- émail
- (é-mall, ll mouillées) s. m.1° Fondant (le fondant est un composé de sable siliceux, d'oxyde de plomb, de soude et de potasse), que l'on broie et auquel on ajoute des oxydes métalliques, réduits en poudre et destinés, dans la fusion produite par le feu, à colorer le fondant, tout en lui laissant sa translucidité. Les émaux sont fusibles. Les couleurs de l'émail sont inaltérables.Émail cloisonné, émail fabriqué à l'aide d'une plaque de fond sur laquelle sont soudées de petites lames posées verticalement (ou de champ) et contournées de manière à former les figures que l'on veut obtenir. La réunion de ces lames produit des cases dans chacune desquelles on dépose l'émail en poudre (chaque couleur dans sa case). À la cuisson, l'émail fond et les lames ou cloisons le retiennent dans ces contours, et empêchent le mélange des couleurs. Lorsque les cases sont formées, non par des lames soudées de champ sur le fond, mais par des cavités creusées au ciseau dans l'épaisseur de cette plaque même, on dit que l'émail est champlevé.Émaux d'orfévre, nom donné à tout émail contenu dans une partie évidée et creusée dans le métal par le travail de l'outil tranchant, DE LABORDE.Émaux en taille d'épargne, nom donné, dans le moyen âge, à un procédé d'émaillerie qui consiste à décalquer un dessin sur la surface unie du métal, et, au moyen du burin, du ciselet et des échoppes, évider tout ce qui n'est pas le contour du dessin ; de cette façon on obtient une véritable gravure en relief ; les espaces évidés entre ces contours forment autant de petites cuves qu'on remplit de poudre ou de pâte d'émail de diverses nuances, selon que l'artiste a combiné son dessin et suivant que la chimie lui vient en aide, DE LABORDE.Émaux des peintres, nom donné à des plaques de métal que l'on couvrait d'émail et sur lesquelles on exécutait de véritables tableaux en couleurs éclatantes (XVe siècle), DE LABORDE.Émaux de basse taille, nom donné dans le moyen âge à des plaques d'or ou d'argent que l'on fixait solidement pour résister à la force d'impulsion de l'outil, et sur lesquelles on traçait légèrement le calque de son dessin, et on gravait ou plutôt l'on ciselait la composition en relief avec toutes les finesses du modelé ; puis on étendait, sur cette sculpture d'un très faible relief, de la poudre d'émail nuancée, par grandes teintes plates, de vert et de rouge pour les vêtements, de bleu pour les ciels, de violacé pour les carnations ; la chaleur du four faisait entrer tous ces métaux en fusion, et leur donnait le brillant et la transparence de la glace, DE LABORDE.Émaux de niellure, nom donné à des bijoux ou à des plaques d'or et d'argent doré, qui, gravées en taille d'épargne ou en creux, étaient émaillées de noir, DE LABORDE.L'émail de la porcelaine, de la faïence, la matière vitreuse dont on l'enduit.2° Nom donné aux décorations de peintures appliquées sur métal.3° Par métonymie, nom donné à la plaque de métal émaillée. Il est connaisseur en émaux. Les premiers émaux ne remontent pas au delà des premiers siècles de notre ère.4° Il s'est dit pour cadran de montre.• Peut-être avant que l'heure en cercle promenée Ait posé sur l'émail brillant, Dans les soixante pas où sa course est bornée, Son pied sonore et vigilant, A. CHÉN. 272.5° Fig. Diversité, variété des fleurs, par assimilation à la variété des couleurs des émaux.• Ces fleurs n'ont plus d'émail en leur couleur diverse, RÉGNIER Dial..• Les soins ne volent point sur l'émail des prairies Comme autour des palais d'une orageuse cour, CHAUL. à Mme de Bouillon..• Ni les âpres frimas, ni les grandes chaleurs N'y ternissent jamais le bel émail des fleurs, SEGRAIS Églogue VI.• On découvre de loin une grande prairie toute parée de l'émail des fleurs, MONTESQ. Temple de Gnide, 1.• L'île féconde à la fois se couronne D'épis dorés, des fruits mûrs de l'automne Et de l'émail dont brille le printemps, MALFIL. Narc. ch. I.• Elles flétrissent l'émail des prés, l'éclat des fleurs, J. J. ROUSS. Prom. 7.6° Terme de blason. Se dit des couleurs et des métaux dont un écu est chargé. Le blason a sept émaux, dont deux métaux, or, argent, et cinq couleurs, gueules, azur, sable, sinople et pourpre.7° Substance qui revêt la couronne des dents. Certaines maladies attaquent l'émail des dents.8° Matière analogue à l'émail, qui recouvre le dedans des coquilles.9° Terme de minéralogie. Émail des volcans, lave vitreuse.XIIe s.• Et cil vert haume à or et à esmal, Ronc. p. 79.XIIIe s.• Nus ne puet ne ne doit metre en oevre cloz [clous] d'evoire ne d'esmail, de quelque maniere que ce soit, Liv. des mét. 212.• D'un blanc esmail fu fais l'image Assise en l'or par artimage [sorcellerie], Fl. et Blanchefl. V. 459.XIVe s.• [Un anneau d'or] à lettres d'esmail qui luisoient, Et qui gardez-moi bien disoient, DE LABORDE Émaux, p. 345.XVe s.• Entrementes que le herault parloit, l'escuyer avoit l'oeil trop fort sus un grand esmail que le herault portoit à sa poitrine, FROISS. II, III, 39.• Et alla ledit grant escuyer querir ung esmail d'ung petit herault qui estoit à monseigneur l'admiral...., COMM. IV, 7.XVIe s.• Les esmails en se liquefiant couleront, PALISS. 60.• J'avois ouy dire que l'esmail blanc estoit le fondement de tous les autres esmaux, PALISS. 312.• Esmail est une pierre artificielle composée de plusieurs matieres, PALISS. 378.Provenç. esmaut ; catal. esmalt ; espagn. et portug. esmalte ; ital. smalto ; bas-lat. smaltum ; allem. Schmelz ; du germanique : anc. Haut allem. smelzan, smaltjan, fondre ; allem. schmelzen ; étymologie que Diez préfère au latin maltha, sorte de mortier, laquelle est au contraire adoptée par M. de Laborde. Il est certain que la dérivation allemande rend plus facilement compte de es ou s qui commencent le mot dans toutes les langues romanes. Quant à l'apocope du t dans la forme française, on en a un exemple dans l'ancien français gal, pour galt, bois, de l'allemand Wald.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.