- violence
- (vi-o-lan-s') s. f.1° Qualité de ce qui agit avec force.• Comme un enfant que sa mère arrache d'entre les bras des voleurs, doit aimer, dans la peine qu'il souffre, la violence amoureuse et légitime de celle qui procure sa liberté, PASC. Pens. XXIV, 61 ter, éd. HAVET..• Sa constance [de la reine d'Angleterre] par laquelle, n'ayant pu vaincre la violence de la destinée, elle en a si noblement soutenu l'effort, BOSSUET Reine d'Anglet..• Ô mort, éloigne-toi de notre pensée, et laisse-nous tromper pour un peu de temps la violence de notre douleur par le souvenir de notre joie, BOSSUET Duch. d'Orl..• Hé bien ! de leur amour tu vois la violence, RAC. Brit. II, 8.• Ce mal dont vous craignez, dit-il, la violence, A souvent sans péril attaqué son enfance, RAC. ib. v, 5.• Un style clair, noble, simple, éloigné de l'affectation, de la violence qui caractérise aujourd'hui l'esprit du siècle, VOLT. Lett. Brenellerie, 7 mars 1777.• La violence du feu dépend presque en entier de la rapidité du courant de l'air qui l'anime, BUFF. Hist. min. introd. Oeuv. VI, p. 88.• La violence des désirs du roi [Philippe V] faisait la force de la reine, DUCLOS Oeuv. t. VI, p. 113.• La ville du Cap.... est composée d'environ mille maisons, toutes bâties de briques, et, à cause de la violence des vents, couvertes de chaume, RAYNAL Hist. phil. II, 18.2° Emportement, irascibilité.• Un peu de violence M'a fait de vos raisons combattre la puissance, RAC. Andr. II, 4.• Je sais quelle est sa violence : Il est fier, implacable, aigri par son malheur, VOLT. Oreste, I, 5.• Il [Socrate] eut de la peine à réprimer la violence de son caractère, soit que ce défaut paraisse le plus difficile à corriger, soit qu'on se le pardonne plus aisément, BARTHÉL. Anach. ch. 67.3° Force dont on use contre quelqu'un, contre les lois, contre la liberté publique, etc.• La violence est juste où la douceur est vaine, CORN. Héracl. I, 1.• Je vous l'ai dit ailleurs, et je vous le redis encore, la violence et la vérité ne peuvent rien l'une sur l'autre, PASC. Prov. XVIII.• Qui ne sait les violences que la reine de Navarre [Jeanne d'Albret] exerça sur les prêtres et les religieux ?, BOSSUET Var. x, 52.• Quelque haut qu'on puisse remonter pour rechercher dans les histoires les exemples des grandes mutations, on trouve que jusqu'ici elles sont causées ou par la mollesse ou par la violence des princes, BOSSUET Reine d'Anglet..• Je vous dis de ne point repousser la violence par la violence ; mais, si quelqu'un vous frappe sur la joue droite, présentez-lui encore la gauche, c'est-à-dire souffrez sans bruit, sans animosité, sans fiel, BOURDAL. Exhort. sur le soufflet don. à J. C. t. I, p. 493.• Des violences dans le pouvoir, qui enfantent d'autres violences dans le peuple, VOLT. Lett. Bastide, 1758.• Je puis, je le sais trop, user de violence, VOLT. Orphel. III, 4.Fig.• Et la nature souffre extrême violence, Lorsqu'il [le ciel] en fait [des femmes] d'humeur à garder le silence, CORN. le Ment. I, 4.• Les violences dont l'art y opprime [à Versailles] la pauvre nature, SÉV. 15 juin 1676.• Ainsi la vérité gémissait captive sous une telle contrainte, et souffrait violence en eux [les philosophes païens], BOSSUET Panég. de sainte Cather. 2.• Dans toutes les occasions où la nature souffre violence, BOISGUILLEBERT Factum de la France, XII.Faire violence à une femme, la prendre de force.• Un livre classique de la Chine regarde comme un prodige de vertu de se trouver seul dans un appartement reculé avec une femme sans lui faire violence, MONTESQ. Esp. XVI, 8.Fig. Faire violence à la loi, à un texte, y donner un sens contraire à son véritable esprit.• Il [Basnage] soutient que toutes les guerres des prétendus réformés sont justes ; et en même temps il fait violence à toutes les histoires, pour nous faire accroire que la religion n'y a point de part, BOSSUET Déf. Var. 1er disc. 15.• Il me semble que par là il fait violence à bien des passages des anciens, CONDIL. Conn. hum. II, 1.4° Terme de jurisprudence. Contrainte exercée sur une personne pour la forcer à s'obliger. Violence morale. Violence indirecte.5° Au plur. Actes, paroles de violence.• Un amant dédaigné ne voit pas de bon oeil Ceux qui du même objet ont un plus doux accueil, Et, pour peu qu'on le pousse, il court aux violences, CORN. Suiv. II, 13.• Finissons toutes ces violences, lui ai-je dit, LETOURNEUR Trad. de Cl. Harl. lett. 53.6° Terme de spiritualité. Ardeur incessante de la dévotion.• Les maximes crucifiantes, la violence, l'humilité, le renoncement à soi-même, MASS. Carême, Mot. de conv..• Sa grâce [du Seigneur], comme son royaume, est le prix de la seule violence, MASS. Carême, Prière 2.7° Effort qu'on fait sur soi ; combat intérieur.• L'amour que j'ai pour vous a commis cette offense, Lui seul à mon devoir fait cette violence, CORN. Nicom. II, 2.Se faire violence, faire des efforts pour se vaincre.• La violence qu'on se fait pour demeurer fidèle à ce qu'on aime, ne vaut guère mieux qu'une infidélité, LA ROCHEFOUC. Réfl. mor. n° 381.• Je l'ai juré, ma fille, je vais finir [ma lettre] ; je me fais une violence pour vous quitter, SÉV. 1er juill. 1671.• C'est que la vraie sévérité, la sévérité chrétienne, doit consister à se faire violence, et à contredire la nature et l'amour-propre, BOURDAL. Sévérité évang. 2e avent, p. 447.• Combien s'est-il [Ulysse] fait de violence pour ne se point découvrir [à son fils] !, FÉN. Tél. XXIV.Familièrement. Une douce violence, action d'insister pour que quelqu'un accepte, fasse quelque chose qu'il refuse d'accepter, de faire, et qui pourtant lui est agréable.• C'est me faire une aimable et douce violence, BOISSY Deh. tromp. I, 6.Faites-vous une douce violence, se dit pour faire accepter à quelqu'un une chose qu'il refuse par façon.XIVe s.• Que les fassies [bandes] puissent estre ostées sans violence, H. DE MONDEVILLE f° 41, verso..• Le quatrieme jour le desliay [un blessé], et estoit la medecine toute seiche, et ne la povoie avoir sans violence, LANFRANC f° 14, verso..XVe s.• Tantost furent appareillées les nourrices qui devoient les enfans garder au temple par six jours, et la chevalerie qui le temple devoit garder, lesquels n'y firent violence [ne s'y refusèrent pas], Perceforest, t. I, f° 103.XVIe s.• Estant averty que ses soudards faisoient quelques violences par les chemins, AMYOT Pomp. 17.• Par l'insolidité du fondement et violence des eaux, l'artifice se deserta dans quelque temps, O. DE SERRES 756.Lat. violentia, de violentus, violent.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.