- jeu
- (jeu) s. m.1° Action de se livrer à un divertissement, à une récréation.2° Action de se jouer.3° Jeu de mots.4° Les Jeux, divinités.5° Amusement soumis à des règles, où il s'agit de se divertir sans qu'il y ait aucun enjeu.6° Amusement soumis à des règles et auquel on hasarde ordinairement de l'argent.7° Académie des jeux ou jeux publics.8° Les règles d'après lesquelles il faut jouer.9° Assemblage des cartes qui, données à chacun des joueurs, lui servent à jouer le coup.10° Ce qui sert à jouer à certains jeux ; jeu de cartes.11° Jeu de contre-marques.12° Ce que l'on met au jeu.13° Jeu de bourse.14° Nom des divisions de la partie au jeu de paume.15° Lieu où l'on joue à certains jeux.16° Courses, luttes, etc. chez les anciens.17° Les jeux de prix.18° Jeux Floraux.19° Les jeux de la scène.20° Le maniement des hautes armes.21° La façon de faire des armes.22° Manière de jouer d'un instrument de musique.23° Manière dont un comédien remplit ses rôles.24° Différentes expressions que prend la physionomie.25° Le jeu de la lumière.26° Aisance de mouvement.27° Action d'un ressort.28° Jeu d'eau ; jeu de voiles.29° Jeu d'orgue, espèce de soubassement.30° Jeu de fief.1° Action de se livrer à un divertissement, à une récréation (ce qui est le sens propre du latin jocus, d'où vient jeu).• Ce qu'ils en font n'est que par jeu, MOL. Sicil. 14.• Ce que je dis, ma fille, n'est point jeu, MOL. Tart. II, 2.• Il n'est guère de jeu que trop loin on ne mène, MOL. Amph. II, 2.• Sous un visage riant, sous cet air de jeunesse qui semblait ne promettre que des jeux, elle cachait un sens et un sérieux...., BOSSUET Duch. d'Orl..• La géométrie spéculative a ses jeux, ses inutilités, comme les autres sciences, CHATEAUBR. Génie, III, II, 1.Fig.• Tu railles, mais bientôt nous verrons d'autres jeux ; Je sais trop comme on venge une flamme outragée, CORN. Mél. V, 3.• La fourbe n'est le jeu que des petites âmes, CORN. Nic. IV, 2.C'est un rude jeu, c'est un jeu qui va à fâcher ou à blesser quelqu'un.Ce sont jeux de prince qui ne plaisent qu'à ceux qui les font, ou, absolument, ce sont jeux de prince, c'est-à-dire ce sont des jeux ou, en général, des actes qui causent peine et dommage à autrui.• Le bon homme disait : ce sont là jeux de prince, LA FONT. Fabl. IV, 4.• Il [Frédéric II] mit l'Europe en feu ; ce sont là jeux de prince ; On épargne un moulin, on vole une province, ANDRIEUX le Meunier sans souci..Fig. et familièrement. C'est un jeu à se rompre le cou, les jambes, etc. se dit d'une action qui expose à se tuer, à se rompre les jambes, etc.Fig. et familièrement. Le jeu lui plaît, se dit en parlant d'une personne qui veut recommencer à faire une chose qui lui plaît.En un sens opposé.• J'évite l'apparence autant comme le crime ; Je fais un compliment qui semble illégitime ; Et le jeu m'en déplaît quand on fait à tous coups Causer un médisant et rêver un jaloux, CORN. la Place roy. I, 4.Prendre quelque chose en jeu, le prendre en plaisanterie.Cela passe le jeu, cela est plus fort que le jeu ou que jeu, cela passe la raillerie, cela blesse ou offense.• Je crains que le pendard, dans ses voeux téméraires, Un peu plus fort que jeu n'ait poussé les affaires, MOL. Éc. des femmes, II, 6.Ce n'est qu'un jeu, se dit d'une chose qu'on fait facilement.• Moitié de ce fardeau ne vous sera que jeu, LA FONT. Fabl. VI, 16.• Des plus fermes états la chute épouvantable, Quand il veut, n'est qu'un jeu de sa main redoutable, RAC. Esth. III, 4.Se faire un jeu de quelque chose, y mettre son plaisir.• Le coadjuteur vous contera les prospérités de son voyage, mais il ne se vantera pas d'avoir pensé être étouffé chez M. de Louvois par vingt femmes qui se firent un jeu, et qui croyaient chacune être en droit de l'embrasser, SÉV. 188.• La cour est toute réjouie du mariage de M. le prince de Conti et de Mlle de Blois ; ils s'aiment comme dans les romans : le roi s'est fait un grand jeu de leur inclination, SÉV. 394.• Elle [Mme de Vins] me mande qu'elle fait un jeu merveilleux avec M. de Grignan et avec vous de sa jalousie, SÉV. 24 juill. 1680.Faire du jeu, amuser.• Cela nous fait du jeu, SÉV. 7 sept. 1689.• Ç'a été un grand jeu pour Son Éminence [Retz], qu'un esprit neuf comme celui de notre ami [Corbinelli], SÉV. 30 juin 1677.En mauvaise part, se faire un jeu, s'amuser à, faire un jouet de.• Vous faites un jeu de dire du mal de votre âme, SÉV. 199.• Vous faites-vous un jeu des pleurs d'une mortelle ?, VOLT. Olymp. II, 3.• Et c'est un jeu pour toi de trahir l'amitié, VOLT. ib. IV, 2.• Un conquérant, dans sa fortune altière, Se fit un jeu des sceptres et des lois, BÉRANG. Dieu d. b. gens..Terme de fauconnerie. Donner jeu aux autours, leur laisser plumer la proie.Terme de marine. Jeu parti, mot à mot jeu partagé, locution qui n'est plus usitée ; il consiste en ce que, lorsque des armateurs associés veulent dissoudre la société, ils devront faire entre eux une licitation en vertu de laquelle celui qui offrira de désintéresser le plus les autres gardera le navire.2° Action de se jouer.• Il entretint les dieux, non point sur la fortune, Sur ses jeux, sur la pompe et la grandeur des rois, LA FONT. Phil. et Baucis..• Ce sont des jeux de la Providence qui nous fait connaître en toutes choses la fausseté de nos jugements, SÉV. 437.