- tribut
- (tri-bu ; le t ne se lie pas dans le parler ordinaire ; au pluriel, l's se lie : des tri-bu-z onéreux) s. m.1° Ce qu'un État paye ou fournit à un autre État pour marque de dépendance.• Après divers avis on résout, on conclut D'envoyer hommage et tribut [à Alexandre], LA FONT. Fabl. IV, 12.• Carthage fut obligée à payer tribut, BOSSUET Hist. I, 8.• Affranchir l'Espagne de l'infâme tribut de cent filles que son oncle Mauregat avait accordé aux Maures, BOSSUET Hist. I, 11.• Pompée.... content du tribut qu'il leur imposa.... leur laissa leur prince [aux Juifs] avec toute la juridiction, BOSSUET Hist. II, 10.• La guerre contre les Saxons avait commencé pour un tribut de trois cents chevaux et quelques vaches que Pepin avait exigé d'eux ; et cette guerre dura trente années, VOLT. Moeurs, 15.• Le souverain de la Perse osa demander un tribut au vainqueur ; Albuquerque fit apporter, devant l'envoyé, des boulets, des grenades et des sabres : voilà, leur dit-il, la monnaie des tributs que paye le roi de Portugal, RAYNAL Hist. phil. I, 14.Enfants de tribut, les enfants que le Grand Seigneur lève en certains pays par forme de tribut sur les chrétiens qui sont ses sujets.2° Impôt que lèvent les gouvernements.• Ils [les sénateurs, à Rome] déchargèrent le menu peuple de tout impôt, ajoutant que les pauvres payaient un assez grand tribut à la république, en nourrissant leurs enfants, BOSSUET Hist. III, 6.• Lorsqu'il fut question de payer le tribut à César, MASS. Carême, Aumône..• Les tributs doivent être si faciles à percevoir et si clairement établis, qu'ils ne puissent être augmentés ni diminués par ceux qui les lèvent, MONTESQ. Esp. XIII, 10.• Il n'y a point d'État où l'on ait plus besoin de tributs que dans ceux qui s'affaiblissent, MONTESQ. Rom. 18.3° Fig. Ce qu'on est obligé d'accorder, de souffrir, de faire.• L'estime et le respect sont de justes tributs Qu'aux plus fiers ennemis arrachent les vertus, CORN. Sertor. III, 2.• Ni l'or ni la grandeur ne nous rendent heureux.... Des soucis dévorants c'est l'éternel asile.... L'humble toit est exempt d'un tribut si funeste, LA FONT. Phil. et Bauc..• Tout le monde en ce pays a eu des rhumatismes, ou des fluxions sur la poitrine, choisissez.... ainsi il fallait bien payer le tribut d'une façon ou d'une autre, SÉV. 247.• Elle [Mme de Luynes] avait payé le tribut de l'humanité l'année passée par une grande maladie, et la voilà morte un an après, SÉV. 5 nov. 1684.• Quel qu'il soit, il paiera son tribut aux douleurs, DELILLE Imag. III.• À son penchant toujours il faut payer tribut, COLLIN D'HARLEV. Vieill. et jeun. gens, II, 12.Payer le tribut à la mer, se dit d'un homme qui, embarqué pour la première fois, a le mal de mer.Payer le tribut à la nature, mourir.• C'est une loi de la nature, que ce qui est mortel doit le tribut à la mort, BOSSUET 1or sermon, Assompt. de la Ste Vierge, 1.4° Dans le langage de la galanterie, hommage amoureux.• Le plus parfait objet dont je serais charmé N'aurait point mes tributs, n'en étant point aimé, MOL. Dép. am. I, 3.• Son mari [de Mme de Vins] a donc payé le tribut aux yeux de Mme D*** ; vous lui apprendrez comme il faut en être jalouse, SÉV. 30 juin 1680.• Peut-être sans colère Alliez-vous de mon coeur recevoir le tribut, RAC. Bérén. I, 4.5° Rétribution.• Je sais qu'un noble esprit peut sans honte et sans crime Tirer de son travail un tribut légitime, BOILEAU Art p. IV.• Et nos voisins frustrés de ces tributs serviles Que payait à leur art le luxe de nos villes [il s'agit de l'établissement des manufactures sous Louis XIV], BOILEAU Épît. I.6° Fig. et poétiquement. Les fleuves portent à la mer le tribut de leurs ondes, ils s'y jettent.Il ne faut pas confondre payer tribut et payer le tribut. Payer tribut, c'est être tributaire. Payer le tribut, c'est acquitter l'imposition fixée.XIe s.• E le treüd d'Espagne la grant tere, Ch. de Rol. LII.XIIe s.• E rechut de ces citez David, cume sires, servises e truud, Rois, p. 146.XIIIe s.• Il me retenoient le treü Que trestuit homme m'ont deü, la Rose, 19531.XVe s.• Si nous avions jà jusques à mille lances, nous ferions un si grand treü en Angleterre qu'il y parroit [paraîtrait] quarante ans à venir, FROISS. II, II, 220.• Jà estoit venu Bouciquaut en l'age et au temps que amour naturellement a coustume de prendre le treü et la paye de tous jeunes nobles courages, Bouciq. I, 7.XVIe s.• Il n'imposera peage ou treu, sinon du consentement des electeurs, SLEIDAN f° 17.Prov. trabug, trabus, trahut, traut, treu, et aussi tribut, trebut ; esp. et ital. tributo ; du lat. tributum, de tribuere, distribuer, qui vient de tribus, tribu, et signifie répartir par tribu.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRETRIBUT. - Ajoutez : L'e de treü, qui est l'ancienne forme, se trouve dès le VIe siècle : trebuetur, dans MONE, Mess. III, 20, 13.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.