or

or
or 1.
(or) adv.
   On a dit autrefois or, ore et ores, dans le sens de présentement.
   Comme ores à mes yeux vos marques apparaissent, MALH. I, 4.
   Ô débile raison, où est ores ta bride ?, RÉGNIER Sat. IX..
   Si je t'aimai jadis, ores je m'en repens, RÉGNIER Élég. II.
   Or sage à mes dépens, j'esquive la bataille, RÉGNIER Épître II.
   Ores est temps de vous donner conseil, DESHOULIÈRES Ball. à une de mes filles.
   On l'a dit aussi dans le sens de tantôt,... tantôt.
   Or ils parlent soldat, et ores citoyen, RÉGNIER Sat. XI.
   .... Faisant ore un tendon, Ore un repli, puis quelque cartilage, LA FONT. Fais..
   Aujourd'hui, conjonction qui sert à lier la mineure d'un argument à la majeure, et dont la signification est une dérivation de celle de ore, maintenant. Tous les hommes sont mortels ; or un roi est un homme ; donc un roi est mortel.
   Ores, archaïquement.
   Ores ce sont suppôts de sainte Église, LA FONT. Cloch..
   Or sert aussi à lier un discours à un autre.
   Or le plus grand dessein qui m'arrête en ces lieux, MAIR. Solim. I, 2.
   Or il est temps, ma soeur, de montrer qui nous sommes, Et qui peut plus sur nous, ou des dieux ou des hommes, ROTR. Antig. III, 5.
   Comble-moi cette ornière ; as-tu fait ? Oui, dit l'homme. Or bien je vas t'aider, dit la voix, prends ton fouet, LA FONT. Fabl. VI, 18.
   Or ai-je été prolixe sur ce cas, LA FONT. Fér..
   La règle pour entendre l'Écriture est de l'entendre selon la tradition.... or est-il que le motif de la récompense se trouve par toute l'Écriture, BOSSUET Quiétisme, 4e écrit, I, 24.
   Or donc se dit dans un sens analogue. Or donc, pour en revenir à ce que je disais....
   Or donc ne peut se mettre pour or servant à argumenter ; et c'est une faute de dire : Dieu est juste, vous l'offensez ; or donc il vous punira. Il faut mettre : donc il vous punira.
   Or sert à exprimer l'exhortation. Or, dites-nous. Or çà, monsieur. Or sus commençons.
   Or, faites-en, nymphes, votre profit, LA FONT. Court..
   En son hôtel il fait venir Le chanteur, et lui dit : Or çà, sire Grégoire, Que gagnez-vous par an ?, LA FONT. Fabl. VIII, 2.
   Or sus, nous voilà bien, MOL. Tart. II, 1.
   Xe s.
   Dixit ore nos [il nous dit ore], Fragm. de Valenc. p. 467.
   Si astreient [seraient] li Judei perdut, si cum il ore sunt, ib. p. 468.
   XIe s.
   Et dist al rei : or ne vous esmaiez, Ch. de Rol. III.
   Des or [il] comence le conseil que mal prist, ib. XII.
   XIIe s.
   Ici de Charlemaine [je] me doi ore bien taire, Sax. XXXI.
   XIIIe s.
   Et par tel convant li rendirent [la ville], qu'il les tenroit as us et as coustumes que li emperers Grieus les avoit tenus jusques à ore, VILLEH. CXVIII.
   Quant Tybers et les serve voient qu'il va ainsi, Or ne demandez mie s'il furent esbaubi, Berte, LXXXIX.
   Seneschal, or me dites les raisons pourquoy preudomme vaut miex que beguin, JOINV. 195.
   XVe s.
   [Quand le roi Philippe vit les Génois fuir devant les Anglais] il commanda et dit : Or tost, tuez toute cette ribaudaille, car ils nous empeschent la voie sans raison, FROISS. I, I, 287.
   Et là nous dist à tous le duc Jehan : Or çà nous sommes à ce que nous avons tousjours desiré, COMM. I, 11.
   XVIe s.
   C'est ores la saison qu'on voit de toutes choses Multiplier par tout les semences encloses, DU BELLAY IV, 76, verso..
   Et, ores que le sage ne doibve donner aux passions humaines de se fourvoyer de la droicte carriere, il peult bien leur quitter...., MONT. I, 339.
