- tas
- tas 1.(tâ ; l's se lie : un tâ-z-énorme) s. m.1° Accumulation de choses de la même espèce. Un tas de papiers. Mettre en tas, en un tas.• Là sur des tas poudreux de sacs et de pratique Hurle tous les matins une sibylle étique, On l'appelle chicane, BOILEAU Lutr. v..• Il s'agit [dans une guerre], dit le philosophe, de quelques tas de boue grands comme votre talon ; ce n'est pas qu'aucun de ces millions d'hommes qui se font égorger prétende un fétu sur ces tas de boue, VOLT. Micromégas, 7.• Je trouvai des tas de dépêches tant de la cour que des autres ambassadeurs, dont il n'avait pu lire ce qui était chiffré, J. J. ROUSS. Conf. VII.Populairement. Mettre plusieurs choses ablativo tout en un tas, les mettre ensemble confusément.Familièrement. Se mettre tout en tas, se ramasser et se mettre en un peloton.Fig. Crier famine sur un tas de blé, se plaindre au milieu de l'abondance.Il ferait rire un tas de pierre, se dit d'un plaisant.Fig. et familièrement. Un tas de, beaucoup de.• Je ne dois d'autre réponse à cet argument [contre Olympie], que de bâtir un roman à la façon de Calprenède, et de supposer un tas d'aventures improbables, VOLT. Lett. Chauvelin, 26 févr. 1762.• J'appris que le prétendu baron m'en avait imposé par un tas de mensonges, J. J. ROUSS. Conf. XII.2° Multitude de gens, en mauvaise part, par mépris.• Certes, c'est lâchement qu'un tas de médisants.... De frivoles soupçons nos courages étonnent, MALH. v, 26.• Un tas d'hommes perdus de dettes et de crimes, Que pressent de mes lois les ordres légitimes, CORN. Cinna, v, 1.• Un tas de misérables sophistes formés dans l'école du mensonge, BOILEAU Disc. sur la satire XII.• Lodève mourut riche et vieux, et laissa un tas de bâtards, SAINT-SIMON 133, 228.• Vous avez un tas de créanciers, que j'aurais bien envie de mettre à notre bataillon, DANCOURT la Gazette, sc. i..• Ces tas de désoeuvrés qu'on appelle bonne compagnie, J. J. ROUSS. Hél. v, 2.Tirer dans le tas, lâcher son coup de fusil sur une masse d'hommes ou d'animaux, sans en viser un en particulier.3° Au trictrac, se dit de l'amas de dames qu'on fait avant de commencer le jeu.4° Terme d'architecture. Se dit de la masse d'un ouvrage en construction.Approcher des matériaux sur le tas, les monter de sorte qu'ils soient prêts à être employés.Tas de charge, dans les voûtes gothiques, se dit des coussinets à branches, d'où partent les ogives, formerets, arcs doubleaux, etc.Terme de maçonnerie. Tailler sur le tas, se dit lorsque la taille, au lieu de se faire au chantier, s'exécute au bâtiment.Terme de charpentier. La place sur laquelle on raccorde, dans le bâtiment, une pièce que l'on pose. On dit faire une mortaise, un tenon, un coupement, une entaille sur le tas.Terme de ponts et de chaussées. Tas ou tas droit, rangée de pavés en ligne droite, sur le milieu d'une chaussée.TAS, MONCEAU. Ce qui distingue le tas du monceau, c'est que le tas est composé de parties semblables, tandis que monceau n'implique pas cette idée : un monceau de ruines, plutôt qu'un tas de ruines ; un tas de blé plutôt qu'un monceau de blé.XIIIe s.• Et quant crestiien virent le roi ensi maintenir, si se ferirent tout à un tas en mer et prirent terre, Chron. de Rains, 201.XIVe s.• Un tas.... De fain [foin] en une grange qu'on ot fait entasser, Guesclin. 20523.XVe s.• [Les François] ocioient [les Flamands] à grands tas en la boue et ès maisons où ils se traioient, FROISSART II, II, 184.• Et feroit à tas de son espée sur le bassinet et sur le dos du seigneur de Sconnevort, FROISSART I, I, 140.• Lesquelx se bouterent et musserent tous ensemble en une tasse de boys, DU CANGE tassia..• Et comme furent traictez ung tas de povres francs archiers qui avoient esté prins dedans Neelle, COMM. III, 10.XVIe s.• Soubdain vindrent à tas saiges femmes de tous coustez, RAB. Garg. I, 6.• Boeuf de saison à tas [en quantité], RAB. I, 4.• Un tas de jeunesses folles, DU BELLAY III, 76, recto..• Un tas de gens, interpretes et contrerooleurs ordinaires des desseings de Dieu, MONT. I, 248.Berry, à tas : il y avait du monde à tas dans l'assemblée ; provenç. tatz ; du germanique : anglo-sax. tass ; néerlandais, tas, amas de blé ; anc. haut-allem. zas ; ou du celtique : gaélique, tas ; kymri, dâs ; bas-breton, dastum.————————tas 2.(tâ) s. m.1° Matrice dont se servent les boutonniers (ce qui est le sens ancien).2° Petite enclume portative, placée quelquefois sur le même billot qu'une grande.3° Terme de monnayage. Bloc d'acier sur lequel on essaye la sonorité des monnaies frappées.• Les ayant brisés [des boutons de platine] dans un mortier d'agate et sur un tas d'acier, BUFF. Hist. min. Introd. Oeuv. t. VII, p. 54.XIIIe s.• Nus [nul] bouclier de fer ne peut ferir boucles en tas, quar elles ne sont ne bonnes ne loiaus, Liv. des mét. 58.XIVe s.• Que nuls orfevres ne puissent faire planches de boutons ferues en tas, qui ne se reviennent massives et toutes pleines, Statuts des orfévres de Paris, DE LABORDE Émaux, p. 514.D'après Scheler, tas représente le radical de tasseau ; mais tasseau est le lat. taxillus, osselet, et de là on ne peut tirer tas. Le sens propre est instrument à faire des boutons ; et c'est de là qu'il a pris dans d'autres métiers le sens de petit bloc, de petite enclume. Il semble probable que ce n'est pas autre chose que le mot tas 1.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE• Nom, en Normandie, d'un lézard noir et jaune qui se met dans les murailles ou se cache dans les cailloux ; il passe pour venimeux ; les vaches, dit-on, le mangent et en meurent, DELBOULLE Gloss. de la vallée d'Yères, p. 319.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.