- ouvert
- ouvert, erte(ou-vêr, vèr-t') part. passé d'ouvrir.• Apollon à portes ouvertes Laisse indifféremment cueillir Les belles feuilles toujours vertes Qui gardent les noms de vieillir, MALH. III, 2.• Mille chemins ouverts y [chez les morts] conduisent toujours, RAC. Phèdre, I, 3.• Il [Cimon] voulait que ses vergers et ses jardins fussent ouverts en tout temps aux citoyens, afin qu'ils pussent y prendre les fruits qui leur conviendraient, ROLLIN Traité des Ét. V, III, 2.• Quelque accès m'est ouvert en ce séjour sacré, VOLT. Sémiram. I, 1.• La navigation dans les îles fut alors ouverte à tous les sujets de la domination danoise, RAYNAL Hist. phil. XII, 30.On dit d'un enfant qu'il lit à livre ouvert, quand il est assez avancé pour lire sans étudier d'avance la page.Dans les classes des lycées et colléges, expliquer le grec, le latin, un auteur, à livre ouvert, c'est-à-dire sans préparation.Chanter, jouer à livre ouvert, chanter, jouer en voyant la note et sans avoir auparavant étudié le morceau.• Un recueil de contredanses qu'il dansait toutes à livre ouvert, HAMILT. Gramm. 8.Fig.• Afin que son mystère.... Ne soit ouvert à tous, ni connu du vulgaire, RÉGNIER Sat. IV.C'est un enfonceur de portes ouvertes, se dit d'un fanfaron.On dit aussi : enfoncer une porte ouverte, pour : s'être donné beaucoup de mal pour venir à bout d'une entreprise fort aisée.Ce port est ouvert à tous les étrangers, c'est-à-dire ils peuvent y venir commercer librement et avec sûreté.À main ouverte, loc. adv. En ouvrant la main, et fig. en prodiguant.• C'est une chose assurée que les dons naturels dont nous avons reçu quelques petites parcelles, la munificence divine les a répandus comme à main ouverte sur ces belles intelligences [les anges], BOSSUET 1er sermon, Démons, 1.Avoir les yeux ouverts, ne pas dormir.• Vos yeux seuls et les miens sont ouverts dans l'Aulide, RAC. Iph. I, 1.Avoir les yeux ouverts comme un lièvre, être bien éveillé.Dormir les yeux ouverts comme le lièvre, se dit quand dans le sommeil les paupières ne sont pas bien closes.Fig. Avoir les yeux ouverts, considérer attentivement, avec intérêt.• Tes yeux sur ma conduite incessamment ouverts, RAC. Brit. I, 4.• Des yeux toujours ouverts sur une grande partie du globe, depuis le Mexique jusqu'au fond de la Sicile, VOLT. Moeurs, 163.• Il faut satisfaire sur ce point comme sur le reste la curiosité des hommes qui ont eu les yeux ouverts sur tout ce qui regarde ce prince, VOLT. Charles XII, 8.• Les corps, jaloux de leur honneur, ont sans cesse les yeux ouverts sur la conduite et les actions des membres qui les composent, RAYNAL Hist. phil. XIII, 57.• Sur un nuage d'or Junon du haut des airs Sur ces fameux rivaux tenait les yeux ouverts, DELILLE Én. XII.Terme de blason. Couronne ouverte, couronne composée d'un simple bandeau, par opposition à couronne fermée où le bandeau est surmonté d'une partie qui vient couvrir la tête ; les couronnes de duc, de comte, sont des couronnes ouvertes, celles des rois sont fermées.Tour ouverte, château ouvert, tour, château, avec une porte ouverte ou une embrasure.2° Il se dit d'une plaie dont les bords, n'étant pas rapprochés, restent béants.• On prétend qu'il lui en est resté une blessure ouverte qui le fait beaucoup souffrir, GENLIS Mères rivales, t. II, p. 341, dans POUGENS.3° Entamé, percé.• De tant de coups mon estomac ouvert, Et tout mon triste corps de blessures couvert, MAIRET Sophon. IV, 5.Il se dit de la terre où on a pratiqué des fentes, des sillons.• L'oiseau [le motteux], entraîné par le double motif de chercher sa nourriture dans une terre fraîchement ouverte et de se cacher dans la tranchée, BUFF. Ois. t. IX, p. 347.4° Pays ouvert, pays qui n'est pas défendu par des places fortifiées et où les ennemis peuvent entrer facilement.• Les Polonais sentaient que, si cette guerre, entreprise sans leur consentement, était malheureuse, leur pays ouvert de tous côtés serait en proie au roi de Suède, VOLT. Charles XII, 2.• Laissez donc votre pays tout ouvert comme Sparte ; mais bâtissez-vous, comme elle, de bonnes citadelles dans les coeurs des citoyens, J. J. ROUSS. Gouv. de Pologne, 12.Ville ouverte, ville qui n'est pas fortifiée.