- habit
- (a-bi ; le t ne se lie pas dans le parler ordinaire ; au pluriel, l's se lie : des a-bi-z étroits) s. m.1° Ce qui se met par-dessus la chemise et le gilet pour couvrir le corps, chez l'homme, et, chez la femme, ce qui se met par-dessus le jupon. Un habit bourgeois, ecclésiastique, militaire.• Ma foi, les beaux habits servent bien à la mine, RÉGNIER Macette..• Sous l'habit de Didyme elle-même est sortie, CORN. Théod. IV, 5.• Une femme ne prendra point un habit d'homme, et un homme ne prendra point un habit de femme, SACI Bible, Deutéron. XXII, 5.• Quoique son habit [de Psyché] fût de deuil, c'était aussi un habit de noces, chargé de diamants en beaucoup d'endroits, et qui avait consumé deux années du revenu de son père, LA FONT. Psyché, II, p. 141.• Le deuil n'est bien souvent que changement d'habits, LA FONT. Coupe..• Je tâte votre habit [l'habit d'Elmire], l'étoffe en est moelleuse, MOL. Tart. III, 3.• L'habit qu'il eut sur lui fut son seul héritage, BOILEAU Sat. I.• Quelles traces de sang vois-je sur vos habits ?, RAC. Théb. I, 3.• Et lui-même marchant en habits magnifiques, RAC. Esth. II, 5.• Je l'ai vu : son même air, son même habit de lin, Sa démarche, ses yeux, et tous ses traits enfin, RAC. Athal. II, 5.• Laissez là cet habit, quittez ce vil métier, RAC. ib. II, 7.• Vous savez que l'habit ne fait pas la science, REGNARD Folies am. I, 5.• Chez de certaines gens, un habit neuf, c'est presque un beau visage, MARIVAUX Marianne, 1re part..• L'or et les diamants brillent sur ses habits, VOLT. Scythes, I, 1.• Les autres sont armés sous un habit de paix, VOLT. Irène, II, 1.• Elle avait un habit de cheval qui dessinait à ravir l'élégance de sa taille, STAËL Corinne, XVII, 6.• L'hiver moscovite les attaque de toutes parts : il pénètre au travers de leurs légers vêtements et de leur chaussure déchirée ; leurs habits mouillés se gèlent sur eux ; cette enveloppe de glace saisit leurs corps et roidit tous leurs membres, SÉGUR Hist. de Nap. IX, 11.Habits de choeur, habits que les chanoines, les ecclésiastiques et les religieux portent durant l'assistance aux offices de l'église.Terme de religieuses bénédictines. Habit de choeur, grande robe noire plissée, avec des manches longues, qu'on porte aux cérémonies.Mettre habit bas, quitter son habit pour se livrer à quelque travail manuel.Fig. Mettre habit bas pour jamais, mourir.• Je dois bientôt, il me semble, Mettre pour jamais habit bas ; Attends un peu, nous finirons ensemble, Mon vieil ami, ne nous séparons pas, BÉRANG. Mon habit..Vieux habits, vieux galons ! cri des fripiers ambulants qui demandent à acheter de vieilles défroques.• Gens vêtus d'or et d'écarlate, Pendant un mois chacun vous flatte ; Puis à vos portes nous allons : Vieux habits, vieux galons, BÉRANG. Vieux habits..Un habit qui montre la corde, un habit tout à fait usé.• Cet habit fait bien dire aux gausseurs qu'il fait peur aux larrons, en leur montrant la corde, CYRANO DE BERG. le Pédant joué, III, 2.Grand habit, s'est dit pour habit de cérémonie.• Sans prendre le temps d'aller à la maison qu'elle occupait à Paris, pour y quitter son grand habit et son éclatante parure, GENLIS Mlle de la Fayette, p. 21, dans POUGENS.2° Particulièrement. Partie de l'habillement de l'homme ouverte par devant, et à basques plus ou moins larges.• C'est un chef-d'oeuvre que d'avoir inventé un habit sérieux qui ne fût pas noir, MOL. Bourg. gent. II, 8.• Vous avez tout à fait bon air avec cet habit, MOL. ib. III, 4.• L'ignorance et l'erreur à ses naissantes pièces [de Molière], En habit de marquis, en robes de comtesses, Venaient pour diffamer son chef-d'oeuvre nouveau, BOILEAU Ép. VII.• J'ai à présent sous mes yeux un paysage que Vernet fit à Rome pour un habit, veste et culotte, et qui vient d'être acheté mille écus, DIDEROT Salon de 1767, Oeuv. t. XIV, p. 7, dans POUGENS.• Sois-moi fidèle, ô pauvre habit que j'aime ; Ensemble nous devenons vieux ; Depuis dix ans je te brosse moi-même, Et Socrate n'eût pas fait mieux, BÉRANG. Mon habit..Par antonomase, celui des vêtements du haut du corps que l'usage fait choisir comme seul convenable dans les réunions un peu cérémonieuses ; c'est aujourd'hui le frac. - Irez-vous là en redingote ? - Non, je serai en habit. - Et que mettrez-vous sur votre habit ? - Mon paletot.Habit veste, habit à basques très courtes.3° Habit long, la soutane, habit des ecclésiastiques, et aussi autrefois de quelques professions.