- louche
- louche 1.(lou-ch') adj.1° Dont les deux yeux n'ont pas la même direction. Cet enfant est louche.Fig.• La peur blême et louche est leur dieu, A. CHÉN. Iambes..L'envie est louche, se dit parce qu'elle ne voit jamais que de travers les actions et les choses d'autrui.Il se dit aussi de l'oeil et du regard.• Petit de taille, noir, le regard un peu louche, CORN. Oedipe, IV, 4.• Lors, me semble, il ouvrit la bouche, Et, me regardant d'un oeil louche, SCARR. Virg. II.• C'est l'inégalité de portée de vue dans les yeux qui produit le regard louche, BUFF. De la vue..• Je ne prétends pas que l'inégalité de force dans les yeux soit la seule cause du regard louche, il peut y avoir d'autres causes de ce défaut, BUFF. ib..Substantivement. Un louche.• Cette observation est générale pour tous les louches, ainsi il est sûr qu'ils ne voient que d'un oeil, BUFF. De la vue..2° Fig. Qui n'est pas transparent, qui est troublé par des corps légers tenus en suspension. Ce vin est louche. Ces perles ont un oeil louche.Se dit des couleurs qui ne sont pas pures de ton.Terme de peinture en émail. Ton louche, ton noirâtre qui obscurcit les couleurs et leur ôte leur vivacité.3° Fig. Suspect, peu clair. Une conduite louche.• L'affaire [du quiétisme], qui dormait un peu à la congrégation du saint-office, reprit couleur, et couleur qui commença à devenir fort louche pour M. de Cambrai, SAINT-SIMON 56, 189.• Je n'entends guère parler de gouvernements sans trouver qu'on remonte à des principes qui me paraissent faux ou louches, J. J. ROUSS. Pologne, 6.Substantivement. Il y a du louche dans cette affaire.• Nancré crut ou sut que je n'ignorais pas le louche qui s'était mis entre le duc d'Orléans et lui, SAINT-SIMON 256, 196.• Pourquoi faut-il qu'il y ait toujours du louche en ce que tu fais ?, BEAUMARCH. Mar. de Fig. III, 5.4° Fig. Terme de grammaire. Qui n'a pas la netteté, la clarté requise.• Un trouble qui a du pouvoir sur des larmes, cela est louche et mal exprimé, VOLT. Comm. Corn. Rem. Horace, I, 1.• On est toujours étonné de cette foule d'impropriétés, de cet amas de phrases louches, irrégulières, incohérentes, obscures, et de mots qui ne sont point faits pour se trouver ensemble, VOLT. Comm. Corn. Rem. Pertharite, I, 1.Sens louche, sens qui n'est pas clair, ou qui prête à un faux sens.Construction louche, voy. construction.Substantivement. Il y a du louche dans cette phrase.CONSTRUCTION LOUCHE, CONSTRUCTION ÉQUIVOQUE. Une construction louche est une construction dont le sens n'est pas suffisamment clair. Une construction équivoque est celle qui se prête à plusieurs sens.XIIIe s.• Tout entor lui oste les mousques [mouches], Plusours en fait et clos [boiteux] et lousques, DU CANGE luscus..• Ainçois que il encoreust ledit perill, il avoit les ieuz droiz et biax, et après il les a toz jors eu louches et tors, Miracles saint Loys, p. 144.XVe s.• Mais quant il vient une fort mouche à la toile, cil [l'araignée ou le juge] fait le louche, Qui la deüst prandre et happer...., E. DESCH. Miroir de mariage, p. 83.XVIe s.• Je sçai que tu scez qu'elle est louche, Mais je te veux dire comment, MAROT III, 94.Wallon, lus' ; namur. lusk ; provenç. losc ; catal. llusco ; du lat. luscus, borgne. Le changement de sens ne peut faire ici difficulté ; déjà de luscus, borgne, le latin avait formé lusciosus, louche, ainsi le changement de sens était déjà opéré.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE1. LOUCHE. - HIST. XIIIe s. Ajoutez :• Uns chevaliers, Belchis li lois, Qui a le front plus noir que pois, Meraugis, p. 160.(lois représente le latin luscus).————————louche 2.(lou-ch') s. f.1° Cuiller à pot.2° Grande cuiller à long manche, avec laquelle on sert le potage.3° Terme rural. Espèce d'écuelle emmanchée à un long bâton, qui sert à répandre les engrais liquides sur la terre.XIIIe s.• Saize louches d'or, DU CANGE lochea..XVe s.• Le duc a trois queux pour sa bouche, chascun compté par quatre moys ; et doibt le queux en sa cuisine commander, ordonner, et estre obey, et doibt avoir une chaiere en tel lieu, qu'il puist veoir et congnoistre tout ce que l'on faict en la dicte cuisine, et doibt avoir en sa main une grande louche de bois qui luy sert à deux fins, l'une pour assayer potaige et brouet, et l'autre pour chasser les enfans hors de la cuisine et ferir si besoing est, DE LABORDE Émaux, p. 369.• Coclear, cuiller, louce, SCHELER Gloss. rom. lat. p. 52.XVIe s.• ....Commencent à puiser dedans avec de longues et larges louches potieres, ou cuillers de bois, etc., la Nouvelle fabrique des excellents traits de vérité, etc. Paris, éd. P. JANNET, 1853, in-18, p. 136.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE2. LOUCHE. - HIST. Ajoutez :XVe s.• Les filles ne doivent point mengier à cachelouche leur potage avec leurs amoureux, les Évang. des quenouilles, p. 23.(en cachant la louche, en secret, avec mystère).————————louche 3.(lou-ch') s. f.Outil de tourneur, pour agrandir des trous déjà commencés.————————louche 4.(lou-ch') s. f.Poisson du genre des labres.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.