- veau
- (vô ; au XVIe siècle, d'après Bèze, on prononce veo, un e fermé s'entend avec o et ne fait qu'un son, on ne doit pas prononcer viau comme les Parisiens) s. m.1° Nom du petit de la vache, pendant la première année.• Et qui m'empêchera de mettre en notre étable Une vache et son veau ?, LA FONT. Fabl. VII, 10.• Le premier hiver est le temps le plus dangereux de la vie des veaux et, par conséquent, celui où ils demandent le plus de soins, GENLIS Maison rust. t. I, p. 227, dans POUGENS.Veau de lait, veau qui tète encore sa mère, dit, au XVIIe siècle, veau mongane (de l'ital. mongana, veau qui tète).Veau broutier, veau qui a commencé à manger du foin, de l'herbe.Veau de dîme, veau très gras, qui était choisi de préférence pour payer la dîme aux églises.Veaux de rivière, veaux engraissés aux environs de Rouen, dans des prairies qui bordent la Seine.• Une longe de veau de rivière longue comme cela, blanche, délicate, et qui, sous les dents, est une vraie pâte d'amande, MOL. Bourg. gent. IV, 1.• Vous êtes-vous souvenu d'aller à ce messager de Rouen savoir si ce quartier de veau de rivière, ce muid de cidre, ces pots de noix confites et ces deux témoins sont arrivés ?, DANCOURT Femme d'intr. I, 3.Veau gras, veau engraissé pour la boucherie.• Amenez aussi le veau gras, et le tuez ; mangeons et faisons bonne chère, SACI Bible, Évangile St Luc, XV, 23.Fig. Tuer le veau gras, faire un régal pour fêter le retour de quelqu'un, par allusion au veau gras tué dans l'Évangile pour le retour de l'enfant prodigue.• Il s'était dit qu'il tuerait le veau gras le jour de mon retour ; en effet son déjeuner fut splendide, REYBAUD Jér. Patur. I, 16.• Les étudiants [après avoir pris l'inscription de juillet].... n'ont rien de mieux à faire qu'à revenir dans leurs familles, où ils savent que le veau gras les attend, CH. DE BERNARD un Homme sérieux, v..Fig. et familièrement. Faire le pied de veau à quelqu'un, lui aller faire des révérences, des soumissions, lui témoigner une complaisance servile.• Si vous aviez appris à prendre le temps comme il vient, et à ne pas négliger les pieds de veau de Provence, SÉV. 17 janv. 1680.S'étendre comme un veau, faire le veau, se dit d'un homme qui se tient d'une manière nonchalante.• Tu t'amuses ainsi qu'un veau, Comme un blondin qui fait le beau, à dormir jusqu'à près d'onze heures, SCARR. Virg. VII.• Tandis que ce nigaud, comme un évêque assis, Fait le veau sur son âne, et pense être bien sage, LA FONT. Fabl. III, 1.Avoir la fièvre de veau, trembler quand on est soûl, avoir un petit frisson après le repas.Pleurer comme un veau, pleurer en poussant des sanglots.• Je serai donc mangé des soles, Cria-t-il pleurant comme un veau, Et je finirai dedans l'eau, SCARR. Virg. I.• Son pauvre mari [de la duchesse du Maine] pleurait comme un veau des reproches qu'il avait sans cesse à essuyer de ses emportements contre lui, SAINT-SIMON 518, 126.2° Veau mis en quartiers à la boucherie et qu'on y débite. Une longe de veau. Jarret de veau. Pied de veau. Côtelettes de veau.3° La chair du veau. Manger du veau.• On me donnait un perdreau ; j'eusse voulu du veau, une tourterelle, SÉV. 569.Eau de veau, eau dans laquelle on a fait bouillir, sans sel, un morceau de veau, et qu'on prend pour se rafraîchir.4° Veau d'or, idole que les Israélites se firent faire au pied du mont Sinaï, et à laquelle ils rendirent un culte, en imitation de celui du boeuf Apis en Égypte.Fig. Le veau d'or, le culte des richesses. Adorer le veau d'or.• Quand le peuple hébreu dans vos fêtes Vous voit adorer son veau d'or, BÉRANG. Vertu de Lis..Plier les genoux devant le veau d'or, faire bassement sa cour à un homme riche ou puissant, faire des bassesses pour devenir riche ou puissant.Fig. Veau d'or, homme qui n'a pas d'autre mérite que d'être riche5° Idole faite à l'imitation du veau d'or des Israélites.