   Mais, en la meslée, l'un descendoit à terre ; et combattoient ores à pied, ores à cheval, l'un aprez l'autre, MONT. I, 368.
   Et ores que le faire soit plus naturel aux Gascons que le dire, si est-ce qu'ils s'arment quelquefois autant de la langue que du bras, MONT. IV, 343.
   J'espere et crain, je me tais et supplie, Or' je suis glace et ores un feu chaud, RONS. 6.
   Provenç. ora, ara, aras, er, era, eras ; anc. cat. ara ; ital. or, ora ; du lat. hora (voy. heure). Le sens propre de ore, ores ou or est : à l'heure, alors, maintenant ; de là le passage est facile au sens actuel de or. Ore ou or est hora ; ores est horis.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
1. OR.
   Ajoutez : D'ores et déjà ou d'ors et déjà, dès maintenant. Quand les deux époux concourent au contrat, le consentement de la femme est certain, et rien ne s'opposait à ce qu'on la déclarât d'ors et déjà propriétaire de l'immeuble licité, Dissertation insérée au n° 2925 du Répertoire périodique de l'enregistrement.
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or 2.
(or) s. m.
   Métal d'un jaune brillant, d'une pesanteur très grande, dont on fait les monnaies de la plus haute valeur.
   L'or est un charme étrange, un métal précieux, Qui corrompt toute chose et tenterait les dieux, ROTR. Antig. V, 5.
   Qu'il ne s'ingère pas d'oser écrire encor Des lettres qu'il envoie avec des boîtes d'or, MOL. Éc. des mar. II, 7.
   Quand je vois.... nos vaisseaux, domptant l'un et l'autre Neptune, Nous aller chercher l'or malgré l'onde et le vent, BOILEAU Disc. au roi..
   À quoi bon ravir l'or au sein du nouveau monde ?, BOILEAU Épître V.
   Telle qu'une bergère.... sans mêler à l'or l'éclat des diamants, Cueille en un champ voisin ses plus beaux ornements, BOILEAU Art p. II.
   C'est pour eux [ses amants] qu'elle étale et l'or et le brocart, BOILEAU Sat. X..
   Que de l'or le plus pur son autel soit paré, RAC. Esth. III, 9.
   L'or et l'argent étaient très rares en Europe ; et l'Espagne, maîtresse tout à coup d'une très grande quantité de ces métaux, conçut des espérances qu'elle n'avait jamais eues, MONTESQ. Esp. XXI, 22.
   Lorsque les nations policées sont les maîtresses du monde, l'or et l'argent augmentent tous les jours, MONTESQ. ib. XXII, 4.
   L'or est de toutes les matières du globe la plus pesante, la plus inaltérable, la plus tenace, la plus extensible ; et c'est par la réunion de ces caractères prééminents que, dans tous les temps, l'or a été regardé comme le métal le plus parfait et le plus précieux, BUFF. Min. t. IV, p. 218.
   En général, on trouve l'or dans quatre états différents, tous relatifs à sa seule divisibilité, savoir en poudre, en paillettes, en grains et en filets séparés ou conglomérés, BUFF. ib. t. IV, p. 223.
   L'or le plus fin, c'est-à-dire le plus épuré par notre art, est, comme l'on sait, à 24 carats ; mais on n'a jamais trouvé d'or à ce titre dans le sein de la terre ; et dans plusieurs mines il n'est qu'à 20 et même à 16 et à 14 carats, BUFF. ib. t. IV, p. 226.
   Dans les premiers temps de la civilisation de l'espèce humaine, l'or, qui, de tous les métaux, s'est présenté le premier à la surface de la terre ou à de petites profondeurs, a été recueilli, employé et travaillé, BUFF. ib. t. IV, p. 295.
   En 1461, on fit le commerce de l'or de la Mina [or de la mine] au cinquième degré de latitude nord, sur cette même côte qu'on a depuis nommée la côte d'Or, BUFF. ib. t. IV, p. 326.
   L'or, l'argent et le cuivre sont les premiers métaux que les hommes ont connus ; on les trouvait souvent à la surface de la terre sans les avoir cherchés, CONDIL. Comm. gouv. I, 13.
   Au Japon, l'or est à l'argent comme un à huit, tandis qu'il est en Europe comme un à quatorze et demi ou comme un à quinze, CONDIL. ib. I, 19.
   L'or et l'argent ne sont pas des richesses ; ils représentent seulement des richesses, RAYNAL Hist. phil. VIII, 34.
