- finesse
- (fi-nè-s') s. f.1° Qualité de ce qui est fin, c'est-à-dire de ce qui a le caractère d'une élégante délicatesse. Il y a beaucoup de finesse dans cette plaisanterie. Réponse pleine de finesse. Finesse de vues, d'aperçus.• Jamais Lamotte n'aura ce style, disaient-ils ; quelle finesse et quelle grâce ! on reconnaît la Fontaine à chaque mot ; la fable était de Lamotte, VOLT. Mél. littér. à M. de Laharpe..2° Il se dit de ce qui a une forme délicate et élégante. La finesse des contours dans une figure, dans un dessin.• La tête a aussi plus de finesse ; ce qui lui rend la physionomie agréable, BUFF. Quadrup. t. XII, p. 109, dans POUGENS.• C'était la belle Desfourniels qui, pour la régularité, la délicatesse des traits et leur finesse inimitable, était le désespoir des plus habiles peintres, MARMONTEL Mém. III.Terme de sculpture, de peinture et de gravure. Finesse de ciseau, de pinceau, de burin, manière délicate et gracieuse de sculpter, de peindre, de graver.• Elle est sans finesse.... mais tant mieux.... oui, mais j'entends sans finesse de pinceau, DIDER. Salon de 1765, Oeuv. t. III, p. 343, dans POUGENS.Finesses de touche, finesses de ton, effets de touche, de ton, remarquables par leur grâce et leur délicatesse.Qualité de ce qui est svelte et élégant. La finesse de la taille.3° Qualité de ce qui est fin, délié, menu. Du linge d'une grande finesse. La finesse des cheveux, d'une dentelle.4° Subtilité des sens. Il a l'ouïe d'une grande finesse.5° Qualité qui fait que l'esprit, par la délicatesse, saisit et perçoit les choses fines. La finesse du jugement. La finesse du goût. La grâce et la finesse de la Fontaine.• Le mot de finesse ne saurait non plus l'avoir fâché en l'endroit où il est ; il ne signifie autre chose qu'adresse, que science, que subtilité, BALZAC Lettres, I, 4, dans RICHELET.• Le sage nous avertit que la vraie finesse est de bien connaître non la voie des autres, mais sa voie propre, NICOLE Ess. mor. 2e traité, chap. 5.• .... Pour dire un mot faut-il tant de finesse ?, MOL. Tart. I, 6.• [L'esprit] C'est une finesse de raison qui s'évapore, et qui est d'autant plus faible et plus sujette à s'évanouir qu'elle est plus délicate et plus épurée, FLÉCHIER Mme de Montausier..• Dans la conduite, finesse exprime toujours, comme dans les arts, quelque chose de délié, VOLT. Dict. phil. Finesse..• Par une grande finesse de discernement, on distinguera les pensées stériles des pensées fécondes, BUFF. Disc. de réception..• La finesse semble être la qualité dominante de son esprit ; mais il l'a portée à un si haut degré, il l'a si heureusement employée, et elle l'a si bien servi que cette qualité prend chez lui un caractère de grandeur, et produit ce sentiment d'admiration et d'étonnement qui semble réservé aux prodiges qu'en fantent la force et la profondeur du génie, CONDORCET Daniel Bernoulli..Absolument, finesse se dit pour finesse d'esprit. Sa physionomie exprime la finesse.• La finesse imagine au lieu de voir ; à force de supposer elle se trompe, DUCLOS Consid. moeurs, chap. 13.Parole, action qui dénote de la finesse.• Gardez-vous bien d'imiter ces personnes qui applaudissent aux enfants lorsqu'ils ont marqué de l'esprit par quelque finesse, FÉNEL. Éduc. des filles, chap. 9.Entendre finesse à quelque chose, y donner un sens fin et quelquefois malin, en tout cas ne pas la prendre dans le sens qui se présente.• Nous le verrions pendre que nous y entendrions encore quelque finesse, SÉV. 301.• Ceux qui n'y entendaient point de finesse...., HAMILT. Gramm. 10.• On inspire la défiance en employant toujours la finesse ; on se trompe presque toujours en entendant finesse à tout, VOLT. Dict. phil. Finesse..• Ils sont au comble de l'esprit, lorsqu'ils savent entendre finesse à tout, MONTESQ. Lett. pers. 82.On dit de même : chercher finesse à une chose. Il ne faut pas chercher de finesse à ce que je vous dis.N'y pas savoir de finesse, ne pas vouloir tromper, faire illusion.• Il y en a parmi eux [les médecins] qui sont eux-mêmes dans l'erreur populaire, dont ils profitent ; et d'autres qui en profitent sans y être ; votre monsieur Purgon, par exemple, n'y sait point de finesse ; c'est un homme tout médecin, depuis la tête jusqu'aux pieds, MOL. Mal. imag. III, 3.• Moi, je n'y sais point de finesse ; j'avertis qu'elle finira une heure au moins plus tôt qu'une autre pièce, RÉGNARD Fol. amour. Prol..Faire finesse d'une chose, ou, simplement, faire finesse, cacher, dissimuler ce qu'on ne devrait pas dissimuler.• Nous n'avions point dessein de vous faire de finesse, SÉV. 249.• Je n'en ai pas fait de finesse à monsieur le chevalier, SÉV. 531.• Je ne voudrais pas faire finesse de tout, BOSSUET Lett. abb. 247.6° Il se dit de la chose même qui est difficile à saisir, à sentir.