- aborder
- (a-bor-dé)1° V. n. Venir à bord. Le navire aborde à Toulon. Ils n'avaient pu aborder dans l'île. Il aborda en Afrique sur un misérable esquif.• Enfin l'esquif aborde, on l'invite à descendre, CORN. M. de Pomp. II, 2.• Déjà il se préparait, selon l'ordre qu'il en avait reçu, à aller aborder secrètement dans une petite île qui est auprès de la grande, FÉN. Tél. IX..2° Arriver en général, affluer. On aborde sans peine dans cette église. Le peuple abordait de toutes parts sur la place publique. Cet enfant abordait à peine dans la maison, qu'il fut saisi d'une attaque d'épilepsie.• .... Verras-tu d'un esprit bien tranquille Chez ta femme aborder et la cour et la ville ?, BOILEAU Sat. X..• Elle y voit aborder le marquis, la comtesse, Le bourgeois, le manant, le clergé, la noblesse, BOILEAU Sat. I.• Les marchands y abordent [à Tyr] de toutes les parties du monde, et ses habitants sont eux-mêmes les plus fameux marchands qu'il y ait dans l'univers, FÉN. Tél. III.3° Aborder de, s'approcher de. Cet emploi est maintenant hors d'usage ; mais on le trouve dans de bons auteurs du XVIIe siècle.• La ville était battue des flots de tous côtés.... et le mur qui était avancé dans la mer et escarpé empêchait qu'on ne pût en aborder, VAUGEL. Q. C. 209.• Dieu ne vous permettra pas d'en aborder, BOSSUET Rech. 2.• Ils ne peuvent aborder du trône de Dieu, BOSSUET Asc. 2.4° V. a. Arriver à. Aborder un rivage. Côte qu'on ne peut aborder. Ils abordèrent la ville par la route du nord.• Ses cheveux se dressent sur sa tête quand il aborde le noir séjour de l'impitoyable Pluton, FÉN. Tél. XVIII.• Ils [les compagnons d'Ulysse] abordèrent un rivage Où la fille du Dieu du jour, Circé, tenait alors sa cour, LA FONT. Fab. XII, 1.• Je chante les combats et cet homme pieux Qui, des bords phrygiens conduit dans l'Ausonie, Le premier aborda les champs de Lavinie, BOILEAU Art poét. III.5° Joindre quelqu'un. Abordez-le et exposez-lui votre affaire. Il n'y avait personne qui ne pût aborder le prince. Il se laissait facilement aborder. Mon ami m'aborda dans la rue.• Il m'aborda avec amitié, FÉN. Tél. II.• Ce tigre que jamais je n'abordai sans crainte, RAC. Phèd. IV, 6.• Moi-même, de quel oeil dois-je ici l'aborder ?, RAC. Mith. II, 3.• Je verrai le témoin de ma flamme adultère, Observer de quel front j'ose aborder son père, RAC. Phèd. III, 3.• Si vous l'abordez, demeurez avec elle le moins de temps qu'il vous sera possible, MOL. Pr. d'Él. III, 2.• Deux inconnus armés m'ont abordé soudain, VOLT. Mér. II, 2.6° Fig. En venir à un sujet. Aborder une cause. La discussion fut abordée avec beaucoup de fermeté. J'aborde la suite de mon sujet.7° En termes de guerre, aborder l'ennemi, marcher à l'ennemi pour l'attaquer. Le régiment aborda avec beaucoup d'ardeur la troupe qui occupait la hauteur. On aborda le village qui était barricadé.8° Terme de marine. Aborder un vaisseau, l'accrocher pour que l'assaillant passe dessus et cherche à le prendre de vive force ; et aussi le heurter par accident. La frégate manoeuvra pour aborder le vaisseau ennemi. Dans la nuit le bateau à vapeur aborda une barque de pêcheur qui coula aussitôt.• Leurs voiles étaient meilleures que les nôtres ; le vent les favorisait ; ils nous abordent, nous prennent, et nous emmènent prisonniers en Égypte, FÉN. Tél. II.9° En termes de chasse, aborder la remise, s'approcher de l'endroit où la perdrix s'est réfugiée.10° S'aborder, v. réfl. s'approcher pour se parler. Nous nous sommes abordés dans la rue.• Tout le monde s'abordait, s'interrogeait dans les églises, sans se connaître, VOLT. L. XIV, I.11° Se heurter. Les vaisseaux s'abordèrent, et reçurent l'un et l'autre de graves avaries.12° A L'ABORDER, loc. adv. A l'aborder, il est froid ; mais cela ne dure pas. Aborder est pris ici substantivement.13° Marine. Aborder de franc étable, se dit de deux navires qui se choquent par les étraves.Aborder, v. n. se conjugue avec avoir ou être : ils ont abordé, ils sont abordés. Le sens est différent : ils ont abordé signifie l'action d'aborder : ils ont abordé et ont aussitôt marché vers la ville. Ils sont abordés exprime l'état de ceux qui sont dans le lieu qu'ils ont atteint : ils sont abordés depuis quelques heures.• Le prince d'Orange est abordé, SÉV. 486.c'est-à-dire il reste en Angleterre.ABORDER, AVOIR ACCÈS, APPROCHER. On a accès où l'on entre. On aborde les personnes à qui l'on veut parler. On approche celles avec qui l'on est souvent. Qui a beaucoup de connaissances peut avoir accès en beaucoup d'endroits. Qui a de la hardiesse aborde sans peine tout le monde.• Qui joint à la hardiesse un esprit souple et flatteur peut approcher les grands avec plus de succès que d'autres, GUIZOT. .• Aborder marque un fait, avoir accès, une faculté, et approcher, une habitude, LAFAYE .XVe s.• Philippe de Bourgogne fut amoureux de la comtesse de Salsebri, mais ils n'aborderent point ensemble, P. DE FENIN 1424.XVIe s.• Mais à la fin la bonasse fortune Loin les aborde au rivage inconnu De la Provence, RONSARD 609.• Socrate à l'aborder sembloit de prime face homme ignorant et grossier, AMYOT Caton, 14.• Il se mit à la voile sans aborder nulle part, sinon où il estoit contraint à ce faire pour prendre vivres ou faire eau, AMYOT Pompée, 107.• A l'instant mesme du peril arriva en la ville Gongylus, qui venoit de Corinthe avec une galere, à l'aborder du quel estant incontinent tout le peuple accouru à l'entour de lui, il...., AMYOT Nic. 34.Abord.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.