- débaucher
- (dé-bô-ché) v. a.1° Jeter dans la débauche. Les mauvaises compagnies l'ont débauché.2° Détourner une femme, un mari de ses devoirs, une femme libre, fille ou veuve, de la bonne conduite.• Photin dont il avait débauché la femme, BOSSUET Hist. I, 11.• Si un maître débauche la femme de son esclave, ceux-ci sont tous deux libres, MONTESQ. Esp. XV, 12.• Je n'ai débauché le mari d'aucune femme, je n'ai jamais attiré dans mes filets aucun jeune homme, RAYNAL Hist. phil. XVII, 21.Se dit aussi d'une personne qui, détachant d'un commerce de galanterie une autre personne, l'attire à soi.• Il venait de lui débaucher la comédienne, HAMILT. Gramm. XI.• Tu m'as débauché de Timante, BRUEYS Muet, I, 7.3° Détourner d'un travail, d'une occupation. Débaucher un ouvrier, un domestique.• Il y a quelque autre chose qui vous débauche tous de mon service, VAUGEL. Q. C. 558.• Cela n'est ni beau ni honnête de nous débaucher nos laquais, MOL. Préc. 16.• Faisons défense à tous fabricants, contre-maîtres de fabrique.... de débaucher directement ou indirectement aucun ouvrier forain ou domicilié, et même de lui donner de l'ouvrage, qu'il n'ait..., Lett. patent. du 12 sept. 1781, art. 6.Fig.• Son irrégularité me débauche ; je la condamne et je l'imite, SÉV. 116.4° Provoquer à la défection.• Il débauchait par promesses et par argent les troupes mêmes de l'empire, FLÉCH. Hist. de Théod. I, 17.• Ptolémée vint par mer sur les côtes de la Cilicie, et employa toutes sortes de moyens pour lui débaucher les Argyraspides [troupes d'élite dans l'armée macédonienne], ROLLIN Hist. anc. Oeuvres, t. VII, p. 122, dans POUGENS.• Chaque parti tâchait de débaucher les alliés de l'autre, VERTOT Révol. rom. XI, p. 98.• Des vaisseaux qu'il envoyait pour débaucher une partie de la flotte, SÉV. 470.Par extension.• Dépenses [de Fouquet] qui allaient à se fortifier contre lui [le roi] et à lui débaucher ses sujets et ses domestiques, CHAPELAIN Lett. à Mme de Sévigné, dans l'édition de SÉVIGNÉ, donnée par Adolphe Régnier, t. I, p. 429.5° En bonne part, faire quitter un moment le travail pour le plaisir. Un de ces jours j'irai vous débaucher.• M. de Termes nous mène dans son carrosse, et j'ai aussi débauché M. Hessein pour faire le quatrième, RAC. Lett. à Boileau, 25 juillet 1687.6° Se débaucher, v. réfl. Se jeter dans la débauche.• On se débauche, et la jeunesse Ne songe plus à s'exercer, Et ne fait que son temps passer, SCARRON Virg. trav. IV.7° Quitter ses occupations.• Étant jeune, je me débauchai de mes études avec quelques-uns de mes camarades ; nous fîmes dessein de nous en aller en pèlerinage à St-Jacques en Galice, SEGRAIS Ile imaginaire, t. II, p. 180.En bonne part, se délasser par quelque plaisir, par quelque distraction.XIVe s.• Grans gens aveuc lui se debauchent, Droit vers Lille en Flandres chevauchent, G. GUIART ms. f° 273, dans LACURNE.XVe s.• Quant compaignons sont desbauchez, Ils ne cerchent que compaignie, VILLON la Repue de Montfaucon..• Comme par delà [à Gênes] ils soyent moult jalouse gent, ny n'ont desir que on leur aille desbaucher leurs femmes, de cestuy leur est bien advenu, Bouciq. IV, ch. 7.XVIe s.• Il y a partout des scandales et tentations à se desbaucher, CALVIN 271.• Il follastrera, il se desbauchera avec son prince, MONT. I, 185.• Ils les ont prinses [les passions] comme tempestes qui desbauchent honteusement l'ame de sa tranquillité, MONT. II, 326.• .... Les organes et instrumens, lesquels estant detraqués et desbauchés, l'ame ne peut bien et reiglement agir...., CHARRON Sagesse, I, 14.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.