- santé
- (san-té) s. f.1° État de celui qui est sain, qui se porte bien ; exercice permanent et facile de toutes les fonctions de l'économie.• Je vous pourrais servir de quelque chose si j'avais de la santé, BALZ. liv. II, lett. 3.• Je ne croirai pas qu'elle [une dame qui priait pour lui] m'aime tant qu'elle dit, ni que j'aie beaucoup de part en ses prières, si je continue à avoir si peu de santé et si peu de fortune, VOIT. Lett. 25.• Seigneur.... vous m'aviez donné la santé pour vous servir, j'en ai fait un usage tout profane, PASC. Prière pour le bon usage des mal.• Oui, Seigneur, je confesse que j'ai estimé la santé un bien, non pas parce qu'elle est un moyen facile pour vous servir avec utilité..., PASC. ib..• Une santé robuste, PASC. ib..• Ce n'est pas vivre que de n'avoir point de santé, SÉV. 2 nov. 1679.• J'ai eu bien des vapeurs, et cette belle santé, que vous avez vue si triomphante, a reçu quelques attaques dont je me suis trouvée humiliée, comme si j'avais reçu un affront, SÉV. à Bussy, 6 août 1675.• Non, après ce que nous venons de voir [la mort précipitée de Madame], la santé n'est qu'un nom, la vie n'est qu'un songe, BOSSUET Duch. d'Orl..• Quelle santé nous couvrait la mort que la reine portait dans son sein ! de combien près la menace a-t-elle été suivie du coup !, BOSSUET Mar.-Thér..• Elle poursuit : Dieu me donnera peut-être de la santé pour aller servir cette paralytique, BOSSUET Anne de Gonz..• Vous dirai-je.... qu'elle sacrifia sa santé, toute faible et tout usée qu'elle était, à l'honneur d'être auprès d'une grande reine ?, FLÉCH. Duch. de Mont..• Il crut que Dieu l'avait mis dans le palais comme Adam dans le paradis pour y travailler, et répondit depuis à ceux qui le priaient de se ménager, que sa santé et sa vie étaient au public, et non pas à lui, FLÉCH. Lamoignon..• Quel carême saint Louis n'a-t-il pas continué, aux dépens même de sa santé, toute précieuse qu'elle était ?, FLÉCH. Panég. St Louis..• Par mes ordres trompeurs tout le peuple excité, Du prince déjà mort demandait la santé, RAC. Brit. IV, 2.• Ô déesse de la santé, Fille de la sobriété, Et mère des plaisirs du sage, VOLT. Lett. en vers et en prose, 81.• Que puis-je conclure ? que Pascal se portait mal, et que l'autre [son commentateur] se portait bien : Bonne ou mauvaise santé Fait notre philosophie [vers de Chaulieu], VOLT. Mél. litt. Observations, avertissement..• Une première édition n'est jamais qu'un essai... je demande seulement de la santé au ciel, comme Ajax demandait du jour, VOLT. Lett. Cideville, 3 avr. 1752.• Vous êtes dans une solitude complète, vous crevez de santé, GALIANI Corresp. t. II, p. 213, dans POUGENS.• La santé peut paraître à la longue un peu fade ; Il faut, pour la sentir, avoir été malade, COLLIN D'HARLEVILLE Optimiste, I, 7.• Elle se servait de la faiblesse de sa santé autant pour plaire que pour toucher, STAËL Corinne, XII, 2.Familièrement et par exagération, une santé imperturbable, insolente, une santé que rien n'altère.On dit dans le même sens : une santé de crocheteur, une santé d'athlète.• Peut-être, avant deux jours, Courtois et Denyau, mandés à son secours [d'une prétendue malade]... Lui sauront bien ôter cette santé d'athlète, BOILEAU Sat. X.• Je bois à merveille ; je mange de même ; je dors comme une marmotte ; voilà ma santé. - C'est une santé de crocheteur ; un honnête homme serait heureux de l'avoir, MARIV. la Double surprise de l'amour, I, 2.Une petite santé, une santé qui ne se soutient qu'à l'aide de ménagements.• Pour la coquetterie la petite santé est une ressource, POINSINET Cercle, 2.Une grande santé, une santé solide qui n'est jamais dérangée.• Que n'avez-vous un peu de ma grande santé ?, SÉV. 25 déc. 1679.Lui demander s'il veut cela, c'est demander à un malade s'il veut la santé.Chocolat de santé, chocolat propre à entretenir la santé.On dit de même : flanelle de santé.2° Au plur Les santés, la santé de plusieurs personnes.• Comme vous êtes le centre de toutes les conduites et la cause de toutes les santés, je me réjouis infiniment avec vous de tant de bons succès, SÉV. à Mme de Grignan, 16 oct. 1689.3° Complexion, constitution.• Aimez-vous un peu pour l'amour de nous, commencez à étudier votre santé, que vous avez jusques ici négligée, BALZ. liv. VIII, lett. 7.Au plur. Même sens. Des santés qui ne se soutiennent qu'à force de remèdes.• Pour les santés délicates, elles méritent qu'on y prenne confiance, SÉV. 612.4° État salubre, en parlant d'une ville, d'un pays, par opposition à maladie épidémique. La santé de la ville est bonne malgré les chaleurs.