- poignée
- (po-gnée ; quelques-uns disent poi-gnée) s. f.1° Quantité que la main peut contenir fermée.• Aussitôt de longs clous il prend une poignée, BOILEAU Lutr. II.• L'humanité m'y aurait refusé une poignée de riz, tant la religion m'y avait rendu odieux, BERN DE ST-P. Ch. ind..Fig.• J'ai pris les libertés que vous m'avez données.... j'ai jeté quelques poignées de mortier dans un ou deux endroits d'un édifice de marbre [la Réfutation de Machiavel], VOLT. Lett. prince roy. de Prusse, 1739.Acheter la viande à poignée, l'acheter en la soupesant à la main, sans la peser effectivement dans la balance.Familièrement. Prendre une poignée de feu, se chauffer un moment.Fig.• Je suis ravi de la quantité de souvenirs que vous m'envoyez ; je les distribuerai avec plaisir.... envoyez-m'en une poignée pour des femmes, SÉV. 19 avr. 1694.Fig. et populairement. Arrangé, donné comme une poignée de sottises, se dit d'une chose en désordre, ou donnée malhonnêtement.2° Ce qu'on saisit avec la main. Une poignée d'herbes, une poignée de cheveux.Une poignée de verges, des brins de bouleau liés ensemble.3° Terme de commerce. Une poignée de fil, un certain nombre d'écheveaux.Une poignée de morues, deux morues sèches jointes ensemble.4° Fig. Petit nombre.• Vous êtes accouru avec une poignée de gens au secours d'une place qui était assiégée par une grande armée, VOIT. Lett. 89.• Pour arrêter quelques jours l'armée persienne à un passage difficile, et pour lui faire sentir ce que c'était que la Grèce, une poignée de Lacédémoniens courut avec son roi à une mort assurée, BOSSUET Hist. III, 5.Une poignée de monde, très peu de gens.• Avec une poignée de monde, il rend toutes nos forces inutiles, et nous ôte partout les moyens de l'attaquer, J. J. ROUSS. Hél. v, 4.5° Une poignée de main, action par laquelle deux personnes se prennent la main en signe de salutation amicale. Nous nous sommes donné, en nous quittant, une poignée de main.6° La partie d'un objet par où on le saisit, on le tient à la main. La poignée d'un sabre, d'un sceptre.• Ce n'est pas sans raison qu'on les a définis [les jésuites] une épée nue dont la poignée est à Rome, D'ALEMB. Destr. des jésuites, Oeuv. t. v, p. 37, dans POUGENS..Poignée de pistolet, la partie par laquelle on tient le pistolet.Se dit aussi des pointes de toile que les emballeurs laissent aux coins d'un ballot pour le remuer plus facilement.Poignée de l'aviron, partie extrême de l'aviron, celle que le rameur tient dans sa main, et qui, pour cela, est arrondie et d'un petit diamètre ; dite aussi le manche de l'aviron.7° Ce qui sert, dans les cuisines, dans les laboratoires, etc. pour saisir ou tenir un ustensile trop chaud.Manche avec lequel les plombiers et les ferblantiers prennent les fers à souder.8° Terme de fontainier. La partie supérieure d'une clef de robinet, sur laquelle on pose la main pour la faire tourner dans son boisseau.Terme de serrurier. Pièce sur laquelle on pose la main pour fermer ou tirer à soi une porte, une croisée, etc.Pièce qui meut le corps d'une espagnolette.9° Moitié de fuseau, sur le gros bout de laquelle les metteurs en oeuvre mettent du ciment pour y affermir les pierres qu'on veut travailler.Morceau de bois rond sur le bout duquel les graveurs en cachet mettent le ciment où ils enfoncent le cachet.10° À poignée, loc. adv. à pleine main. Prendre une chose à poignée.En grande quantité. Jeter de l'argent à poignée.• Sur les chaumières dédaignées Par les maîtres et les valets, Joyeuse, elle [la nature] jette à poignées Les fleurs qu'elle vend aux palais, V. HUGO Voix intérieures, 5.XIIe s.• E gengibre e girofre à puignies mangeit, Th. le mart. 102.• Cele respundi : Jo n'en ai si une puinnie nun de farine [sinon une poignée de farine] en un vaissel, Rois, p. 311.XIIIe s.• Quiconques est liniers à Paris, il puct et doit vendre soulement en gros, par poigniées, par pesiaus, par cartiers et boteleites de betisi et lin serancié boen et loial, Liv. des mét. 145.• Et donnoit à poingnées aussi bien les siens deniers, comme il faisoit ceulz que il avoit gaingnés, JOINV. 254.XIVe s.• Deux poignées d'argent, neellées de France, à porter la palme le jour de pasques flories, DE LABORDE Ém. p. 455.XVe s.• Une poignée de gens, FROISS. I, I, 289.• Luy perça outre la targe et parmy l'espaule, tant que le fer passa outre bien une poignée [une largeur de main], FROISS. liv. IV, p. 18, dans LACURNE.• Le suppliant donna à ladite femme deux poingnées ou visage, et la jeta par terre, DU CANGE pugnata..• Comme grand prince qu'il fust, si consideroit il ce monde transitoire, et sa haute domination et gloire rien estre que vanité et pugnie de vent, CHASTEL. Él. de Ch. le Hardi..• Une grosse poignée de verges, LOUIS XI Nouv. XLIV.XVIe s.• Mettant la main sur la pognée de l'espée, D'AUB. Hist. II, 284.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREPOIGNÉE. Ajoutez :11° Poignée de main, nom donné à des morceaux tout coupés qui sont dans la corbeille contenant le pain bénit.• 822 petits pains ont été ainsi distribués, sans compter les grands pains bénits et deux énormes corbeilles pleines de ces morceaux tout coupés qu'on nomme des poignées de main, la Liberté, 8 nov. 1869.12° En Normandie, mesure, pour le lin, qui équivaut à la quantité de tiges que peuvent entourer les deux mains rapprochées.• Nous avons vu imposer dans des baux, outre le payement des fermages en argent, des prestations annuelles en lin, desquelles l'importance était supputée par poignées, H. MOISY Noms de famille normands, p. 366.13° Poignée d'enfonçures, de chanteaux, mesures de solidité pour le merrain.• Champagne : la treille se compose de 65 dos de douves, de 50 poignées d'enfonçures et de 50 poignées de chanteaux ; le dos contient 16 douves ; la poignée est de 4 pièces, Annuaire des Eaux et Forêts, 1873, p. 24.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.