- muse
- muse 1.(mu-z') s. f.1° Chacune des neuf déesses qui présidaient, suivant les anciens, aux arts libéraux (on met une majuscule). Clio, Muse de l'histoire ; Calliope, Muse de l'éloquence et de la poésie héroïque ; Melpomène, Muse de la tragédie ; Thalie, Muse de la comédie ; Euterpe, Muse de la musique ; Érato, Muse de la poésie amoureuse ; Terpsichore, Muse de la danse ; Polymnie, Muse de la poésie lyrique ; Uranie, Muse de l'astronomie.• Muse, redis-moi donc quelle ardeur de vengeance De ces hommes sacrés rompit l'intelligence, BOILEAU Lutr. I.• Le loisir fut certainement le père des Muses, les affaires en sont les ennemis, et l'embarras les tue, VOLT. Lett. d'Argental, 21 juin 1761.• Ô Muses, accourez, solitaires divines, Amantes des ruisseaux, des grottes, des collines, A. CHÉN. ib. XIV.• Ah ! je les reconnais, et mon coeur se réveille ; Ô sons, ô douces voix chères à mon oreille, ô mes Muses, c'est vous ; vous, mon premier amour, Vous qui m'avez aimé dès que j'ai vu le jour, A. CHÉN. ib. IV.• On a appris par l'examen des Muses dont nous avons les statues, et de celles qui se trouvent sur les médailles et dans des bas-reliefs, que les sculpteurs anciens les ont ordinairement représentées vêtues et la gorge couverte, MONGEZ Instit. Mém. litt. et beaux-arts, t. V, p. 156.Dixième Muse, se dit, par flatterie ou par admiration, de toute femme qui cultive la poésie avec succès. Les anciens ont dit que Sapho était une dixième Muse. Les modernes ont appliqué ce nom à diverses femmes.Voltaire a nommé dixième Muse la critique.• Nous eûmes longtemps neuf Muses ; la saine critique est la dixième qui est venue bien tard ; elle n'existait point du temps de Cécrops, du premier Bacchus, de Sanchoniaton, de Thaut, de Brama, VOLT. Dict. phil. Pierre le Grand et J. J. Rousseau..Fig. Les nourrissons, les favoris, les amants des Muses, les poëtes.2° Fig. Les belles-lettres, et, particulièrement, la poésie (dans ce sens et dans tous les suivants on met une minuscule). Cultiver les muses.• Motin, la muse est morte, ou la faveur pour elle ; En vain dessus Parnasse Apollon on appelle ; En vain par le veiller on acquiert du savoir, Si fortune s'en moque...., RÉGNIER Sat. IV.L'art de la poésie. Enfin Malherbe vint.. .• Et réduisit la muse aux règles du devoir, BOILEAU Art poét. I.Les muses grecques, latines, françaises, etc. la poésie grecque, latine, etc.• Il est certain, et vous le savez aussi bien que moi, vous qui connaissez les bonnes choses, et qui les faites, qu'il n'y a point de muses si sévères que les françaises, ni de langue qui souffre moins le fard et l'apparence du bien que la nôtre, BALZ. liv. X, lett. 3.En ce sens, on le dit aussi au singulier. La muse latine. La muse française.3° Absolument. L'inspiration poétique en général.• Il est de ceux à qui la muse accorde aisément ses faveurs, Dict. de l'Académie.4° Particulièrement, le génie de chaque poëte, le caractère de sa poésie.• Le mal est qu'en rimant ma muse un peu légère Nomme tout par son nom et ne saurait rien taire, BOILEAU Disc. au roi..• Ce n'est pas quelquefois qu'une muse un peu fine Sur un mot en passant ne joue et ne badine, Et d'un sens détourné n'abuse avec succès, BOILEAU Art p. II.• Je hais ces vains auteurs dont la muse forcée M'entretient de ses feux, toujours froide et glacée, BOILEAU ib. II.• Mais tout ce beau discours dont il vient vous flatter N'est rien qu'un piége adroit pour vous les réciter [ses vers] ; Aussitôt il vous quitte, et, content de sa muse, S'en va chercher ailleurs quelque fat qu'il abuse, BOILEAU ib. I.