• Il fit [Jéroboam] deux veaux d'or, et dit au peuple : N'allez plus à l'avenir à Jérusalem ; Israël, voici vos dieux qui vous ont tiré d'Égypte, SACI Bible, Rois, III, XII, 28.• Les Druzes du mont Liban rendent un culte secret à des simulacres de boeufs ou de veaux, couverts de caractères dont la valeur n'est connue parmi eux-mêmes que des initiés, SILV. DE SACY Instit. Mém. hist. et litt. anc. t. III, p. 77.6° Cuir de veau. Des souliers de veau.• Et s'il lui plaît encor qu'on me relie en veau, RÉGNIER Sat. XII.• Il semble à trois gredins dans leur petit cerveau, Que, pour être imprimés et reliés en veau, Les voilà, dans l'État, d'importantes personnes, MOL. Femm. sav. IV, 3.• Presque toutes les reliures en veau des XVe et XVIe siècles étaient fauves.... on est toujours revenu au veau fauve, LESNÉ la Reliure, p. 118 et 119.Fig. Il se fait relier en veau, il fait des livres, il est auteur.Fig. Un vieux bouquin relié en veau, un vieillard qui fait le jeune homme (mot qui fut appliqué au duc de Richelieu, sous Louis XV).7° Fig. et familièrement. Nigaud, niais.• Ce malheur est venu de quelques jeunes veaux Qui mettent à l'encan l'honneur...., RÉGNIER Sat. IV.8° Fig. et familièrement. Brides à veaux, voy. brides.9° Veau marin, un des noms donnés au phoque commun de Buffon, dit aussi phoque veau marin.10° Coquille univalve (genre cône).Veau panaché, le cône vitulin.Veau lisse, nom donné au cône vulpin, côtes de Guinée, dit aussi renard, et qui est le cône renard de certains auteurs.11° Terme de construction. Levée qu'on fait dans une pièce de bois, pour la cintrer suivant une courbe déterminée.12° Place où le blé manque dans un champ.XIIe s.• Ne receverai de la tue maison [de ta maison] vedels ne de tes fuls [troupeaux] bues [boeufs], Liber psalm. p. 66.XIIIe s.• Un tor et une vache ensemble Qui a avec lui son veel, Ren. 5761.XVe s.• Et Dieu sçait s'elle parlera Gravement en termes nouveaulx, Afin d'estonner povres veaulx, COQUILL. Droits nouv..XVIe s.• Il ne m'a point dit s'il le veut en veau, ou couvert de veloux, DESPER. Cymbal. 74.• Nos veaux de philosophes [sots], DESPER. ib. 95.• Sacs de peau de veau pour la poudre et les boulets, D'AUB. Hist. III, 87.• Les veaux à laict, et les bouveaux et genisses, O. DE SERRES 281.• Veau mal cuit et poulets crus Font les cimetieres bossus, H. EST. Précell. 173.• Il estoit fils d'une Marrane, Comme tu es au demourant, Aussi vedel et ignorant, MAROT II, 197.• Et n'estoient que gros veaux de disme, RAB. II, 10.• Au dessus de sa teste comme en une nue y avoit une nymphe qui avoit un escriteau portant ces mots : gardez-vous de faire le veau, Sat. Mén. Tapisserie des Estats.• Celui qui, pour estre estimé un gros lourdaut, est par nous appellé veau de disme, PASQUIER Rech. VIII, p. 701, dans LACURNE.• Si cest escrimeur n'a autres armes que celles-là pour me combattre, croyez qu'il le faut envoyer en la place aux veaux, PASQUIER Lett. t. II, p. 703.Bourguign. véaa ; Berry, viau, faire le viau, se dit d'une personne qui, par sa propre faute, manque de réussir dans quelque affaire ; picard, viau, vieu ; wallon, vai, via ; provenç. vedel, vedelh ; catal. vedell ; ital. vitello ; du lat. vitellus, dimin. de vitulus, qui tient au grec veau, d'où l'Italie paraît avoir tiré son nom chez les Grecs à cause de son abondance en bêtes à cornes. C'est le sanscrit vatsa, veau et année ; d'où l'on a conjecturé que le mot signifiait proprement bête d'un an.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREVEAU.Ajoutez :Changement d'herbe réjouit les veaux, se dit pour exprimer que les changements plaisent d'ordinaire aux jeunes gens.On voit à la boucherie plus de veaux que de boeufs, c'est-à-dire il meurt plus de jeunes que de vieux.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.