• Le roi me demanda hier si vous ne seriez pas toujours en habit long, MAINTENON Lett. au card. de Noailles, 6 nov. 1695.Habit court, l'habit que les ecclésiastiques portent quelquefois au lieu de leur soutane.Habit court, s'est dit aussi pour certaines gens qui, dans leurs fonctions, portaient l'habit long.• Lorsque, ayant quitté la robe consulaire, vous êtes à Saint-Mandé ou à Paris, dans votre chambre, en habit court, et à peu près dans l'équipage et dans l'humeur où se trouvait Scipion quand il ramassait des coquilles au bord de la mer avec son ami Lélius, SCARRON Lett. Oeuv. t. I, p. 230.• Tel rit d'un juge en habit court, qui tremble au seul aspect d'un procureur en robe, BEAUMARCH. Mar. de Fig. III, 4.4° Habit se dit du vêtement des religieux et des religieuses.• De retour dans sa patrie il [Roger Bacon] prit l'habit de franciscain, DIDEROT Opin. des anc. phil. (scholastiques), Oeuv. t. VII, p. 276.Absolument. Prendre l'habit, se faire religieux, religieuse.• Votre cousine a pris l'habit à Montmartre, SÉV. 300.Prise d'habit, entrée en religion.L'habit ne fait pas le moine, on ne doit pas juger des personnes par l'apparence. Cela se dit aussi des personnes dont la conduite n'est pas conforme à leur état.• Cette façon de parler est prise des auteurs du droit canon, traitant de la capacité ou incapacité de posséder des bénéfices ; elle veut dire au propre : Il faut être profès et non simple novice pour posséder un bénéfice régulier, par opposition aux bénéfices séculiers, DE BRIEUX .XIIe s.• Faites roi del moine Costant ; Drois oirs [légitime héritier] est, tolons li l'abit, WACE Brut, V. 6642.XIIIe s.• Li mesdisans ont parlé Seur aucuns amis, Que, s'il se fussent mené En simples habis, Jà n'en fust issuz mesdiz [sortie médisance], Mss. de poés. fr. avant 1300, t. IV, p. 1418, dans LACURNE.• Note que habit fet moine ; et qui est profès ne se pot marier, Liv. de just. 193.• Moult volentiers [je] quesisse une religion Où je m'ame salvaisse en bonne entention ; Mais tant voi en pluseurs envie, elation, Qu'il ne tiennent de l'ordre fors l'abit et le nom, RUTEB. 238.XIVe s.• Les habis [habitudes] naturels sont en enfans et en bestes, ORESME Eth. 189.• Bien semble à leur abit une poure maisnie, Guesclin. 3780.XVe s.• Et là seoit le jeune roi en habit royal, FROISS. II, II, 74.• Ils [les Gantois] mirent tout hors, femmes et enfans, et les envoyerent toutes nues en leurs chemises ou es plus povres et petits habits qu'elles eussent, FROISS. II, II, 213.• Trop de gens sont qui honourent l'habit, Et au corps font pour robe reverence, Et ne tiennent compte de l'esperit, E. DESCH. Ball..• L'habit ne fait pas l'homme. Et entre tous ceulx que j'ay jamais congneus [Louis XI] le plus humble en parolles et en habitz, COMM. I, 10.XVIe s.• Il n'est pas si fol qu'il en porte l'habit, COTGRAVE .• D'habits d'autrui mal on s'honore, LEROUX DE LINCY Prov. t. II, p. 168.• Perdre son habit en un jour de froid, LEROUX DE LINCY ib. p. 370.• Tout habit au pauvre duit, LEROUX DE LINCY ib. p. 427.Bourg. haibi ; provenç. habit, abit ; cat. habit ; esp. habito ; ital. ábito ; du latin hábitus, qui veut dire proprement manière d'être, venant de habere, avoir, mais qui signifie aussi dans la meilleure latinité vêtement ; on comprend comment, de manière d'être, le passage s'est fait à vêtement ; ce passage appartient non au moyen âge scolastique, mais à l'antiquité latine. Habit, bien qu'il remonte au XIIIe siècle, est fait sur le latin ; habitus, ayant l'accent sur ha, aurait donné hate.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREHABIT. Ajoutez :5° Se disait, dans l'ordre de Fontevrault, du logement des religieux de l'ordre qui servaient de chapelains et de confesseurs, par opposition au monastère, qui se disait de l'édifice occupé par les religieuses.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.