- philosopher
- (fi-lo-zo-fé) v. n.1° Traiter, raisonnner des choses qui regardent la philosophie.• Bernier, après avoir philosophé cinquante ans, avoue qu'il doute des choses qu'il avait cru les plus vraies, S. ÉVREM. dans RICHELET.• Se moquer de la philosophie, c'est vraiment philosopher, PASC. Pens. VII, 34, édit. HAVET..• On avait philosophé trois mille ans durant sur divers principes, et il s'élève dans un coin de la terre un homme [Descartes] qui change toute la face de la philosophie...., NICOLE Ess. de mor. 1er traité, ch. 7.• Si j'avais quelqu'un pour m'aider à philosopher, je pense que je deviendrais une de vos écolières [en cartésianisme], SÉV. 432.• ....Des habillements, des armes, des instruments, curiosités qui, quoiqu'elles ne soient pas sorties immédiatement des mains de la nature, ne laissent pas de devenir philosophiques pour qui sait philosopher, FONTEN. Tournefort..• Quand Descartes voulut philosopher, il quitta la France, VOLT. Lett. Damilaville, 14 mars 1764.• On dit : vivre d'abord, ensuite philosopher ; c'est le peuple qui parle ainsi ; mais le sage dit : philosopher d'abord, et vivre ensuite si l'on peut, DIDER. Claude et Nér. II, 2.2° Raisonner, discuter sur diverses matières de morale ou de physique.• Le médecin vous donnant des jours et des heures qui ne sont pas en sa puissance, et toujours prêt à philosopher admirablement de la maladie après la mort, BOSSUET Bourgoing..• Dans la prison même et lorsqu'il buvait la ciguë, il [Socrate] philosophait, dit Plutarque, et instruisait le genre humain, ROLLIN Hist. anc. Oeuv. t. IV, p. 369, dans POUGENS.• N'ayant plus de maîtresse et n'ayant pas un sou, Nous philosopherons maintenant tout le soûl, REGNARD Joueur, IV, 13.• Que sont devenus nos anciens projets de philosopher un jour ensemble dans cette grande ville si peu philosophe [Paris] ?, VOLT. Lett. Formont, 1734.• J'espère cependant que cette santé et cette machine me permettront de jouir des bontés de Votre Majesté, et d'aller philosopher avec elle sur les grands maux et les petits biens de la vie, D'ALEMB. Lett. au roi de Pr. 27 fév. 1777.3° Argumenter, disputer trop subtilement.• Mais sans être savant et sans philosopher, MALH. V, 16.• Ce n'est point à vous de philosopher sur les abaissements et la croix de votre Sauveur, BOURDAL. Dim. de la Quinquagés. Dominic. t. I, p. 454.• Après avoir philosophé toute votre vie, n'apprendrez-vous jamais à raisonner ?, J. J. ROUSS. Émile, v..4° Raisonner sur, tirer des inductions.• Enfin il [le lièvre] se trahit lui-même Par les esprits sortant de son corps échauffé ; Miraut, sur leur odeur ayant philosophé, Conclut que c'est son lièvre, LA FONT. Fabl. v, 17.• On philosophe pourquoi cette augmentation [surcroît de dignité accordé au chancelier d'Aligre], SÉV. 12 janv. 1674.5° S. m. Le philosopher, l'action de philosopher.• Mais n'en déplaise aux vieux : ni leur philosopher Ni tant de beaux écrits qu'on lit en leurs écoles, Pour s'affranchir l'esprit ne sont que des paroles, RÉGNIER Sat. III.Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.XVIe s.• Un ancien, à qui on reprochoit qu'il faisoit profe-sion de la philosophie, de laquelle pourtant en son jugement il ne tenoit pas grand compte, respondit que cela c'estoit vrayement philosopher, MONT. II, 243.Provenç. philosophar ; espagn. filosofar ; ital. filosofare ; du lat. philosophari, de philosophus, philosophe.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREPHILOSOPHER. Ajoutez : - REM. Au XVIIe siècle, philosopher s'employait au sens de raisonner sur, tirer des inductions, comme on le voit par les exemples de La Fontaine et de Mme de Sévigné, rapportés dans le n° 4. C'est ainsi que Richelieu l'emploie dans cette phrase : M. de Chazé a fort bien interrogé M. de Thou [dans le procès de Cinq-Mars], et assurément il n'est pas incapable ; mais, pour la conduite générale de l'affaire, il nous faut, à mon avis, M. de Lauzon, étant besoin qu'un commissaire qui aura cette charge soit capable de philosopher et songer perpétuellement aux moyens qu'il devra tenir pour venir à ses fins, Lettres, etc. 1642, t. VII, p. 17.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.