- pavillon
- (pa-vi-llon, ll mouillées, et non pavi-yon) s. m.1° Logement portatif qu'on peut dresser partout et pour toutes sortes de personnes, mais employé plus particulièrement au campement des gens de guerre. L'arbre, les cordages d'un pavillon.• La couleur des pavillons qui étaient tendus dans les jardins d'Assuérus, et les autres menues circonstances de cette fête royale, BOSSUET Projet de réunion, Lett. XXXIII.• Luxembourg a du rivage Reculé ses pavillons, BOILEAU Ode I.• C'est sous ces pavillons qu'ils règlent notre sort, VOLT. Triumv. II, 4.Poétiquement. Ciel, pavillon de l'homme, admirable nature, Salut pour la dernière fois ! , GILBERT, Ode imitée de plusieurs psaumes.Terme de blason. Pavillon se dit de ce qui enveloppe les armoiries des souverains, et qu'ils ont droit seuls de porter. Il est composé de deux parties, qui s'appellent les courtines et le comble.2° Terme de tapisserie. Tour de lit plissé par en haut et suspendu au plafond ; on dit aujourd'hui couronne.• Un garde-robe gras servait de pavillon, RÉGNIER Sat. XI.• Un pavillon à queue d'une bonne serge d'Aumale rose sèche, avec le mollet et les franges de soie, MOL. l'Avare, II, 1.Tour d'étoffe dont on couvre le tabernacle dans quelques églises.Tour d'étoffe qu'on met sur le saint ciboire.3° Terme d'architecture. Corps de bâtiment, ordinairement carré, dont la forme est semblable aux pavillons d'armée.Corps de bâtiment lié à d'autres constructions en retraite, au-dessus desquelles il s'élève ordinairement de la hauteur du comble ou de l'attique qui le couronne. Le pavillon de l'Horloge, le pavillon de Marsan, aux Tuileries.Pavillon double, pavillon dans lequel il y a deux appartements adossés.On appelle aussi pavillons les extrémités angulaires d'un bâtiment, soit sur la rue, soit sur les jardins.Corps de logis seul, qui se fait dans un jardin, loin de la maison principale.Ancien terme de marine. Petite construction de forme ronde ou quadrangulaire qu'on établissait, comme aujourd'hui les bouteilles, aux angles de la poupe.4° Extrémités évasées d'une trompette, d'un cor, d'un hautbois, d'une clarinette, etc. et aussi du porte-voix.• Que l'on adapte le pavillon d'une trompette immédiatement à l'embouchure et supprimant le tube intermédiaire, l'instrument rendra des sons à peine sensibles, MONGEZ Instit Mém. litt. et beaux-arts, t. v, p. 124.• Il est [le thème chanté par Charon, dans l'Alceste de Gluck] toujours précédé et suivi de trois sons de cors donnant la même note que la voix, mais d'un caractère mystérieux, rauque, caverneux.... les deux cors à l'unisson, avec leurs notes toniques et dominantes, et par conséquent leurs sons ouverts, ne produisaient point du tout ce qu'il [Gluck] cherchait ; enfin il s'avisa de faire aboucher les cors, pavillon contre pavillon ; les deux instruments se servant ainsi mutuellement de sourdine, et les sons s'entre-choquant à leur sortie, le timbre extraordinaire fut trouvé, H. BERLIOZ à travers chants, p. 184.Pavillon chinois, petit cône de métal garni de clochettes, et attaché à l'extrémité d'une hampe, que l'on agite en frappant sur les temps forts de la mesure, dans la musique militaire.Extrémité évasée d'une sonde, d'une algalie. La sonde entra dans la vessie jusqu'au pavillon.Partie évasée d'un entonnoir.Pavillon de la tuyère, son ouverture extérieure.5° Terme d'anatomie. Pavillon de l'oreille, espèce de cornet ou d'entonnoir formé par la conque.Extrémité libre évasée et froncée de la trompe de Fallope.6° Étendard, drapeau.• Vous me verrez, suivi de mille bataillons, Sur ces murs renversés planter mes pavillons, CORN. Méd. IV, 6.7° Terme de marine. Quadrilatère d'étoffe, généralement plus large que haut, s'attachant par un de ses côtés à un mât ou à une drisse qui le porte soit à l'extrémité de la vergue d'artimon, soit au sommet d'un mât, JAL., Sa Majesté ayant été informée qu'encore que, par son règlement du 12 juillet 1670, il ait été ordonné que les pavillons, cornettes, flammes et autres marques de commandement de ses vaisseaux de guerre seraient toujours blancs, tant dans les navigations que dans les combats, quelques-uns des officiers commandant lesdits vaisseaux n'ont pas laissé d'arborer, dans les jours de combat, des pavillons et enseigne de poupe rouges.... Ordres du roi, 1678, dans JAL.