- guigner
- (ghi-gné)1° V. n. Fermer à demi les yeux en regardant du coin de l'oeil. Guigner de l'oeil.2° V. a. Regarder sans faire semblant, à la dérobée, guetter.• J'ai guigné ceci [la cassette d'Harpagon] tout le jour, MOL. l'Av. IV, 6.Fig. Former quelque dessein sur quelque personne, sur quelque chose. Guigner une héritière, un héritage.• Jupin, qui du ciel toujours guigne Quelque femelle en droite ligne, SCARRON Gigant. I.XIIIe s.• Et tant à suen lige [je] me tieng, .... que s'el me guigne sol de l'ueil.... Faire m'estoura son commant, Partonop. ms. de St-Germ. f° 163, dans LACURNE.• La reïne en guigna cons [le comte] Bertelais, Gerard de Ross. p. 368.• Si ot [Beauté] le vis clair et alis, Et fu greslete et alignie, Ne fu fardée ne guignie [masquée, déguisée], la Rose, 1008.• Cous tes manches, tes cheveux pigne, Mais ne te farde, ne ne guigne, ib. 2280.XVe s.• Et quant Madame veit le petit Saintré.... fut tres joyeuse ; lors, en le guignant, fist de son espingle le signal, Jeh. de Saintré, ch. 12.XVIe s.• Il y a mille discours que Plutarque n'a que touchés simplement ; il guigne seulement du doigt par où nous irons s'il nous plaist, MONT. I, 169.• Comme ils se guignoient [faisaient signe] l'un l'aultre que l'occasion estoit propre à leur besongne, MONT. I, 255.• Eschever tantost l'un tantost l'aultre des maux qui nous guignent de suitte et assenent ailleurs autour de nous, MONT. IV, 206.• Il lui dist en latin, en le guignant de la teste : accipe, DESPER. Contes, LXXXVI.Picard, guenier, gogner ; génev. gigner ; provenç. guinhar ; cat. guinyar ; esp. guiñar ; ital. ghignare. Origine fort incertaine discutée par Diez : il écarte l'allemand winken, faire signe, à cause que l'n ne peut disparaitre ; puis, trouvant dans le picard guenier et non wenier, et doutant si le gu est ici germanique, il incline pour l'ancien haut-allemand kînan, en latin arridere, sourire. Rien de tout cela n'est concluant, d'autant que, dans l'historique, guigner a aussi le sens de farder.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIREGUIGNER. - HIST. Ajoutez :XIIe s.• D'amours [pour un chevalier] estoit espris li feus El cuer à la biele Guimer ; Vers lui n'osoit del oel gluinier [sic] ; Si l'amoit el plus que son cors, Perceval le Gallois, V. 13470.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.