   Pour avoir de l'or, vous avez franchi les mers ; pour avoir de l'or, vous avez envahi les contrées ; pour avoir de l'or, vous avez massacré la plus grande partie des habitants, RAYNAL ib. VII, 24.
   Avant l'arrivée des Castillans, les Mexicains n'avaient d'or que ce que les torrents en détachaient des montagnes, RAYNAL ib. VI, 19.
   Il y a des corps capables de transmettre une couleur, et d'en réfléchir une autre ; tel est l'or, qui paraît jaune par réflexion, et bleu verdâtre par transparence, BRISSON Traité de phys. t. II, p. 409, dans POUGENS.
   Il en est de l'or comme de l'argent : l'époque de sa découverte se perd dans la nuit des temps, et la tradition ne fournit parmi les hommes aucune trace des événements qui le leur ont fait connaître pour la première fois, FOURCROY Connaiss. chim. t. VI, p. 346, dans POUGENS.
   La densité de l'or est telle qu'on l'a cru longtemps le corps le plus pesant de la nature ; on sait aujourd'hui qu'il ne tient que le second rang, et qu'il cède la première place au platine, FOURCROY ib. t. VI, p. 351.
   L'or s'applique sur le bois, sur le carton, sur le cuir, ou sur tout autre corps qui ne peut éprouver l'action du feu, au moyen d'un mordant qui est tantôt une huile grasse et siccative, tantôt une colle animale, AL. BRONGNIART Traité de min. t. II, p. 349, dans POUGENS..
   La Thrace et la Macédoine fournissaient beaucoup d'or aux anciens, AL. BRONGNIART ib. t. II, p. 271.
   On ne trouve l'or minéralisé par aucune substance ; en sorte que ce genre n'est composé que d'une seule espèce, AL. BRONGNIART ib. t. II, p. 265.
   On ne trouve en général des mines d'or que dans les terrains primitifs, les terrains d'alluvion et le lit des rivières ; les premiers le contiennent en filons, et les autres en paillettes, THENARD Traité de chimie, t. I, p. 322, dans POUGENS.
   Faire de l'or, nom donné à toutes les opérations par lesquelles les alchimistes ont essayé de transformer les métaux vils en or.
   Le premier auteur qui parle de faire de l'or est Zozime, qui vivait dès le commencement du cinquième siècle, GENLIS Maison rust. t. II, p. 186, dans POUGENS.
   Ce n'est qu'or et azur, se dit d'une maison bien parée.
   Or en barre, or en lingot, or qui a la forme de barre, de lingot.
   Fig. C'est de l'or en barre, se dit d'une marchandise de bon aloi et dont on peut faire argent sans peine, d'un billet dont on aura de l'argent comptant quand on voudra.
   Géronte : Voilà certainement un effet fort bizarre ! - Hector : Oh ! s'il n'était pas mort, c'était de l'or en barre, REGNARD le Joueur, III, 4.
   C'est l'histoire de la dent d'or, se dit d'une prétendue merveille qu'il faudrait vérifier avant d'y croire ; une prétendue dent d'or venue à un enfant ayant servi de texte à beaucoup d'explications, avant qu'on eût examiné si la dent était d'or réellement.
   En 1593, le bruit courut que, les dents étant tombées à un enfant de Silésie, âgé de sept ans, il lui était venu une dent d'or.... il ne manquait autre chose à tant de beaux ouvrages [écrits pour expliquer ce phénomène], sinon qu'il fût vrai que la dent était d'or ; quand un orfévre l'eut examinée, il se trouva que c'était une feuille d'or appliquée à la dent avec beaucoup d'adresse, FONT. Oracles, I, 4.
   Juste comme de l'or ou comme l'or, se dit d'un poids très juste, à cause que l'or se pèse très exactement.
   Tous vos discours sur Charleroi sont justes comme l'or, SÉV. 353.
   Or se dit au pluriel pour signifier les différentes couleurs qu'on peut donner à l'or. Une boîte de deux ors. Des ors de différentes couleurs.
   Terme de commerce. Ce métal considéré suivant sa pureté ou ses emplois. Or de coupelle, ou or affiné, celui que le feu a purgé de toutes sortes de mélanges.
   Or au titre, l'or à bijoux au titre de 834 millièmes environ.
   Or bas, or au-dessous de 750 millièmes.