• Roi cruel ! ce sont là les jeux où tu te plais, RAC. Esth. III, 1.Jeu de la nature, action de la nature qui produit une chose bizarre, extraordinaire. La nature dans ses jeux est infiniment variée.La chose même produite par la nature qui semble se jouer. Cette coquille est un jeu de la nature.Terme de minéralogie. Jeux de Van Helmont, variété cloisonnée de marne.Un jeu du hasard, un effet du hasard.• Jeux cruels du hasard, en qui me montrez-vous Une si fausse image et des rapports si doux ?, VOLT. Mérope, II, 2.• La naissance, la fortune ! laissons-là les jeux du hasard, BEAUMARCHAIS Barb. de Sév. IV, 6.Jeu de la fortune, ce qui semble un pur caprice de la fortune.• L'on ne saurait s'empêcher de voir dans certaines familles ce qu'on appelle les caprices du hasard ou les jeux de la fortune, LA BRUY. VI.• Ce n'est pas un des moindres exemples des jeux de la fortune, que les ruines de Carthage aient vu mourir un roi chrétien qui venait combattre des musulmans dans un pays où Didon avait apporté les dieux des Syriens, VOLT. Moeurs, 58.• Hélas ! est-il possible ? étonnants jeux du sort ! Elle était en ces lieux quand je pleurais sa mort, BRIFFAUT Ninus II, IV, 4.Fig. et poétiquement. Les jeux sanglants de Mars, la guerre, les combats.• Il a lui-même triomphé dans les jeux sanglants du dieu de la guerre, CHATEAUBR. Martyrs, I.3° Jeu de mots, nom générique de toutes les phrases où l'on abuse de la ressemblance du son des mots. Un jeu de mot plaisant, heureux, sans sel.• Insipides plaisants, bouffons infortunés, D'un jeu de mots grossier partisans surannés, BOILEAU Art p. II.• Les jeux de mots, la pire espèce du faux bel esprit, VOLT. Dict. phil. Esprit..• Il y a quelques jeux de mots dans Corneille, mais ils sont rares ; le plus remarquable est celui d'Hypsipile qui, dans la quatrième scène du troisième acte, dit à Médée sa rivale en faisant allusion à sa magie : Je n'ai que des attraits et vous avez des charmes, VOLT. Comm. Corn. Rem. Toison d'or, Préf. commentat..4° S. m. plur. Les Jeux, nom, en poésie, de certaines divinités allégoriques qui sont censées présider à la gaieté, à la joie (on met un J majuscule.)• Toute la bande des Amours Revient au colombier ; les Jeux, les Ris, la danse Ont aussi leur tour à la fin, LA FONT. Fabl. VI, 21.• Le chagrin vient ensuite ; elle sent chaque jour Déloger quelques Ris, quelques Jeux, puis l'Amour, LA FONT. ib. VII, 5.5° Par substitution du sens de divertissement à celui d'un jeu spécial, c'est-à-dire substitution du sens de ludus à celui de jocus. Amusement soumis à des règles, où il s'agit de se divertir sans qu'il y ait aucun enjeu. Le jeu des barres. Le jeu de colin-maillard.• Les jeux qui naissent de la force et de l'adresse, sont toujours les premiers connus d'un peuple naissant, DUCLOS Mém. jeux scéniques, Oeuvr. t. I, p. 334, dans POUGENS..N'être pas du jeu, ne pas faire partie de la société qui joue a tel ou tel jeu.• Non, c'est moi, cousin ; je ne suis pas du jeu ; mais il n'importe, DANCOURT Colin-maillard, sc. 24.Petits jeux, ou jeux de société, jeux où l'on propose des questions à résoudre et des pénitences à faire.• Puis nous jouerons ensemble à mille petits jeux, TH. CORN. Berger extrav. I, 5.Jeux innocents, jeux où il n'y a ni argent à exposer, ni danger moral d'aucune espèce.• On peut aussi récompenser les enfants par des jeux innocents et mêlés de quelque industrie, FÉN. Éduc. filles, 5.Jeu d'enfant, jeu qui amuse les enfants.• Les immortels rient des affaires les plus sérieuses qui agitent les faibles humains, et elles leur paraissent des jeux d'enfant, FÉN. Tél. IX..Fig. Jeu d'enfant, chose très facile.Ce n'est pas un jeu d'enfant, ce n'est pas jeu d'enfant, c'est une affaire grave et sérieuse, c'est un engagement dont on ne peut se dédire.Jeux de main, jeux où l'on se donne de petits coups, sans dessein de se faire du mal. La main chaude est un jeu de main.Jeu de main, se dit aussi de l'action de lutter, de se porter des coups réciproques en plaisantant.PROVERBE Jeux de main, jeux de vilain, ou, au singulier, jeu de main, jeu de vilain, c'est-à-dire les jeux de main ne conviennent qu'à des gens mal élevés, et aussi ils finissent souvent par des querelles.Jeux d'esprit, certains petits jeux qui demandent quelque facilité, quelque agrément d'esprit.• Le roi d'Espagne a quelque goût pour les jeux d'esprit, MAINTENON Lett. au duc de Noailles, 19 déc. 1700.• J'aime les jeux galants où l'esprit se déploie, REGNARD Joueur, I, 7.Fig. Jeux d'esprit, certaines productions d'esprit qui n'ont aucune solidité, comme les anagrammes, les énigmes, les bouts rimés, etc.Jeu d'esprit, se dit aussi d'un simple exercice de l'esprit, et, par suite, de conceptions, d'idées, d'hypothèses sans consistance.• S'il croit que cette dispute soit un jeu d'esprit, BOSSUET Rem. rép. quiétisme, art. I, 2.• Le stoïcisme est un jeu d'esprit, et une idée semblable à la république de Platon, LA BRUY. XI.• On commence en Allemagne même à regarder les monades, l'harmonie préétablie, et la théodicée de l'ingénieux et profond Leibnitz comme des jeux d'esprit, oubliés en naissant dans tout le reste de l'Europe, VOLT. Singul. nat. Préambule..Terme d'ancienne poésie française. Jeu parti, pièce de poésie en dialogue par questions et par réponses, sur des sujets relatifs à l'amour et à la galanterie.6° Amusement soumis à des règles, et auquel on hasarde ordinairement de l'argent. Aimer le jeu. Perdre au jeu. Vivre du jeu. Ne jouez pas avec lui, il trompe au jeu. La perte, le gain du jeu. Ceux qui regardent ne doivent point parler sur le jeu.