- bruit
- (brui ; le t se lie : un brui-t injurieux ; au pluriel l's se lie : des brui-z injurieux) s. m.1° Mélange confus de sons.• Les taureaux furieux n'auraient pas fait un bruit aussi affreux, FÉN. Tél. XV.• Cette vieille fit du bruit à une porte, FÉN. Tél. VIII.• Ils me font un bruit enragé, SÉV. 420.• Les dieux mêmes, les dieux de l'Olympe habitants, Qui d'un bruit si terrible épouvantent les crimes, RAC. Phèd. IV, 6.• Sa voix tumultueuse [du peuple] assez souvent fait bruit, CORN. Hor. V, 3.• Mes soeurs, j'entends du bruit dans la chambre prochaine, RAC. Esther, II, 9.• Le Rhin, tranquille et fier du progrès de ses eaux, Appuyé d'une main sur son urne penchante, Dormait au bruit flatteur de son onde naissante, BOILEAU Ép. IV.• Il mesure au bruit des combats Tout le bruit de sa renommée, BÉRANG. Bonheur..• L'opéra toujours Fait bruit et merveilles, BÉRANG. Musique..• Que le séjour de l'homme est divin, quand la nuit De la vie orageuse étouffe ainsi le bruit !, LAMART. Harm. II, 4.Familièrement. Faire plus de bruit que de besogne, parler plus qu'on n'agit.Bruit de mer, nom donné au bruissement que l'on perçoit en appliquant une coquille univalve contre l'oreille.2° Dires, nouvelles qui circulent dans le public. Bruits de bourse. Il y a des bruits de guerre. Il n'est bruit que de cela.• J'ai fait semer ce bruit, CORN. Hér. II, 6.• Un faux bruit s'y coula touchant la mort du roi, CORN. Rod. I, 1.• Crains-tu si peu le blâme et si peu les faux bruits ?, CORN. Cid, III, 4.• C'est une chose étrange que les mauvais bruits qui courent de lui, SÉV. 414.• Le bruit court que je vais en Provence, SÉV. 219.• Un bruit qui courait d'elle en toutes ces provinces, LA FONT. Fianc..• J'ai rencontré un orfévre qui, sur le bruit que vous cherchiez quelque beau diamant en bague...., MOL. Mar. forcé, 5.• Ou qu'on tâche à semer de méchants bruits de vous, MOL. Mis. I, 1.• Mille bruits en courent à ma honte, RAC. Brit. IV, 2.• Croyez-moi, hâtons-nous d'en prévenir le bruit, RAC. Baj. I, 2.• Un bruit assez étrange est venu jusqu'à moi, Seigneur, je l'ai jugé trop peu digne de foi...., RAC. Iph. IV, 6.• Au bruit que l'on menait Bélisaire au supplice...., ROTR. Bélis. V, 7.• Au moindre bruit qui court qu'un auteur les menace, BOILEAU Disc. au roi..• Je fus soudain frappé du bruit de son trépas, RAC. Mithr. I, 1.• Déjà de ma faveur on adore le bruit, RAC. Brit. V, 3.• Au bruit de sa marche, VERTOT Révol. rom. liv. XIV, p. 295.Le commun bruit, la voix publique.• Contraire en jugement au commun bruit de tous, RÉGNIER Sat. II.En jurisprudence, bruit public, commune renommée, qui peut tenir lieu de preuve.3° L'éclat que fait une chose dans le monde.• Tout autre que moi Au seul bruit de ton nom pourrait trembler d'effroi, CORN. Cid, II, 2.• Votre sévérité, sans produire aucun fruit, Seigneur, jusqu'à présent a fait beaucoup de bruit, CORN. Cinna, IV, 4.• Et je vous demandais quel bruit fait par la ville De Pompée et de moi l'entretien inutile, CORN. Sertor. IV, 3.• Et de votre grand nom diminuer le bruit, RAC. Mithr. III, 1.• Ils ont à soutenir le bruit de leurs exploits, RAC. Baj. I, 1.• Surtout ne craignez point qu'une aveugle douleur Remplisse l'univers du bruit de mon malheur, RAC. Bérén. I, 4.• ....Le bruit de sa fierté, RAC. Phèd. II, 1.• La beauté de Mlle Stwart commençait à faire bruit, HAMILT. Gramm. 6.• Il n'était bruit que des charmes de Mlle Jennings, HAMILT. ib. 9.