   Or vierge, celui qui n'a pas souffert le feu, et tel qu'il est sorti de la mine.
   Or moulu, celui dont on dore, au feu, le bronze et le cuivre.
   Or de coquille, celui avec lequel on écrit en lettres d'or, et qui sert aux enlumineurs.
   L'or en coquille est de l'or en oxyde pourpre, précipité de sa dissolution et délayé avec une eau mucilagineuse ou une dissolution de gomme, FOURCROY Connaiss. chim. t. VI, p. 397.
   
   On nomme or en chaux, celui que l'on prépare [pour la dorure] en broyant avec du miel les rognures de feuilles d'or.... pour faire l'or en drapeaux, on trempe des morceaux de vieux linge fin dans une dissolution nitro-muriatique d'or ; on les fait sécher et on les brûle ; quand on veut s'en servir, on trempe un bouchon mouillé dans les cendres de ces chiffons ; on en frotte l'argent sur lequel l'or très divisé s'applique facilement, FOURCROY ib..
   Lettres d'or, lettres écrites avec l'or de coquille.
   Souviens-toi de m'écrire ces mots ; je les veux faire graver en lettres d'or sur la cheminée de ma salle, MOL. Avare, III, 5.
   Or mat, celui qui n'est pas poli et dont la surface est inégale.
   Il serait fort à propos que ladite bordure fût d'or mat tout simplement ; car il s'unit très doucement avec les couleurs, sans les offenser, POUSSIN Lett. 28 avr. 1639.
   Or bruni, celui qui est poli avec la dent de loup.
   Or de la mosaïque, celui qui est partagé en petits carreaux pour paraître de relief.
   Or d'orfévrerie, or solide et massif, qui doit être mis en oeuvre.
   Or en pâte, or prêt à fondre dans le creuset.
   Or en feuilles, or disposé dans un petit cahier et dont se servent les peintres décorateurs et les fabricants d'éventails.
   Or vert, composé de couleur verte formé par la combinaison de 708 parties d'or pur avec 292 parties d'argent pur.
   Or vert, or en feuilles appliqué sur ce que les doreurs nomment l'assiette, après l'avoir brunie.
   Or d'épée, celui dont on se sert pour damasquiner.
   Or de pistolet, celui qu'emploient les armuriers.
   Or d'apothicaire, celui dont on fait usage pour peindre et écrire.
   Le veau d'or, voy. veau.
   Or, la monnaie, les espèces d'or. Il m'a payé tout en or. Nos pièces d'or contiennent 29 centigrammes d'or par franc, plus 1/9 de cuivre, qui est ainsi le dixième du poids total.
   Il leur jette de l'or ensuite à pleines mains, CORN. Théod. IV, 4.
   Nous n'avons pas les yeux à l'épreuve des belles, Ni les mains à celle de l'or, LA FONT. Fabl. VIII, 7.
   L'or est comme une femme ; on n'y saurait toucher Que le coeur, par amour, ne s'y laisse attacher, REGNARD le Joueur, IV, 13.
   Platon, qui naquit peu d'années avant la mort de Périclès, nous apprend qu'il y avait plus d'or et plus d'argent à Lacédémone que dans tout le reste de la Grèce, LÉVESQUE Instit. Mém. scienc. mor. et polit. t. III, p. 366.
   Il a coûté plus d'or qu'il n'est gros, c'est-à-dire on a dépensé beaucoup d'argent pour l'élever, pour l'entretenir.
   Or, vaisselle d'or.
   Que dans l'or mangent les grands ; Il ne faut à deux amants Qu'un seul verre, qu'une assiette, BÉRANG. B. vin..
   Or, fil d'argent doré dont on fait des passements, des galons, des franges, etc. Toile d'or. Drap d'or. Or de Paris, de Lyon.
   Ce n'est qu'or et que pourpre dans votre armée, VAUGEL. Q. C. III, dans RICHELET.
   M. de Langlé a donné à Mme de Montespan une robe d'or sur or, rebrodé d'or, rebordé d'or, et par-dessus un or frisé rebroché d'un or mêlé avec un certain or, qui fait la plus divine étoffe qui ait jamais été imaginée, SÉV. 326.
   L'or éclate en ses vêtements, RAC. Esth. II, 9.
   Défendre l'or et l'argent, défendre de porter des étoffes, des dentelles, tissues en fil d'argent doré.
