- miracle
- (mi-ra-kl') s. m.1° Acte contraire aux lois ordinaires de la nature et produit par une puissance surnaturelle.• La vertu divine qui avait opéré ce miracle, PASC. Prov. XII.• Miracle : c'est un effet qui excède la force naturelle des moyens qu'on y emploie ; et non-miracle est un effet qui n'excède pas la force naturelle des moyens qu'on y emploie, PASC. Pens. XXIII, 41, éd. HAVET..• Je ne serais pas chrétien sans les miracles, dit saint Augustin, PASC. ib. XXV, 94.• Incrédules, les plus crédules : ils croient les miracles de Vespasien, pour ne pas croire ceux de Moïse, PASC. ib. XXIV, 99.• Les miracles sont plus importants que vous ne pensez ; ils ont servi à la fondation et serviront à la continuation de l'Église jusqu'à l'Antechrist, jusqu'à la fin, PASC. ib. XXIII, 19.• Aux hérétiques les miracles seraient inutiles ; car l'Église, autorisée par les miracles qui ont préoccupé la créance, nous dit qu'il n'ont pas la vraie foi, PASC. ib. XXIII, 13.• Les miracles discernent la doctrine, et la doctrine discerne les miracles, PASC. ib. XXIII, 1.• Si j'avais vu un miracle, disent-ils, je me convertirais ; comment assurent-ils qu'ils feraient ce qu'ils ignorent ?, PASC. ib. XIII, 9.• Les prophéties, les miracles mêmes et les preuves de notre religion ne sont pas de telle nature qu'on puisse dire qu'ils sont absolument convaincants, PASC. ib. XXIV, 18.• Dieu fait des miracles en leur faveur [des rois de Juda], BOSSUET Hist. II, 4.• Le don des miracles est une grâce infructueuse qu'ont eue quelques saints, mais qui n'a point aidé à les faire saints, BOURDAL. 5e dim. après Pâq. Dominic. t. II, p. 217.• En ces murs même une troupe égarée.... De ses miracles faux [de Mahomet] soutient l'illusion, VOLT. Fanat. I, 1.• Rien ne caractérise mieux un miracle que l'impossibilité d'en expliquer l'effet par des causes naturelles, BUFF. Hist. nat. Preuv. théor. terr. Oeuv. t. I, p. 290.• Le fameux Spinosa, qui avait dit que les miracles étaient impossibles, parce qu'ils étaient contraires aux lois de la nature et qu'ils supposaient de la variation dans les décrets de Dieu, BONNET Paling. XVII, 6.Cour des Miracles, se disait d'un endroit de Paris où se réunissaient les gueux et les mendiants, ainsi dite parce que ceux qui simulaient toutes sortes d'infirmités pour solliciter la charité, redevenaient là sains et dispos.2° Par exagération, chose extraordinaire, ou chose ordinaire, régulière dans l'ordre naturel, mais dont on ne sait aucunement la cause ou le moyen.• Les miracles que fait Marie Pour le salut des fleurs de lis, MALH. VI, 3.• Et la main de Rodrigue a fait tous ces miracles !, CORN. Cid, IV, 1.• Un héros, comme un dieu, peut faire des miracles, CORN. Sophon. II, 3.• Ô miracle d'amour !, CORN. Cid, III, 4.• Un jour sans douleur est pour moi un miracle, SCARRON Lettres, Oeuv. t. I, p. 249, dans POUGENS.• Il y a du miracle à un si prompt changement, SÉV. 4 févr. 1696.• C'est un beau miracle, si la Trousse s'est sauvé de l'état où l'on nous l'a représenté, SÉV. 13 août 1675.• Le ciel fit naître en même temps et faisait croître sous une pareille éducation le roi, dont la naissance miraculeuse promettait à tout l'univers une vie pleine de miracles, FLÉCH. Mar.-Thér..• C'est miracle que ce que nous voyons entre les Espagnols et les Français ; Dieu tourne les coeurs comme il lui plaît, MAINTENON Lett. au D. de Noailles, 5 mars 1701.• Le succès tenait du miracle, BOSSUET Var. 1.• Achille, à qui le ciel promet tant de miracles, RAC. Iphig. I, 1.• Ceux qui ont fait les relations de ces étranges événements [la conquête du Mexique] les ont voulu relever par des miracles qui ne servent en effet qu'à les rabaisser ; le vrai miracle fut la conduite de Cortez, VOLT. Moeurs, 147.• L'attraction et la direction de l'aimant sont des miracles continuels ; un limaçon auquel il revient une tête est un miracle ; la naissance de chaque animal, la production de chaque végétal sont des miracles de tous les jours, VOLT. Dict. phil. Miracles..