fief

fief
(fièf) s. m.
   Terme de féodalité. Domaine noble, relevant du seigneur d'un autre domaine, concédé sous condition de foi et hommage et assujetti à certains services et à certaines redevances.
   Les biens réservés pour les leudes furent appelés des biens fiscaux, des bénéfices, des honneurs, des fiefs, dans les divers auteurs et dans les divers temps, MONTESQ. Esp. XXX, 16.
   Ceux qui ont écrit le livre des fiefs nous apprennent que d'abord les seigneurs purent les ôter à leur volonté ; qu'ensuite ils les assurèrent pour un an, et après les donnèrent pour la vie, MONTESQ. ib..
   Celui qui avait le fief avait aussi la justice, qui ne s'exerçait que par des compositions aux parents et des profits au seigneur, MONTESQ. ib. 20.
   Je ne puis douter que dès ce temps-là [le temps des maires du palais] la plupart des fiefs n'eussent été rendus héréditaires, MONTESQ. ib. XXXI, 7.
   L'hérédité des fiefs et l'établissement général des arrière-fiefs éteignirent le gouvernement politique et formèrent le gouvernement féodal ; au lieu de cette multitude innombrable de vassaux que les rois avaient eus, ils n'en eurent plus que quelques-uns dont les autres dépendirent, MONTESQ. ib. 32.
   Fig.
   D'ailleurs, si par les biens on prise les personnes, Le théâtre est un fief dont les rentes sont bonnes, CORN. l'Illus. com. V, 5.
   Fief servant, se disait d'un fief quelconque pour en indiquer la dépendance à l'égard de celui dont il relevait et qu'on nommait fief dominant.
   On disait dans le même sens : fief mouvant d'un autre fief.
   Fief de dignité, celui auquel était attaché, un titre, comme un duché, un comté.
   Franc-fief, fief possédé par un roturier, avec concession et dispense du roi, contre la règle qui ne permettait pas aux roturiers de tenir des fiefs.
   Droits de francs-fiefs, taxe de francs-fiefs, droit domanial qui se levait de temps en temps sur les roturiers, possesseurs de terres nobles.
   Lui dire de songer à faire payer les francs-fiefs dans son gouvernement, SÉV. 244.
   Arrière-fief, fief mouvant d'un autre fief.
   De son domaine faire son fief, donner en fief une partie de son domaine.
   Fief suzerain, fief qui ne relevait de personne ou qui ne relevait que de la couronne.
   Fief de corps ou fief lige, celui dont le vassal était tenu par l'hommage lige.
   Fief pairie, fief auquel la dignité de pair était attachée. On disait dans le même sens : les grands fiefs.
   Il s'est dit aussi de certaines propriétés, autres que les domaines et possédées de la même manière que les fiefs. Le droit de chasse, les essaims d'abeilles pouvaient devenir fiefs.
   XIe s.
   Le seignur en ki fiu [dans le fief duquel] il maindra, Lois de Guill. 3.
   Teres et fiez, tant com vos en vuldrez, Ch. de Rol. v.
   À lui lais-je mes honors et mes fieus, ib. XXIII.
   Et à mei [qu'il] vienne reconoistre son feu, ib. CLXXXIX.
   XIIe s.
   E quant en barunie de lui granz fius tenez, Jugement en sa curt e dreit i sufferrez, Th. le mart. 45.
   XIIIe s.
   Li vileins dit par repruvier, Qu'amur de seignur n'est pas fieuz, MARIE Éliduc..
   Li per furent sage et jugerent par droit que li rois Phelippes pooit et devoit le fief saisir, que li rois Jehans devoit tenir de lui, Chr. de Rains, p. 133.
   Il sont aucun fief c'on apele fiés abregiés [fiefs dans lesquels il est dû des services limités], BEAUMANOIR XXVIII, 7.
   Tuit li home de la conté, qui tienent de fief, ont en lor fiés hautes justices et basses, BEAUMANOIR LVIII, 1.
   S'eles [les femmes] tienent fief, eles doivent cel meisme service que uns hons devroit, BEAUMANOIR XXIX, 19.
   Se hons de poesté maint en franc fief, il est demenés comme gentix hons, BEAUMANOIR XXX, 44.
   Et le conte de Champaingne vendi au roy parmi [pour] quarante mil livres les fiez ci après nommés, JOINV. 204.
   XVe s.
   Si lui donna le jeune roi quatre cents marcs d'esterlins de rente heritablement, à tenir de lui en fief, et à payer chacun an en la ville de Bruges [Édouard III à Jean de Hainaut], FROISS. I, I, 27.
   XVIe s.
   Il lui respondit que ouy, en arriere-fief ; mais qu'en proche fief, il tenoit de M. de Vielleville, CARLOIX V, 30.
   En fiefs abonnés [dont les droits casuels sont remplacés par une rente ou redevance annuelle] vendus, ne sont dus quints ni requints, LOYSEL 574.
   Les droits dus par le vassal à son seigneur se paient selon la coustume du fief servant ; mais la foi et hommage se doivent faire en la forme du fief dominant, LOYSEL 594.
   En fief de danger, le vassal qui s'en met en jouissance sans le congé de son seigneur, perd son fief, et c'est pour cela qu'il est dit fief de danger, LOYSEL 646.
   Qui fief nie ou fief rogne, fief perd, LAURIÈRE Gloss. du droit fr..
   Provenç. feu, fieu ; espagn. et portug. feudo ; ital. fio, feudo ; bas-lat. feudum, feodum ; du germanique : lombard, fader-fium, bien paternel ; anglo-sax. feoh, bétail ; anc. haut allem. fihu, fehu, troupeau ; goth. faihu, biens, avoir ; anc. frison, fia, troupeau et avoir ; allem. mod. Vieh, bétail (comp. le latin pecus, et voy. pécore). Feudum, feodum est formé de l'allemand avec l'épenthèse d'un d servant à la prononciation, et venant probablement de la transformation de l'h ; ce d est passé dans féodal, féodalité, feudataire, feudiste. Le sens primitif de fief est donc biens, avoir ; sens déterminé ensuite par l'usage à signifier une espèce particulière de possession.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
FIEF.
   Ajoutez :
   Fig.
   Le théâtre est un fief dont les rentes sont bonnes, CORN. Illus. V, 5.
   Plain fief, s'est dit pour fief direct.
   Quant au fief de la Motteprevoy, dont ledit sieur de la Chesnaux vous a parlé.... il est sans doute consolidé à sa dite terre et est devenu un plain-fief au lieu d'un arrière-fief, Lettres, etc. de Colbert, VII, p. 7.

Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. . 1872-1877.

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