- trogne
- (tro-gn') s. f.1° Terme familier et de moquerie. Visage.• Et que son plus beau jeu ne gît rien qu'en sa trogne, RÉGNIER Sat. VI.• Que je hais les amants et leurs mourantes trognes !, SCARR. Jodelet, I, 1.• Ils [les rois] se sont accompagnés de gardes, de hallebardes : ces trognes armées qui n'ont de mains et de force que pour eux.... font trembler les plus fermes, PASC. Pens. III, 3, édit. HAVET..• Tu veux, en combat singulier, Exposer ta petite trogne...., BACHAUM. Mém. secr. t. XXXI, p. 165.2° Particulièrement. Visage enluminé par l'habitude du vin et de la bonne chère.• Que votre incomparable trogne, La vive image du bon temps, Ne sera plus qu'une charogne, MAÎTRE ADAM Oeuv. p. 195, dans POUGENS.• Dieu sait combien on vit d'ivrognes, Et tous aux différentes trognes, SCARR. Virg. I.Rouge trogne, trogne enluminée, le visage d'un ivrogne.• Aux buveurs à rouge trogne Il dit : trinquons à grands coups, BÉRANG. Enfers..3° Arbre mis en têtard, dans quelques pays.XVe s.• Quant j'aurai beu, elle, voyant ma trongne, M'iroit disant : je ne vueil point d'ivrogne, BASSELIN XLIX..XVIe s.• Quelle maniere de les y guider [les enfants à l'étude] d'une trogne effroyable et les mains armées de fouets !, MONT. I, 183.Bourguig. trongne ; patois des Fourgs, trougne. Quelques-uns le tirent du celtique : cornique, trein ; gallois, trwyn, forme récente tron, museau, nez. Diez préfère le vieux scandinave triona, museau de cochon, danois tryna, qui d'ailleurs est voisin des formes celtiques. Toutefois en même temps il se demande s'il ne faudrait pas songer au latin truo, truonis, cormoran, mot qui a été employé figurément pour signifier un homme à grand nez ; mais ici, comme il le remarque, tous les intermédiaires manquent. Lacurne cite les Gesta comitum barcinonensium, cap. XIII, p. 544 du Marca hispanica, où il est parlé d'un Guillaume de Besauduns, qui cognominatur trunnum, eo quod nasum fictitium haberet. Ce texte paraît tout à fait parler en faveur de l'étymologie celtique ou germanique.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.