- croûte
- (krou-t') s. f.1° La partie extérieure du pain, durcie par la cuisson.• [Le dîner de M. le Prince] C'était un potage, et la moitié d'une poule rôtie sur une croûte de pain, SAINT-SIMON 225, 54.• Quand nous mangeons quelque croûte de pain, il nous est avis que nous faisons un bien grand bruit, mais il n'y a personne que nous qui l'entende ; ainsi en est-il de ce pauvre rimailleur, Francion, liv. VI, p. 231.• Nous y rencontrâmes un homme de vingt-sept à vingt-huit ans, qui trempait des croûtes de pain dans une fontaine, LESAGE Gil Blas, II, 8.Familièrement. Casser la croûte, une croûte avec quelqu'un, manger amicalement et sans façon avec lui.Absolument. Casser la croûte, manger un morceau.Fig. Ne manger que des croûtes, faire maigre chère.2° Absolument, gros morceau de pain où il y a plus de croûte que de mie et que l'on fait tremper dans le pot au feu. Manger une croûte au pot.Croûte au pot, tranches de pain qu'on met au fond d'une casserole, qu'on laisse gratiner avec un peu de bouillon, qu'on dresse dans la soupière et sur lesquelles on verse le bouillon.On dit dans un sens analogue croûte au madère.Croûte aux champignons, croûte de pain frite dans du beurre, sur laquelle on sert les champignons préparés d'une certaine façon.3° La pâte cuite qui enferme un pâté, une tourte, un vol-au-vent.4° Le dessus de certaines choses. Il s'est fait une croûte de tartre autour du tonneau.• Le limon que le Tanaïs avait apporté avait formé une espèce de croûte sur le Bosphore, MONTESQ. Rom. 17.• Le terrain qui s'étend sous son front escarpé, D'une croûte brillante au loin enveloppé, Trahissait le trésor des mines souterraines, DELILLE Paradis perdu, I.Croûte terrestre, la portion superficielle du globe terrestre qui est accessible à l'observation des hommes et que l'on suppose portée sur un noyau central de matières en fusion.• La terre, selon Woodward, n'est qu'une croûte superficielle et fort mince qui sert d'enveloppe au fluide qu'elle renferme, BUFF. Théor. de la terre, 2e disc..• Ainsi Descartes l'a regardé [un corps céleste] comme ayant été autrefois un soleil, obscurci et étouffé depuis par une croûte épaisse dont il s'est couvert, D'ALEMB. Abus de la critique, Oeuvres, t. IV, p. 255, dans POUGENS..• L'étude des tremblements de terre importe à la science, qui commence à dresser des tables et des inventaires de la croûte terrestre, MARCHAND Acad. des sc. Comptes rendus, t. LIII, p. 1259.Fig.• Une croûte d'ignorance et d'avarice a tellement recouvert les principes invariables de la doctrine monétaire...., MIRABEAU Collection, t. V, p. 63.5° Terme de marine. Partie irrégulière et inégale d'épaisseur que l'on scie en planche, plus ou moins épaisse, sur une pièce de bois de construction.6° Nom vulgaire de petites plaques formées sur la peau ou à l'origine des membranes muqueuses par une humeur muqueuse ou purulente qui se dessèche et se solidifie. Croûtes varioleuses. Croûtes vaccinales. Croûtes dartreuses.Son corps n'est qu'une croûte, il est tout couvert de gale.Croûtes de lait éruption exanthématique qui occupe particulièrement le cuir chevelu et le visage chez les enfants à la mamelle.7° Terme de botanique. Partie du lichen qui, produisant les fructifications, est adhérente aux pierres, aux écorces, etc.8° Cuir en croûte, cuir plané, poudré, tanné et séché, en sortant de la fosse au tan.Croûte de garance, superficie dure de la garance pulvérisée et mise en pipe ou en sac.9° Terme de peinture. Vieux tableau noirci et gercé par le temps et que l'on compare à quelque chose de croûteux.• Toujours point de coloris, ou plutôt un ton blafard, qui donne l'air d'une croûte à celui-ci [tableau] et qui répugne au spectateur, BACHAUMONT Mém. secrets, t. XXX, p. 170, dans POUGENS.Mauvais tableau. Ce peintre ne fait que des croûtes.Tableau douteux, copie qu'on voudrait faire passer pour un original.10° Locution populaire. C'est une croûte, c'est une vieille croûte, se dit d'un homme encroûté dans la routine, dans des idées arriérées.PROVERBE Croûte de pâté vaut bien pain.XIIe s.• Porterons nos auvec nos nule chose, Ne pain, ne vin, ne nulle crostre grosse ?, Raoul de C. 286.XIIIe s.• Durs fu li pains et crouste et mie, RUTEB. 173.Artois, cruste ; bourguig. crôte ; wallon, crose ; provenç. crosta ; espagn. costra ; ital. crosta ; du latin crusta. Le latin crusta signifie tout ce qui enveloppe, et la croûte de pain n'y est qu'un sens particulier ; par conséquent l'ordre des sens devrait commencer non par la croûte de pain, mais par le sens qui est le plus général. Mais en français, à en juger par l'historique, croûte de pain est l'acception ancienne, d'où alors les autres dérivent.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRECROÛTE. Ajoutez :11° Terme de porcelainier. L'assiette ébauchée par l'ouvrier qui a travaillé sur le tour une masse de pâte.• Une machine à faire les croûtes ; une machine à cintrer ; une machine à mouler et calibrer.... l'opération du façonnage de la croûte se fait d'une manière constante, Journ. offic. 31 mai 1876, p. 3733, 1re col..Moulage à la croûte.• Le moulage à la croûte s'exécute en appliquant la pâte contre le moule, sous la forme d'une feuille plus ou moins épaisse, et en l'y comprimant avec une éponge, de manière à lui faire épouser toutes les cavités et saillies de ce moule, P. POIRÉ Notions de chimie, p. 192, Paris, 1869.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.