- servile
- (sèr-vi-l') adj.1° Qui appartient à l'état d'esclave.• Philippe d'autre part, montrant sur le rivage Dans une âme servile un généreux courage, CORN. Pomp. II, 2.Guerre servile, guerre terrible qui éclata, vers la fin de la république romaine, entre les esclaves soulevés et leurs maîtres.2° Qui appartient à l'état de serf, de serviteurOeuvres serviles, celles qui ont pour objet de gagner de l'argent. L'Église catholique interdit les oeuvres serviles le dimanche.• Les hommes qui portaient les armes étaient libres, dans le sens que le seigneur supérieur ne pouvait leur commander des oeuvres serviles ; mais ils étaient indissolublement liés au service militaire de leur seigneur, LÉVESQUE Instit. Mém. sc. mor. et pol. t. V, p. 250.3° Fig.• Qui enchaîne comme fait un service.. [Soleil] Tu dois ta flamme à tout le monde ; Et ton allure vagabonde, Comme une servile action Qui dépend d'une autre puissance...., MALH. II, 4.• Et nos voisins frustrés de ces tributs serviles Que payait à leur art le luxe de nos villes, BOILEAU Ép. I.• Ce n'est plus le jouet d'une flamme servile, RAC. Andr. II, 5.• Est-il juste après tout qu'un conquérant s'abaisse Sous la servile loi de garder sa promesse ?, RAC. ib. IV, 5.• Et ce sont ces périls et ce soin de ma vie Qui d'un servile hymen feraient l'ignominie, RAC. Bajaz. II, 3.4° Qui a un caractère d'esclave, en parlant des personnes.• Pour qu'il puisse, enrichi de ces affronts utiles, Enrichir à son tour quelques têtes serviles, A. CHÉN. Élég. I, 21.S. m. S'est dit des membres des cortès espagnoles qui se montrèrent partisans de l'absolutisme en 1820.5° Qui est digne d'un esclave, bas, rampant.• Je n'ai fait action ni lâche, ni servile, ROTR. Antig. IV, 6.• Jamais il n'exigea ni de circonspection gênante ni d'assiduité servile, FLÉCH. Lamoignon..• Il n'est pas possible qu'un homme qui n'a toute sa vie que des sentiments et des inclinations basses et serviles puisse jamais rien produire qui soit merveilleux ni digne de la postérité, BOILEAU Longin, Subl. ch. 7.• Dès qu'on n'a point l'âme servile et qu'on n'est pas prêt à les flatter [les princes]...., FÉN. Tél. XIV.• Cette fierté d'âme qui dédaigne les serviles bienséances, et sied si bien à la vertu, J. J. ROUSS. Hél. IV, 9.Fig.• J'aime mieux un tilleul que la simple nature Élève sur les bords d'une onde toujours pure, Qu'un arbuste servile, un lierre tortueux Qui surmonte en rampant les chênes fastueux, BERNIS Epît. IV, Indép..Terme de théologie. Crainte servile, se dit par opposition à crainte filiale.• Une servile peur tint lieu de charité, BOILEAU Lutrin, VI.• Vous qui ne connaissez qu'une crainte servile, RAC. Athal. I, 4.6° Terme de littérature et d'arts. Qui s'attache trop à l'imitation d'un modèle, à la lettre d'un original. Imitateur, traducteur servile.• Quand j'ai publié mes propres idées, on ne m'a pas accusé d'être un disciple servile, et de jurer in verba magistri, J. J. ROUSS. Conf. VI.• Une servile admiration, BARTHÉL. Anach. ch. 71.On dit dans un sens analogue : imitation, traduction servile.Détail servile, se dit d'une énumération trop scrupuleuse.• Si on entre dans un détail servile des plus petites circonstances, que le lecteur prenne sur lui d'en essuyer le récit ; elles ont été, dans le procès, d'une grande importance, GUYOT DE PITAVAL Causes célèbres, I, 209.7° Terme de grammaire hébraïque. Lettres serviles, lettres qui servent à former avec le radical les temps des verbes et les cas des noms.Dans d'autres langues. Lettre servile, lettre qui n'appartient pas au mot en propre et n'y est que pour remplir un certain office. Dans dessaisir, composé du préfixe dé.... et saisir, la première s est une lettre servile, et n'a d'autre office que d'indiquer la prononciation et d'empêcher qu'on ne prononce l'autre s comme un z.8° S. m. Ce qui est servile.• Je commençai à soupçonner l'humeur fantasque de ce vieillard [le duc de Gesvres], à laquelle le servile surnageait toujours, SAINT-SIMON 73, 19.XIVe s.• Et doncques sont telles delettations et semblent estre serviles et bestiaulx, ORESME Éth. 94.• Et veulent à chescun plere, il sont flateurs et de servile condicion, ORESME ib. 124.• Offices de fevres et ouvriers et oeuvres serviles, BERCHEURE f° 26, verso..• Il consideroit que leur manieres n'estoient point vileinnes ne serviles, BERCHEURE f° 9.XVIe s.• La guerre servile y estoit encore en sa plus grande vigueur, AMYOT Pomp. 30.• Une simple et servile obligation à l'usance, MONT. I, 245.Provenç. et espagn. servil ; ital. servile ; du lat. servilis, de servus (voy. serf).
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.