flétrir

flétrir
flétrir 1.
(flé-trir) v. a.
   Faire perdre à une plante la couleur de vie.
   Il [le temps] flétrit les oeillets, il efface les roses, ROTR. Herc. mour. I, 3.
   Ternir. Le grand air flétrit les couleurs.
   Fig. Flétrir les lauriers, porter atteinte à la gloire.
   Et ne suis-je blanchi dans les travaux guerriers Que pour voir en un jour flétrir tant de lauriers ?, CORN. Cid, I, 4.
   Et dans ce haut éclat où tu te viens offrir, Touchant à tes lauriers, je crains de les flétrir, BOILEAU Discours au roi..
   Ces guerriers Dont l'hiver le plus terrible A seul flétri les lauriers, BÉRANG. Bon français..
   Il se dit de l'action de l'âge, des passions, des souffrances sur le visage, sur le corps. L'âge flétrit le teint, flétrit la beauté. Les chagrins ont flétri sa jeunesse.
   Et mon front, dépouillé d'un si noble avantage, Du temps qui l'a flétri laisse voir tout l'outrage, RAC. Mithr. III, 5.
   Mais l'hiver accourant d'un vol sombre et rapide Nous sèche, nous flétrit...., A. CHÉN. Élég. 33.
   Il n'était point flétri par les rides de l'âge, M. J. CHÉN. Oedipe roi, III, 4.
   Ta jeunesse sera flétrie Avant l'herbe de la prairie, Avant le pampre du coteau, MILLEVOYE Chute des feuilles..
   Abattre, ôter l'énergie, la vigueur, le courage.
   Aucun étonnement n'a leur gloire flétrie, CORN. Hor. III, 5.
   La douleur avait flétri son coeur, FÉN. Tél. XXI.
   La peine qu'il avait à flétrir la gloire de ses grandes actions et de ses anciens trophées par une si honteuse démarche, ROLLIN Hist. anc. t. III, p. 351, dans POUGENS.
   Nos tyrans ont flétri ton âme magnanime, VOLT. Alz. II, 4.
   Se flétrir, v. réfl. Devenir flétri. Les fleurs se flétrissent du matin au soir. Sa beauté commence à se flétrir.
   Son teint se flétrit comme une fleur que la main d'une nymphe a cueillie, FÉN. Tél. XX..
   Il se dit, en chirurgie, d'une partie, d'une tumeur, d'une végétation qui perd sa vitalité et devient flasque. La tumeur fut liée à son pédicule et se flétrit.
   XIIe s.
   Il est si de els cume del fain [foin] del champ e cume des herbes ki sur maisuns creissent, ki flaitrissent devant ço [ce] que viengent à maürted, Rois, p. 414.
   Mais l'une de ses faces comença à festrir, Si que dedens la bouche tres qu'as denz lui pourri, Th le mart. 94.
   XIIIe s.
   Lor roses flestir, la Rose 7670.
   Car quant vostre rose iert [sera] flestrie, ib. 14747.
   XVIe s.
   L'homme est cadue et fragile, et semblable à une fleur fletrissante, CALVIN Instit. 91.
   L'ame de l'homme sieche et fletrit, CALVIN ib..
   Au second appareil se trouva la partie fletrie, et la tumeur presque toute resolue, PARÉ VI, 3.
   Mais ainsi qu'un bouquet se flestrit en un jour, J'ay peur qu'un mesme jour flestrisse votre amour, RONSARD 292.
   Berry, flâtrir. D'après Diez, de l'ancien adjectif flaistre, flestre, fané, qu'il rattache sans hésitation à une forme flaccaster, dérivée du latin flaccere, être flasque.
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flétrir 2.
(flé-trir) v. a.
   Marquer une personne d'un fer chaud en punition d'un crime.
   Celui qui aura dérobé des cordages, ferrailles et ustensiles des vaisseaux étant dans les ports, sera flétri d'un fer chaud portant la figure d'une ancre, Ordonn. maritime, IV, titre I, art. 16, dans RICHELET.
   Frapper d'une condamnation déshonorante.
   Aussi Rome a-t-elle flétri par décret exprès cet écrit [le Moyen court] du père Falconi, BOSSUET Ét. d'orais. I, 19.
   Il serait contre la raison que la loi flétrît dans les enfants ce qu'elle a approuvé dans le père, MONTESQ. Espr. XXIII, 5.
   Obscur, on l'eût flétri d'une mort légitime ; Il est puissant, les lois ont ignoré son crime, GILBERT Mon apologie..
   Absolument.
   Il n'y aurait de flétri que le juge qui l'a condamnée [la famille Sirven] ; car ce n'est pas pouvoir qui flétrit, c'est le public, VOLT. Pol. et législ. Lettre de l'auteur à M. Élie de Beaumont..
   Fig. Diffamer, déshonorer, traiter comme infâme.
   On aura de grands ménagements pour ne pas flétrir un archevêque, BOSSUET Lett. quiét. 166.
   Comme si la sagesse ne demandait pas d'autre examen, lorsqu'il s'agit de flétrir votre frère et de l'outrager, BOURDAL. Exhort. faux témoign. contre J. C. t. II, p. 10.
   Les flatteurs qui ont loué le vice, les critiques malins qui ont tâché de flétrir la vertu, FÉN. Tél. XVIII.
   Son supplice vous venge et ne vous flétrit pas, VOLT. Tancr. II, 4.
   Se flétrir v. réfl. Se déshonorer.
   Mais loin de me flétrir par un assassinat, Je lui dirai : Montfort, je t'appelle au combat, C. DELAV. Vêpres sicil. IV, 5.
   XIVe s.
   Estre mis ou pillory et flastris d'un fer chaud, Bibl. des ch. 2e série, t. III, p. 424.
   Tant fu sourprise, au cuer, d'amour qui la maistrie [maîtrise], La veüe li tourble, si fut toute esbleuie ; Quant descendre cuida, à terre chiet [tombe] flastrie, Baud. de Seb. II, 911.
   Origine germanique : angl. flat, plat ; danois, flad ; anc. scandinave, fletia, rendre plat. Le sens propre est jeter à plat, comme on le voit dans l'exemple de Baudouin de Sebourg ; d'où frapper à plat, marquer d'un fer chaud. Pour marquer d'un fer chaud, quelque apparence qu'on puisse trouver à admettre que flétrir, marquer, est flétrir, faner, pris figurément, néanmoins on ne peut pas écarter flastrir, qui est la forme la plus ancienne de flétrir, marquer, tandis que, dans l'historique de flétrir, faner, la forme flastrir ne se montre pas. À l'origine, on ne pouvait guère se servir, pour cette punition, d'une métaphore tirée de l'herbe qui se flétrit.
   On disait flatir dans un sens analogue : L'on me devroit flatir ou vis Une vessie de mouton, la Rose, 8526.
Au reste il a été facile, à l'aide de la métaphore, de confondre flastrir et flestrir. Comparez en outre flâter
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
2. FLÉTRIR. - HIST. Ajoutez :
   XVIe s.
   Lacedemone, où les jeunes enfans estoyent flaistris [battus] si rigoureusement par le grand maistre de la jeunesse, qu'ils rendoyent quelquefois l'esprit sur l'autel de Diane, pendant qu'on les fessoit, BODIN Republique, III, 7.

Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. . 1872-1877.

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  • flétrir — 1. flétrir [ fletrir ] v. tr. <conjug. : 2> • fleistrir XIIe; de l a. fr. flaistre, flestre « flasque », lat. flaccidus « flasque », de flaccus 1 ♦ Faire perdre sa forme naturelle, son port et ses couleurs à (une plante) en privant d eau. ⇒ …   Encyclopédie Universelle

  • FLÉTRIR — v. a. Faner entièrement, ternir, ôter la couleur, la vivacité, la fraîcheur. Le vent de bise, le hâle flétrit les fleurs. Le grand air flétrit les couleurs. Le temps, l âge flétrit le teint, flétrit la beauté. Fig., Flétrir les lauriers d un… …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 7eme edition (1835)

  • FLÉTRIR — v. tr. Décolorer, faner entièrement, en parlant de Fleurs, de feuillages. Le vent de bise flétrit les fleurs. Les roses se flétrissent. Par analogie, il se dit de Certaines parties du corps humain. Avoir la peau, le visage, les yeux flétris. Il… …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 8eme edition (1935)

  • flétrir — vt. => Dessécher, Faner …   Dictionnaire Français-Savoyard

  • étrir — flétrir pétrir …   Dictionnaire des rimes

  • faner — [ fane ] v. tr. <conjug. : 1> • v. 1360; fener XIIe; lat. pop. fenare, de fenum « foin » I ♦ Retourner (un végétal fauché) pour faire sécher. Faner de l herbe, de la luzerne à la fourche, avec une faneuse. Absolt Faire les foins. « les prés …   Encyclopédie Universelle

  • flétrissure — 1. flétrissure [ fletrisyr ] n. f. • XVe; de 1. flétrir 1 ♦ État d une plante flétrie. 2 ♦ Littér. Altération de la fraîcheur, de l éclat (du teint, de la beauté). Les flétrissures de l âge. ⇒ flétrissement. ♢ Fig. « un chant si pathétique et si… …   Encyclopédie Universelle

  • immarcescible — [ i(m)marsesibl ] adj. VAR. immarcessible • 1482; bas lat. immarcescibilis, de marcescere « se flétrir » ♦ Bot. Didact. Qui ne peut se flétrir. Fig. Gloire immarcescible. « La jeunesse plus forte que le temps, la jeunesse immarcessible » (F.… …   Encyclopédie Universelle

  • friper — [ fripe ] v. tr. <conjug. : 1> • 1534; de fripe, var. dial. a. fr. frepe (XIIIe) « guenilles » ♦ Défraîchir en chiffonnant, en froissant. Friper ses vêtements. Une vieille lettre fripée. Pronom. « Les œuvres exquises des artistes couturiers …   Encyclopédie Universelle

  • flétrissement — [ fletrismɑ̃ ] n. m. • 1912; de 1. flétrir 1 ♦ Maladie (des plantes) par laquelle le végétal se flétrit. Flétrissement bactérien de la pomme de terre. 2 ♦ Littér. Fait de perdre sa jeunesse. Le flétrissement de la peau. Sa figure « était comme… …   Encyclopédie Universelle

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