• L'autre, pour se purger de sa magnificence, Dit qu'elle gagne au jeu l'argent qu'elle dépense ; Et le mari benêt, sans songer à quel jeu, Sur les gains qu'elle fait rend des grâces à Dieu, MOL. Éc. des f. I, 1.• Si Dangeau est de ce jeu, il gagnera toutes les poules, c'est un aigle, SÉV. 437.• Les dettes du jeu sont privilégiées ; et, comme si ses lois étaient les plus saintes et les plus inviolables de toutes, on se pique d'honneur d'y être fidèle, BOSSUET Sermons, justice, I.• Parler à un mondain, à une mondaine de modérer leur jeu, ou même de se l'interdire absolument...., BOURDAL. Pensées, t. I, p. 340.• ....Ce marquis sage et prude, Et qui, sans cesse au jeu, dont il fait son étude, ....Voit sa vie ou sa mort sortir de son cornet, BOILEAU Sat. IV.• Eh ! que serait-ce donc si le démon du jeu, Versant dans son esprit sa ruineuse rage...., BOILEAU ib. X..• Mille gens se ruinent au jeu, et vous disent froidement qu'ils ne sauraient se passer de jouer, LA BRUY. VI.• Le chevalier de Grammont, à qui il [Mazarin] trouvait beaucoup d'esprit et auquel il voyait beaucoup d'argent, fut bientôt de son goût et de son jeu, HAMILT. Gramm. 5.• Cette jeune duchesse Vous attend à vingt pas pour vous mener au jeu, REGNARD Joueur, II, 6.• Elle [Angélique] est après le jeu ce qu'il aime le mieux, REGNARD ib. I, 2.• C'est monsieur, par exemple, un joli jeu que l'oie, REGNARD ib. I, 7.• Je suis, pour vous servir, gentilhomme auvergnac, Docteur dans tous les jeux, et maître de trictrac, REGNARD ib. I, 10.• Oui, je vous le promets, Que la fureur du jeu sortira de mon âme, REGNARD ib. II, 11.• Quand feu M. de Leibnitz a dit que les hommes n'ont jamais marqué plus d'esprit que dans les différents jeux qu'ils ont inventés, il en pénétrait toute l'algèbre, cette infinité de rapports de nombres qui y règnent...., FONTEN. Dangeau..• On a dit que le jeu et l'amour rendent toutes les conditions égales : je suis persuadé qu'on y eût joint l'esprit, si le proverbe eût été fait depuis que l'esprit est devenu une passion, DUCLOS Consid. moeurs, ch. XI.• Le jeu est une passion avide dont l'habitude est ruineuse, BUFF. Homme, arith. morale..• Le jeu, par sa nature même, est un contrat vicieux jusque dans son principe, un contrat nuisible à chaque contractant en particulier, et contraire au lien de toute société, BUFF. ib..Fig.• Daru lui [à Napoléon] répondit que la guerre était un jeu qu'il [Napoléon] jouait bien, où il gagnait toujours, et qu'on pouvait conclure qu'il la faisait avec plaisir, SÉGUR Hist. de Nap. V, 2.Jeux de hasard, comme le trente et quarante, le biribi, etc. jeux dans lesquels le hasard seul décide.• Tous ces jeux de hasard n'attirent rien de bon, REGNARD Joueur, I, 7.• Le luxe dans les habits et les jeux de hasard plus dangereux que le luxe furent sévèrement défendus, VOLT. Russie, II, 11.• Il [Jos. Sauveur] est un des premiers qui aient calculé les avantages et les désavantages des jeux de hasard, VOLT. Louis XIV, Écrivains..Fig.• Il ne faut pas permettre à l'homme de se mépriser tout entier, de peur que, croyant avec les impies que notre vie n'est qu'un jeu où règne le hasard...., BOSSUET Duch. d'Orl..Jeux de calcul et de combinaison, comme les dames, les échecs, jeux dans lesquels tout dépend de l'habileté du joueur.Jeux mêlés de combinaisons et de hasard, comme le trictrac, le piquet.• Parbleu, je te saurai, Maudit jeu de trictrac, ou bien je ne pourrai, REGNARD Joueur, I, 4.Le jeu du commerce, espèce de jeu de cartes où le banquier vend des cartes.Jeux de commerce, jeux de cartes où il y a un banquier.Jeux d'adresse, le jeu de paume, le jeu de billard.Jeu de renvi, jeu où l'on met quelque chose par-dessus l'enjeu. Le brelan est un jeu de renvi.Le jeu lui en dit, le jeu ne lui en dit pas, c'est-à-dire il aime, il n'aime pas à jouer.Jouer le jeu de quelqu'un, jouer le jeu qu'il lui plaît ; et fig. s'associer à lui, entrer dans ses vues, dans ses intérêts.• Pour les Vénitiens, ils joueront votre jeu, mais quand vous aurez gagné la partie, VOLT. Lett. Catherine II, 18 mai 1770.Jouer le jeu de quelqu'un, signifie aussi favoriser les intérêts de quelqu'un sans le vouloir.Tenir le jeu de quelqu'un, jouer pour quelqu'un.Mettre au jeu, donner, déposer son enjeu.• J'y jouerais bien en cachette [à la roulette], Mais il faudrait mettre au jeu, BÉRANG. Homme rangé..On dit dans un sens analogue : coucher en jeu.• Si vous en doutez [de la justesse des raisonnements de Jurieu], il est prêt à coucher en jeu quelque chose qui vaille la peine, BOSSUET 6e avert. 19.Fig. Mettre au jeu, risquer des choses qui intéressent beaucoup.• Il y a des marques d'aversion qui font bien mourir ; je suis trop habile sur ce chapitre ; mais il faut avouer aussi que je ne l'ai pas appris sans mettre beaucoup au jeu, SÉV. 347.• Menil, qui ne mettait pas au jeu tant que moi, cherchait sans relâche les moyens de renouer la partie, STAAL Mém. t. II, p. 200.L'argent qui est sur le jeu, sur jeu, la somme des enjeux, ce que les joueurs ont mis au jeu. Il y avait cent francs sur le jeu, sur jeu.Fig.• Ils m'ont fait souvenir d'abord de mes chers romans ; mais il faudrait un peu d'amour sur le jeu, SÉV. 511.Tenir jeu, continuer à jouer avec une personne qui perd.Couper jeu, se retirer avec gain, et ne vouloir pas tenir jeu.Aux jeux de renvi, ouvrir le jeu, faire la première vade. Fermer le jeu, tenir la dernière vade, et ne point faire de renvi.