- aïeul
- (a-ieul) s. m.1° Grand-père. Aïeul paternel. Aïeul maternel.• M. de Montausier racontait avec plaisir les services que son aïeul avait rendus à Henri IV, FLÉCH. Montausier..• J'ai pour aïeul le père et le maître des dieux, RAC. Phèd. IV, 6.2° Au plur. Aïeuls, le grand-père paternel et le grand-père maternel, et aussi le grand-père et la grand'mère. Ses deux aïeuls ont assisté à ce mariage.3° Il a aussi été employé pour désigner tous les ascendants soit paternels, soit maternels. La généalogie des Rabutin que doit publier Bussy lui paraît d'avance [à Mme de Sévigné] un livre admirable ; elle est beaucoup moins occupée de ses aïeuls maternels, L'ABBÉ DE VAUXELLES, Notice sur Sév.AÏEUX (a-ieu), s. m. plur. Tous ceux de qui l'on descend, ou ceux qui ont vécu dans les siècles passés.• Qui sert bien son pays n'a pas besoin d'aïeux, VOLT. Mér. I, 3.• Ce long amas d'aïeux, que vous diffamez tous, Sont autant de témoins qui parlent contre vous, BOILEAU Sat. v..• Le ciel, tout l'univers est plein de mes aïeux, RAC. Phèd. IV, 6.• Plus d'honneur, plus de lois ; Rome est anéantie ; De l'univers et d'elle il [César] triomphe aujourd'hui ; Nos imprudents aïeux n'ont vaincu que pour lui, VOLT. M. de César, II, 3.• Il est de ces esprits favorisés des cieux, Qui sont tout par eux-mêmes et rien par leurs aïeux, VOLT. Fanatisme, I, 4.1. Au plur. on distingue aïeuls et aïeux : l'un signifiant le grand-père et la grand'mère, l'autre les ancêtres. Cette distinction, qui peut être conservée, n'avait pas cours autrefois ; voyez ces exemples ainsi écrits dans certaines éditions de Massillon :• S'ils [les grands] n'ont point d'autre gloire que celle de leurs aïeuls, MASS. P. Car. Grandeur de J.C..• . Le souvenir de leurs aïeuls devient leur opprobre, MASS. ib..• Des aïeuls dont il ne reste qu'une vile poussière, MASS. ib..• Les glorieux vestiges de ses aïeuls, PERROT D'ABLANCOURT Tac. p. 77.D'autre part Ménage remarque : Tous nos poëtes généralement riment aïeuls avec dieux, cieux, lieux et autres mots semblables ; cette rime est très mauvaise, car on prononce aïeuls en faisant sentir l et non aïeux. Ce qui prouve que de son temps on faisait sonner l au pluriel.2. M. Jullien dit : " On prend souvent aïeux pour le pluriel d'aïeul ; c'est une erreur : l'aïeul est le grand-père ; il est après le bisaïeul, et, dans ce sens, il a pour pluriel aïeuls qui est régulier : Ses deux aïeuls ont rempli les premières charges. Aïeux, au contraire, signifie tous ceux dont on descend, et non pas le grand-père, la grand' mère : Nos aïeux ; suivre la trace de ses aïeux. C'est dans ce sens qu'on dit d'un malade qu'il est allé voir ses aïeux, LA FONT., Fab. V. 12, et non pas ses aïeuls qui peuvent très bien lui survivre. De là on peut conclure que La Bruyère a fait une faute quand il a dit, Caractères, ch. 11 : Les hommes de génie n'ont ni aïeuls ni descendants. Il fallait aïeux, qui est pris ici au figuré ; La Bruyère voulait dire que la gloire ne se transmet pas par le sang. Pour des aïeuls les hommes de génie en ont eu très certainement comme tous les autres, un du côté de leur père, un du côté de leur mère. " Chez La Bruyère, ce n'est pas une faute, c'est une manière de parler de son temps. Maintenant la distinction est faite, et on a été conduit par la double prononciation du pluriel aïeuls et aïeux à établir deux sens. à ce point de vue, aïeux n'est pas le pluriel de aïeul, c'est un nom collectif qui n'a pas de singulier. Mais cela n'est vrai que pour l'idée, ce ne l'est pas pour la grammaire. Étymologiquement, aïeux est le véritable pluriel d'aïeul.XIIe s.• Tes aious [ton aïeul] qui prist d'Anju L'honour, eüst cest [celui-là] vil tenu, HUES DE LA FERTÉ Romancero, p. 191.• Al tens à sun aioel esteient il desfait, Li clerc qui erent pris à si vilain mesfait, Th. le Mart. 27.XIIIe s.• N'onc n'orent sergent plus leal Vostre pere ne vostre eal, la Rose, 12192.• Letre que l'ael au dit Raoul les avoit quitez [exemptés] de service, DU CANGE aviones..• Le [la] quele tere li descendi de son pere ou de se [sa] mere ou de son aiol ou de s'aiole, BEAUMANOIR VI, 7.XVe s.• Le roy Edouard, ayeul à iceluy dont nous parlons, FROISS. I, I, 59.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.