- baie
- bai, baie(bè, bê) adj.D'un rouge brun, en parlant des chevaux.• Je fis trois charges sur mon excellent courtaut bai brun, SAINT-SIMON 12, 139.Variétés : bai fauve, bai clair, bai cerise, bai foncé, bai châtain, bai marron, bai brun. Quand on nomme ces variétés, on les emploie, par ellipse, en adjectif invariable : des chevaux bai clair, bai foncé. On emploie aussi le nom de ces variétés, comme substantif masculin : le bai clair.XIIe s.• Li quens Ernaus broiche le destrier bai, Raoul de Camb. 124.XIIIe s.• [Ils] Orent Berte montée sur un palefroy bai, Berte, VII.XVIe s.Provenç. bai ; espagn. bayo ; ital. baio ; bas-lat. baius, bagus, bagius, baiardus (d'où le nom du célèbre Bayard, cheval de Renaud, fils d'Aimon), du latin badius.————————baie 1.(bê) s. f.Petit golfe dont l'entrée est resserrée.Espagn. bahía ; ital. baia ; angl. bay, du bas-latin baia, port (portum veteres a bajulandis mercibus vocabant baias, dit Isidore). Mais bajulare ne peut donner baia. On a indiqué pour étymologie baie, porte, parce que la baie est une ouverture dans une côte, et l'irlandais bâdh ou bâgh, petit golfe ; mais baie, porte (voy. baie 2), ayant un radical bada, et le celtique bâdh ou bâgh ne sont pas conciliables avec le baia d'Isidore ; à une époque aussi reculée que le VIe siècle, la consonne aurait été conservée, et le mot eût été bada ou baga. On a indiqué aussi la ville de Bayonne, dont le nom se décomposerait en deux mots basques, baia, port, et ona, bon ; mais ceci est un cercle hypothétique où Bayonne explique baie, et baie explique Bayonne. Il ne faut pas sortir du domaine latin : il y avait Bajoe qui, signifiant un lieu agréable sur la côte de Campanie, avait fini par prendre le sens de tout lieu maritime agréable ; de là le sens roman de baie, qui est un refuge pour les marins. Une particularité vient à l'appui : le latin disait bajae, en deux syllabes avec l'accent sur ba ; d'où l'italien baia et le français baie ; le grec avait un terme en trois syllabes, avec l'accent sur l'i, d'où une double accentuation qui s'est conservée dans l'espagnol bahía.————————baie 2.(bê) s. f.1° Terme de maçonnerie. Ouverture qu'on pratique dans un mur ou dans un assemblage de charpente pour faire une porte, une fenêtre.2° Espace qui reste à paver dans une chaussée.XIIe s.• Et par l'uis dont cuida clore cele baée Est la veie desclose, et l'ire Deu mustrée, Th. le mart. 153.Bayer, être ouvert (voy BAYER) ; génev. baide, interstice, bède, intervalle.————————baie 3.(bê) s. f.Tromperie, mystification.• La muse Qui me repaît de baie en ses fous passe-temps, RÉGNIER Sat. XV.• Mon esprit.... Qui dans ses caprices s'égaie Et souvent se donne la baie, RÉGNIER Ép. III.• J'ai donné cette baie à bien d'autres qu'à vous, CORN. le Ment. III, 5.• On leur fait admirer les baies qu'on leur donne, CORN. ib. I, 6.• Le sort a bien donné la baie à mon espoir, MOL. l'Étour. II, 13.XIIIe s.• Dame, gardez vous de la bée [attente inutile], Qui en maint lieu par la contrée S'arest et fait la gent muser, Lai du conseil.• Par tel bée, par tel desir [elle] Passe tant vespre et tant matin, Que sa biauté va à declin, ib..XVe s.• Messeigneurs, pardonnez-moi que je vous ai fait payer la baie [mystification], LOUIS XI Nouv. LXXXI.XVIe s.• Ils font contenance d'avoir la teste pleine de plusieurs belles choses ; mais à faulte d'eloquence ne les pouvoir mettre en evidence, c'est une baye, MONT. I, 188.• Il tint ce dernier avis encores pour une baie, D'AUB. Hist. II, 61.Bayer (voy. ce mot), parce que celui qui donne une baie, fait bayer celui qui la reçoit. Provenç. en bada, en vain ; espagn. et portug. vaya ; ital. baja.————————baie 4.(bê) s. f.Terme de botanique. Fruit charnu dépourvu de noyau, et dont les graines sont placées au milieu de la pulpe : tels sont les raisins, les groseilles. On donne aussi par extension le nom de baies à des fruits dont les graines sont contenues dans des loges, tels que ceux des morelles, de la belladone, etc.• On eût dit que ses joues [de Clodion] étaient peintes du vermillon de ces baies d'églantiers qui brillent au milieu des neiges, CHATEAUB. Mart. 202.Dimanche des baies, un des noms donnés au dimanche des Rameaux, parce qu'on y apporte souvent des branches de laurier, garnies de leurs baies.XIIIe s.• Et se il y metoit [dans la bierre] autre chose pour efforcier, c'est à savoir baye, piment et pois resines, il l'amenderoit au roi de vint sous de Paris, Livr. des mét. 30.XVIe s.• Bague [pour baie de lierre], RAB. Pant. V, 34.Latin, bacca.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.