   Or clinquant, or de Paris, clinquant d'or, fil de cuivre aplati en lame et employé, comme le fil d'or, pour lamer et broder les étoffes ; seulement l'or clinquant n'était porté que par les laquais, les bateleurs et les masques, DE LABORDE Émaux, p. 411.
   
   Or tremblant, feuilles d'or clinquant cousues sur des vêtements de mascarade, de manière à trembler au moindre mouvement, DE LABORDE Émaux, p. 413.
   
   Or trait, c'était de l'or ou de l'argent doré, étiré, et d'une grande ténuité, DE LABORDE ib..
   Les mûriers n'étaient encore cultivés qu'en Italie et en Espagne ; l'or trait ne se fabriquait qu'à Venise et à Milan, VOLT. Moeurs, 121.
   Terme de passementerie. Or fin, argent doré ou vermeil. Or faux, cuivre doré. Or demi-fin, cuivre qui a été doré trois fois ou plus.
   Fig. Il est tout cousu d'or, il est très riche.
   Son voisin au contraire était tout cousu d'or, LA FONT. Fabl. VIII, 4.
   Poétiquement. Des jours filés d'or et de soie, des jours brillants et heureux.
   La Parque à filets d'or n'ourdira point ma vie, LA FONT. Fabl. XI, 4.
   Fig. Richesses, opulence.
   Ni l'or ni la grandeur ne nous rendent heureux, LA FONT. Phil. et Baucis..
   Car, si l'éclat de l'or ne relève le sang, En vain l'on fait briller la splendeur de son rang, BOILEAU Sat. V.
   L'or même à la laideur donne un teint de beauté, BOILEAU ib. VIII.
   Si l'or seul a pour vous d'invincibles appâts, Fuyez ces lieux charmants qu'arrose le Permesse ; Ce n'est point sur ses bords qu'habite la richesse, BOILEAU Art p. IV.
   Un roi sage, ainsi Dieu l'a prononcé lui-même, Sur la richesse et l'or ne met point son appui, RAC. Ath. IV, 2.
   Si l'or prolongeait la vie, Je n'aurais point d'autre envie Que d'amasser bien de l'or ; La mort me rendant visite, Je la renverrais bien vite, En lui donnant mon trésor, FONTEN. Dial. 4, morts anc..
   César avait bien raison de dire qu'avec de l'or on a des hommes, et qu'avec des hommes on a de l'or ; voilà tout le secret, VOLT. Dict. phil. Roi..
   Au moment où l'on put arriver à tout avec de l'or, on voulut avoir de l'or, DIDER. Salon de 1767, Oeuv. t. XIV, p. 159, dans POUGENS.
   Malgré la voix de la sagesse, Je voudrais amasser de l'or, BÉRANG. Beauc. d'amis..
   Fig. et familièrement. Il ne ferait cela ni pour or ni pour argent, il ne ferait pas cela pour tout l'or du monde, pour tout l'or du Pérou, c'est-à-dire il ne le ferait pas à quelque prix que ce soit.
   Je veux mourir si pour tout l'or du monde Je voudrais être aussi savant que vous, J. B. ROUSS. Ép. II, 13.
   On n'en peut avoir ni pour or ni pour argent, se dit d'une chose très rare, qu'on ne peut se procurer.
   Acheter, vendre quelque chose au poids de l'or, l'acheter, le vendre très cher.
   Êtes-vous en état de les acheter au poids de l'or ?, LESAGE Estev. Gonz. ch. 31.
   Promettre des monts d'or, faire de grandes promesses.
   Faire un pont d'or à quelqu'un, voy PONT.
   Fig. et poétiquement. Il se dit de ce qui est jaune et brillant.
   L'aurore aux cheveux d'or, au visage de roses, Déjà comme à demi découvrait toutes choses, RÉGNIER Ép. I.
   C'est l'or de tes cheveux qui doit parer ton visage, et non cette rose qui les cache et que ton teint flétrit, J. J. ROUSS. Hél. II, 25.
   L'or flottant des moissons, et le vert des feuillages, Et le changeant émail qui peint les coquillages, DELILLE Trois règnes, I.
10°   Fig. Il se dit de ce qui a moralement une valeur comparable à celle de l'or.
   Me voici encore, ma fille, à dépenser.... mon pauvre esprit en petites pièces de quatre sous ; il n'y a pas un grain d'or à tout ce qu'on dit, SÉV. 10 août 1680.