• Philadelphie, de même que les autres villes de Pensylvanie, est entièrement ouverte, RAYNAL Hist. phil. XVIII, 6.• Cette ville [Sparte] est tout ouverte, et n'avait alors pour défenseurs que des enfants et des vieillards, BARTHÉL. Anach. ch. 13.Spacieux et sans obstacle.• C'était une très belle chose à voir dans ces campagnes, la plupart du temps fort ouvertes, ces grands corps d'infanterie et de cavalerie marchant en si bon ordre, PELLISSON Lett. histor. t. I, p. 66, dans POUGENS.• J'entrai dans un pays plus ouvert, et j'admirai ce vaste silence de la nature, MONTESQ. Ars. et Ismén..• Ils [les guillemots] ne peuvent trouver leur subsistance que dans une mer ouverte, et ils sont forcés de la quitter dès qu'elle se glace en entier, BUFF. Ois. t. XVIII, p. 18.5° Terme de marine. Rade ouverte, celle où les vents soufflent sans obstacle.Navire ouvert, celui dont l'élévation des murailles et des bastingages n'est pas suffisante ; se dit aussi d'un bâtiment disjoint et dégarni d'étoupe, et d'un bateau non ponté.Voile ouverte, celle qui est brassée sous le vent.Se dit de la distance apparente de deux objets lointains. Objets ouverts d'une voile, de deux voiles, c'est-à-dire séparés par un intervalle apparent de la largeur d'une voile, de deux voiles.6° Terme de botanique. Se dit de parties qui sont épanouies ou étalées.7° Large.• Elle avait le front ouvert, grand et uni, HAMILT. Gram. 7.Terme de manége. Cheval bien ouvert, cheval qui a les jambes, particulièrement celles de devant, éloignées comme il faut l'une de l'autre.Terme de vénerie. Tête ouverte, la tête du cerf, du daim, du chevreuil, quand leurs perches sont écartées et larges ; ce qui constitue la beauté.8° Dont le vêtement a été ôté.• Je vais lui présenter mon estomac ouvert, CORN. Cid, V, 1.9° Les bras ouverts, les deux bras écartés l'un de l'autre et étendus.Fig.• Vous me trouverez toujours les bras ouverts, BOSSUET Lett. 119.À bras ouverts, loc. adv. Avec empressement, avec cordialité.10° Table ouverte, voy. table.11° Commencé.• Je suis partie ce matin des Rochers par un chaud et un temps charmant ; le printemps est ouvert dans nos bois, SÉV. 24 mars 1676.• Il est impossible qu'ayant si bien fait pour les cadets [Grignan], on ne fasse pour l'aîné ; je crois que le temps en viendra, il ne l'était pas encore [venu] l'année passée ; les bienfaits n'étaient pas ouverts comme ils le sont présentement, SÉV. 28 févr. 1680.• N'est-il point [le roi] en train de vous faire du bien.... la libéralité n'est-elle pas ouverte ?, SÉV. 13 mars 1680.• Et dans le même jour, et dans les mêmes lieux, Où des scènes de sang avaient frappé les yeux, Le bal était ouvert et le plaisir barbare Passait des cris de mort aux sons de la guitare, DELILLE Trois règnes, V, 5.La chasse est ouverte, le temps où il est permis de chasser est commencé.12° Les paris sont ouverts, chacun est admis à parier.La question est ouverte, reste ouverte, elle n'est pas décidée, et on la discutera de rechef.Terme de jurisprudence. La succession est ouverte au profit d'un tel, telle personne est dans le cas de recueillir la succession.Terme de féodalité. Fief ouvert en faveur du seigneur, fief qui pouvait être saisi si les droits n'étaient pas payés, si les devoirs n'étaient pas rendus par le vassal.13° Terme de commerce. Compte ouvert, celui auquel on ajoute journellement des articles.Terme de finances. Payer à bureau ouvert, payer tous les billets ou bons qui sont présentés, sans avertissement préalable.• Tous les arrérages.... seront payés à bureau ouvert sur l'ancien taux, sur la présentation et remise des titres originaux, Décret du 22 floréal, an II, Rapp. Cambon, p. 93.14° Guerre ouverte, guerre déclarée.• Ils ne nous font pas une guerre ouverte, FÉN. Tél. X..Force ouverte, force employée d'une façon publique.• S'il voit qu'en sa faveur je marche à force ouverte, CORN. Héracl. IV, 1.• On en vint bientôt à la force ouverte, BOSSUET Var. 7.À force ouverte, loc. adv. Les armes à la main.15° Fig. Accessible.• L'âme de cette reine, à la douleur ouverte, à toute sa famille imputerait sa perte, CORN. Toison d'or, IV, 1.• Et l'âme ouverte au bien que le ciel lui envoie, CORN. Sophon. II, 2.