- perle
- (pèr-l') s. f.1° Globule d'un blanc argentin qui se forme dans certaines coquilles ; c'est dans le mollusque même, ou au moins sous son manteau, que se forment les perles par une surabondance de la matière nacrée destinée à revêtir l'intérieur de sa coquille. En vieillissant les perles jaunissent.• Un jour un coq détourna Une perle qu'il donna Au beau premier lapidaire : Je la crois fine, dit-il ; Mais le moindre grain de mil Ferait bien mieux mon affaire, LA FONT. Fabl. I, 20.• La perfection des perles, selon Pline, est lorsqu'elles sont d'une blancheur éclatante, grosses, rondes, polies et d'un grand poids, qualités qui se trouvent rarement réunies, ROLLIN Hist. anc. Oeuvr. t. x, p. 546, dans POUGENS.• La perle est comme la nacre, dont elle ne diffère que par un tissu plus fin, un composé de matière gélatineuse et de carbonate de chaux, FOURCROY Connaiss. chim. t. x, p. 336, dans POUGENS.• On recueille les perles les plus régulières dans l'avicule perlière, avicula margaritifera ; les plus belles nous viennent aujourd'hui de la mer des Indes, et particulièrement de l'île de Ceylan, DE LABORDE Émaux, p. 437.Perles baroques, voy. baroque.Fig. Jeter des perles devant les pourceaux, offrir à quelqu'un des choses dont il ne sent pas le prix ; faire à quelqu'un un compliment, une gracieuseté dont il ne sent pas la délicatesse.Cela est net comme une perle, se dit de quelque chose de très net.Perles fines, les véritables perles.Semence de perles, perles trop petites pour les compter, qui se vendent au poids et qu'on emploie en grande abondance dans la broderie.• Perles de compte, perles assez grosses pour être comptées, trop petites pour être estimées selon leur grosseur, DE LABORDE Émaux, p. 438.Gris de perle, couleur semblable à celle de la perle.2° Nacre de perles, ou mère de perles, la substance intérieure de la coquille des moules à perles.Loupes de perle, croissances en forme de demi-perles, qui s'élèvent dans l'intérieur des nacres, et que les joailliers scient adroitement pour les mettre en oeuvre.3° Perles fausses, imitation des vraies perles ; il y en a de deux sortes : les unes en boules de verre creux, remplies d'essence d'Orient ; les autres composées d'une substance pleine, sorte de cristal coloré.• Le plus ingénieux usage auquel sont consacrées les écailles de poissons, est celui qui a pour objet la fabrication des perles artificielles, FOURCROY Connais. chim. t, x, p. 330, dans POUGENS.4° Perles d'or, d'acier, cuivre doré, ou acier travaillé en forme de perles de diverses grandeurs qui servent à de jolis ouvrages tels que sacs, bourses, calottes, etc. Une bourse en perles.Perles de verre de toutes couleurs, mates et transparentes, qui s'emploient aux mêmes ouvrages et avec lesquelles les enfants s'amusent. Cette petite fille enfile des perles pour faire un collier à sa poupée.Fig. et familièrement. Je ne suis pas ici pour enfiler des perles, c'est-à-dire pour perdre mon temps, ou l'employer à des choses de peu d'importance.Perles défilées, perles enfilées qui ont quitté leur fil.• Les disgrâces souvent sont du ciel révélées ; J'ai songé, cette nuit, de perles défilées Et d'oeufs cassés...., MOL. Dépit, v, 7.5° Perles de Rome, petits grains d'albâtre plongés dans une pâte de nacre.Perles de Venise, émaux teints en rouge, qu'on exporte surtout en Afrique.6° Fig. Ce qu'il y a de mieux dans son genre.• Mais quoi, c'est un chef-d'oeuvre où tout mérite abonde, Un miracle du ciel, une perle du monde, MALH. VI, 25.• Je vais vous montrer la perle des manuscrits, LE SAGE Diable boit. ch. XV.• Ces amis font de vous la perle des neveux, DESTOUCH. Dissipat. IV, 4.• Qu'est devenue Mlle Cunégonde, la perle des filles, le chef-d'oeuvre de la nature ?, VOLT. Candide, 4.• Ce marquis [Tacconi] vaut de l'or, c'est la perle des hommes, P. L. COUR. Lett. I, 204.