railler

railler
(râ-llé, ll mouillées, et non râ-yé) v. a.
   Tourner en ridicule avec quelque acerbité.
   Tel vous semble applaudir, qui vous raille et vous joue, BOILEAU Art p. I.
   Il y a de petits défauts qu'on abandonne volontiers à la censure, et dont nous ne haïssons pas à être raillés : ce sont de pareils défauts que nous devons choisir pour railler les autres, LA BRUY. v..
   Quand on est sage, on ne raille ni les grands, ni ceux qu'il y a danger de railler, ni ses amis, ni un ordre, ni une nation, THIERS Des jeux, ch. 4.
   Vous avez si souvent loué le célibat, Vous avez tant raillé, déploré la folie De tout homme d'esprit qui pour jamais se lie, DESTOUCH. Phil. marié, III, 2.
   Je sais bien que je suis pauvre ; mais il n'est pas nécessaire de m'en railler, non plus que des secours qu'on a bien voulu me donner, MARIV. Marianne, 2e part..
   Absolument.
   Il y a une manière de railler délicate et flatteuse qui touche seulement les défauts que les personnes dont on parle veulent bien avouer, qui sait déguiser les louanges qu'on leur donne sous des apparences de blâme, et qui découvre ce qu'elles ont d'aimable, en feignant de le vouloir cacher, LA ROCHEFOUC. Réfl. div. p. 118, dans POUGENS.
   Votre petit esprit se mêle de railler, MOL. F. sav. I, 2.
   Pour badiner avec grâce et rencontrer heureusement sur les plus petits sujets, il faut trop de manières, trop de politesse, et même trop de fécondité : c'est créer que de railler ainsi, et faire quelque chose de rien, LA BRUY. V.
   Et railla bien qui railla le dernier, LAMOTTE Fabl. IV, 6.
   Tous ceux que j'ai raillés vont railler à leur tour, DESTOUCH. Phil. marié, IV, 4.
   V. n. Il se dit des personnes qu'on raille.
   Vous savez que, dans les triomphes, les soldats ont accoutumé de railler avec leurs empereurs, VOIT. Lett. 66.
   De choquer un auteur qui choque le bon sens, De railler d'un plaisant qui ne sait pas vous plaire, C'est ce que tout lecteur eut toujours droit de faire, BOILEAU Sat. IX..
   Ne raillons point ici de la magistrature, RAC. Plaid. II, 13.
   Il se dit aussi des choses.
   Pourquoi railler de la conversion de cet homme ? ce qu'il fait, c'est ce qu'il faudra que vous fassiez vous-même un jour, BOURDAL. Pensées, t. I, p. 385.
   Ne pas parler sérieusement, badiner. Ne raillez point.
   Je vous parle sans feindre, et ne sais point railler, Lorsqu'au salut commun il nous faut travailler, CORN. Pulch. IV, 4.
   Se railler, v. réfl. Se moquer.
   C'est une méchante raillerie que de se railler du ciel, MOL. D. Juan, I, 2.
   Il n'y a maintenant qu'à nier d'un certain air le péché originel, l'immortalité de l'âme, ou se railler de quelque sentiment reçu dans l'Église, pour acquérir la rare qualité d'esprit fort parmi le commun des hommes, MALEBR. Rech. vér. II, III, 2.
   De là vient qu'on s'est raillé de Gorgias pour avoir appelé Xercès le Jupiter des Perses, et les vautours des sépulcres animés, BOILEAU Longin, Subl. ch. 2.
   Se moquer l'un de l'autre.
   Vous aviez épuisé tout votre voisinage [pour s'en moquer], Et la disette enfin allait nous obliger à nous railler l'un l'autre, COLLIN D'HARLEVILLE Malice pour malice, I, 2.
   Badiner, ne pas parler sérieusement.
   Cet homme se raillait assez hors de saison, LA FONT. Fabl. III, 16.
   XVe s.
   Lequel d'estre plaisant raillart Eut le bruyt lorsque jeune estoit ; On tiendroit à fol et paillart Vieil, si à railler se mettoit, VILLON Ball. en vieux langage..
   Le suppliant et icelui Breton en rasglant et devisant comme ilz avoient accoustumé de faire, DU CANGE raffarde..
   Diez en rapproche l'espagnol rallar, racler ; du lat. rallum, racloir ; de sorte que railler serait proprement racler, frotter. Cela est confirmé par la forme rasgler.
   Il y avait un substantif raille, signifiant moquerie : Se truiffler en raille, en moquerie, DU CANGE trufare..
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
   RAILLER. - ÉTYM. Ajoutez : Railler est le même mot que érailler ; et, comme il est probable que érailler a pour origine eradiculare, il est probable aussi que radiculare est l'origine de railler (voy. érailler au Supplément).

Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. . 1872-1877.

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  • railler — [ raje ] v. tr. <conjug. : 1> • 1636; « plaisanter » 1462; a. provenç. ralhar « plaisanter »; lat. pop. °ragulare, du bas lat. ragere « braire » 1 ♦ Littér. Tourner en ridicule par des moqueries, des plaisanteries. ⇒ brocarder, moquer,… …   Encyclopédie Universelle

  • railler — RAILLER. v. a. Tourner en plaisanterie, tourner en ridicule. Railler agreablement quelqu un, le railler trop fortement, le railler cruellement. il raille tout le monde. il raille ses meilleurs amis. on l a fort raillé de cela, de cette action. il …   Dictionnaire de l'Académie française

  • railler — Railler, et se gaudir d aucun, Iocari, Dicta dicere in aliquem. Se railler de quelque chose, Cauillari aliquid, B. Sans plus railler ou mocquer, Omissis iocis. Qui se raille et dit aucunes paroles par jeu et gaudisserie, Iocans, Ioculans. En… …   Thresor de la langue françoyse

  • RAILLER — v. a. Plaisanter quelqu un, le tourner en ridicule. Railler quelqu un agréablement, adroitement, délicatement, finement, grossièrement. Il ne peut souffrir qu on le raille. Il raille ses meilleurs amis. On l a beaucoup raillé là dessus. Il s… …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 7eme edition (1835)

  • RAILLER — v. tr. Plaisanter quelqu’un, lui parler avec moquerie. Railler quelqu’un agréablement, finement, grossièrement. Il ne peut souffrir qu’on le raille. Il raille ses meilleurs amis. On l’a beaucoup raillé là dessus. Il s’emploie absolument. Il… …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 8eme edition (1935)

  • railler — vt. , persifler, se moquer de : bavardâ (Saxel.002), kritikâ, trovâ à rdire (Albanais.001), râlyî (Annecy, Thônes.004), blagâ (004). E. : Chèvre, Duper, Mépriser, Pleurer. A1) s exposer aux critiques malveillantes, aux railleries : se fâre… …   Dictionnaire Français-Savoyard

  • raillerie — [ rajri ] n. f. • 1490; de railler ♦ Vieilli 1 ♦ Plaisanterie. Sans raillerie. Loc. Entendre raillerie : comprendre la plaisanterie. « Son père n entendait pas raillerie sur les questions d étiquette » (R. Rolland). 2 ♦ Habitude, art de railler.… …   Encyclopédie Universelle

  • moquer — [ mɔke ] v. tr. <conjug. : 1> • 1180; o. i., p. ê. onomat I ♦ Littér. Tourner en ridicule, traiter comme un objet de dérision ou de plaisanterie (surtout p. p.).⇒ railler, ridiculiser. « Il se vit bafoué, Berné, sifflé, moqué, joué » (La… …   Encyclopédie Universelle

  • gouailler — [ gwaje ] v. <conjug. : 1> • 1732; même rad. gab que dans gaver, engouer 1 ♦ V. tr. Vieilli Railler sans délicatesse. Gouailler qqn. ⇒ plaisanter, railler. 2 ♦ V. intr. Mod. Dire des railleries. ⇒ se moquer. « Cet être raille, braille,… …   Encyclopédie Universelle

  • railleur — railleur, euse [ rajɶr, øz ] n. et adj. • 1464; railleresse 1410; de railler 1 ♦ Personne qui raille, aime à se moquer. ⇒ ironiste. « Les railleurs s égayaient là dessus à nos dépens » (Lesage). 2 ♦ Adj. Qui raille, exprime la moquerie. ⇒… …   Encyclopédie Universelle

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