- exprimer
- (èk-spri-mé) v. a.1° Extraire la liqueur de certaines choses en les pressant.• Il est des végétaux d'où l'art sait exprimer Quelques sucs bienfaisants...., DUCIS Lear, IV, 5.• Au doux murmure de leurs ondes [des fontaines], Exprimez vos grappes fécondes, Où rougit l'heureuse liqueur, LAMART. Méd. II, 4.Fig.• Qu'importe à des malheureux dont on exprime la sueur, d'avoir pour oppresseurs les Romains ou les Perses ?, MARMONTEL Bélis. ch. XI.2° Rendre par les paroles.• Qui cependant pourrait exprimer ses justes douleurs ? qui pourrait raconter ses plaintes ?, BOSSUET Reine d'Anglet..• Mais, pour bien exprimer ces caprices heureux [de l'élégie], C'est peu d'être poëte, il faut être amoureux, BOILEAU Art p. II.• Qui pourrait cependant t'exprimer les cabales Que formait en ce lieu ce peuple de rivales ?, RAC. Esth. I, 1.• Que ne puis-je t'exprimer ce que je sens si bien ! et comment sens-je si bien ce que je ne puis t'exprimer ?, MONTESQ. Lett. pers. 7.Énoncer en termes exprès. Il faut exprimer cela dans le contrat.3° Représenter par le style, le dessin ou la musique.• L'antiquité nous parle de l'écume d'un cheval qu'une éponge jetée par dépit sur un tableau exprima parfaitement, CORN. Clit. Préf..• Que diriez-vous de celui qui, sans exprimer ni traits ni taille, voudrait peindre une figure humaine, avec un voile pour vêtement ? n'aurait-on pas droit de lui demander où est l'homme ?, J. J. ROUSS. Hél. 2e préf..Fig. Reproduire.• Dans tout le cours de sa vie, elle a exprimé ce parfait original [la femme forte décrite par David] par sa générosité naturelle, par le bon usage des biens et de la faveur...., FLÉCH. Mme de Mont..• Le dessein de Dieu a été de leur proposer, dans la personne de Marie, une image sensible et vivante dont ils étudiassent tous les traits pour les exprimer en eux et se les appliquer, BOURD. Instr. pour l'oct. de l'Ascension, § III, 1.4° Manifester, faire connaître. Exprimer sa douleur par des larmes.• Il semblait que chaque peuple eût une manière particulière d'exprimer sa pudeur, MONTESQ. Gnide, 3.5° S'exprimer, v. réfl. Être tiré par expression.• Le suc qui le nourrit [l'animal] est longtemps à s'exprimer [des aliments], BOSSUET Conn. de Dieu, II, 10.• De la même sorte que le vin et l'huile s'expriment du raisin et de l'olive pressée, BOSSUET ib..6° Se faire comprendre par la parole. S'exprimer en bons termes.• Des êtres si singulièrement constitués doivent nécessairement s'exprimer autrement que les hommes ordinaires, J. J. ROUSS. Dialogues, I.• D'autres s'exprimeront, l'homme seul sait parler, DELILLE Trois règnes, VIII.• Il a peu d'esprit, quoiqu'il sache s'exprimer avec assez de grâce et d'aisance, GENLIS Ad. et Théod. t. I, lett. 37, p. 334, dans POUGENS.Rendre sa pensée.• Nous jugeons naturellement de la peine qu'un écrivain a eue à s'exprimer par celle que nous avons à l'entendre, CONDILLAC Art de penser, II, 7.Être exprimé.• Seigneur, la vérité doit ici s'exprimer, CORN. Cinna, V, 3.• Ses discours me font voir du respect, de l'estime Et même quelque amour, sans que le nom s'exprime, CORN. Att. II, 1.XIVe s.• Les quiex [lesquels] dons et ordenances nous voulons estre tenu pour exprimez en ces presentes, Bibl. des Chartes, 5e série, t. I, p. 80.XVIe s.• J'en oy qui s'excusent de ne se pouvoir exprimer, MONT. I, 188.• ....Faicts d'un limon laicteux exprimé par la chaleur de la terre, MONT. II, 310.• La figure de la langue est triangulaire, plus grosse et mieux exprimée [prononcée] en sa base, qu'en sa pointe, PARÉ IV, 12.Provenç. exprimar, espremer, exprimir ; espagn. exprimir ; ital. esprimere ; du latin exprimere, de ex, et premere, presser (voy. pression). Exprimer a été fait par calque du latin exprimere ; la forme ancienne est espreindre (voy. épreindre). Il y avait aussi un verbe expresser. D'après Palsgrave, p. 9, au XVIe siècle, exprimer se prononçait euzprimer.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREEXPRIMER. - HIST. XIVe s. Ajoutez :• Comme il est en ses dittes lettres contenut et exprimet de mot à mot, CAFFIAUX Régence d'Aubert de Bavière, p. 84.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.