   Tous les jours à la cour un sot de qualité Peut juger de travers avec impunité, à Malherbe, à Racan préférer Théophile, Et le clinquant du Tasse à tout l'or de Virgile, BOILEAU Sat. IX..
   Quelquefois du bon or je sépare le faux, BOILEAU Art p. IV.
   Son livre [d'Homère] est d'agréments un fertile trésor ; Tout ce qu'il a touché se convertit en or, BOILEAU ib. III.
   Comment en un plomb vil l'or pur s'est-il changé ?, RAC. Athal. III, 7.
   C'est un coeur d'or, c'est-à-dire c'est un excellent coeur.
   Il parle d'or, il dit d'or, c'est-à-dire il dit ce qu'il y a de mieux à dire en la circonstance, ou ce qu'il y a de plus satisfaisant pour celui à qui il parle.
   Ma foi, vous dites d'or ; tout ira bien, courage !, HAUTEROCHE Bourg. de qualité, I, 7.
   Je parle d'or, SÉV. 16 juill. 1677.
   Par la mardi, vous parlez d'or, vous m'ôtez plus de cent pesant de dessus le corps, et vous prenez bien la chose, MARIV. Surpr. de l'amour, II, 5.
   Il dit d'or, et si il n'a pas le bec jaune, il parle bien et à notre avantage.
   Un homme d'or, un homme très utile, très précieux pour ce qu'il y a à faire.
   Je vous trouve pour le service Un homme d'or, IMBERT Jaloux sans amour, I, 3.
   C'est un livre d'or, se dit d'un livre excellent, et particulièrement d'un petit livre qui contient beaucoup d'idées justes et d'une utilité pratique.
   Voyez ces lignes, elles sont toutes d'or, PASC. Prov. IV.
   Ce livre tout d'or, qu'il [Vincent de Lerins] a intitulé Commonitorium ou mémoire sur l'antiquité de la foi, BOSSUET Proj. de réunion, 2e part. lett. XXXIII.
   Il vaut son pesant d'or, se dit d'un homme qu'on veut louer, d'un homme excellent.
   Poétiquement. Une bouche d'or.
   Les poëtes célèbrent les dieux avec une bouche d'or, et sont les plus simples des hommes, CHATEAUBR. René..
   Populairement. Saint Jean bouche d'or, se dit d'un homme qui ne peut garder les secrets, ou qui ne déguise pas sa pensée.
   Une affaire, un marché d'or, qui présente de grands avantages.
   Vous pouvez faire des affaires d'or d'ici à demain, PICARD Duhautc. I, 9.
11°   Terme de mythologie. L'âge, le siècle d'or, les temps où, sous le règne de Saturne, les hommes vivaient dans l'innocence et le bonheur.
   Je transportais dans les asiles de la nature des hommes dignes de les habiter.... je me faisais un siècle d'or à ma fantaisie, J. J. ROUSS. 3e Lett. à M. de Malesherbes.
   Je le dis sans blesser personne, Notre âge n'est pas l'âge d'or, BÉRANG. Âge futur..
   C'est un homme de l'âge d'or, un homme de moeurs pures, d'une grande vertu.
   On dit dans le même sens : il a les moeurs de l'âge d'or.
   Par extension.
   Le dix et le onzième siècle passent pour les plus barbares du christianisme, mais il [Leibnitz] prétend que ce sont le treize et le quatorzième, et qu'en comparaison de ceux-ci, le dixième fut un siècle d'or, du moins pour l'Allemagne, FONT. Leibnitz..
12°   Nombre d'or, voy. nombre.
13°   Eau ou liqueur d'or, l'eau-de-vie de Dantzick, sorte de ratafia dans lequel on a mis quelques paillettes d'or.
14°   Terme de blason. Couleur jaune qui représente le premier métal ou le premier des émaux, et qui s'exprime, dans la gravure, par une infinité de petits points. Il porte un lion d'or.
15°   Terme de chimie. Or fulminant, oxyde d'or obtenu en précipitant le chlorure par un excès d'ammoniaque, et qui détone par la chaleur ou la pression.
   L'or fulminant causa la mort de son inventeur, SENNEBIER Ess. sur l'art d'observ. t. I, p. 420, dans POUGENS..
   Or potable, liquide huileux et alcoolique qu'on obtient en versant une huile volatile dans une dissolution de chlorure d'or, et qu'on regardait autrefois comme un cordial et un élixir de santé ; il est sans vertu.
