- cas
- (kâ ; l's se lie : un kâ-z étrange) s. m.1° Ce qui est advenu ou peut advenir, circonstance, fait, histoire, hypothèse. Personne n'est responsable des cas fortuits. En cas de guerre. Au cas de mort. Le cas advenant qu'on soit dépossédé. Agir selon le cas. L'exigence du cas. Il pleut : en ce cas je prends un manteau. C'est le cas ou jamais. Cela change bien le cas. Dans le cas contraire. Le cas échéant.• Juge si sa colère implacable en ce cas...., CORN. Polyeucte, III, 5.• Vous auriez aperçu Jeannette sous vos pas, Dont l'oreille subtile a découvert le cas, MOL. l'Ét. IV, 8.• En la quittant, Gulphar alla tout droit Conter ce cas, le corner par la ville, Le publier, le prêcher sur les toits, LA FONT. Avare..• Ma commère, dit-elle, un cas est arrivé...., LA FONT. Fabl. VIII, 6.• .... à moins que la figure Ne soit d'un éléphant nain, pygmée, avorton ; Auquel cas où l'honneur d'une telle aventure ?, LA FONT. ib. X, 14.• C'est le cas plus que jamais d'invoquer Dieu, BOSSUET Lett. 152.• Pour justifier la conduite du concile, il ne faut que poser un cas pareil, BOSSUET Déf. com..• Posons le cas que vous ayez tout le bien qu'il faudrait, HAMILT. Gram. 7.• Des cartes en cas de besoin, SÉV. 410.Cas fortuit, événement accidentel.En cas de, quant à. En cas de fruits, je n'en mange pas de crus. Cette tournure vieillit.Cas métaphysique, hypothèse par impossible. Vieilli.2° Terme de jurisprudence. L'espèce d'une loi, cause, délit, crime. Ce n'est pas là le cas de la loi que vous citez. Les cas que la loi n'a pas prévus. On lui soumet le cas suivant. Quand les deux parties eurent exposé leurs cas.• La polygamie est un cas pendable, MOL. Pourc. II, 13.• Et si, par un malheur, j'en avais fait autant, Je m'irais, de regret, pendre tout à l'instant. - Je ne vois pas pour moi que le cas soit pendable, MOL. Mis. I, 1.• [Dans ces lois] on distingue avec finesse les cas, on y pèse les circonstances, MONTESQ. Espr. XXX, 19.• Ce n'étaient pas seulement les actions qui tombaient dans le cas de cette loi, mais des paroles, des signes, MONTESQ. Rom. 14.Les cas royaux et prévôtaux étaient certains crimes dont connaissaient les juges royaux et prévôtaux à l'exclusion des subalternes.Cas privilégiés, royaux, crimes dont les juges royaux pouvaient seuls connaître, sans exception de condition. La fausse monnaie, le duel, étaient cas privilégiés.À l'égard des ecclésiastiques, le cas privilégié, cas où il s'agissait de prononcer une peine afflictive contre un ecclésiastique, malgré le privilége clérical. L'official jugeait le prêtre, mais le juge royal assistait pour le cas privilégié, attendu que l'église ne condamne pas à peine afflictive.On dit des affaires qui se font extraordinairement en considération du mérite de quelque personne ou de quelque circonstance importante, que c'est un cas privilégié, qu'il ne tire point à conséquence.Il a été condamné pour les cas résultant du procès, c'est-à-dire il a été condamné non pas pour le fait même du procès, mais pour plusieurs choses dont il y avait preuve au procès.Son cas va mal, n'est pas net, est véreux, sale, se dit d'un homme en danger pour un crime, une mauvaise affaire. Il sent son cas véreux, il a la conscience de son méfait, du danger qu'il court. Il est dans un vilain cas, il est dans une affaire vilaine, désagréable, honteuse.En général, espèce particulière de fait. Mon cas est embarrassant.• Le feuilletant avec négligence, il tomba sur son cas, PASC. Prov. 8.3° Cas de conscience, difficulté ou question sur un point de morale religieuse.• Or, toi qui te connais au cas de conscience, RÉGNIER Sat. VIII.• Mais, censeurs, ne vous tourmentez pas autour de ces cas de conscience, DIDEROT Ess. sur Claude..• Votre père Erade Bille, professeur des cas de conscience à Caen, PASC. Prov. 12.