• Cette nouvelle ne fait aucun bruit à Versailles, SÉV. 335.• Ce livre fait un grand bruit, SÉV. 480.• Leur conversation a fait du bruit, SÉV. 430.• Il remplit l'univers du bruit de sa sainteté, BOSSUET Hist. I, 11.• Il fait du bruit dans le monde, BOSSUET 1, Prof. 1.• Les sociniens font peu de bruit dans le monde, BOSSUET Avert. 6.• Ceci se passa avec peu de bruit sous son pontificat, PASC. Prov. 17.• Cette opinion des jansénistes qui fait tant de bruit, PASC. Prov. 1.• L'habit est propre et riche, il fera du bruit ici, MOL. M. de Pourc. I, 5.• Votre esprit fait du bruit, MOL. Fâch. II, 4.• Les peuples tremblaient au seul bruit de mon nom, FÉN. Tél. VIII.• La gloire des armes est un vain bruit, MASS. Conty..• Remplir tout l'univers du bruit de son nom, MASS. Car. Resp. humain..• Vous prévoyez que cela fera du bruit, et moi, je vous réponds qu'il y a des conjonctures où le bruit est nécessaire, BOURD. Pensées, t. II, p. 475.• C'est peu d'expérience à conduire sa vie, De mesurer son aise au compas de l'envie, Et perdre ce que l'âge a de fleur et de fruit, Pour éviter un bruit, MALH. V, 5.• ....vous le savez si c'est depuis un jour Que l'histoire fait bruit du nom de Fatencour, HAUTEROCHE Nobles de province, I, 1.• Force gens font du bruit en France ; Un équipage cavalier Fait les trois quarts de leur vaillance, LA FONT. Fabl. V, 21.Faire grand bruit de quelque chose, y attacher de l'importance, s'en prévaloir.• Nos catholiques font grand bruit de l'autorité de l'Église, J. J. ROUSS. Ém. IV.• Il a fait un grand bruit de l'amitié qu'il a pour moi, SÉV. 238.• Ces vertus dont vous faites tant de bruit, SÉV. 605.• La matière qui y est décidée, n'étant qu'un simple point de fait, est bien loin de mériter tout le bruit qu'on en veut faire, PASC. Prov. 19.• Voici une comédie dont on a fait beaucoup de bruit, MOL. Préf. du Tart..• On se résout à le laisser périr sans en faire bruit, BOSSUET Amb. 5.Le bruit, le tumulte du monde. Se retirer, vivre loin du bruit.4° Réputation.• Le fameux Amphion, quelque bruit qu'il ait eu, N'a point fait de merveille...., MALH. I, 12.• [Ils] ont acquis dans la scène un légitime bruit, ROTR. St Genest, I, 7.• C'est un petit garçon qui a bien le meilleur bruit qu'on peut imaginer, SÉV. 225.• Si je n'ai pas bon bruit, c'est à grand tort, LA FONT. Contes, 66.• Hé ! là, là, Madame la Nuit, Un peu doucement je vous prie ; Vous avez dans le monde un bruit De n'être pas si renchérie, MOL. Amph. prol..• Pour vous donner bruit de connaissance, MOL. les Préc. 10.• Des ministres aussi désintéressés que celui-là [Temple] sont bien rares ; les nôtres n'en avaient pas le bruit [d'être désintéressés], SAINT-SIMON 65, 82.• Les uns mentent pour abuser, les autres veulent acquérir bruit de sincérité, P. L. COUR. II, 187.• Gardez-moi un profond secret ; il ne faut pas que mon nom paraisse ; je n'ai pas bon bruit, VOLT. Lettr. Vernes, 2 janv. 1763.5° Tumulte, mouvement séditieux. On craint pour ce soir du bruit dans la ville.6° Querelle, éclat.• Je ferai beau bruit, MOL. le Dép. V, 9.• Je serais d'avis que vous ne fissiez point de bruit, MOL. Fourb. I, 6.• Là-dessus nous n'aurons point de bruit, MOL. Éc. des femmes, I, 1.• Mon Dieu, vous en parlez, mon frère, bien à l'aise, Et vous ne savez pas comme le bruit me pèse, MOL. F. sav. II, 9.• Je fais un grand bruit pour retrouver ce paquet, SÉV. 21.• L'époux monte et fait bruit, LA FONT. Fais..