- patois
- (pa-toî ; un pa-toi-z agréable) s. m.1° Parler provincial qui, étant jadis un dialecte, a cessé d'être littérairement cultivé et qui n'est plus en usage que pour la conversation parmi les gens de la province, et particulièrement parmi les paysans et les ouvriers. Le patois normand, gascon.• Peut-être l'introduction du patois sur la scène française n'est-elle qu'un reste de ce misérable goût que nos pères ont eu pendant un temps pour le burlesque, D'OLIVET Rem. Racine, I, § 49.• Ah ! c'est donc ça qu'elle parle un peu patois, GENLIS Théât. d'éduc. la March. de modes, sc. 2.Par analogie et plaisanterie.• L'âne, qui goûtait fort l'autre façon d'aller, Se plaint en son patois, LA FONT. Fabl. III, 1.• On entendit, à son exemple, Rugir en leur patois messieurs les courtisans, LA FONT. ib. VIII, 14.2° Il se dit quelquefois de certaines façons de parler qui échappent aux gens de province. Cela est du patois.3° Par dénigrement, langue pauvre et grossière.• Un reste de l'ancien patois [la langue gauloise] s'est encore conservé chez quelques rustres dans cette province de Galles, dans la Basse-Bretagne, dans quelques villages de France, VOLT. Dict. Phil. français..• Ce texte [un texte grec] a des délicatesses bien difficiles à rendre, et notre maudit patois [le français] me fait donner au diable, P. L. COUR. Lett. I, 219.Patois se dit aussi pour mauvais style. Quel patois !4° Adj. Patois, patoise, qui a le caractère du patois.• Transposition de mots ridicule et patoise, GARASSE Recherche des recherches, p. 552, dans LACURNE.XIIIe s.• Lais d'amors et sonnés corrois Chantoit chascun en son patois, Li uns en haut, li autre en bas, la Rose, 710.XVe s.• Plusieurs femmes y alloient [écouter un prédicateur] curieusement de nuict et de jour, qui se garnissoient en leurs patois [en leurs localités] de pierres, cendres, cousteaulx et autres ferremens et bastons, pour frapper ceux qui lui voudroient nuire ou empescher sa dicte predication, Chroniq. scand. de Louis XI, p. 396, dans LACURNE. Si apperceus venir de la forest une merveilleuse cyngesse grande et layde sans comparaison, et la suyvoient tant de cinges que sans nombre ; et pour ce à celle fois, si je fuz esbahy, ce n'est pas merveille ; car ilz faisoient contenance en leur patois de moy mettre à mort, Perceforest, t. IV, f° 9.Ménage, Lamonnoye, regardent patois comme dit pour patrois ; patrois représente le bas-latin patriensis, qui s'est dit pour homme du pays, indigène. La difficulté est dans l'absence de l'r. Diez dit que, dans Brunetto Latini, Trésor, p. 3, au lieu de, selon le langage des François, les variantes portent selon le patrois ou pratrois ; mais la nouvelle édition ne donne que patois. On remarquera, dans la Chronique scandaleuse, patois avec le sens de localité, pays ; ce qui concorde avec l'explication de patois par patrois. Le provençal a pati, pays. Dans le Midi on dit un patois, une patoise, pour un compatriote, une compatriote. Tout cela emporte la balance ; et il faut admettre que l'r a disparu.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.