• Un petit nombre de soldats, persuadés de l'habileté de leur général, peuvent enfanter des miracles, CHATEAUBR. Génie, I, II, 2.Familièrement. C'est un miracle de vous voir, se dit d'une personne qu'on n'avait pas vue depuis longtemps.Familièrement. Crier au miracle, crier miracle, se dit quand quelqu'un fait une chose qu'il n'a pas coutume de faire.• Ce n'est pour faire au miracle crier, LA FONT. F. avare..Familièrement. Faire des miracles, faire miracle, réussir merveilleusement.• Pour moi les huguenots pourraient faire miracle...., RÉGNIER Sat. IX..• C'est un homme qui fait des miracles, MOL. Méd. m. lui, I, 5.• Le changement d'air me fait des miracles, SÉV. 8 avr. 1676.• Quelle joie, ma chère enfant, que le quinquina ait fait ses miracles ordinaires !, SÉV. 589.Voilà un beau miracle, se dit ironiquement à quelqu'un qui se vante d'une chose fort ordinaire.Il a fait miracle, il a fait un beau miracle, se dit de quelqu'un qui a commis quelque maladresse.Cela se peut sans miracle, cela est très aisé.Par exclamation, miracle ! beau miracle !• Miracle ! criait-on ; venez voir par les nues Passer la reine des tortues, LA FONT. Fabl. X, 3.Miracle chimique, nom donné autrefois à la transformation subite par laquelle l'acide sulfurique concentré, versé dans une solution rapprochée de chlorure de calcium, donne du sulfate de chaux, qui se prend aussitôt en une masse solide.3° Se dit des personnes qui sont dignes d'admiration.• Anne, qui de Madrid fut l'unique miracle, MALH. II, 9.• Je veux du même esprit que ce miracle d'armes [Achille], Chercher en quelque part un séjour écarté, MALH. V, 2.• Ô roi, le miracle des rois, MALH. VI, 4.• Henri, ce grand Henri que les soins de nature Avaient fait un miracle aux yeux de l'univers, MALH. VI, 11.• Nous verrons de nous deux qui pourra l'emporter ; Qui, dans nos soins communs pour ce jeune miracle, Aux voeux de son rival portera plus d'obstacle, MOL. l'Ét. I, 1.Il se dit aussi des animaux.• L'éléphant est en même temps un miracle d'intelligence et un monstre de matière, BUFF. Quadrup t. IV, p. 263.Se dit encore des choses qui sont dignes d'admiration.• Que le miracle de l'Italie, le Pastor fido, l'a entièrement négligée [la liaison des scènes], CORN. Avert. au lect. de la seconde partie des oeuvres.4° Par miracle, loc. adv. D'une façon qui est considérée comme un miracle, qui excite l'étonnement ou l'admiration.• Il ne se soutient que par miracle, et à chaque pas il est sur le point de succomber, BOURDAL. Exhort. sur J. C. portant sa croix, t. II, p. 137.5° À miracle, loc. adv. À merveille, fort bien, on ne peut mieux.• Il sait notre langue à miracle, LA FONT. Oeuv. posth. dans LE ROUX, Dict. comique.• Une oie ; je les aime fort. - Tant mieux, touchez là, à demain à dîner ; ma femme les apprête à miracle, BRUEYS Avoc. Pat. I, 6.• Mes enfants s'en tirent à miracle, COLLIN D'HARLEVILLE Vieux célib. III, 3.XIIe s.• Maint miracle fait Deus là ù fu descenduz [saint Thomas], D'avogles, de contraiz [contrefais] et de surz et de muz, De lepruz, qui receivent e santez e vertuz, Th. le mart. 131.• E maint humme l'unt puis à miracle tenu, ib. 52.XIIIe s.• Et pour le bel miracle que Diex i demonstroit, Berte, CXXXV.• Ore m'a l'en puis dit que il gist en la cité de Marseille, là où il fit moult beles miracles, JOINV. 289.XIVe s.• Si qu'on doit croire sans douter, Que ce sont miracles apertes Que musique fait ; c'est voir [vrai] certes, MACHAUT p. 9.XVIe s.• Ce grand oeuvre de l'Escurial du roy d'Espagne qu'on dit que jamais tous les sept miracles de jadis n'ont approché, BRANT. Capit. franç. t. I, p. 276, dans LACURNE.• Il n'est miracle que de vieux saints, COTGRAVE .Provenç. miracle ; espagn. milagro ; portug. milagre ; ital. miracolo ; du lat. miraculum, de mirari, regarder, admirer (voy. mirer).
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.