- serviteur
- (sèr-vi-teur) s. m.1° Celui qui est au service, aux gages d'autrui.• Je dois vous avertir, en serviteur fidèle, Qu'en sa faveur déjà la ville se rebelle, CORN. Poly. III, 5.• Et j'ai des serviteurs et ne suis point servi, MOL. Femm. sav. II, 7.• Tel est le conseil de Dieu, et la sage économie que ce grand père de famille a établie dans sa maison : il a voulu avoir des serviteurs vigilants et perpétuellement attentifs, BOSSUET Sermons, Nécessité pressante de s'éveiller, 2.• N'oublions jamais que le serviteur peut valoir mieux que son maître, DIDER. Claude et Nér. II, 67.Dans le langage biblique, au lieu de domestique, on dit toujours serviteur.• Serviteurs, soyez soumis à vos maîtres avec toute sorte de respect, SACI Bible, St Pierre, 1re épît. II, 18.2° Fig. Il se dit de ceux qui rendent des services à l'État, au prince.• Comme ils [les rois] n'ont plus de sceptre, ils n'ont plus de flatteurs ; Et tombent avec eux d'une chute commune Tous ceux que la fortune Faisait leurs serviteurs, MALH. I, 3.• La reine croyait assurer au roi des serviteurs, en conservant à Dieu des fidèles, BOSSUET Reine d'Anglet..• M. de Montausier racontait que ses pères avaient toujours été fidèles serviteurs des rois leurs maîtres, mais qu'ils n'avaient pas été leurs flatteurs, FLÉCH. Duc de Mont..Serviteur de l'État, homme zélé et fidèle dans ce qui regarde le service de l'État.3° Il se dit de ceux qui servent Dieu.• Josué, fils de Nun, serviteur du Seigneur, mourut âgé de cent dix ans, SACI Bible, juges, XI, 8.• C'est moi qui ai fait la terre avec les hommes et les animaux.... et maintenant j'ai voulu soumettre ces terres à Nabuchodonosor, roi de Babylone, mon serviteur ; il l'appelle son serviteur, quoique infidèle, à cause qu'il l'a nommé pour exécuter ses décrets, BOSSUET Reine d'Anglet..• Nous pouvons dire que nous voyons en Louis, non un roi, mais un serviteur de Jésus-Christ, BOSSUET Mar.-Thér..• Quoi qu'en pense le monde, Dieu ne manque point encore de vrais serviteurs, BOURDAL. 7e dim. après la Pentecôte, Dominic. t. III, p. 79.C'est un grand serviteur de Dieu, c'est un homme d'une grande piété.Serviteur des serviteurs de Dieu, qualification que le pape se donne dans ses bulles.4° En termes de civilité, attaché à, disposé à rendre service.• Pardieu, monsieur, je vous suis serviteur, RÉGNIER Sat. III.• Toute votre maison m'a toujours été chère ; Et j'étais serviteur de monsieur votre père, MOL. Tart. V, 4.• Vous savez combien je suis de ses serviteurs, BOSSUET Lett. quiét. 428.Votre serviteur, se dit pour se désigner soi-même sans se nommer par son nom.• Quoi ! m'écriai-je encore, c'est donc vous qui êtes le mari qu'on me propose, monsieur ? C'est justement votre serviteur, me dit-il, MARIV. Marianne, 6e part..Je suis votre serviteur, ou, elliptiquement, votre serviteur, et quelquefois, simplement, serviteur, formule de politesse dont on se sert en saluant quelqu'un.• Votre serviteur Gille, Cousin et gendre de Bertrand, Singe du pape en son vivant, LA FONT. Fabl. IX, 3.• Après s'être bien dit serviteur, moi le vôtre, BOURSAULT Fables d'Ésope, II, 6.• ....Si l'on ne voulait vous souffrir ni vous voir, On vous dirait : monsieur, serviteur et bon soir, BARON le Jaloux, III, 12.• Quel honneur ! quel bonheur ! Ah ! monsieur le sénateur, Je suis votre humble serviteur, BÉR. Sénateur..Votre serviteur, votre très humble et très obéissant serviteur, formules de politesse pour finir les lettres.Ironiquement et familièrement : je suis votre serviteur, je suis son serviteur, ou, elliptiquement, serviteur, se dit à quelqu'un ou de quelqu'un quand on n'est pas de son avis, quand on refuse ce qu'il propose, ce qu'il demande. Serviteur, c'est un fourbe, je le connais et je ne m'y fie point.• Serviteur au portier, Dit-il, et de courir, LA FONT. Fabl. IX, 10.• Je louerai, si l'on veut, son train et sa dépense, Son adresse à cheval, aux armes, à la danse : Mais pour louer ses vers, je suis son serviteur, MOL. Mis. IV, 1.