- démentir
- (dé-man-tir), je démens, tu démens, il dément, nous démentons, vous démentez, ils démentent ; je démentais ; je démentis ; je démentirai ; je démentirais ; démens, qu'il démente, démentons, démentez, qu'ils démentent ; que je démente, que nous démentions ; que je démentisse ; démentant ; démenti, v. a.1° Dire à quelqu'un ou de quelqu'un, qu'il n'a pas dit vrai.• À quoi bon se montrer et, comme un étourdi, Me venir démentir de tout ce que je di ?, MOL. l'Étour. I, 5.• Mon coeur ne prétend pas, seigneur, vous démentir ; Et je vous en croirai sur un simple soupir, RAC. Bérén. II, 4.• Vous le craignez ; osez l'accuser la première Du crime dont il peut vous charger aujourd'hui ; Qui vous démentira ? tout parle contre lui, RAC. Phèd. III, 3.• Josèphe voulut joindre à ses Antiquités l'histoire de sa vie, durant qu'il y avait encore plusieurs personnes qui pouvaient le démentir, s'il s'éloignait de la vérité, ROLLIN Hist. anc. t. XII, liv. XXV, ch. 2, art. 1, § 2.• Sans cesse à l'excuser mon coeur ingénieux Trouvait quelque plaisir à démentir les dieux, DUCIS Hamlet, II, 5.Ne pas croire, ne pas ajouter foi.• Lequel croire, Exupère, et lequel démentir ?, CORN. Héracl. IV, 4.Protester contre la conduite de quelqu'un.• Il courut démentir une mère infidèle, RAC. Mithr. II, 3.Par extension, être la preuve que la vérité n'a pas été dite.• Son livre en paraissant dément tous les flatteurs, BOILEAU Sat. IX..2° Nier la vérité, l'exactitude de quelque chose.• Démentir un acte, PATRU Plaidoyer 4, dans RICHELET.• Eût-elle démenti ce billet de Maurice ?, CORN. Héracl. IV, 1.• Vous ne pouvez démentir l'Écriture sainte ni les conciles, PASC. Prov. 5.• Démentez donc, seigneur, ce bruit injurieux, RAC. Alex. II, 4.• Tiens, perfide, regarde, et démens cet écrit, RAC. Baj. V, 4.• Et bientôt, démentant le faux bruit de sa mort, Mithridate lui-même arrive dans le port, RAC. Mithr. I, 4.Démentir sa promesse, ne pas la tenir.Fig.• Si tu démens tes yeux, croiras-tu mon suffrage ?, CORN. Perthar. III, 4.3° N'être pas conforme à, ne pas confirmer. C'est une chose que l'expérience dément tous les jours.• Ta mine ne dément point le lieu [la race] d'où j'apprends que tu es sorti, VAUGEL. Q. C. liv. IV, dans RICHELET.• Beaucoup d'événements ont démenti leurs causes, ROTR. Antig. I, 2.• Et ne voyais-tu pas dans mes emportements Que mon coeur démentait ma bouche à tous moments ?, RAC. Androm. V, 3.• Votre intention dément vos paroles, BOSSUET Char. frat. 3.• L'événement n'a point démenti mon attente, RAC. Mithr. V, 1.• Ses sentiments ne démentaient pas ses oeuvres publiques, MASS. Or. fun. Madame..• Son caractère ne démentait point sa physionomie, J. J. ROUSS. Confess. III.• Ce qui se passait au Louvre ne démentait pas les fureurs de la ville, ANQUET. Ligue, II, p. 43.4° Faire des choses indignes de.• Tu m'as fait démentir l'honneur de ma naissance, CORN. Cinna, IV, 6.• Et je démens pour vous la voix de la nature, CORN. D. San. V, 5.• Je ne puis démentir cette horreur magnanime Qu'en recevant le jour je conçus pour le crime, CORN. Tite et Bérén. II, 1.• Incapable de démentir les maximes de ses premiers rois, BOSSUET Hist. III, 3.• Au lieu de dire comme on dit communément : cet homme dément sa foi, je dirais presque : cet homme n'a plus absolument de foi, BOURD. 3e dim. après l'Épiph. Dominic..• Il dément ses exploits et les rend superflus, RAC. Androm. III, 8.• Vous voulez que le roi s'abaisse et s'humilie ? Qu'il démente en un jour tout le cours sa vie ?, RAC. Mithr. III, 1.Par antiphrase, en parlant des choses mauvaises, odieuses.• Oui vous êtes du sang d'Atrée et de Thyeste ; Vous ne démentez pas une race funeste, RAC. Iphig. IV, 4.• Je n'ai point de son sang démenti l'origine, RAC. Phèd. IV, 2.5° Être rebelle à.• Soit que je n'ose encor démentir le pouvoir De ces yeux où j'ai lu si longtemps mon devoir, RAC. Brit. II, 2.6° Se démentir, v. réfl. Se donner un démenti, en parlant de deux personnes. Ils se sont démentis l'un l'autre.7° Se démentir, se contredire. Il se dément lui-même à tout propos.Manquer à sa promesse. Vous nous avez promis votre appui ; n'allez pas vous démentir.Être démenti.