• Quand vous avez entrepris de décider les cas de conscience d'une manière favorable et accommodante, PASC. ib. 13.Cas, absolument, pour cas de conscience.• On ne saurait, dit le père, écrire pour trop de monde, ni particulariser trop les cas, ni répéter trop souvent les mêmes choses en différents livres, PASC. ib. 8.• Il y a de certains cas dont la résolution serait encore difficile, quoique fort nécessaire pour les gentilshommes, PASC. ib. 7.• Il est vrai qu'ils exceptent un cas auquel ils obligent à restituer, PASC. ib. 8.Par extension, scrupule. Je me ferais un cas de conscience de rien faire qui pût augmenter sa peine. C'est un cas de conscience de déranger un homme aussi occupé.Cas réservés, péchés dont on ne peut être absous que par l'évêque ou même le pape.Cas s'est dit autrefois familièrement pour confession, péché. Ce confesseur entend ordinairement mon cas.4° Chose qui convient, qui fait l'affaire. N'allez point chercher plus loin, c'est là votre cas.Familièrement. Dans le cas de, en état de, capable de. Ils ne seraient pas dans le cas de te secourir. Il n'était pas dans le cas de se tenir debout. Vous vous mettrez dans le cas de partir avec moi.C'est un grand cas, c'est chose importante, considérable, difficile. Cette tournure vieillit.• Bertaut, c'est un grand cas [c'est malaisé], quoique l'on puisse faire...., RÉGNIER Sat. v..• Ce n'est pas peu de cas de faire un long voyage, RÉGNIER Ép. 2.• Je sais bien que mon coeur en a fait pénitence, Mais quoi ! si peu de cas ne me rend satisfait, MALH. I, 4.• Ce que de plus que vous on en pourrait avoir [d'âge] N'est pas un si grand cas pour s'en tant prévaloir, MOL. Mis. III, 5.5° Faire cas de.... Estimer, tenir compte de.• Comment faites-vous cas de chose si petite ?, MALH. IV, 3.• Je ne peux pas faire cas de cette règle, PASC. Prov. 5.• Et de sa propre gloire il fait trop peu de cas, CORN. Hor. V, 1.• Donc de ce que je dis on ne fera nul cas ?, MOL. Tart. II, 2.• Ma fille fait cas de vous, MOL. Am. magn. I, 2.• Nous faisons cas du beau, nous méprisons l'utile, LA FONT. Fabl. VI, 9.• A Dieu ne plaise que je fasse peu de cas de vos peines, BOSSUET Lett. Corn. 94.• Il ne fit pas grand cas de cette promesse, HAMILT. Gramm. 5.• Je fis de telles offres le cas que je devais, SÉV. 110.• Voilà le cas qu'on fait de votre exploit, RAC. Plaid. II, 3.• Des animaux dont on ne fait cas qu'autant qu'ils rendent des services, FÉN. Tél. XVIII.• Il ne fait aucun cas d'une paix forcée, FÉN. Tél. XI.6° Terme de grammaire. Désinence variable des mots qui se déclinent. La déclinaison latine a six cas.• Nous n'avons point de cas en français ; nous nommons l'objet de notre pensée ; et les rapports sont marqués par des prépositions ou par la place du mot, DUCLOS Rem. sur la gramm. II, 6.7° En langage de médecine, maladie considérée dans le sujet particulier qui en est affecté. Il y a eu dans la ville des cas nombreux de choléra. Le cas est grave. Un cas très digne d'être observé attentivement.Cas rare, en anatomie, physiologie et pathologie, ce qui présente quelque chose d'extraordinaire.8° Terme d'algèbre. Cas irréductible, celui où les racines d'une équation du 3e degré sont réelles et inégales.9° Familièrement, excrément, ordure, obscénité. Il a fait son cas au pied d'un mur.Fig. Il montre son cas, il se découvre d'une manière déshonnête.10° En tout cas, loc. adverb. Quoi qu'il arrive, à tout événement. Vous n'avez plus rien à craindre ; cependant en tout cas soyez prudent. En tout cas comptez sur moi.11° Au cas que, loc. conj. qui veut le subjonctif. Supposé que.• Je ne donnerai ici que les règles de la première méthode, et encore au cas qu'on ait accordé les principes, PASC. Pensées, I, 3.• Il n'est hérétique qu'au cas qu'il soit conforme à ces erreurs condamnées, PASC. Prov. 17.