À certains jeux de cartes, on entre au jeu quand, ayant fait une main, on est en état de jouer comme il plaît.Fig. Entrer en jeu, entrer dans une affaire, dans une discussion, avoir son tour, soit pour agir, soit pour parler, etc.Entrer en jeu, se dit aussi de choses dont on fait intervenir l'emploi, et rentrer en jeu se dit de choses dont on use de nouveau.• À ce discours, fouets de rentrer en jeu, LA FONT. Lun..D'entrée de jeu, dès le commencement du jeu. Il se mit à jouer, et d'entrée en jeu il perdit dix napoléons.Fig. D'entrée de jeu, tout d'abord, pour commencer.• [M. de Harlay nommé premier président] a défendu à son secrétaire de prendre quoi que ce soit au monde, et, pour l'y disposer plus agréablement, il lui a donné d'entrée de jeu deux mille écus comptant, SÉV. 9 oct. 1689.Se piquer au jeu, s'opiniâtrer à jouer malgré la perte.Fig. Se piquer, être piqué au jeu, prétendre venir à bout de quelque chose, malgré les obstacles.Jouer bon jeu, bon argent, jouer avec l'intention de payer sur-le-champ.Fig. et familièrement. Bon jeu, bon argent, c'est-à-dire tout de bon, sérieusement.• Je meurs de peur que ce ne soit un présage et qu'il ne soit bientôt appelé de ce doux nom, bon jeu, bon argent, SÉV. 311.• M. le comte de Revel est ici avec deux jolies dames de Rennes, dont l'une est l'une de ses maîtresses ; cette femme entend raillerie ; il ne me paraît pas qu'elle veuille jouer bon jeu, bon argent, avec un héros qui passe, SÉV. 7 sept. 1689.De franc jeu, voy. franc 3.Fig. et par plaisanterie. À quel jeu l'a-t-on perdu ? c'est-à-dire pourquoi cet homme ne va-t-il plus dans une maison, dans une compagnie où il avait coutume d'aller.Fig. Mettre quelqu'un en jeu, le citer ou le mêler dans une affaire sans sa participation, à son insu.• Dans ces conversations où l'on met si volontiers en jeu le prochain, BOURDAL. Exhort. faux tém. contre Jés. Chr. t. II, p. 11.Parler de.• Qu'un mariage était nul pour lui [le frère de Charles II] sans le consentement du roi, quand même le parti se fût trouvé d'ailleurs sortable ; mais que c'était une moquerie de mettre en jeu la fille d'un petit avocat [Mlle Hyde, qu'il avait épousée secrètement], HAMILT. Gramm. 8.Compromettre.• Ah ! monsieur, est-ce vous de qui l'audace insigne Met en jeu mon honneur, et fait ce conte indigne ?, MOL. Dép. am. III, 8.• La Brinvilliers mettait bien du monde en jeu, SÉV. 290.Faire intervenir.• C'est profaner le pouvoir que vous avez sur moi l'un et l'autre, que de vous mettre en jeu, quand il est question de protéger une pareille probité, SÉV. 4 août 1679.Citer ou faire intervenir, pour blâmer.• L'un, défenseur zélé des bigots mis en jeu, Pour prix de ses bons mots [de Molière] le condamnait au feu, BOILEAU Épitre VII.Mettre en jeu, se dit aussi de choses qu'on fait agir, qu'on emploie.• Ce qui leur fit mettre en jeu cette feinte, LA FONT. Gag..Petit jeu ou bas jeu, se dit au trictrac quand les dés amènent beset, deux et as, trois et deux, etc.Jeu simple, s'emploie au jeu de l'ambigu, en parlant d'une position dans laquelle on n'a plus qu'une seule chance pour gagner, comme le point ou la prime, ou la séquence. Jeu double, se dit par opposition à jeu simple.7° Académie des jeux, ou jeux publics, lieux où l'on donne à jouer toutes sortes de jeux.Maison de jeu, maison publique, avouée ou clandestine, essentiellement montée pour donner à jouer les jeux de hasard. Les banquiers d'une maison de jeu.La ferme des jeux, la ferme des maisons de jeu.Il y a grand jeu dans cette maison, il s'y rassemble beaucoup de joueurs.• Mais ce grand jeu chez vous comment l'autoriser ?, BOILEAU Sat. X..Tenir un jeu, donner à jouer chez soi ou en public. Les gens qui tiennent des jeux dans une foire.• La dévote princesse de Carignan obtint de faire tenir un jeu dans son hôtel de Soissons ; aussitôt le duc de Tresmes reprit le sien, en gardant sa pension, DUCLOS Mém. rég. Oeuvres, t. V, p. 384.8° Le jeu, les règles d'après lesquelles il faut jouer, la manière dont il convient de jouer, ou dont une personne joue. Jouer le jeu. C'est le jeu de jeter vos coeurs.Fig. et familièrement. C'est son jeu, il fait précisément ce qu'il doit faire pour réussir.• Ne parler point d'amour ! pour moi, je me défie Des fantasques raisons de la philosophie ; Ce n'est pas là mon jeu...., CORN. la Veuve, I, 1.On dit de même : C'est un homme qui sait bien son jeu.Le droit du jeu, ce qu'il convient de faire en jouant. Vous me demandez si je deviens dévote ; ma bonne, hélas ! non, dont je suis très fâchée ; mais il me semble que je me détache un peu de ce qui s'appelle le monde.... mais ce que j'épargne sur le public, il me semble que je vous le redonne ; ainsi je n'avance guère dans ce pays de détachement, et vous savez que le droit du jeu serait de commencer par effacer un peu Sichée [sa fille, Mme de Grignan], vous savez la fable [Énéide, IV], SÉV. 8 juin 1676.9° Assemblages des cartes qui, données à chacun des joueurs, leur servent à jouer le coup. Regarder son jeu. Avoir une carte de trop dans son jeu. Il lui est venu beau jeu.• Parbleu, tu jugeras toi-même si j'ai tort, Et si c'est sans raison que ce coup me transporte ; Car voici nos deux jeux, qu'exprès sur moi je porte, MOL. Fâcheux, II, 2.Je n'ai point de jeu, c'est-à-dire je n'ai pas des cartes favorables.Donner beau jeu, donner des cartes qui font un jeu favorable.Fig. Donner beau jeu, faire beau jeu à quelqu'un, lui présenter une occasion favorable de réussir en quelque chose.• C'était un beau jeu pour ces discours à part si fréquents chez les anciens et chez les modernes de toutes les langues, CORN. Examen de la Veuve..