• Ce qu'il dit se dément soi-même, BOSSUET Préf..8° N'être pas conséquent avec soi-même, s'écarter de son caractère ; être en contradiction avec ses principes.• Tu te démens bientôt de tes bons sentiments, MOL. Sgan. 23.• Notre personnage ne se dément point, SÉV. 328.• Non, tu ne te démens point, dit monsieur le prince, en l'ayant encore embrassé, HAMILT. Gramm. 5.• Titus n'a point pour moi paru se démentir, RAC. Bérén. I, 3.• Et je sens qu'à l'instant, prompte à me démentir, Je fais des voeux secrets pour n'en jamais sortir, VOLT. Zaïre, V, 3.Il se dit des choses qui cessent d'être ce qu'elles étaient. Ses bontés pour moi ne se sont jamais démenties. Les caractères des personnages d'Homère ne se démentent jamais.• À considérer cette courtoisie si exacte et qui ne s'est jamais démentie, VOIT. Lett. 3.• Que jusque-là ma gloire ose se démentir !, CORN. Poly. III, 5.• Sa vertu jusqu'au bout ne s'est point démentie, CORN. Héracl. III, 3.• L'innocence qui ne s'est jamais démentie, BOSSUET 1, Nativ. 1.• Tout se soutient dans cet homme, rien encore ne se dément dans cette grandeur qu'il a acquise, dont il ne doit rien, qu'il a payée, LA BRUY. VI.• Une foi qui se dément dans les oeuvres, MASS. Av. Disp..• Cette fierté qu'en nous soutient la modestie, Dans mon coeur à ce point ne s'est point démentie, VOLT. Zaïre, I, 1.• Mais je connais le sort, il peut se démentir, VOLT. Mérope, I, 4.9° Terme de manége. Se démentir, se relâcher, changer, en parlant du cheval.10° Terme de construction. Ne pas garder sa solidité, son arrangement. Ce bâtiment commence à se démentir. Cette cloison se dément.Fig. par extension. Je me les représente tous ces globes qui sont en marche ; ils ne s'embarrassent point l'un l'autre.• ils ne se choquent point, ils ne se dérangent point : si le plus petit d'eux venait à se démentir et à rencontrer la terre, que deviendrait la terre ?, LA BRUY. XVI.XIe s.• Deus me confonde, se la geste [récit] [j'] en dement, Ch. de Rol. LXI.• [Rien n'empêchera] Au brant d'acier que je ne l'en desmente, ib. CCLXXVI.• S'or a [s'il a maintenant] parent [qui] m'en veuille desmentir, ib. CCLXXIX.XIIe s.• E serement en fist, ne s'en puet dementir, Th. le mart. 40.XIIIe s.• Mais la tour estoit si bonne qu'onques ne se dementi, Chron. de Rains, 184.• Rogel, trop estes alentiz ; Par vos ai sovent desmentiz Toz les vilains qui me disoient...., Ren. 15360.• Et se celui que l'on appelle ensi s'en viaut [veut] aerdre à celui qui l'a apelé de son cors contre le sien, il le deit maintenant desmentir, et offrir sei à defendre de son cors contre le sien, Ass. de Jér. I, 156.• Il me dit que je me gardasse que je me desmentisse, ne ne desdeisse nullui de ce que il diroit devant moi, JOINV. 194.XVe s.• Et se monteplierent les paroles entre eux deux, tant que ils se desmentirent, FROISS. II, II, 221.XVIe s.• Celuy est fol qui d'aymer se demente, Et n'ay pas peur qu'un saige m'en desmente, J. MAROT V, 268.• Le roy en fut fort courroucé, comme se sentant desmenty, AMYOT Artax. 19.• Nature ne se desment pas en cela de sa generale police, MONT. I, 105.• Qu'on face, dict Horace, perdre à son ouvrage toutes ses coustures et mesures, il ne se desmentira point pour cela, MONT. I, 90.• Nous sommes advertis que le massif se desment quand nous voyons fendiller l'enduict et la crouste de nos parois, MONT. I, 338.• Amyot ne luy a rien presté qui le desmente ou qui le desdie, MONT. II, 41.• Il n'est piece du monde qui desmente son facteur, MONT. II, 148.• De la teste nous advouons, desadvouons, desmentons, bienveignons...., MONT. II, 159.• Pour peu que nostre raison se desmente du sentier ordinaire, MONT. II, 256.• On les veoit le desmentir et l'injurier, MONT. III, 79.• Il fut ouy un horrible tonnerre avec un esclat bruyant, tout ainsi que les grosses artilleries, dont plusieurs maisons se desmentirent, PARÉ Monstres, app. 5.Dé.... préfixe, et mentir ; provenç. et espagn. desmentir ; ital. smentire. Du sens propre, démentir, dans la langue ancienne et dans des significations techniques, a passé à l'acception de choses qui, ne gardant pas leur solidité, se démentent pour ainsi dire.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.