- lèvre
- (lè-vr') s. f.1° Partie extérieure et charnue qui forme le contour de la bouche. La lèvre supérieure. La lèvre inférieure.• Un lsaïe qui tremble devant Dieu jusqu'à ce que ses lèvres soient purifiées, BOSSUET Élévat. sur myst. IV, 8.• Mais ses lèvres à peine en ont touché le bord [d'une coupe], RAC. Brit. V, 5.• La couleur vermeille des lèvres, la blancheur de l'émail des dents, tranchent avec tant d'avantage sur les autres couleurs du visage, qu'elles paraissent en faire le point de vue principal, BUFF. Hist. nat. hom. Oeuv. t. IV, p. 293.• C'est l'adieu d'un ami, c'est le dernier sourire Des lèvres que la mort va fermer pour jamais, LAMART. Médit. I, 29.• Puisque j'ai mis ma lèvre à ta coupe encor pleine, V. HUGO Chants du crépuscule, XXV.• Qu'à peine un mouvement de ta lèvre indignée Révèle ton courroux au fond du coeur grondant, V. HUGO Voix intér. XXXII.Se mordre les lèvres, serrer les lèvres inférieures avec les dents, pour s'empêcher de rire ou de se livrer à quelque explosion de passion.• Madame, qui se mordait les lèvres pour s'empêcher de rire, MARIV. Paysan parv. 1re part..• Le cachemirien se mordit les lèvres, de peur d'éclater au nez de l'Indien, VOLT. Dial. 1.Fig. Se mordre les lèvres de quelque chose, s'en repentir.Fig. Avoir encore le lait sur les lèvres, être d'une grande jeunesse et sans expérience.Serrer les lèvres, se taire.• Chacun se mit à serrer les lèvres, SÉV. 301.Ne pas passer les lèvres, le bord des lèvres, se dit de quelque chose de feint, d'affecté, qui n'est pas véritable. Son rire ne passe pas les lèvres.• Chacun se retira, après avoir donné des marques d'une tristesse qui ne paraissait pas passer le bord des lèvres, MARIV. Paysan parv. 7e part..Rire du bout des lèvres, rire sans en avoir envie, à contre-coeur.Avoir la mort sur les lèvres, être près de mourir, ou avoir la figure d'un mourant.Dans le langage poétique, on dit que l'âme vient sur les lèvres pour exprimer l'approche d'un évanouissement ou de la mort.• Et mon âme déjà sur mes lèvres errante, RAC. Phèdre, III, 1.2° Lèvres prises pour bouche, langage.• C'est-à-dire qu'il faut prononcer ce mot [prochain] des lèvres, de peur d'être hérétique de nom, PASC. Prov. I.• Heureux qui porte toujours la charité sur les lèvres !, BOURDAL. 2e dim. après la Pentec. Dominic. t. III, p. 277.• La douce persuasion était sur les lèvres de votre père, FÉN. Tél. XV.Dans la Bible, toute la terre n'avait qu'une lèvre, c'est-à-dire tous les hommes n'avaient qu'une langue avant la confusion de Babel.Il le dit des lèvres, mais le coeur n'y est pas, c'est-à-dire il exprime un sentiment qu'il n'éprouve pas.Fig. Du bout des lèvres, sans grande bonne volonté, avec quelque dédain.• Ce que vous m'accordâtes du bout des lèvres, VOIT. Lett. 75.N'honorer Dieu que des lèvres, que du bout des lèvres, prier Dieu de bouche seulement et sans que le coeur soit touché.• Ce peuple m'honore des lèvres, mais son coeur est loin de moi, SACI Bible, St Math. Év. XV, 8.Avoir une chose sur les lèvres, sur le bord des lèvres, la savoir, il est vrai, mais, par quelque défaut momentané de mémoire, ne pouvoir la dire.Fig. Avoir le coeur sur les lèvres, parler sans déguisement.• On le trouvait toujours libre, naturel, ouvert, comme un homme qui a son coeur sur les lèvres, FÉN. Tél. XVI.Avoir le coeur sur les lèvres, se dit familièrement pour avoir mal au coeur, avoir envie de vomir.3° Terme de manége. S'armer de la lèvre, se dit d'un cheval qui se défend des lèvres, ayant les lèvres si épaisses, qu'elles lui ôtent le sentiment des barres, et que l'appui du mors cesse d'être ferme.4° Terme de chirurgie. Lèvres, les deux bords d'une plaie simple. Rapprocher les lèvres d'une plaie. Les lèvres de la plaie étaient fort écartées.Terme d'anatomie. Les grandes lèvres, les bords extérieurs de la vulve ; les petites lèvres, les bords intérieurs.5° Terme de botanique. Lèvres, les deux lobes principaux d'une corolle bilabiée ou personnée.6° Les deux bords d'une coquille univalve.7° Se dit des bords d'un vase antique quand ils sont recourbés en forme de lèvres.8° Lèvre de Vénus, cardère cultivée.9° Sorte de levier dont l'ardoisier se sert pour abattre les blocs.XIIe s.• Fors metront [exprimeront] les meies levres loenge, cum tu ensegneras mei les tues justificaciuns, Liber psalm. p. 197.• Les levres de proveire [de prêtre] sunt guarde d'escient [de science] ; Li prestre est angeles Deu, ce dit Pols qui ne ment, Th. le mart. 91.XIIIe s.• Monseigneur Erart de Syverey fu feru d'une espée parmi le visage, si que le nez li cheoit sus la levre, JOINV. 226.XIVe s.• Les leivres sont membres.... il sont huis du cors, et donnent tiex [telles] utilités à la bouche comme fait l'uis à la maison, H. DE MONDEVILLE f° 19.• Oster les dars et toutes choses qui sont entre les leivres des plaies, H. DE MONDEVILLE f° 35, verso..XVe s.• Petit menton, lefres et nez traitis, Vos joettes font deux fosses toudis En soubzriant, o belle plus que belle, E. DESCH. Poésies mss. f° 250.• Si en mordit le duc ses levres, et le prit à aigre, disant...., G. CHASTELAIN III, 44.XVIe s.• La vengeance, quand on y procede par cholere, se consume ordinairement en morsure de levres, grincement de dents, AMYOT Comment refréner la colère, 21.Provenç. labras, du lat. labrum, lèvre, qui se rapporte à lambere ; verbe grec traduit par lécher ; c'est le membre qui lèche. Comparez l'allemand Lippe, lèvre.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.