- écu
- (é-ku) s. m.1° Bouclier que portaient les chevaliers. L'écu était fait ordinairement en bois couvert de cuir et garni d'un bord en métal, quelquefois seulement en cuir bouilli. Combattre avec la lance et l'écu.Terme d'astronomie. Écu de Jean Sobieski, petite constellation australe.2° Figure de l'écu représentant les armoiries. L'écu est le champ qui renferme les pièces des armoiries. Écu écartelé. L'écu de France.• Elle [la poule d'eau] se promène dans les fossés du château ; elle aime à se percher sur les armoiries sculptées dans le mur ; quand elle se tient immobile, on la prendrait pour un oiseau en blason, tombé de l'écu d'un ancien chevalier, CHATEAUB. Génie du chr. I, V, 7.3° Monnaie d'argent, ainsi dite parce que sur une des faces elle portait, comme un écu de blason, trois fleurs de lis. Écu de trois livres. Écu de six livres.Petit écu, ancienne pièce d'argent valant trois francs. Cela vous coûtera un petit écu.En termes de compte. Mille écus, trois mille francs.• Le financier.... Lui dit : je vous veux mettre aujourd'hui sur le trône ; Prenez ces cent écus ; gardez-les avec soin, Pour vous en servir au besoin, LA FONT. Fabl. VIII, 2.• Soixante mille écus d'argent sec et liquide Ont mis notre fortune en un vol bien rapide, REGNARD Ménechmes, IV, 2.• Loin de les rendre à ton Crésus, Va boire avec ses cent écus, BÉRANG. Éloge de la rich..Écu-sol, la plus ancienne monnaie d'or appelée écu.Écu d'or au soleil, monnaie frappée sous Louis XI et Charles VIII, avec un soleil au-dessus de la couronne.Écu blanc, pièce d'argent valant trois francs.Écu quart, ancienne monnaie de compte, valant 64 sous.Quart d'écu, ancienne monnaie d'argent, qui valait d'abord quinze ou vingt sous, et qui, plus tard, en a souvent valu davantage.N'avoir plus ni écu ni targe, être sans le sou, se disait par un jeu de mot entre écu, bouclier, et écu, monnaie.4° De nos jours, pièce de monnaie frappée à l'effigie du prince et valant cinq francs. Un écu de cinq francs.5° Absolument et au pluriel, argent, richesse. Il a des écus. Mettre écu sur écu, thésauriser.Il est le père aux écus, il a des écus moisis, se dit familièrement d'un homme avare et riche.Il remue les écus à la pelle, il est très riche.N'avoir pas vaillant un quart d'écu, n'avoir pas un écu vaillant, être pauvre.Être au bout de ses écus, être sans ressources.Voici le reste de notre écu, de nos écus, se dit, en plaisantant, d'une personne qui arrive dans une compagnie, et le plus souvent avec l'idée que cette venue est gênante, déplaisante.• Voici le reste de notre écu, dit l'hôtesse ; si nous n'avions pas d'autre pratique que celle-là, notre louage serait mal payé, SCARRON Rom. com. ch. 6.• Mme Jourdain apercevant Dorimène et Dorante : Ah ! ah ! voici justement le reste de notre écu, je ne vois que chagrins de tous côtés, MOL. Bourg. gent. V, 1.6° Terme d'entomologie. Pièce du dos des insectes.7° Écu de mer, congé que la douane délivre dans certains ports du nord de l'Europe au capitaine d'un bâtiment de commerce qui a déchargé sa cargaison.8° Terme de commerce. Papier de petite dimension. Écu double.PROVERBESVieux amis, vieux écus, c'est-à-dire les vieux amis sont comme la vieille monnaie, les meilleurs.Cela ne lui fait non plus de peur qu'un écu à un avocat, se dit d'une offre, d'une proposition qu'on suppose devoir être bien accueillie.• Un médecin n'a non plus de pitié d'un homme qu'un avocat d'un écu, HAUTEROCHE Crispin méd. III, 1.Écu changé, écu mangé, c'est-à-dire une pièce d'argent, dès qu'elle est changée, est bientôt dépensée.XIe s.• Tans cops [il] a pris sur son escut bucler, Ch. de Rol. XXXIX.XIIe s.• À son col [il] pent un escu bauvesin [de Beauvais], Ronc. p. 50.• Plus biaux princes de lui [que lui] ne put porter escu, Sax. XXVIII.• Mult fu espiritaus [spirituelle] de sa part la mellée, Quant fist de sa corune escu contre l'espée ; Ainc [jamais] ne lur volt [voulut] guenchir pur colp ne pur colée, Th. le mart. 153.• Sire, tes veies sunt nettes, e tes paroles sunt cume esmerées par fu [feu], et tu es escuz à tus ces ki espeirent en tei, Rois, p. 208.XIIIe s.• Contre vent [elle] fait escu d'arbrissiaus, mout y luite [lutte], Berte, XXXVII.• Qui l'escu portoit d'or, à un lion d'azur, ib. XLI.• Et i ot mainte lance brisie sur escu, ib. CXXXVII.• On n'a l'escu ne la maaille, Mès Renart n'Isengrin n'en chaille, Ren. 7927.• Or a la dame ainsi vescu ; Que de sa vie a fet escu Por s'ame desfendre et covrir, Et por saint paradis ovrir Envers li après son decès, RUTEB. II, 185.• Ses arriebans est venus, Esmez [estimé] à deux cent mil escus [chevaliers], Partonop. ms. dans LACURNE. Quant nous les veismes venir, nous fichames les pointes de nos escus au sablon, JOINV. 215.• Le roy sailli en la mer, dont il fu en yaue jusques aus esseles ; et ala l'escu au col, et le heaume en la teste, et le glaive en la main, jusques à sa gent qui estoient sur la rive de la mer, JOINV. 215.XVe s.• Douze cents chevaliers d'un escu [qui n'avaient point d'autres chevaliers à leurs ordres], FROISS. I, I, 295.• Se consuirent des glaives si roidement en my leurs escus, qu'ils volerent en pieces, FROISS. II, II, 43.• J'ai veu partout honourer mon escu, Et en tous lieux doubter ma seigneurie, EUST. DESCH. Compl. de la France..• Honneur est ses droiz escus, EUST. DESCH. Poésies mss. f° 45, dans LACURNE.• Les chevaliers tous desarmez jouoient aux escuz les uns aux autres, pour estre plus droitz et pour aucun tour nouvel aprendre, Perceforest, t. V, f° 6.• Je me trouvay du costé gauche, où estoient les gentilshommes des vingt escus, et les autres de la maison du roy, et les pensionnaires, COMM. VIII, 6.XVIe s.• Donques estant tousjours plus à priser l'escu que le teston, O. DE SERRES 72.• Le soc qu'on emploiera à ce defrichement n'aura qu'une aureille, appellée en France l'escu ; afin que par icelle seule les gazons ou mottes se puissent renverser toutes d'un costé, O. DE SERRES 73.• Escus du palais [jetons], OUDIN .Provenç. escut ; espagn. et portug. escudo ; ital. scudo ; du latin scutum, en grec, peau et bouclier ; radical sanscrit sku, couvrir.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREÉCU. Ajoutez :9° L'arbre aux quarante écus, arbre du Japon, de la famille des conifères (gingko biloba, L.), ainsi nommé, parce que, dit-on, le premier qui entra en France au XVIe siècle, coûta quarante écus.• Deux espèces d'érables, le hêtre,... l'arbre aux quarante écus, existaient déjà pendant l'époque tertiaire, CH. MARTINS Rev. des Deux-Mondes, 15 fév. 1876, p. 753.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.