- superstition
- (su-pèr-sti-sion ; en vers, de cinq syllabes) s. f.1° Sentiment de vénération religieuse, fondé sur la crainte ou l'ignorance, par lequel on est souvent porté à se former de faux devoirs, à redouter des chimères, et à mettre sa confiance dans des choses impuissantes.• La piété est différente de la superstition ; soutenir la piété jusqu'à la superstition, c'est la détruire, PASC. Pens. XIII, 5, éd. HAVET..• [M. de Montausier] chrétien de bonne foi, sans superstition et sans hypocrisie, FLÉCH. Duc de Mont..• La superstition semble n'être autre chose qu'une crainte mal réglée de la divinité, LA BRUY. Théoph. XVI.• La superstition est à la religion ce que l'astrologie est à l'astronomie, la fille très folle d'une mère très sage, VOLT. Pol. et lég..• Tolérance, s'il est utile.... Quiconque a un peu vécu avec les hommes a pu voir quelquefois combien aisément on est prêt à sacrifier la nature à la superstition, VOLT. Mahomet, Lett..• La superstition sied bien au paysage ; Triste dans les cités, elle est gaie au village, Et le sage lui-même aime voir, en ces voeux, La terre à ses travaux intéressant les cieux, DELILLE Imag. VIII.2° Pratique superstitieuse, croyance superstitieuse. La confiance qu'on avait aux oracles chez les anciens était une superstition.• Laissons là de Joad l'audace téméraire, Et tout ce vain amas de superstitions Qui ferment votre temple aux autres nations, RAC. Athal. II, 4.• La superstition, en général, est toujours une erreur ; mais les superstitions particulières ont quelquefois un fondement raisonnable, BUFF. Ois. t. XII, p. 29.Particulièrement. Vaine observation religieuse pratiquée par les anciens et défendue par l'Église.3° Vain présage que l'on tire d'accidents purement fortuits. Il ya de la superstition à croire qu'une salière renversée présage un malheur.4° Fig. Tout excès d'exactitude, de soin, en quelque matière que ce soit.• Ceux qui l'avaient pratiqué [l'art des fortifications], ou qui en avaient écrit, s'étaient attachés servilement à certaines règles établies, quoique peu fondées, et à des espèces de superstitions, qui dominent toujours longtemps en chaque genre, et ne disparaissent qu'à l'arrivée de quelque génie supérieur, FONTEN. Vauban..• Une si petite attention s'ennoblissait par son principe ; et combien ne serait-il pas à souhaiter que le bien public fût toujours aimé avec autant de superstition ?, FONTEN. des Billettes..• M. de la Hire, exact jusqu'au scrupule et jusqu'à la superstition, présentait à M. de Louvois des mémoires dressés jour par jour et où les fractions n'étaient pas négligées, FONTEN. la Hire..• Un des avantages de la philosophie appliquée aux matières de goût est de nous guérir ou de nous garantir de la superstition littéraire, D'ALEMB. Oeuv. t. III, p. 414.• Comme le dit fort bien le chevalier de Celtas, elle a toutes les superstitions de la toilette, GENLIS Mères riv. t. I, p. 150, dans POUGENS.XVe s.• Qu'à la superstition de vos ydoles renoncez, et au vray Dieu qui vous a creé vous convertissez, Myst. de Barl. et Josaphat, dans GUI DE CAMBRAI, p. 372.XVIe s.• Il me semble que la superstition a esté nommée de ce qu'en ne se contentant pas de ce qui estoit ordonné de Dieu, elle a fait un amas superflu de choses vaines, CALV. Instit. 66.Lat. superstitionem, d'un verbe archaïque superstitare, protéger, de super, au-dessus, et stare, se tenir : superstitio, la crainte des dieux, le respect de leur protection, et, en mauvaise part, superstition.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.