• Valère : Si je ne vous croyais l'âme trop occupée, J'irais parfois chez vous passer l'après-soupée. - Sganarelle : Serviteur, MOL. Éc. des mar. I, 5.• Si elles [les nièces de Voltaire] se marient à des bourgeois de Paris, serviteur très humble, elles sont perdues pour moi, VOLT. Lett. Thiriot, 21 déc. 1737.• Du grand Napoléon je suis l'admirateur ; S'il me croit son sujet, je suis son serviteur, GUICHARD Épigr. contre Napoléon..Familièrement. Serviteur à, se dit pour signifier qu'il n'y a plus moyen de faire telle ou telle chose. Voilà l'hiver, serviteur à la promenade. J'ai la goutte, serviteur aux bons dîners.• Avec une femme on a des enfants, c'est la coutume ; auquel cas, serviteur au collatéral, MARIV. Fauss. confid. I, 3.Populairement. Faites serviteur à monsieur, à madame, se dit aux petits enfants à qui l'on dit de faire la révérence.• Il [le bourgeois] fit venir son fils, qui était un petit garçon de sept ans : Jeannot, faites serviteur, lui dit-il, CAILLIÈRES Bon et mauv. usage, Convers. 1re..5° Celui qui courtise une femme.• Des hommes comme vous ne sont que des conteurs ; Vraiment, c'est bien à moi d'avoir des serviteurs, CORN. Gal. du Palais, IV, 10.• On devient grandelette, Puis grande tout à fait, et puis le serviteur, LA FONT. Coupe..• J'ai perdu tout mon bonheur ; J'ai perdu mon serviteur, J. J. ROUSS. Devin du vill. sc. 1.SERVITEUR, DOMESTIQUE. Ces deux mots sont synonymes pour le sens, et ne varient que pour l'emploi. Dans le style et le parler ordinaire on dit domestique et non pas serviteur : Mon domestique vous portera ma lettre ; j'ai un nouveau domestique, etc. Mais, hors de l'usage de la conversation et du style semblable à la conversation, on peut, si l'on veut, dire serviteur au lieu de domestique : Un fidèle serviteur ; le maître et ses serviteurs, etc.XIe s.• Deus fist l'imagine, pur sue amur, parler Al servitor ki serveit à l'alter [autel], Saint Alexis, XXXIV.XIIe s.• Mais nus clerc [nous clercs], qui en sumes ministre e servitur [de la maison de Dieu], Th. le mart. 147.XIIIe s.• Bien doi dire mon consire [avis], Dont sui pensaire ; Car servire et jausire [celui qui jouit] Sui et amaire, Ms. de poés. franç. avant 1300.• t. II, p. 901, dans LACURNE. Où sont li riche servitour Ki me servoient nuit et jor ?, GUI DE CAMBRAI Barb. et Jos. p. 263.XIVe s.• S'elles [femmes qui quittent leur pays pour entrer en service] fussent sans tache, elles fussent maistresses et non serviteresses, Ménagier, II, 3.XVe s.• Gouvernement fut en une maison, Où serviteurs ot en grande abondance, E. DESCH. Admin. de l'hostel du prince..• Quant ilz furent trestous dedans entrez, ils regarderent combien ilz povoient bien avoir perdu de lours gens, si trouverent qu'il leur en failloit bien encores cent chevaliers, sans les serviteurs, Lancelot du lac, t. III, f° 141, dans LACURNE.• Estoit capitaine dudit chasteau pour les Anglois Reynaud de St-Jean, escuyer gascon et serviteur du Captal de Buch, J. CHARTIER Hist. de Charles VII, p. 222, dans LACURNE.XVIe s.• Que les serviteurs se rendent serviables à leurs maistres, et diligens à leur complaire, CALV. Instit. 307.• En ceste nuict le dieu d'amours resveille Ses serviteurs...., MAROT I, 353.• Estant touts deux serviteurs [poursuivants] de la soeur du sieur de Foungueselles, MONT. I, 253.• Parler tousjours d'un langage maestral à ses serviteurs, MONT. III, 278.• Amoureux qu'on appelle maintenant serviteurs, H. EST. Apol. d'Hérod. p. 64, dans LACURNE.• Bon maistre, bon serviteur, LEROUX DE LINCY Prov. t. II, p. 102.• À peine sera bon maistre qui n'a esté serviteur, LEROUX DE LINCY ib. p. 229.• Sans la resistance que luy fit à la porte de Bussy un qui luy est aujourd'huy serviteur, il nous eust pris, Sat. Mén. édit. LABITTE, p. 181.Wallon, sierviteur ; provenç. servire, serveire, servidor ; espagn. servidor ; ital. servitore ; du lat. servitorem, de servire, servir. Le vieux franç. et le provenç. servire sont le nominatif (du latin servitor) ; et servitor, servidor sont le régime (du latin servitórem).
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.