- pile
- pile 1.(pi-l') s. f.1° Amas de choses placées les unes sur les autres.• Leurs débris sont couverts d'une pile de morts, MAIRET Mort d'Asdrub. I, 3.• Ils [la famille de M. le Prince] eurent tant de peur qu'on ne s'excusât faute de manteaux, qu'il y en avait des piles à leur porte, SAINT-SIMON 226, 26.• Allez donc, élevez cette pile fatale [un bûcher] ; Préparez les cyprès et l'urne sépulcrale, VOLT. Olymp. V, 3.En pile, en tas.• Quand il tonnait, Mme de Saint-Hérem se fourrait à quatre pattes sous un lit de repos, puis faisait coucher tous ses gens dessus l'un sur l'autre en pile, SAINT-SIMON 97, 26.Pile de boulets, d'obus, de bombes, réunion, en ordre régulier, d'un certain nombre de projectiles sphériques, de manière à former des pyramides, des troncs de pyramides, des troncs de prismes. Les piles de projectiles oblongs présentent la forme d'un mur.2° Chez les marchands en détail, amas de plusieurs poids enfermés l'un dans l'autre qui forment, par gradation, toutes les parties de la livre depuis le demi-gros, ou du kilogramme jusqu'au gramme.3° Au trictrac, pile de malheur ou de misère, se dit lorsqu'un des joueurs, ne pouvant passer dans le jeu de son adversaire, pour faire le jan de retour, est obligé d'entasser toutes ses dames en une seule pile dans le coin de son grand jan.4° Pile galvanique ou voltaïque ou de Volta, ou, simplement, pile, appareil électrique imaginé par Volta en 1800, composé de plaques de cuivre ou de zinc alternées avec un liquide conducteur, et au moyen duquel on produit un courant continu d'électricité galvanique.Pile à auges, pile horizontale dont les couples forment comme de petites auges que l'on remplit d'eau acidulée.Pile sèche, celle où le conducteur humide est remplacé par du carton ou du papier.5° Massif de maçonnerie, tel que ceux sont formées les arches des ponts de pierre.Pile percée, celle qui a une ouverture ou arcade pour faciliter le courant des grandes eaux.6° Portion du tronc d'un arbre qui est susceptible d'être convertie en charpente.XIVe s.• Belle pile [grande quantité], G. GUIART V. 3213.• À pile [en masse], G. GUIART V. 988.• Et de draps y avoit mainte pile empilée, Guesclin. 20398.XVIe s.• Mais quand Didon, qui entendoit le poinct, Secrettement vit la pyle dressée De bois gommeux et d'yeuze entassée..., DU BELLAY IV, 20, verso..• Il mettra le fumier par petites pilles, O. DE SERRES 245.Provenç. pila, sanctuaire, piela, pile ; espagn. et ital. pila, colonne ; portug. pilha, tas ; du lat. pila, colonne, qui se rattache sans doute à pilum, javelot (voy. pile 5).————————pile 2.(pi-l') s. f.1° Grosse pierre qui sert à broyer, à écraser.Populairement. Donner une pile à quelqu'un, le frapper, le battre d'importance.Fig. Mettre quelqu'un à la pile au verjus, parler très mal de lui, ou le tourmenter beaucoup.2° Espèce de caisson dans lequel on foule les draps, soit avec des pilons, soit avec les pieds. Les principales parties d'un moulin à foulon sont.... les pilons ou maillets, et les piles, qu'on nomme autrement pots, et quelquefois simplement vaisseaux à fouler ; les piles sont des espèces d'augets où l'on met l'étoffe que l'on veut fouler, Dict. des arts et mét. Fouleur.Terme de papeterie. Auge où l'on broie le chiffon.3° Citerne servant de réservoir pour les huiles dans une savonnerie.Tonneau dans lequel le cartonnier met la matière propre à faire le carton.Grands vaisseaux de pierre dure, dans lesquels les Italiens et les Provençaux mettent les huiles qu'ils veulent garder.XIVe s.XVIe s.• Et jouoyent à la balle, à la paume, à la pile trigone, RAB. I, 23.Lat. pila, mortier à piler, pour pisla, de pinsere, broyer.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE2. PILE. Ajoutez :4° Huile de pile, huile mise dans les réservoirs appelés piles.• Les huiles lampantes se traitent [à Marseille] à 59 francs de la pile, Journ. offic. 16 déc. 1872, p. 7832, 3e col..• Les lampantes de pile valent 57 francs ; les lampantes de fabrique, 55 francs 50, ib. 19 mai 1873, p. 3197, 1re col..————————pile 3.(pi-l') s. f.1° Ancien terme de monnayeur. Morceau de fer bien acéré, au bout duquel est gravée l'effigie ou la devise qui s'imprime sur la monnaie.2° Aujourd'hui, côté d'une pièce de monnaie opposé à la face, et où sont empreintes les armes du souverain et la valeur de la pièce. Les parisis et les tournois, quoique usés, ne laisseront pas que d'avoir cours, pourvu néanmoins qu'on les puisse connaître, tant du côté de croix que de pile, Ordonn. 1662, vers mi-carême.Jouer à pile ou face, synonyme de jouer à croix ou pile.Fig. et familièrement. à pile ou face, au hasard. Il n'a pas fait de trop longues réflexions, il s'est décidé à pile ou face.• N'avoir ni croix, ni pile, c'est n'avoir point d'argent, LEROUX Dict. comique.XIIe s.• Ne faillissent au duc por pille ne por croiz, VACCE dans DU CANGE, pila..XIIIe s.• Il est esgardé que nuls ne puisse faire monoies semblant à la monoye le roy, que il n'y ait dissemblance aperte et devers croix et devers pille, Ordonn. des rois, t. I, p. 93.• Ne fist mie de sa croix pile, Si com font souvent teil dix mile, Qui la prennent par grant faintize, RUTEB. 58.XIVe s.• Jà n'ai ne croix ne pile, Guesclin. 14344.• Ils commencerent à jouer ensemble à hoissier à plus croix ou plus pile, DU CANGE hochia..XVIe s.• À André Belenfant orfevre demeurant à Bourges, six sols tournois pour avoir faict une pille et ung trousseau, en la quelle pille a troys moutons coronnés, et au dict trousseau ung Bituris coronné et taillé, DE FONTENAY Manuel de l'amateur de jetons, p. 197.Wallon, peie ; bas-lat. pila, partie opposée à celle où était la croix. Du Cange pense que ce côté a été ainsi nommé de pila, sanctuaire, église, à cause que les monnaies ont plusieurs fois porté l'effigie d'édifices sacrés. D'autres disent qu'il l'a été de pila, sorte d'instrument monétaire, trébuchet dont on mettait la marque sur les monnaies. Entre ces hypothèses, l'origine de pile reste indécise.————————pile 4.(pi-l') s. f.Terme de pêche. Ligne plus ou moins déliée, faite de fil de pite ou de bon chanvre filé, que l'on attache au bout des lignes latérales partant de la maîtresse corde.————————pile 5.(pi-l') s. m.En termes de blason, se dit d'un pal, qui, s'étrécissant depuis le chef, va se terminer en pointe vers le bas de l'écu.Lat. pilum, sorte de javelot, proprement un pilon, pour pislum, de pinsere, broyer, peler.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.