- chartre
- charte ou chartre(char-t' ou char-tr') s. f.CHARTRE est aujourd'hui tout à fait tombé en désuétude et qui est seul dans le Dict. de RICHELET.1° Acte concédant des franchises, des priviléges. Charte de commune. Charte d'affranchissement.• Le serf pouvait, par une chartre de son seigneur, combattre contre toute personne, MONTESQ. Esp. XXVIII, 25.La grande charte, charte par laquelle Jean (1215), roi d'Angleterre, accorda certains priviléges, bases des libertés de la nation.• Henri III confirma la grande chartre d'une manière très solennelle, FÉN. XXII, 408.Chartes générales du Hainaut, ordonnance d'un archiduc, en 1619, contenant le recueil des anciennes lois du Hainaut.Charte ou chartre normande ou aux Normands, titre contenant plusieurs priviléges ou concessions accordés aux habitants de Normandie le 19 mars 1313 par le roi Louis X et confirmés à diverses reprises. On mettait dans la plupart des lettres de la grande chancellerie : Nonobstant clameur de haro, charte normande à ce contraire, etc.Lettres de charte, lettres de grande chancellerie qui attribuaient un droit perpétuel et contenaient cette adresse : à tous présents et à venir.La charte constitutionnelle, ou, simplement, la charte, celle que Louis XVIII octroya en 1814, qui fut modifiée après la révolution de 1836, et abolie par celle de 1848.Par suite, toute constitution accordée par un prince.Acte législatif qui, en Angleterre et aux États-Unis, constitue une corporation. La charte de la compagnie des Indes.2° Ancien titre.• Si la chartre de quelque héritage était attaquée de faux, MONTESQ. Espr. XXVIII, 18.L'école des chartes, école instituée pour apprendre à lire et à interpréter les chartes, diplômes, etc. et en général pour étudier les titres, les institutions, les usages du moyen âge.3° Terme de commerce. Charte partie, acte qui constate le louage de tout ou partie d'un navire.• Nous ne fûmes pas plutôt arrivés qu'on nous demanda notre charte partie, qui est si nécessaire à la mer, que tout homme qui navigue sans l'avoir est pendable, RETZ IV, 330.Ce mot vient d'un ancien usage : au lieu de faire le double de l'acte, on le coupait en deux parties, dont les deux contractants gardaient chacun une. Partie est ici le participe passé du verbe partir, partager.XIe s.• Les naïfs [serfs natifs] qui departent de leur terre ne deivent cartre faire, Lois de Guill. 33.• Il est escrit es cartres et es brefs, Ch. de Rol. CXXV.• Il fist la chartre au moustier de Laon, ib. CLIII.• Faites faire errament Vos chartres et vos briés [brefs] à clerz bien escrivanz, Sax. XXI.• Vous porterez ma chartre où li seax d'or pend, ib..XIIIe s.• Vos et vostre pere lor avés juré leur convenances à tenir ; il en ont vos chartres, VILLEH. XCIV.• Amors de la chartre leüe A si la novele espandue Que jamès n'iert hons de vaillance Qui ne s'acort à la sentence, la Rose, 20881.• Autant vaut fours qui ne cuist, comme chartre qui n'est uzée, BEAUMANOIR L, 1.• Cil qui ont tex manieres d'uzages monstrent par chartre que le [la] coze lor fust otroiée par le segneur du liu, BEAUMANOIR XXIV, 7.XVe s.• Car estoient en la Gascongne trop anciennement chartes et privilegies du grand Charlemaigne, FROISS liv. I, p. 253, dans LACURNE.• Et prenans la piece d'une chartre, escripvirent à Joseph, disans : Paix soit à toy et à ceux qui sont avec toy, Perceforest, t. VI, f° 124.Provenç. espagn. et ital. carta ; du latin charta, du grec, papier. Dans la forme chartre, l'r vient d'une assimilation fautive avec chartre, prison.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRECHARTE. Ajoutez :4° Charte lapidaire, titre inscrit sur la pierre, Bibl. des ch. 2e série, t. III, p. 31.————————chartre 1.(char-tr') s. f.Voy. charte.————————chartre 2.(char-tr') s. f.1° Prison.• Cette chartre est faite de façon Que...., LA FONT. Diable..Il est vieux. Usité encore dans cette locution : Tenir en chartre privée, séquestrer une personne sans autorité de justice.2° Nom vulgaire du carreau ou atrophie mésentérique, cette maladie retardant le développement et tenant le petit malade comme en une chartre, en une prison. Tomber en chartre. Être en chartre.XIIe s.• Que, se li clers forfait à perdre sun mestier, Face le sis prelaz en sa chartre lancier, Th. le mart. 31.XIIIe s.• Puis li liast on poins et piez, Si fust jetez trestoz liez En la chartre ou en la jeöle...., Ren. 8603.• Cil que l'en met en chartre oscure, Et en vermine et en ordure, la Rose, 2623.• C'est [l'amour] chartre qui prison [prisonnier] soulage, Printems plains de fort yvernage, ib. 4343.• Lors, se vous ne voulez ce croire, Quand il ara sur vous victoire, Sans retour en sa chartre noire Au feu d'enfer ardoir irez, J. DE MEUNG Cod. 93.XVe s.• Et par sentence fut privé de tous ses benefices et mené en un tombereau, mitré et condamné en chartre perpetuelle et au pain, JUVÉN. Charles VI, 1416.XVIe s.• Pour retirer aucuns de la chartre des vices, SLEIDAN f° 19.• Si on en rechappe, le malade tombe en fievre hectique ou en chartre, ou en mal caduc, PARÉ XXIII, 44.• Je plainds plusieurs gentilshommes qui, par la sottise de leurs medecins, se sont mis en chartre tous jeunes et entiers, MONT. IV, 261.SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE2. CHARTRE. Ajoutez : - REM. Bien que chartre soit féminin même dans de très anciens textes, cependant on le trouve masculin aussi à l'origine de la langue conformément à l'étymologie (lat. carcer) : XIIe siècle.• Et quant il encore ensi ne pot pas amolir la vertut de sa pense, dunkes enclost celui en un estroit chartre, et si loiat de fer lo col et les mains de celui, li Dialoge Gregoire lo pape, 1876, p. 168.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.