• Isocrate, la plus nette perle du langage attique, P. L. COUR. ib. 18 oct. 1808.• Écoutons la légende de saint Léonor, l'une des perles les plus fines du précieux écrin de la tradition celtique, MONTALEMBERT Moines d'Occid. t. II, p. 389.7° Fig. Nom donné aux gouttes de liquide, et, particulièrement, aux gouttes de rosée qui sont sur la pointe des herbes.• L'aube.... sème sur les monts les perles de l'aurore, LAMART. Méd. I, 16.Faire la perle, se dit de l'eau-de-vie, lorsqu'elle se couvre de bulles, après qu'on l'a agitée.8° Fig. De belles dents. Sa bouche est garnie d'un double rang de perles.9° Se dit des cadences de la flûte, quand chaque son est plein et qu'il a une sorte de rondeur et de netteté, comme les perles.Se dit aussi de certaines notes de chant détachées.10° Grain de plomb passé dans un fil, qui sert à divers instruments de mathématique et à guider l'oeil quand on tire de l'arbalète.11° Terme d'imprimerie. Le plus petit caractère.12° Terme d'architecture. Suite de petits grains ronds qu'on taille dans les moulures appelées baguettes.13° Terme de tapissier. Petite boule de bois, dite aussi coulant, couverte de soie ou de laine, dans laquelle passent les fils d'une frange à quadrille ou autre.Petit globe d'émail percé, dont se sert le fabricant de gaze.14° Un des noms vulgaires de l'albugo ou tache blanche de la cornée.15° Genre d'insectes nevroptères.Espèce de coquille univalve.XIIIe s.• Des merciers : nus ne nulle du dit mestier.... ne puet metre aucunes finnes pelles fausses, pelles blanches ne dorées, s'elles ne sont d'argent ; car telles euvres sont fausses, DE LABORDE Émaux, p. 438.XIVe s.• [on fist] Li chainture de perles à carnieres fremer, Baud. de Seb. v, 776.XVIe s.• Seulement quant je veux toucher le loz de celle Qui est de nostre siecle et la perle et la fleur, DU BELLAY VI, 64, recto..• Il est net comme une perle, DESPER. Contes, LXVI.• La rose blanchit tout autour Au matin de perles petites Qu'elle emprunte du poinct du jour, RONS. 512.• Ce n'est pour enfiler des perles, Ce n'est pas pour chasser aux merles, Qu'on voit ce martial arroy, LEROUX DE LINCY Prov. t. II, 177.• Encore disons-nous en commun proverbe d'un homme illustre ou d'une chose belle par excellence : c'est une perle, BOUCHET Serées, III, p. 217, dans LACURNE.• Un grand baril de serpentin, garny d'argent doré, avec de petites perles de barocques et des roses de petits saphirs, DE LABORDE Émaux, p. 437.• À Jehan Rousseley, marchand florentin, pour son paiement d'une bien grosse perle pucelle et non percée que le roy a achapté de luy, DE LABORDE ib. p. 438.Wallon, piel ; prov. esp. et ital. perla ; portug. perola ; anc. haut-allem. perala, berala ; angl. pearl ; bas-lat. perulus, et aussi perna. Origine très incertaine. 1° On l'a tiré du latin perna, pinne marine, sorte de coquillage, par le changement d'n en l ; il est certain qu'il y a des textes du XIIIe siècle où perna signifie perle, et que dans les dialectes napolitain et sicilien perna a ce même sens. 2° Du latin pirum, poire, par une assimilation, à cause des formes perulus en bas-latin, et perola en portugais ; Diez cite aussi le vénitien porolo, pendant d'oreille. 3° Du latin sphaerula, petite boule ; mais les formes des deux mots sont bien éloignées l'une de l'autre. 4° Du latin pilula, globule, avec permutation de l'l en r, permutation qui se trouve en effet dans le vénitien, et le véronais pirola pour pilula. 5° De l'anc. haut-allem. perala ou berala, que Grimm rattache au grec, bérylle. Diez regarde comme plus probable, ou perula, petite poire, ou pilula, globule.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREPERLE. Ajoutez :16° Perles mortes, perles qu'on pêche dans les parages de l'Écosse et qui ressemblent à des yeux de poisson, CH. BLANC, l'Art dans la parure, p. 319.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.