• Je conviens qu'on vous donne beau jeu, HAMILT. Gramm. 11.• La lettre de Philippe valait un bon manifeste et donnait aux pensionnaires qu'il avait dans Athènes beau jeu pour le justifier, ROLLIN Hist. anc. Oeuvr. t. VI, p. 96, dans POUGENS.On dit dans un sens analogue : avoir beau jeu.• Mon frère en son amour n'aura pas trop beau jeu, REGNARD Joueur, I, 9.• La philosophie n'a pas beau jeu, mais les belles-lettres ne sont pas dans un état plus florissant, VOLT. Lett. d'Argental, 26 sept. 1770.Perdre à beau jeu, perdre quoiqu'on ait un beau jeu ; et fig. échouer dans une tentative dont le succès paraissait assuré.Fig. Voir beau jeu, être témoin de quelque événement considérable, de quelque esclandre, de quelque algarade.• Mon cousin Jupiter, dit-il, verra dans peu Un assez beau combat, de son trône suprême : Toute sa cour verra beau jeu, LA FONT. Fabl. XII, 21.• Nous allons voir beau jeu si la corde ne rompt, MOL. l'Ét. III, 10.Fig. Faire voir beau jeu à quelqu'un, le maltraiter, lui nuire par vengeance, par un mouvement de colère ; ou l'emporter sur lui dans une discussion.Voir beau jeu, subir quelque atteinte, quelque punition.• Toutes verront beau jeu, LA FONT. Lun..• Pompignan se fera peut-être prier ; mais laissez-moi faire, il payera, ou il verra beau jeu, D'ALEMBERT Lett. à Voltaire, 12 janvier 1773.Voir beau jeu, en parlant de choses, être prises, pillées, mangées.• Tire-moi ces marrons ; si Dieu m'avait fait naître Propre à tirer marrons du feu, Certes marrons verraient beau jeu, LA FONT. Fables, IX, 15.Fig. Faire bonne mine à mauvais jeu, cacher le mécontentement qu'on éprouve, ou le mauvais état où l'on est.• Que sert à mauvais jeu de montrer bon visage ?, TH. CORN. l'Amour à la mode, I, 3.Bonne mine et mauvais jeu, se dit en parlant d'une personne qui, sous une apparence de joie, cache du chagrin ou du désappointement.Fig. Jouer à jeu sûr, être certain du succès des moyens qu'on emploie dans une affaire.• Je pouvais à jeu sûr faire paraître ma bonne intention en tout, RETZ II, 73.• Battre un homme à jeu sûr n'est pas d'une belle âme, MOL. Amph. I, 2.Fig. Jouer bien son jeu, conduire adroitement, habilement une affaire.• Je sais bien mon métier, et ma simplicité Joue aussi bien son jeu que ton avidité, CORN. Ment. IV, 7.Jouer un nouveau jeu, recourir à de nouveaux artifices.• Tu me vas voir, Cliton, jouer un nouveau jeu, CORN. ib. V, 6.Cacher son jeu, prendre soin que l'adversaire ne voie pas les cartes que l'on porte.Fig. Cacher, couvrir son jeu, dissimuler son habileté soit en feignant de ne pas savoir bien jouer, soit, plus généralement, en cachant les moyens que l'on emploie pour réussir à quelque chose.• D'un bon mot du vieux temps je couvre tout mon jeu, RÉGNIER Épît. II.• Pour mieux couvrir notre jeu, feignez, comme on vous a dit, d'être la plus contente du monde des résolutions de votre père, MOL. Pourc. I, 4.• Savez-vous qu'il [un flatteur] ne fait que couvrir son jeu, et que, par cette immense profusion de louanges qu'il vous donne à pleines mains, il achète la liberté de décrier votre conduite, ou même de vous trahir sans être suspect ?, BOSSUET 3e sermon, Passion, 2.• Tout homme a de l'orgueil, tout homme est sensible, le plus habile est celui qui sait le mieux cacher son jeu, VOLT. Dict. phil. Quisquis, Langleviel..On dit dans le même sens : Le jeu de cet homme est fort caché, fort couvert.Fig. Le dessous du jeu, ce qu'on ne sait pas du jeu, ce qu'il y a de caché dans une affaire.• Mais encore n'y a-t-il point moyen de voir le dessous du jeu ?, PASC. Pens. X, I, éd. HAVET..Aux jeux de cartes, avoir le jeu serré, ne jouer qu'avec un bon jeu, et ne point se hasarder.Fig. Avoir le jeu serré, agir avec prudence, avec réserve, de manière à ne rien compromettre.Aux échecs, avoir le jeu serré, n'étendre pas assez son jeu.Au trictrac, le jeu de ce joueur est serré, est pressé, se dit quand, les cases les plus éloignées étant faites, il court risque, s'il amène des cinq ou des six, de ne pouvoir les jouer utilement.Aux dés, le jeu, les points qu'on amène.En général, le jeu, la situation dans laquelle on se trouve par rapport à son adversaire, à quelque jeu que ce soit.• C'est un mat qui a été donné, lorsqu'on croyait avoir le plus beau jeu du monde, et rassembler toutes ses pièces ensemble, SÉV. 8 déc. 1679.10° Ce qui sert à jouer à certains jeux. Un jeu d'échecs. Un jeu de dames.Jeu de cartes, le nombre de cartes que doit avoir un paquet de cartes. Jeu entier, ou jeu de reversi, ou jeu de whist, assemblage de 52 cartes, 13 de chaque couleur. Jeu de piquet, jeu de cartes qui ne contient point les deux, trois, quatre, cinq et six et n'a par conséquent que trente-deux cartes.Faux jeu, jeu de cartes où il y a des cartes de trop ou de moins.11° Par assimilation avec un jeu de cartes. Jeu de contre-marques, nom donné aux différentes contre-marques nécessaires pour le service d'une soirée de théâtre.12° Ce que l'on met au jeu. Jouer un jeu d'enfer. Il joue un jeu à se ruiner.• Une tenue d'états, ou les chambres assemblées pour une affaire très capitale, n'offrent point aux yeux rien de si grave et de si sérieux qu'une table de gens qui jouent un grand jeu, LA BRUY. VI.• Un jeu effroyable, continuel, sans retenue, sans bornes.... est-ce une chose qui soit permise, ou dont on ne puisse se passer ?, LA BRUY. VI.• Il n'y a rien qui mette plus subitement un homme à la mode et qui le soulève davantage que le grand jeu, LA BRUY. XIII.