• Ma muse en l'attaquant, charitable et discrète, Sait de l'homme d'honneur distinguer le poëte, BOILEAU Sat. IX..• Mais sa muse [de Ronsard] en français parlant grec et latin, BOILEAU Art p. I.• Damon, ce grand auteur, dont la muse fertile Amusa si longtemps et la cour et la ville, BOILEAU Sat. I.• Dût ma muse par là choquer tout l'univers, Riche, gueux, triste ou gai, je veux faire des vers, BOILEAU ib. VII.• J'ai pris pour passagère La muse des chansons, BÉRANG. Nacelle..• Jouy déjà gronde ma muse, Dont il soutint les premiers pas, BÉRANG. Cord..• Quittez la lyre, ô ma muse, Et déchiffrez ce mandat ; Vous voyez qu'on vous accuse De plusieurs crimes d'État, BÉRANG. Muse..• Oh ! la muse se doit aux peuples sans défense, V. HUGO Feuilles d'automne, XL..• Oh ! muse, contiens-toi ! muse aux hymnes d'airain, Muse de la loi juste et du droit souverain, Toi dont la bouche abonde en mots trempés de flamme, V. HUGO Voix intérieures, XXXII.• Muse, sois donc sans crainte ; au souffle qui t'inspire Nous pouvons sans péril tous deux nous confier ; Il est doux de pleurer, il est doux de sourire Au souvenir des maux qu'on pourrait oublier, A. DE MUSSET Nuit d'octobre..• Est-ce toi dont la voix m'appelle, Ô ma pauvre muse ! est-ce toi ? Ô ma fleur, ô mon immortelle, Seul être pudique et fidèle Où vive encor l'amour de moi, A. DE MUSSET Nuit de mai..5° Muse se prend quelquefois pour les poëtes, pour un poëte.• Dans la disette, une muse affamée Ne peut pas, dira-t-on, subsister de fumée, BOILEAU Art p. IV.• On vit avec horreur une muse effrénée Dormir chez un greffier la grasse matinée, BOILEAU Ep. V.6° La personne ou le sentiment qui inspire le poëte. L'indignation est sa muse.• La brillante marquise de la Sablière, la femme du monde qui a inspiré le plus de jolis vers, puisqu'elle était à la fois la muse de son mari, celle de la Fare son amant, et de la Fontaine son ami, GENLIS Mme de Mainten. t. I, p. 102, dans POUGENS.• Camille, où tu n'es point, moi, je n'ai pas de muse, A. CHÉN. Élég. III.Provenç. espagn. et ital. musa ; du lat. musa ; éol. Le terme grec est un participe présent, forme primitive du grec, penser, s'exalter, désirer ; Le grec est une forme éolique fréquente aux participes présents.————————muse 2.(mu-z') s. f.Terme de vénerie. Le commencement du rut des cerfs. La muse dure cinq ou six jours.Mus, radical de museau (voy MUSEAU, à l'étym.)• , comme le prouve ce passage : Ils [les cerfs] entrent dans le fort de leur rut, et ne demeurent en aucune place, ains ne font que cheminer et musser, c'est-à-dire mettre le nez en terre, et sentent par où les biches ont passé, et les poussent et chassent de cette maniere devant eux, CHARLES IX De la chasse, p. 4.————————muse 3.(mu-z') s. f.Nom donné à quelques figues d'Égypte plus douces que les autres.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE3. MUSE. Ajoutez : - ÉTYM. Arabe, mauz, bananier.————————muse 4.(mu-z') s. f.Ancienne locution, inusitée aujourd'hui. Donner la muse à quelqu'un, tromper, amuser quelqu'un de belles promesses.XVIe s.• Prince qui sçavoit par belles promesses donner la muse à ses ennemis, et rompre tout d'une suite et leurs choleres et leurs desseins, PASQUIER Lett. t. I, p. 154.Voy. muser.————————muse 5.(entrée créée par le supplément)(mu-z') s. f.• Nom donné, dans le Rhône, aux chèvres sans cornes ; elles sont généralement plus douces que les autres, les Primes d'honneur, Paris, 1872, p. 376.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.