• Vous êtes bien ridicules de faire du bruit pour les propositions, PASC. Prov. 7.• La belle raison de quitter sa femme et de faire un si grand bruit !, LA FONT. Psyché, II, p. 140.7° À grand bruit, locut. adv. D'une manière bruyante.• Les cloches argentines Appelaient à grand bruit les chantres à matines, BOILEAU Lutr. IV.Fig. Avec ostentation, avec faste.• Là le chantre à grand bruit arrive et se fait place, BOILEAU Lutr. V.Chasser à grand bruit, chasser à cor et à cri avec une meute et des piqueurs.8° À petit bruit, loc. adv. Sans éclat.• Je me divertirai à petit bruit, MOL. D. Juan, V, 2.• On le garde à petit bruit, SÉV. 211.• Trop heureux de se sauver de la solitude à petit bruit, FLÉCH. II, 58.• Il appelle les mages en secret et à petit bruit, FLÉCH. Serm. I, 225.9° Sans bruit, loc. adv. Tout doucement, sans qu'on soit entendu ; et figurément, tranquillement. On le fit entrer sans bruit.• Trois quidams bonnes gens et sans bruit...., LA FONT. Orais..• Et forcez-la sans bruit d'honorer d'autres lieux...., CORN. Sert. II, 4.PROVERBESCet homme n'aime pas le bruit s'il ne le fait, se dit de quelqu'un qui prend des libertés et qui n'en veut pas permettre aux autres.Cet homme est bon cheval de trompette, il ne s'étonne pas du bruit, se dit d'un homme qui ne se déconcerte pas, ne s'effraye pas facilement.Qui a bruit de se lever matin peut dormir jusqu'au soir, c'est-à-dire celui qui a bonne réputation pourrait en abuser.L'un a le bruit, l'autre lave la laine, se dit pour exprimer que pour quelque travail l'un a la récompense et l'autre la peine.XIIe s.• Grans fu li bruiz de la gent paganie, Ronc. p. 54.XIIIe s.• Grant paour [ele] ot du vent qui menoit trop grant bruit, Berte, XXXVI.• Un si fier bruit est en la court, Et si grant foule et si grant presse, Rom. de Robert le diable.XVe s.• Et pour ce que j'oe moult de painne De moi relever à mie-nuit, Ou temps que les cers vont en bruit, FROISS. Le dit dou florin..• Et ils firent tous le mieulx qu'ils peurent ; mais ils n'en emporterent gueres de bruit, J. DE TROYES Chron. 1418.• Et ont esté ceulx qui ont donné le bruyt [renom] à ceux qui sont venus depuis [les premiers Suisses venus en France], COMM. I, 6.XVIe s.• Il emportoit le bruit par-dessus ses compagnons, MARG. Nouv. X..• Il avoit eu le bruit d'estre plutost hardi et gentil compagnon que bon chrestien, MARG. ib. XIII.• Cachez-vous en mon cabinet, et ne faites un seul bruit [le moindre bruit], MARG. ib. XXXVI.• Elle connoissoit le contraire du faux bruit que l'on donnoit aux François, car ils estoient plus sages...., MARG. ib. XIV.• Il avoit acquis un bon bruit pendant sa vie, DESPER. Contes, CXXVI.• Il avoit le bruit d'avoir esté engendré par Neptune, AMYOT Thés. 46.• Cestuy Thalès avoit bruit d'estre poëte lyrique, et prenoit le tiltre de cest art là, AMYOT Lyc. 4.• Il courut un bruit sourd qu'ilz avoient occis le roy Romulus, AMYOT Num. 3.• Ce qui plus augmenta leur gloire, et leur donna plus de bruit et de reputation, fut le renvoi qu'ilz feirent du tripié, AMYOT Solon, 7.• Et de peur que ses freres en montant ne feissent bruit, elle la [l'échelle] couvrit et fourra de laine premier que de la devaller, AMYOT Pélop. 65.• Qui a mis Hercules en bruit et renommée sempiternelle ?, RAB. Pant. V, 15.• Aussi dit on que la plus mechante roue du chariot est celle qui mene le plus grand bruit, BOUCHET Serées, l. I, p. 439, dans LACURNE SAINTE-PALAYE.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.