• Si j'étais riche, je jouerais un très petit jeu, J. J. ROUSS. Ém. IV.Tirer le jeu, décider par le sort quel sera le montant de l'enjeu.Faire le jeu, déposer les enjeux. Le jeu est-il fait ?J'y vais du jeu, j'y suis du jeu, et, par abréviation, j'en suis, se dit aux jeux de renvi, pour avertir que l'on joue une somme pareille à celle qui est sur le jeu.Jouer beau jeu, jouer le jeu que les autres veulent.• Joue-t-il gros jeu ? Il joue beau jeu, HAMILT. Gramm. 3.Jouer gros jeu, hasarder, au jeu, de fortes sommes.• Et d'ailleurs il n'est pas si facile qu'on pense D'être fort honnête homme et de jouer gros jeu, DESHOULIÈRES Réflex. div. XIV.• Le calcul conduit M. Bernoulli à conclure que le gros jeu ne sera jamais l'occupation d'un homme raisonnable, CONDORCET Bernoulli..Fig. Jouer gros jeu, jouer un jeu à se perdre, s'engager dans une affaire où l'on court de grands risques de toute nature.• Grâce au ciel, ma maîtresse a tiré son enjeu ; Vous épouser, monsieur, c'était jouer gros jeu, REGNARD Joueur, v, 11.• Que je garderais le reste pour moi ; étant bien juste que celui qui avait le plus travaillé dans cette affaire et joué le plus gros jeu, eût la plus grosse part, LESAGE Guzm. d'Alfar. v, 3.Fig. Tirer son épingle du jeu, voy. épingle.13° Par extension. Jeu de bourse, nom générique de toute espèce d'agiotage sur les fonds publics et les autres valeurs cotées à la Bourse.14° Au jeu de paume, chacune des divisions de la partie. Une partie de quatre jeux, de six jeux. Jouer en six jeux. Gagner le premier jeu. Avoir trois jeux à deux, trois jeux à point, se dit quand l'un des joueurs a trois jeux, tandis que l'autre n'en a que deux, ou n'en a point.Ils sont à deux de jeu, ils ont chacun deux jeux.Fig. Deux hommes sont à deux de jeu, quand l'un a pris sa revanche de l'autre, quand ils n'ont point d'avantage l'un sur l'autre ; et aussi quand ils se sont rendu réciproquement de mauvais services, ou qu'ils ont été également maltraités dans une affaire.Terme du jeu de balle. Division de la partie qui consiste en quatre quinze. Avoir un jeu, avoir quinze ; avoir deux jeux, avoir trente ; avoir trois jeux, avoir quarante-cinq.Un jeu, un lieu où l'on joue à certains jeux. Un jeu de boule. Un jeu d'arquebuse.La partie de l'emplacement où l'on joue à la paume, qui s'étend depuis le dernier jalon jusqu'à la grille.Jeu de dedans, galerie qui règne sous presque toute la longueur du toit, du côté opposé à celui du service.Jeu de carre, jeu de paume, où il n'y a point de dedans, et où l'on a pratiqué un carré d'un pied et demi au bas du mur de largeur du fond du jeu.Nom donné à un pilier, à un autre arbre ou à toute autre marque de ce genre qui détermine l'espace dans lequel les chasses peuvent avoir lieu.16° S. m. pl. Chez les anciens, les jeux, nom générique des courses, des luttes, des combats de gladiateurs, etc. Chez les Grecs, les jeux olympiques, les jeux pythiques, les jeux néméens ; chez les Romains, les jeux séculaires, les jeux du cirque, etc. Des jeux en l'honneur de Jupiter, d'Hercule.• Et je n'ai proposé les fêtes et les jeux que je fais célébrer ici, qu'afin d'y pouvoir attirer tout ce que la Grèce a d'illustre, MOL. Princ. d'Él. II, 4.• Ils [les Juifs] célébrèrent des jeux comme les gentils, BOSSUET Hist. II, 5.• Quoi de plus cruel que leurs jeux [des Romains], qui faisaient parmi eux une partie du culte divin ; jeux sanglants et dignes de bêtes farouches, où ils soûlaient leurs faux dieux de spectacles barbares et de sang humain !, BOSSUET Sermons, Vertu de la croix, 1.• On a préparé des jeux publics, où tous les prétendants combattront, FÉN. Tél. V.• Les combats qui faisaient la meilleure partie de l'appareil et de la solennité des jeux publics, sont le pugilat, la lutte, le pancrace, le disque, la course, ROLLIN Hist. anc Oeuv. t. V, p. 60, dans POUGENS.• On ne donnait pour toute récompense qu'une simple couronne, d'olivier sauvage aux jeux olympiques, de laurier aux jeux pythiques, d'ache vert aux jeux néméens et d'ache sec aux jeux isthmiques, ROLLIN ib. p. 55.17° Chez les anciens ou chez les modernes, les jeux de prix, jeux ou exercices qui, exigeant certaines qualités corporelles, ont un prix pour récompense du vainqueur. La lutte, la course, le tir à l'arbalète ou au fusil, etc. sont des jeux de prix.Jeu des cannes, jeu emprunté par les Espagnols aux Maures et qui est une sorte de tournois où l'on se lance des cannes que l'on pare avec des boucliers.18° Jeux Floraux, voy. floral.Jeu sous l'ormel, nom donné dans le XIVe siècle à des sociétés littéraires analogues aux puys (voy. ce mot).19° Poétiquement. Les jeux de la scène, les représentations théâtrales.Les jeux de Thalie, la comédie. Les jeux de Melpomène, la tragédie. Les jeux de Terpsichore, la danse.• Je quitte Melpomène et les jeux du théâtre, Ces combats, ces lauriers, dont je fus idolâtre ; De ces triomphes vains mon coeur n'est plus touché, VOLT. Épît. 44.20° Jeu, le maniement des hautes armes (sens qui vieillit). Le jeu de la hallebarde, de la pique, de l'espadon.21° La façon de faire des armes. Un jeu habile.