- matelot
- (ma-te-lo ; le t ne se prononce et ne se lie jamais ; au pluriel, l's se lie : des ma-te-lo-z anglais) s. m.1° Homme de mer qui, sous les ordres des officiers et des maîtres, exécute toutes les opérations de la garniture (des mâts et des vergues), du gréement et de la manoeuvre, ROMME.• Sur nos deux mers nos matelots, Quelqu'inconstants que soient les flots, Sauront ménager pour nos voiles L'aide des vents et des étoiles, LA FONT. Lett. XXIV.• Je tremble au seul récit de la tempête furieuse dont sa flotte fut battue durant dix jours ; les matelots furent alarmés jusqu'à perdre l'esprit, et quelques-uns d'entre eux se précipitèrent dans les ondes, BOSSUET Reine d'Angl..• Le matelot troublé, que son art abandonne, Croit voir dans chaque flot la mort qui l'environne, BOILEAU Sublime, ch. VIII.• Les autres [soldats], qui partaient, s'élancent dans les flots, Ou présentent leurs dards aux yeux des matelots, RAC. Mithr. IV, 6.• La Hollande envoie tous les ans aux Indes un grand nombre de matelots dont il ne revient que les deux tiers, MONTESQ. Esp. XXIII, 25.• Il [le maréchal d'Huxelles] ignorait que c'est [la pêche de la morue] l'école des meilleurs matelots, DUCLOS Mém. rég. Oeuv. t. V, p. 292, dans POUGENS.• Ulric, nul oeil des mers n'a mesuré l'abîme, Ni les hérons plongeurs, ni les vieux matelots, ALFRED DE MUSSET Poésies..2° Marin qui, par ses services, son âge et son aptitude comme homme de mer, a obtenu une certaine solde déterminée par les règlements. C'est un vieux matelot. Recevoir la paye de matelot.3° Il s'est dit pour marin. Meusnier, garde de la marine.... il serait fort propre à remplir la charge de lieutenant de frégate légère.... bon matelot, et ferme dans l'occasion, Mém. de Villette, dans JAL. [Vous Duquesne] ayant affaire au plus habile matelot et peut-être au plus grand et plus ferme capitaine qu'il y ait à présent au monde [Ruyter], Colbert à Duquesne, 1676, dans JAL.4° Camarade. Quand on ne donnait qu'un hamac pour deux hommes, les deux marins couchant alternativement dans le même hamac s'appelaient matelots l'un de l'autre ; par suite, deux amis de bord se donnent cette dénomination d'amitié, JAL., Tous deux amis et se nommant mutuellement mon matelot ; ce qui est le plus grand terme d'affection connu sur le gaillard d'avant, Excentricités du langage.5° Matelot d'un vaisseau, vaisseau qui, dans une ligne de marche ou de combat, suit ou précède immédiatement ce vaisseau. Matelot d'arrière. Matelot d'avant. Chaque vaisseau doit serrer son matelot d'avant, pour empêcher de couper la ligne. Du Casse, chef d'escadre, matelot de M. de Villette, Mém. de Villette, dans JAL.Adjectivement. Vaisseau matelot.6° Vêtement que l'on donne aux petits garçons et même aux petites filles, et dans lequel le pantalon est attaché à la veste.• Elle habille en matelot sa fille âgée de six ans, GENLIS Ad. et Théod. t. III, p. 180, dans LACURNE.Se dit aussi d'un costume de carnaval.XIIIe s.• Ly mathelot les voiles tendent ; Ly autres les avirons prendent, Hist. des trois Maries, ms. p. 376, dans LACURNE, au mot journal.XVe s.• Ce bateau va passer la mer ; Le matelot le puisse bien mener, Sans peril et sans naufrage, BASSEL. XXXV.XVIe s.• Haye, haye, dist le pilot, double le cap et les basses. - Doublé est, respondoyent les matelotz, RAB. IV, 22.Origine douteuse. Il ne peut venir de mât (mast d'où mastelot, dit JAL), puisque, dès les premiers temps, l's y manque. Diez incline à le tirer de matta, natte : mattarius, celui qui couche sur des nattes ; cela est bien peu appuyé. Matelot se dit en allemand Matrose, en danois matros. L'étymologie la plus vraisemblable est le holland. maat, compagnon, d'où, par une dérivation non sans difficulté, matelot. On manque de textes qui montrent que le simple ait existé en français, ce qui augmente le doute.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREMATELOT. - ÉTYM. M. Bugge, Romania, n° 10, p. 155, au lieu du holl. maat, compagnon, propose le norois mötunautr, matunautr, compagnon de table, lequel est synon. du holl. maat, et qui se dit le plus souvent de l'équipage d'un navire ; le personnel de bord se formait en plusieurs mötuneyti ou compagnies de table. Et il ajoute : " Selon moi, il faut supposer une forme antérieure matenot. " Cette supposition est vérifiée ; car au bas de la page, M. G. Paris met cette note : " Au moment même où je reçois de l'imprimerie les épreuves de cet article, je trouve la forme mathenot employée régulièrement pour matelot dans un des mss. de la Passion d'Arnoul Gresban que j'imprime avec M. Raynaud. " Mathenot met hors de doute l'étymologie proposée par M. Bugge.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.