• Je vous écrirai au cas qu'il me dise quelque nouvelle, SÉV. 410.En cas que, loc. conjonct. qui veut le subjonctif. Même sens. En cas qu'il vienne.• Je demande la permission à l'académie de prendre cette tâche [commenter Corneille], en cas que personne ne s'en soit emparé, VOLT. Lett. Duclos, 10 avril 1761.• En cas que j'apparusse devant vous sans vous avoir prévenu, MONTESQ. Correspondance, 54.12° En cas, pris substantivement, chose préparée en cas de besoin chez les princes. Une volaille froide pour l'en cas de nuit.Dans une promenade, un en cas, une voiture en cas de pluie.• De ce lourd carrosse on fait un en cas, BÉRANG. S. Espr..Dans le langage familier, un en cas est tout ce qui peut servir en un cas imprévu. S'il nous vient du monde, nous avons un en cas.Un en-cas, un parapluie ; un en-tout-cas, un petit parapluie, qui peut servir aussi d'ombrelle, ou plutôt une grande ombrelle qui au besoin sert de parapluie.PROVERBESTous vilains cas, tous mauvais cas sont reniables, se dit quand, par honte ou par crainte, on nie quelque faute grave.Au cas que Lucas n'eût qu'un oeil, sa femme aurait épousé un borgne ; réponse qu'on fait à un homme qui prévoit trop d'accidents.1. Bien que l'on dise : faire beaucoup de cas de quelqu'un ou de quelque chose, on ne dit pas faire du cas de quelqu'un, de quelque chose.2. L'Académie a tort de ne pas mettre un trait d'union à en cas pris substantivement : en-cas.XIIe s.• Si l'a contre son pis [poitrine] levé, à un desruban [précipice] l'a porté Entre ses bras trestout pasmé, Ouvri ses mains, lascha ses bras ; Cil fu pesans, si prist tel cas [chute] Aval la faloise el rochier, N'i remest [reste] os à despechier [dépecer], Roman du brut, ms. f° 9, dans LACURNE.XIIIe s.• Car de toz cas d'armes sunt femes excusées en lor persones, BEAUMANOIR XXIX, 19.• Quant enfes qui est sous aagiés fet aucun cas de crieme, on doit regarder le [la] maniere du fet, BEAUMANOIR XVI, 9.XIVe s.• Car en yver à cas d'aventure peut l'en veoir une aronde, ORESME Eth. X (16).• ... et toutevoies il ferist aucun à cas d'aventure, ORESME ib. 62.• En cas où combattre [ils] ne se voulissent, BERCHEURE f° 70, verso..• En cas que nous ou nostre hoir acheterions...., DU CANGE auxilium..• Tailles sont levées par cas de necessité et de volenté de prince, DU CANGE ib..XVe s.• Le traité seroit nul, au cas qu'il viendroit aucun hoir, FROISS. I, I, 151.• Certes vous seriez de tel cas peu prisé et amendé, FROISS. I, I, 166.• Ces chevaliers, qui en tous cas se vouloient acquitter envers le roi, leur seigneur, FROISS. II, II, 4.• Receu toutevoyes son serement, que, au cas que non, il ne tourneroit en la prison, CHR. DE PIS. Charles V, I, 31.• Les grans robes sages ne les font [les hommes], Ne sos aussi ; riens n'y font en ce cas Poures habit, fors science approuvée, E. DESCH. L'hab. ne fait pas l'homme..• Conclusion, vecy mon cas : De nulle rien je ne me dueil, CH. D'ORL. Rondeau..• Et ne croye mie qu'il y ait en vostre royaulme homme à qui on les refusast en vostre chancellerie en cas pareil, JUVÉNAL DES URSINS 1411.• Au cas que, au plaisir de Dieu, il auroit paix avec le roi de Chypre, son desir estoit de grever les ennemis, Bouc. II, 13.• Il avoit commis un cas très horrible, car il avoit pris son pere prisonnier, COMM. IV, 1.• L'ung luy desplaisoit d'ung cas, l'autre de l'autre, COMM. V, 13.• Pour commencer à faire cas de nouvelleté, ils mirent hors de prison le duc de Gueldre, COMM. V, 17.• Et en son cas, qui estoit de marchandise, estoit la plus grand' maison que je croy qui jamais ait esté au monde, COMM. VII, 5.• Et nostre armée qui estoit en la Romanie [Romagne], combien qu'elle fust la plus foible, toutesfois faisoit prosperer nostre cas, COMM. VII, 6.XVIe s.