• La santé, dans ces murs tout d'un coup répandue, Fait crier au miracle, CORN. Oedipe, V, 11.5° Officier de santé, médecin d'un ordre inférieur, en ce sens qu'on lui demande moins de connaissances qu'aux docteurs.6° Service de santé, les médecins et les chirurgiens attachés au service du roi, de l'empereur, d'un prince.7° Maison de santé, maison où l'on reçoit des malades moyennant un prix convenu.8° Corps de santé, corps chargé du service médical dans l'armée, dans la marine.On dit de même : service de santé.9° Lieu, maison de santé ou, absolument, la santé, maison désignée où l'on porte les pestiférés, et où l'on retient ceux qui viennent de lieux soupçonnés de peste (cette dénomination a vieilli, voy. lazaret).Bureau de santé, établissement formé dans les villes maritimes pour inspecter les bâtiments soupçonnés de contagion.Bateau de santé, canot qui va visiter un navire à son entrée dans le port et qui y conduit le médecin.On dit dans un sens analogue : un garde de santé.Billet de santé, attestation que des officiers ou des magistrats donnent en temps de peste, pour certifier qu'un voyageur ne vient pas d'un lieu suspect.Capitaine de santé, nom, dans quelques villes, au XVIIe siècle, en temps de peste, d'officiers chargés de veiller à la santé publique.10° Au moral. La santé de l'esprit. La santé de l'âme.11° Action de boire à quelqu'un dans un repas, en lui souhaitant santé.• Votre pâté, dès qu'il parut, Ramena les santés, et fit naître l'envie De boire à Chloris, à Sylvie, LA FONT. Lett. XIV, à M. Simon.• La divine potion pour conserver la santé spirituelle par la cure de la maladie invétérée de boire à la santé, titre d'un livre, 1648, cité par VOLT. Dict. phil. Boire à la santé.• Quarante gentilshommes avaient dîné en bas, et avaient bu chacun quarante santés, SÉV. 77.• Votre santé a été célébrée au plus beau repas que j'aie jamais vu, SÉV. 122.• Un Allemand qui perdit la vie pour avoir bu, dans une débauche, trois santés avec du tabac dans son vin, LESAGE Diable boit. 12.Porter la santé de quelqu'un, boire des santés, boire à la santé.• Cependant mon hâbleur, avec une voix haute, Porte à mes campagnards la santé de notre hôte, BOILEAU Sat. III.À votre santé, façon de parler dont on se sert à table lorsqu'au moment de boire on souhaite santé à quelqu'un.On dit de même : à la santé de monsieur un tel. à la santé des absents. Boire à la santé de quelqu'un.• On but encore à la santé de l'hôte, LA FONT. Rem..• Nous avons bu à votre santé en vin blanc.... Mme de Grignan a commencé, les autres ont suivi, SÉV. à M. de Chaulnes, 5 mai 1691.• À ma santé coule un vin généreux, BÉR. Bon vieill..12° Santé du corps, nom populaire, à Paris, du cresson de fontaine.XIIe s.• Nen est sanctez en la meie carn [chair], Liber psalm. p. 49.• Ne se doit plaindre li homs qui santé a, Bat. D'Aleschans, V. 8030.• Lores requist li reis le prudume, que il Deu depreiast que guarisun e sancted de la main li dunast, Rois, 287.XIIIe s.• Le diable me cuide bien avoir engané ; Mais n'i aura pooir, se Diex me dont santé [jugement sain], Berte, XLV.• Bien [elle] sait que se sa fille fust en bonne santé, Qu'ele l'eüst veüe..., ib. LXXXI.• Mais li espoirs d'amie avoir Lui fit tost sa santé ravoir, Bl. et Jeh. 805.XIVe s.• De ceste hache ci li donrai tel santé, Car il ne lui chaura combien on vende blé, Guesclin. 19 290.XVe s.• ...Si Dieu me donne que à santé je puisse retourner en la comté de Hainaut, FROISS. II, III, 12.• Si tu estoyes chose mortelle et que on te peust tenir aux mains, tu auroyes occis à ta male santé ce preux chevalier, Perceforest, t. III, f° 14.XVIe s.• Ilz faisoient festin pour la joye du recouvrement de sa santé, AMYOT Pomp. 82.• Nul ne doute de la santé du sejour ès forests, O. DE SERRES 784.• La serenité du ciel, la santé de l'air, le plaisant aspect de la contrée, O. DE SERRES 1000.• Souvenez-vous du proverbe qui dit : Il n'est richesse que de santé, LANOUE 185.• Dieu nous garde de la santé des Allemans et de la maladie des François, OUDIN Curios. franç..• De grande maladie vient-on bien en grande santé, COTGRAVE .• Qui n'a santé il n'a rien ; qui a santé il a tout, ID. .• La santé du corps, la chaleur des pieds, LEROUX DE LINCY Prov. t. I, p. 275.• Netteté nourrist la santé, LEROUX DE LINCY ib. t. II, p. 356.Provenç. santat, sandat, sanitat, sanetat ; espagn. sanidad ; ital. sanità ; du lat. sanitatem, de sanus (voy. sain).SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRESANTÉ. Ajoutez :13° Fig. Porter santé, demeurer dans un état de tranquillité, de possession de soi-même.• Depuis cette funeste époque, il [le cardinal de Noailles] ne porta quasi plus santé, je veux dire qu'il fut presque incontinent attaqué, et peu à peu poussé sans relâche aux dernières extrémités, jusqu'à la fin de sa vie, SAINT-SIMON dans Scènes et portraits choisis, par Eug. de Lanneau, t. I, p. 225 (Destruction de Port-Royal)..
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.