• Ni la bouche ni les oreilles de cette pieuse abbesse n'ont été jamais ouvertes à la médisance, BOSSUET Yol. de Monterby..• Pour moi, je suis plus fière et fuis la gloire aisée.... d'entrer dans un coeur ouvert de toutes parts, RAC. Phèdre, II, 1.• À de nouveaux tourments mes sens étaient ouverts, VOLT. Oreste, I, 5.• Mon coeur à ce récit ouvert de toutes parts, VOLT. Scythes, III, 1.• Cette âme qui ne se croyait plus ouverte qu'à la douleur, trouve encore de la sensibilité en elle pour la reconnaissance qu'elle vous doit à tant de titres, D'ALEMB. Lett. au roi de Prusse, 14 nov. 1776.• Ton sexe faible est oublieux des crimes ; Mais, dans ces murs ouverts à tant de peurs, N'entends-tu pas des ombres de victimes Mêler leurs cris à tes soupirs trompeurs ?, BÉRANG. Octavie..La porte de cette maison est ouverte à tous les honnêtes gens, c'est-à-dire tous les honnêtes gens y sont bien reçus.16° Fig. Qui admet et comprend facilement. Une intelligence ouverte.• Les riches grossiers.... N'ont pas une âme ouverte à sentir les talents, A. CHÉN. Idylles, l'Aveugle..17° Qui exprime la franchise et l'accueil.• Il porte sur le front une allégresse ouverte, Que le bonheur public fait bien moins que ma perte, CORN. Hor. IV, 4.• Je ne vois plus en vous dans ce triste entretien Cet air doux, tendre, ouvert, tel qu'il est quand on aime, PÉCHANTRÉ Mort de Néron, III, 2.• Ce visage ouvert ne se referma pas, même après que je lui eus déclaré ce que je ne croyais pas pouvoir lui cacher, RETZ Mém. t. II, liv. III, p. 457, dans POUGENS.• M. Fouquet l'a aperçu ; il l'a salué avec un visage ouvert et plein de joie et de reconnaissance, SÉV. Lett. à Pompone, 21 et 22 déc. 1664.• On dit que le roi n'a jamais le visage plus serein et plus ouvert avec un ministre que la veille de sa disgrâce, DIDER. Mém. t. III, p. 5, dans POUGENS.Qui se communique.• Je suis fort resserré avec ceux que je ne connais pas, et je ne suis pas même extrêmement ouvert avec la plupart de ceux que je connais, LA ROCHEFOUC. Portrait..• Si votre coeur était un peu plus ouvert, vous ne seriez pas si injuste, SÉV. 15 sept. 1679.• Je connais tes vertus, j'estime ta valeur, Et de ton coeur ouvert la naïve candeur, VOLT. Scythes, II, 2.• Sa gaieté n'est point bruyante ; il est facile et ouvert : il n'a point cette sorte d'esprit qui semble vouloir étouffer celui des autres, VOLT. l'Homme aux 40 écus, Grande querelle.Franc, sincère.• Qui s'expose au péril veut bien trouver sa perte, Et, pour vous en parler avec une âme ouverte...., CORN. Poly. II, 4.• Je cherchais quelqu'un d'un caractère ouvert et gai, MARIVAUX Pays. parv. 2e part..• Ce coeur est tout ouvert et n'a rien qu'il déguise, VOLT. Brutus, II, 2.• Cette manière ouverte d'exposer ses opérations et la situation de ses affaires a sans doute ses avantages, MARMONTEL Mém. XII.À coeur ouvert, loc. adv. Avec franchise, sincérité, effusion.• Et chacun en riant en parle à coeur ouvert, RÉGNIER Élég. II.• Pauline a l'âme noble et parle à coeur ouvert, CORN. Poly. II, 2.• Je vous parlerai à coeur ouvert de Mlle Duplessis, SÉV. 55.• Il hait à coeur ouvert ou cesse de haïr, RAC. Brit. V, 1.18° En grammaire, e ouvert, a, o ouverts, ceux qu'on entend dans succès, plat, bol, par opposition aux mêmes voix fermées dans thé, bas, clos.19° S. m. Ouvert, terme employé parfois dans la marine pour ouverture, entrée. Nous nous présentâmes à l'ouvert de la baie.S. m. pl. Se dit, à la paume, de certains intervalles garnis de filets qui sont placés entre le toit et les batteries, dans un jeu de dedans.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREOUVERT.13° Ajoutez :Terme de comptabilité. à livre ouvert.• Le grand livre ou livre de comptes est un registre sur lequel on ouvre des comptes à toutes les personnes avec qui on fait des affaires ; chaque compte est dressé à livre ouvert, c'est-à-dire qu'il occupe deux pages, en regard l'une de l'autre.... la page de gauche reçoit les articles du doit ou débit ; celle de droite, les articles de l'avoir ou crédit, SAINTOIN-LEROY Comptabilité simplifiée, 3e éd. Paris, 1876, p. 12.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.