• On m'a prêté un exemplaire des remarques de M. de Vaugelas avec des notes écrites de la main de feu M. Chapelain, à qui aucune finesse de notre langue n'était inconnue, VAUGELAS Rem. not. Th. Corn. t. I, p. 40, dans POUGENS.• Presque personne ne savait les finesses de la versification [avant Racine], VOLT. Dict. phil. Art dramat..• Il [Aristote] veut que l'orateur connaisse les passions des hommes et les moeurs, les humeurs de chaque condition ; je ne crois pas qu'il y ait une seule finesse de l'art qui lui échappe, VOLT. ib. Aristote..• Les finesses de l'art sont rarement dues aux premiers inventeurs, VOLT. Newton, II, 9.7° Supercherie, ruse.• Enfin j'ai vu le monde et j'en sais les finesses, MOL. Éc. des femmes, IV, 5.• Je vous ai soupçonnée de finesse ; je suis bien aise de m'être trompée, MAINTENON Lett. à Mme de la Viefville, 23 fév. 1705.• La finesse est l'occasion prochaine de la fourberie ; de l'une à l'autre le pas est glissant, LA BRUY. VIII.• Avec les gens qui par finesse écoutent tout et parlent peu, parlez encore moins ; ou, si vous parlez beaucoup, dites peu de chose, LA BRUY. .• Elles [les filles] estiment la finesse ; et comment ne l'estimeraient-elles pas, puisqu'elles ne connaissent pas de meilleure prudence ?, FÉNELON Éduc. filles, ch. 9.• La finesse est un mensonge en action ; et le mensonge part toujours de la crainte ou de l'intérêt, et par conséquent de la bassesse, DUCLOS Consid. moeurs, ch. 13.• Il [Louis XI] introduisait trop souvent dans la politique la finesse, qui la supplée rarement et qui l'avilit toujours, DUCLOS Hist. de Louis XI, Oeuvres, t. III, p. 357, dans POUGENS..• La finesse n'a jamais réussi à personne dans les grandes choses, VOLT. Lett. Catherine, 21 sept. 1770.Acte de finesse, de ruse.• Bien qu'il parle de paix, ce n'est qu'une finesse Pour trouver un moyen de revoir la princesse, DESMARETS Mirame, I, 1.• On les voit [les animaux] attaquer et se défendre aussi industrieusement qu'on le puisse imaginer, ruser même ; et, ce qui est plus fin encore, prévenir les finesses, comme il se voit tous les jours à la chasse, où les animaux semblent montrer une subtilité exquise, BOSSUET Connaiss. V, 1.• Ce que j'appelle ici mauvaises finesses, ne sont pas seulement les finesses grossières ou les raffinements trop subtils, mais en général toutes les finesses qui usent de mauvais moyens, BOSSUET Politique, V, II, 9.• Jamais ces misérables finesses que les religieuses prennent pour habileté, MAINTENON Lett. à Mme de la Viefville, 17 oct. 1707.• Il n'est plus question de deviner les finesses des prêtres par des moyens qui pourraient eux-mêmes paraître trop fins ; un temps a été qu'on les a découvertes de toutes parts aux yeux de toute la terre, ce fut quand la religion chrétienne triompha hautement du paganisme, FONTEN. Oracl. I, 17.• C'étaient de petites finesses [d'Auguste] pour se faire donner ce qu'il ne croyait pas avoir assez acquis, MONTESQ. Rom. XIII.• Prenez garde que toutes ces histoires de maîtres supposés sont de vieilles finesses, des moyens de comédie, BEAUMARCH. Barb. de Sév. III, 2.Des finesses cousues de fil blanc, des artifices grossiers, métaphore prise des tailleurs mal habiles qui font des coutures grossières et avec du fil blanc.Il est au bout de ses finesses, c'est-à-dire il est au bout de ses inventions pour tromper.1. FINESSE, SUBTILITÉ., La subtilité de l'esprit est la finesse poussée à l'excès et devenue un défaut.2. FINESSE, PÉNÉTRATION., La pénétration perce les choses difficiles, obscures. La finesse discerne les choses fines et qui échappent facilement à la vue.3. FINESSE, RUSE., La finesse, en ce sens, n'est que la finesse d'esprit conduite jusqu'à un mauvais usage. Il reste donc toujours quelque chose de fin, de délié, qui peut manquer tout à fait à la ruse.XVe s.• Jouer une finesse [jouer un mauvais tour], DU CANGE fictitia..• Leur administrer bastons ou armeures deffensables pour faire leurs finesses [leur mauvais coup], DU CANGE ib..• Et à qui que feisse finesse [courtoisie, service], Il ne m'aymoit que pour le myen, VILLON Regrets de la belle Heaulmyère..XVIe s.• Combattre de vertu, non de finesse [adresse], MONT. I, 23.• Je ne meslois à mes jeux ni tricotterie ni finesse [astuce], MONT. I, 109.• Quelqu'un proposoit contre Cleanthes des finesses dialectiques, MONT. I, 190.• Il leur feit cognoistre que toutes leurs finesses n'estoient que jeux d'enfans, AMYOT Philop. 22.• Finesse est une parolle mitoyenne entre la prudence et la tromperie, PASQUIER Recherches, liv. VIII, p. 756, dans LACURNE.Fin 2 ; provenç. fineza, pureté ; catal. finesa ; espagn. fineza ; ital. finezza.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.