• J'ai la botte trompeuse, et le jeu très brouillé, REGNARD le Joueur, III, 11.Jeu dur, action d'un tireur qui emploie la force et ne répond aux coups que par des mouvements imprévus.Jeu de la pointe de l'épée, action de l'élever au-dessus de celle de l'ennemi.Jeu simple, celui qui se fait avec vitesse sur une ligne.Jeu composé, jeu qui comprend toutes les inventions possibles pour tromper l'adversaire.Savoir le jeu de quelqu'un, connaître les coups dont il se sert le plus habituellement ; et fig. connaître sa manière d'agir.22° Manière de jouer d'un instrument de musique. Avoir le jeu beau, le jeu brillant, le jeu large, hardi.Plein jeu, se dit des sons plus forts que l'on tire d'un instrument.Demi-jeu, terme qui répond à l'italien mezzo forte, et qui se dit de l'action de ne pas donner au jeu des instruments toute l'intensité de son dont ils sont susceptibles.Demi-jeu, la moitié d'un jeu d'orgues, et aussi manière de jouer de l'orgue qui tient le milieu entre le fort et le doux.Jeu céleste, qualité de son un peu étouffé, mais très doux et très agréable, que l'on obtenait par une des pédales du piano (aujourd'hui on ne met plus cette pédale). L'orgue a aussi un jeu céleste.Fig. et familièrement. C'est le vieux jeu, ce sont de vieilles habitudes.C'est le vieux jeu, on n'en rit plus, se dit quand quelqu'un fait un vieux conte qu'on a ouï plusieurs foisJeu d'orgue, se dit de l'instrument qu'on appelle aussi simplement orgues. Le jeu de voix humaine, le jeu de flûtes, le jeu de trompettes, le jeu de clairon, registres qui servent, dans les orgues, à imiter le son de la voix humaine, celui des flûtes douces, celui des trompettes, etc.Le plein jeu, ce qui sert, dans l'orgue, à produire des sons plus forts.Jeu de viole, se disait autrefois de quatre ou cinq violes de différentes grandeurs pour jouer les différentes parties de la musique.23° Manière dont un comédien remplit ses rôles. Ce comédien a le jeu pathétique. Un jeu noble.Jeu de théâtre, nom donné à certains effets de scène où l'on emploie surtout les gestes et les expressions du visage.• On ne se pique plus de déclamer des vers comme on faisait du temps de Baron ; on veut du jeu de théâtre ; on met la pantomime à la place de l'éloquence, VOLT. Lett. Lacombe, 14 juillet 1766.• Gardons-nous surtout de chercher dans un grand appareil et dans un vain jeu de théâtre un supplément à l'intérêt et à l'éloquence, VOLT. Scythes, Préf..• L'appareil, la pompe, la position des acteurs, le jeu muet sont nécessaires ; mais c'est quand il en résulte quelque beauté, VOLT. Lett. Lekain, 16 déc. 1760.Fig.• Un zèle désavoué par une conduite reprochable est un jeu de théâtre qui n'a de sérieux que l'abus du ministère, MASS. Confér. Zèle c. l. scand..Fig. C'est un jeu joué, se dit d'une feinte concertée entre deux ou plusieurs personnes.• On dit que M. de Saint-Vallier a épousé Mlle de Rouvroi ; c'était un jeu joué que sa disgrâce, SÉV. Lett. 10 juillet 1675.24° Il se dit des différentes expressions que prend la physionomie.• Quel jeu de physionomie ! qu'il a de feu dans le regard !, FAVART Soliman II, I, 10.• Tout cela donne beaucoup de variété, de jeu et de caractère à la physionomie de cet oiseau, BUFF. Ois. t. v, p. 166.25° Le jeu de la lumière, les différents reflets que présente un corps éclairé.• Le jeu des nuances fugitives qui se succèdent ou se mêlent, s'éclipsent ou se font valoir mutuellement, et surtout expriment l'action, le mouvement et la vie, BUFF. ib. t. VII, p. 132.• Vernet, admirable dans l'art de peindre l'eau, l'air, la lumière et le jeu de ces éléments, MARMONTEL Mém. VI.26° Aisance de mouvement, facilité à se mouvoir, en parlant des ouvrages d'art. Le balancier de cette horloge n'a pas assez de jeu. Il faut donner du jeu à cette porte.Par extension.• Je voudrais que vous eussiez été saignée... cela vous eût débouché les veines, cela eût donné du jeu et de l'espace à votre sang, SÉV. c avril 1689.Terme de peinture. Il y a du jeu dans cette composition, le mouvement y est, les aspects y sont variés, les objets n'y sont point entassés, et laissent entre eux l'espace nécessaire.Terme de mécanique. Jeu de piston, espace que parcourt. À chaque coup, le piston dans son corps de pompe.Terme de marine. Espace vide. Les haubans ont du jeu. Jeu de la barre, espace qu'elle peut parcourir lorsqu'on fait obliquer le gouvernail d'un bord à l'autre.Terme de menuiserie. Bois qu'on ôte dans les feuillures d'une porte, d'une croisée, avec le rabot, pour en rendre la fermeture plus facile.Terme de charpenterie. Nom d'une longue pièce de bois, où pose et tourne l'arbre d'un moulin à vent, du côté de la tête.27° Action d'un ressort. Le jeu de la gâchette d'un fusil.Action régulière et combinée des diverses parties d'une machine.• On ne peut assez admirer cette prodigieuse quantité de muscles qui se voient dans le corps humain, ni un jeu si aisé et si commode, non plus que le tissu de la peau qui les enveloppe, si fort et si délicat tout ensemble, BOSSUET Conn. II, 2.Fig.• Condition qui fait tout le jeu de la machine politique, J. J. ROUSS. Ém. V.• Le jeu de l'intrigue et de la méchanceté se soutient, se renouvelle, J. J. ROUSS. Confess. IX..• Il est trop vrai que la température de telle ou telle région peut être un obstacle au jeu et à la marche du gouvernement populaire, CHATEAUBR. Amér. Républ. espagn..En jeu, en action.