- différer
- différer 1.(di-fé-ré. La syllabe fé prend l'accent grave quand la syllabe qui suit est muette : je diffère ; excepté au futur et au conditionnel, je différerai, je différerais, exception qui n'est pas justifiée) v. a.1° Remettre à un autre temps. Il différa longtemps le payement de cette dette.• .... Et lors il nous faut croire Que nous n'y sommes pas dignement préparés [à la mort], Et que ces doux moments ne nous sont différés Qu'afin que nous puissions mériter plus de gloire, CORN. Imit. I, 19.• Si mon coeur de tout temps facile à tes désirs, N'a jamais d'un moment différé tes plaisirs, BOILEAU Lutr. II.• Mais qui me vient ici différer ma vengeance ?, RAC. Baj. IV, 5.• Je leur écris qu'Achille a changé de pensée, Et qu'il veut désormais, jusques à son retour, Différer cet hymen que pressait son amour, RAC. Iphig. I, 1.• Mon amant m'adorait et j'ai tout différé, VOLT. Zaïre, V, 3.2° V. n. Tarder à. J'ai différé à le dire.• On ne doit pas différer à bien vivre, D'ABLANCOURT Lucien, t. I, dans RICHELET.• Je croyais moi-même arriver plus tôt, j'ai toujours différé à vous faire réponse jusqu'à présent, SÉV. Lett. 20 mai 1667.• Jusques à quand différerez-vous à nous faire justice et à venger nos frères ?, SACI Bible, Machab. I, VI, 22.On le construit aussi avec la préposition de et un infinitif.• Différer d'être heureux après son inconstance, C'est montrer...., TH. CORN. Ariane, IV, 2.• Qui pourra différer de venger la querelle ?, VOLT. Catil. II, 2.Absolument.• Qu'y a-t-il donc, chrétiens, qui puisse nous empêcher de recevoir, sans différer, ses inspirations [de la grâce] ?, BOSSUET Duch. d'Orl..• Des amis d'Aristie assurons le secours, à force de promettre, en différant toujours, CORN. Sertor. IV, 2.• Demain, sans différer, je prétends que l'aurore Découvre mes vaisseaux déjà loin du Bosphore, RAC. Mithr. III, 1.• Mais ne différez point, chaque moment vous tue, RAC. Phèdre, I, 2.• C'est un maître doux et patient.... qui diffère afin qu'on le prévienne, qui menace pour être désarmé, MASS. Car. Fausse confiance..3° Se différer, v. réfl. Être renvoyé à un autre temps. Ce mariage se diffère de jour en jour.• Ce grand choix ne se peut différer à demain, CORN. Sophon. II, 4.• D'une heure encore, ami, mon bonheur se diffère, VOLT. Zaïre, III, 1.XIVe s.• La chose avoit esté differée pour l'absence de luy, lequel principalment il desiroit à occire, BERCHEURE f° 24, recto..• Et se l'un de eulx estoit malvès, l'autre devroit fuir ou differer à lui ministrer du sien, ORESME Eth. 258.XVIe s.• Je differe d'en traiter jusques au passage de la Redemption, CALV. Instit. 77.• Cela est enquerir sur les secrets dont la pleine revelation est differée au dernier jour, CALV. ib. 108.• En differant nos desirs à l'heure de sa volonté, CALV. ib. 732.• Il pouvoit advenir que le differer à les lire eust esté d'un grand prejudice, MONT. II, 42.• Il feint, il ploye, il differe, selon le besoing des circonstances, MONT. 153.• Il envoya l'un de ses familiers leur dire qu'ilz differassent leur entreprise jusques à une autre meilleure occasion, AMYOT Pélop. 14.Lat. differre, de di, exprimant écartement, et ferre, porter : porter au loin.————————différer 2.(di-fé-ré. La syllabe fé prend l'accent grave, quand la syllabe qui suit est muette : je diffère, excepté au futur et au conditionnel : je différerai, je différerais) v. n.Être autre, n'être pas le même.• Il disait qu'un roi qui ne faisait pas la guerre ne différait en rien de son palefrenier, D'ABLANCOURT Apophth. dans RICHELET.• Le mien d'avec le vôtre en ce point seul diffère, CORN. Cinna, V, 2.• .... Le sang Ne nous empêche pas de différer de rang, CORN. Nicom. I, 2.• Comme nos intérêts, nos sentiments diffèrent, CORN. Pomp. V, 2.• .... Nous ne différons ni de coeur ni de sang, ROTROU Vencesl. I, 2.• Tous les hommes sont fous, et, malgré tous leurs soins, Ne diffèrent entre eux que du plus ou du moins, BOILEAU Sat. IV.Différer d'opinion, d'avis, et, absolument, différer. Différer du blanc au noir.Il se conjugue avec l'auxiliaire avoir.XIVe s.• C'est la seconde raison à monstrer que elettion et volenté different, ORESME Eth. 64.• Comme elles [les plaies de tête] se different entre elles, aussi se differe l'operation manuel en iceles, H. DE MONDEVILLE f° 53.XVe s.• Toutefois moi et mon jardin, Nous differons en une chose ; Je me vueil abreuver de vin, Et d'eau nostre courtil s'arrose, BASSELIN XVII.XVIe s.• Il ne differe en rien à un fantosme, CALV. Instit. 201.• Puis après nous verrons comment ils different l'un d'avec l'autre, CALV. ib. 75.• De deux hommes qui ne different rien en merites, Dieu en laisse l'un derriere et choisit l'autre, CALV. ib. 756.• Nulle forme ne differe l'une de l'aultre entierement, MONT. IV, 239.• Les grands rois et les empereurs Ne different aux laboureurs, Si quelcun ne chante leur gloire, RONS. 570.Lat. differre, être différent, le même que differre, différer 1.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.