- embarrasser
- (an-ba-ra-sé) v. a.1° Obstruer par un embarras. Ces voitures, ces pierres embarrassent la rue. Ces moulins embarrassent le cours de la rivière.S'embarrasser, embarrasser à soi. Il s'embarrassa les jambes dans des cordes.Fig.• Il est certains esprits dont les sombres pensées Sont d'un nuage épais toujours embarrassées, BOILEAU Art p. I.2° Empêcher la liberté du mouvement. Votre manteau vous embarrasse, ôtez-le.• Il eut à combattre un grand nombre de nations qui embarrassaient la navigation avec leurs canots, et qui, du rivage, l'accablaient de flèches, RAYNAL Hist. phil. IX, 11.• Son fils, ce faible enfant qu'il porte entre ses bras, D'un cher et doux obstacle embarrasse ses pas, DUCIS Oscar, III, 5.3° Entortiller. On embarrasse le boeuf dans une corde.• Dans ce piége sanglant je veux l'embarrasser, VOLT. Catil. I, 2.4° Mettre dans l'embarras, dans l'incertitude, dans l'hésitation.• Oui, mais de cette nuit la suite m'embarrasse, CORN. Sert. I, 1.• Ce n'est pas en effet ce qui plus m'embarrasse, CORN. ib. V, 2.• Vous croyez nous embarrasser par cette demande, BOSSUET Rép..• Modérez des bontés dont l'excès m'embarrasse, RAC. Phèd. I, 2.• Un reproche secret embarrasse mon âme, RAC. Esth. II, 5.• Quel prodige nouveau me trouble et m'embarrasse ?, RAC. Ath. II, 7.Absolument.• Le passé fait trembler, l'avenir embarrasse, BOURSAULT Ésope à la cour, III, 3.• L'intention qu'on suppose embarrasse souvent plus que la vérité, Mme DE GENLIS Théd. d'éduc. le Portrait, I, 3.5° Embarrasser une question, une affaire, la compliquer, l'embrouiller, y faire naître des difficultés.• Puisque M. Jurieu, pour embarrasser la matière, veut nous parler du divorce, ayons la patience de l'entendre, BOSSUET Var. 4e avertiss. § 6.6° S'embarrasser, v. réfl. S'entortiller, s'empêtrer.• Le roi, qui était en bottes, selon sa coutume, s'embarrassa dans ses éperons et tomba, VOLT. Charles XII, 6.• Sa tête et ses cornes s'embarrassent dans les festons de pampres, Mme DE GENLIS Veillées du chât. t. I, p. 474, dans POUGENS.Fig.• Je m'embarrasse en mes pensées, RÉGNIER Épit. III.• Comme en sa propre fourbe un menteur s'embarrasse, CORN. Ment. V, 7.• Ces personnages épisodiques [d'une pièce de théâtre] doivent s'embarrasser si bien avec les premiers, qu'une seule intrigue brouille les uns et les autres, CORN. Premier disc..• Et pour vos intérêts, que je voulais laisser, En de nouveaux périls [je] viens de m'embarrasser, MOL. l'Étour. II, 1.S'embarrasser dans ses discours, perdre la suite de ce qu'on dit.Sa langue s'embarrasse, il ne fait que balbutier.Son esprit s'embarrasse, ses idées se troublent.• De plus en plus cet esprit s'embarrasse, MAIR. Sophon. III, 4.7° Se causer une gêne à soi-même.• L'âme, qui s'est éloignée de la source de son être, ne connaît plus ce qu'elle est ; elle s'est embarrassée, dit saint Augustin, dans toutes les choses qu'elle aime, BOSSUET la Vallière..• Quant aux soldats, plusieurs s'étant embarrassés des fruits de leur pillage, devinrent moins lestes, moins insouciants, SÉGUR Hist. de Napol. VIII, 8.Se causer une gêne réciproque.• Ils s'embarrassent les uns les autres dans cette confusion, FÉN. Tél. XVI.8° Devenir interdit. à la première question, il s'embarrasse.9° Prendre souci de.• Il ne fallait pas s'embarrasser de leurs fantaisies, HAMILT. Gramm. 7.• Il ne s'embarrassait point de mes chagrins, FÉN Tél. XIII.• De quel frivole soin mon esprit s'embarrasse ?, RAC. Iphig. IV, 8.S'embarrasser de tout, se faire une grande affaire des moindres choses.C'est un homme qui ne s'embarrasse de rien, c'est-à-dire rien ne lui donne de l'inquiétude, du souci.Dans une formule de politesse, s'embarrasser de quelqu'un, se charger de lui.• Est-ce que vous voulez vous embarrasser de moi ? Et si d'une offre en l'air votre âme encor frappée, Veut bien s'embarrasser de rebut de Pompée, CORN. Sert. IV, 2.10° Terme de médecine. La tête, la poitrine s'embarrasse, se dit d'un malade dont les idées se troublent, qui ressent de l'oppression.• Sur les six heures du soir, sa tête s'est embarrassée, et insensiblement il est tombé dans le délire le plus effrayant, Mme DE GENLIS Adèle et Théod. t. III, lett. 67, p. 494, dans POUGENS..XVIe s.• Le pauvre homme embarrassé respondit...., MONT. I, 39.• Le pont estant embarrassé du bagage qu'on faisoit retirer dans la ville, les fuyans ne se pouvoient sauver, LANOUE 600.• La raison se perd, s'embarrasse et s'entrave, tournoyant dans cette mer ondoyante des opinions humaines, MONT. II, 156.Embarras ; espagn. embarazar.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.