• Il y a plus de forces en jeu, plus d'intensité dans les mouvements, plus de quantité dans l'effet, BONNET Ess. analyt. âme, ch. 18.28° Par assimilation avec ce qui sert à jouer (sens du n° 10). Terme d'architecture hydraulique. Jeu d'eau, diversité de formes des jets d'eau dont on varie les ajutages.Jeu d'eau, jets qui, par le mouvement de l'eau, font jouer des instruments, des machines.Terme de marine. Jeu de voiles, l'appareil complet de toutes les voiles d'un vaisseau. Pour le rechange, ils [les Hollandais] mettent toujours trois jeux de voiles sur leurs vaisseaux et huit ancres, Corresp de Colbert, III, 2, p. 312.Un jeu d'avirons, le nombre d'avirons nécessaire pour un canot.Terme de pêche. Ligne de fond à 5 ou 6 hameçons, ordinairement employée pour prendre le barbeau pendant le jour.29° Jeu d'orgue, espèce de soubassement sous le manteau d'une cheminée.30° Terme de féodalité. Jeu de fief, aliénation d'un fief, sous la réserve de la foi, et avec l'imposition d'un devoir domanial et seigneurial.PROVERBESÀ beau jeu, beau retour, se dit quand on rend la pareille à qui nous a fait quelque injure.À tout venant beau jeu, se dit pour exprimer qu'on est en état de tenir tête à tous ceux qui se présenteront.Les fautes sont faites pour le jeu, c'est-à-dire qu'en toutes choses il y a des règles qu'il faut observer.Dieu vaut jeu, se dit lorsque le mal qu'une personne voulait faire aux autres retombe sur elle-même, et signifie proprement que la justice divine n'a pas moins de force que le mauvais jeu des méchants.Le jeu ne vaut pas la chandelle. voy. chandelle.• Amusez-vous de la vie, il faut jouer avec elle ; et, quoique le jeu ne vaille pas la chandelle, il n'y a pourtant pas d'autre parti à prendre, VOLT. Lett. Mme d'Argental, 1er août 1757.XIe s.• Greignor [plus grand] fais [il] porte par giu quant il s'enveise [s'amuse], Ch. de Rol. LXXVI.XIIe s.• Lors [ils] sauront come Charles nous a le geu parti, Sax. XXIV.• Niés Vivien [mon neveu Vivien], ce n'est pas jeus petis, Que tant i a Sarrazins et Persis, Contre un des noz [nôtres] en ont soixante et diz, li Covenans Vivien, V. 386.• Je si souvent me tourmente Que je n'ai ne jeu ne ris, Dame de Faiele, dans Couci.XIIIe s.• Cest gieu parti en envoions Au comte d'Anjou.... Et de juger droit le prions, LE COMTE DE BRET. Romanc. p. 162.• Mais si me puist aidier sains Pox [Paul], Li jeus s'en va en autre guise ; Venus en estes à joïse [jugement] ; Vous le comparrez [payerez] hui mout chier, Ren. 5182.• Qui du songe la fin orra, Je vous di bien qu'il i porra Des jeus d'amors assés aprendre, la Rose, 2079.XIVe s.• Il fut ordonné que par maniere d'ebattement seroit donné un joyel ou present au jeu de barres, ainsi qu'il est accoustumé à faire au jeu de prix, DU CANGE escrinium..• Berruier et François et Breton bien corseu, Bien quatre cens ou plus ont commencié le geu [la bataille], Guesclin. V. 19953.• Le dittateur voua et promist à fere les grans jeuz quant la cité de Veie seroit conquise, BERCHEURE f° 104.XVe s.• Jamès je ne fuisse lassés à juer aux jus des enfans, FROISS. Poés. Espinet. amour..• Faisons leur voie, et vous verrez tantost beau jeu, FROISS. II, II, 175.• Et que les princes doivent bien congnoistre quelles gens les meuvent [les traictez], et par especial celluy qui n'a le plus apparent du jeu, COMM. I, 13.• Ha ! mon amy ce n'est pas jeu, Dist le penancier seurement, Il vous fault bien penser à Dieu Et le supplier humblement, Oeuvres de VILL. 1re repue.• La darraine parole me demourra, soit tort, soit droit ; mais il n'est jeu que à joueurs, et n'y a que faire, Les 15 joyes de mariage, p. 24.• L'autre dit qu'il n'en peut challoir, et que ce n'est que la regle du jeu, et qu'il [le mari trompé] n'est que une beste, ib. p. 76.• Quand le chevalier veit ce, il s appensa que ce n'estoit pas jeu d'enfant, et que legierement pourroit recevoir blasme, s'il ne se defendoit, Perceforest, t. II, f° 128.• De tant estoit ie jeu mal parti envers eulx, qu'il leur convenoit recevoir plus de coups qu'ilz ne povoient rendre, ib. t. I, f° 34.• À quel jeu vous avons-nous perdu ?, Petit J. de Saintré, p. 20, dans POUGENS.XVIe s.• Voilà les armes prises par toute la France à jeu descouvert, D'AUB. Hist. II, 123.• Par maniere de jeu [en plaisantant], MONT. I, 101.• J'aurois trop beau jeu, si je voulois considerer l'homme..., ID. II, 228.• Le jeu ne vault pas la chandelle, MONT. III, 47.• Un instrument de musique à plusieurs jeux et plusieurs registres, AMYOT Anton. 32.• Les jeux des musiciens, AMYOT Péricl. 29.• En trois villages peut avoir un toreau qui ne peut estre empesché d'aller à jeu [de saillir des vaches], Coust. géner. t. II, p. 780.• Comme on dit en proverbe : Jeux de prince, c'est à dire jeux qui plaisent à ceux qui les font, H. EST. Apol. pour Hérod, p. 278, dans LACURNE.• À vrai dire perd on le jeu, COTGRAVE .• Après la feste et le jeu les pois au feu, ID. .• Le jeu, la femme, le vin friand Font l'homme pauvre tout en riant, LEROUX DE LINCY Prov. t. II, p. 85.Provenç. joc, juec, juoc ; catal. jog ; espag. juego ; portug. jogo ; ital. giuoco, du latin jocus. De même que jam est pour diam, Joris pour Diovis, jocus est pour diocus ; sanscr. div, jouer.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREJEU. Ajoutez :31° Terme de turf. Un cheval fait le jeu, quand, dès le départ, il prend la tête du train, forçant ainsi ses concurrents à développer, dès le début, leur maximum de vitesse.Quand deux chevaux d'une même écurie sont engagés dans une course, l'un d'eux est réservé à faire le jeu de son camarade, c'est-à-dire à fatiguer les concurrents jusqu'au moment où son camarade d'écurie peut prendre place et terminer victorieusement la course.Dans le proverbe : le jeu ne vaut pas la chandelle, on pèche contre le dicton en mettant enjeu.• Rivarol quitta cette partie de la politique militante dont l'enjeu ne valait plus la chandelle, DE LESCURE Journ. offic. 16 mai 1875, p. 3479, 2e col..
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.