• La petite flotte du comte d'Estrées arbora pavillon d'Espagne, SAINT-SIMON 107, 132.Chaque pavillon est distingué par le nom du lieu où on le place, ou de l'usage auquel il sert. Pavillon de poupe, pavillon de beaupré, pavillon de conseil, etc.Placé au mât de l'arrière, il indique à quelle nation appartient le bâtiment ; placé à d'autres mâts, il indique le rang de l'officier général de mer qui commande.En général, le pavillon blanc est un signe de paix ; le pavillon rouge est un signe de guerre, c'est aussi celui des bâtiments ou bateaux employés pour le transport des poudres en rade ; le pavillon jaune est un signe de maladies contagieuses ; le pavillon noir est celui des pirates et des forbans.Pavillon noir, signe de deuil aux XVIe et XVIIe siècles.Le pavillon couvre la marchandise, c'est-à-dire le commerce des neutres doit être respecté par les puissances belligérantes ; et fig. cela est sous la responsabilité de telle ou telle personne.Trafiquer sous le pavillon neutre, sous pavillon neutre, employer, en temps de guerre, des bâtiments neutres pour le transport de ses marchandises.Assurer son pavillon, tirer un coup de canon en arborant le pavillon de sa nation.Mettre le pavillon en berne, le plier dans sa hauteur, de manière qu'il ne fasse qu'un faisceau ; c'est un signal de détresse pour demander du secours, et aussi un signe de deuil.Amener le pavillon, le baisser par déférence ou par force.Amener son pavillon, se dit d'un vaisseau qui se rend.• Baisser pavillon, rendre un hommage en mettant son pavillon bas Louis XIV fait baisser le pavillon aux amiraux espagnols devant le sien, VOLT. Louis XIV, 29.Fig. Baisser le pavillon, baisser pavillon, mettre pavillon bas, reconnaître son infériorité.• J'ai conçu, digéré, produit un stratagème Devant qui tous les tiens, dont tu fais tant de cas, Doivent sans contredit mettre pavillon bas, MOL. l'Ét. II, 14.• Et sur l'art de former un nouvel embarras Devant elle Rolet [un procureur] mettrait pavillon bas, BOILEAU Sat. X.Fig. Se ranger sous le pavillon de quelqu'un, se mettre sous sa protection.8° Il se dit des pavillons qui sont employés dans les signaux de mer.• C'était ce duc d'York, depuis Jacques II, qui avait inventé l'art de faire entendre les ordres sur mer par les mouvements divers des pavillons, VOLT. Louis XIV, 11.9° Anciennement. Vaisseau pavillon, ou, simplement, pavillon, vaisseau portant le pavillon d'un officier général.• Je fis une faute que personne n'a remarquée ; je ne pensai point à placer mes brûlots à la tête de la ligne de vaisseaux : si j'avais pris cette précaution, j'aurais assurément brûlé quelque pavillon ennemi, Mém. de Villette, 1690, dans JAL.• Les pavillons répondent à l'amiral de leur canon, savoir : les amiraux, de chacun deux coups, et les contre-amiraux de chacun un, Corresp. de Colbert, III, 2, p. 339.Être sous tel pavillon, être sous tel commandant.10° Fig. Les vaisseaux, l'armée navale, la puissance maritime d'une nation. Le pavillon anglais domine sur ces mers.• Un homme à la fois négociant et guerrier nommé Mahé de la Bourdonnais vengea l'honneur du pavillon français au fond de l'Asie, VOLT. Louis XV, 29.11° Pavillon de guerre, se dit, dans l'histoire d'Italie, d'un pavillon attaché à un char orné des armes de l'État, qu'on promenait pour annoncer que la guerre était déclarée.12° Par extension, marque apparente. Chaque page était marquée par un signet, ou un pavillon, qui rappelait sommairement le sujet.13° Au jeu de trictrac, marque façonnée en étendard qui annonce qu'on a la bredouille, et qui est prise par le joueur qui fait ses trous le second, jusqu'à ce que l'autre, en les faisant à son tour, lui ôte le pavillon.14° Tas de bois à vendre, dit ainsi de sa forme, et fait, sur place, avec les copeaux des arbres abattus et façonnés.15° Désigne quelquefois l'étendard des fleurs papilionacées.16° Planche qui cache toutes les planchettes d'une jalousie, lorsque celle-ci est relevée.17° Facette qui termine la culasse du diamant taillé en brillant.18° Pavillon d'or, monnaie qui fut frappée en 1329 par Philippe de Valois.19° Pavillon d'orange, coquille de prix, du genre volute.XIIe s.• E alerent andui [tous les deux] nuitantre [pendant la nuit] en l'ost ; truverent le Jei dormant en son paveillun, Rois, p. 103.• Où il orent tenduz pavillons et brehanz, Sax. V.XIIIe s.• Quiconques veut estre crespignieres de fil et de soie à Paris, c'est à savoir ouvrieres de coiffes à dames et toies à orilliers et de paveillons que on met par desus les autez que on fait à l'aguille et à mestier, estre le puet franchement pour tant que...., Liv. des mét. 85.• Or avint que monseigneur Gauchier d'Autreche se fist armer en son paveillon de touz points, JOINV. 217.XVIe s.• Il monte après le lit, defait le beau pavillon de sarges de diverses couleurs qui y estoit, DESPER. Contes, VIII.• Et pour avoir habillé vingt-quatre pavillons de la dicte galeace [le Saint-Jean, en 1538] qui estoient rompus, Ms. de 1541, dans JAL..• Huict jours après le massacre [de la Saint-Barthélemy], il vint une grande multitude de corbeaux, les uns s'appuyer, les autres croacer sur le grand pavillon du Louvre, D'AUB. Hist. II, 29.Provenç. papallo, pabalho, pavallo ; cat. pabello, pavello ; esp. pabellon ; ital. padiglione ; du lat. papilionem, ainsi dit de la ressemblance avec un papillon (voy. ce mot). Le pavillon, tente, se dit de tentures, et de là passa au sens d'étendard.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.