• Minos le juge est de cela soigneux, Qui devant lui, pour entendre le cas...., MAROT I, 248.• C'est un grand cas, dije lors, s'il n'advient Quelque mechef bien tost en cestuy regne, MAROT III, 300.• Je l'ay secouru en tous cas que ay peu cognoistre son advantaige, RABEL. Garg. I, 28.• Si par cas il estoit devenu furieux...., RABEL. ib..• Au cas que [tandis que] les aultres roys l'eussent miserablement traicté, il le traicta courtoysement, RABEL. ib. I, 50.• Feut decrete que ja ne seroyent là les femmes, au cas que [à moins que] n'y feussent les hommes, RABEL. ib. I, 52.• Que la mort des humains est attachée à peu de cas, puisqu'une espingle est suffisante pour nous tuer, YVER 623.• C'est grand cas que les choses en soyent là, en nostre siecle, que...., MONT. I, 175.• Au cas que l'un d'eux vienne à defaillir, MONT. I, 216.• Sophocles, voyant de cas de fortune passer un beau garson, MONT. I, 227.• Je ne fais cas du boire que pour la suitte du manger, MONT. II, 18.• Pour les quatre ce ne seroit que douze mille escus par an : qui est bien peu de cas pour le grand fruit qui en proviendroit, LANOUE 128.• Je pren le cas que vous ayez de la fortitude, LANOUE 153.• Tous vilains cas sont reniables, LOYSEL 803.• L'on tient maintenant que le cas privilegié attrait à soi le delit commun, LOYSEL 804.• Un satyre admonesta un jour Minerve, que ce n'estoit point bien son cas que de jouer des flustes, AMYOT Refréner la colère, 12.Provenç. cas ; espagn. et ital. caso ; de casus, chute, cas, événement, désinence, dont le radical se trouve dans cadere, tomber (voy. choir).SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRECAS. - REM. Ajoutez :3. J. J. Rousseau a dit : dans le cas, pour : dans ce cas-là ; cela est correct, mais moins usité.• Rien n'est plus commun que de tout gâter en pensant bien faire ; l'assurance que vous me donnez que je ne suis pas dans le cas, m'ôte un grand poids de dessus le coeur, J. J. ROUSS. Lett. à M. Jacob Vernet, 18 sept. 1758.• Si vous êtes dans le cas, J. J. ROUSS. Lett. à Du Peyrou, 22 juin 1766.4. J. J. Rousseau écrit en tous cas au pluriel, Lett. à Du Peyrou, 7 mars 1765.5. Si le cas pouvait être, si la chose était possible.• Outre qu'il n'est pas possible qu'il ne vous en soit parvenu quelqu'une [de mes lettres], si le cas pouvait être...., J. J. ROUSS. Lettre à milord Maréchal, 29 oct. 1764.Locution peu usitée.————————cas, casse(kâ, kâ-s') adj.Qui sonne le cassé.• D'une voix rauque et casse ainsi me répondit, RÉGNIER Dial..• As-tu pris garde ? il parlait d'un ton cas, LA FONT. Herm. Mot vieilli..XIIe s.• À ses clers [il] prist conseil qui nel deçurent pas : Li quels direit sa cause ; il s'en firent tout quas [ils s'y refusèrent], Th. le mart. 87.• Brisié et cas, Sax. t. II, p. 185.XIIIe s.• Et tous les autres estrumens Qui sunt piliers et argumens à soutenir nature humaine, Qui sans eus fust et casse et vaine, la Rose, 6996.• Il fut semons ; li prestres vient : Venuz est, respondre convient à son evesque de cest quas Dont li prestres doit estre quas, RUTEB. 276.XVe s.• Cloez l'oeil de, je hay telz fais ; Les paupieres de je m'en tais ; L'oreille de, tout sonne cas, COQUILL. Droit nouv..XVIe s.• Autres manieres de chansons, Leans on chante à voix contraintes, Ayans casses et meschans sons, MAROT I, 184.• Puis ma voix rauque et casse Empescheroit que bien ne les contasse, MAROT I, 314.• Un soldat recreu et casse, MONT. I, 82.Provenç. cass ; du latin cassus, vide, inutile, ou de quassus, endommagé, affaibli, les deux mots s'étant probablement confondus pour former le mot roman.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRECAS, CASSE. - HIST. XVIe s. Ajoutez :• Banquet : Hélas ! que dit-on de mon fait ? - Clistere : Vostre cas sonne fort le cas, Rec. de farces, p. 412.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.