   Il fallait que ce fût quelque goutte d'or potable. - Cela pourrait bien être, MOL. Méd. m. lui, I, 5.
   Il [Villebrune] a eu de grandes conversations avec M. de Vardes sur l'or potable ; il est fort estimé dans notre Bretagne, SÉV. 291.
   Je suis toujours fort en peine de Corbinelli ; il a été rudement traité de la fièvre tierce, le délire, et tout ce qui peut effrayer : il a pris de l'or potable, nous en attendons l'effet, SÉV. 360.
   Toutes les recettes d'or potable, de teintures et d'élixirs aurifiques, tous les moyens prétendus de le diviser, de l'atténuer, de le dissoudre ont été pour les véritables chimistes autant de faits sur ses affinités et ses combinaisons, FOURCROY Connaiss. chim. t. VI, p. 348.
16°   Nom de différentes substances qui n'ont rien de commun avec l'or.
   Or blanc, ancien nom du platine.
   Or de chat, nom vulgaire du mica lamelliforme ou ammochryse.
   Or graphique, tellurure d'or argentifère.
   Or paradoxal ou problématique, tellure.
   Or de Manheim, synonyme de similor (il faut prononcer manèmm, qui rime à Jérusalem).
   Or musif ou mussif, voy. musif.
   Or de Judée, synonyme d'or mussif.
   Or faux, chrysocale. Bijoux en or faux.
   Or d'Allemagne, feuille très mince de cuivre jaune.
17°   Or de couleur, sorte de vernis.
   Ce qu'on appelle or de couleur n'en a que l'apparence ; ce n'est qu'un simple vernis qui ne contient point d'or, BUFF. Min. t. IV, p. 289.
   Terme de doreur. Or couleur, couleur grasse et gluante dont les doreurs se servent pour appliquer les feuilles d'or battu.
   Or à huile, or en feuilles, or appliqué sur l'or couleur.
   Or de rapport, celui qu'on enchâsse dans du fer pour produire les damasquinures.
18°   Terme d'alchimie. Or vif des philosophes, le feu qui est dans la matière de la pierre.
   Fleur de l'or, la couleur qui suit la citrinité.
   Or blanc, le mercure hermétique.
PROVERBES
   C'est de l'or de Toulouse qui lui coûtera bien cher, c'est-à-dire ce bien ne lui profitera pas ; locution tirée de l'or pillé à Toulouse par les Romains, et qui, d'après la légende, fut cause de malheur à ceux qui l'eurent (voy. JUSTIN, XII, 3).
   Or est qui or vaut, c'est-à-dire nous estimons les gens à proportion du bien qu'ils nous procurent.
   Aux premiers siècles de l'Église, les évêques étaient d'or et avaient des crosses de bois, c'est-à-dire les vertus étaient grandes et la simplicité extrême.
   Tout ce qui reluit n'est pas or, c'est-à-dire il ne faut pas se laisser prendre aux belles apparences.
   Xe s.
   Ne por or, ned argent, ne paramenz, Eulalie.
   XIe s.
   D'or et d'argent quatre cenz muls chargez, Ch. de Rol. III.
   XIIe s.
   Coveitus fu d'aur et d'argent, WACE Rou, 6463.
   Et vaissels d'aur e d'argent, WACE ib. 6568.
   Sur un escu de fin or reluisant, Roncisv. p. 28.
   Vous porterez ma chartre où li seax d'or pend, Sax. XXI.
   XIIIe s.
   Qui l'escu portoit d'or à un lion d'azur, Berte, XLI.
   Nus ne puet paindre de couleur à or sele derriere, se elle n'est couverte de fin or, c'est à dire d'or sans mesleure d'argent que en apele or parti, Liv. des mét. 209.
   S'il seüst çou [ce] qu'il avint, il ne li eüst otriet [octroyé] pour tout l'or del mont, Chr. de Rains, 203.
   Sire, portés la lance el non sainte Marie ! - Sire, ce dist li dus, ne la porterai mie, Se vous or me doniés tout l'or qu'est en Roussie, Ch. d'Ant. VIII, 82.
   Or li furent remez encor Robes, vessels d'argent et d'or Et dras de soie à or batuz, RUTEB. II, 195.
   N'est pas tout or quanque il reluit, RUTEB. Vie Ste Elysab. p. 177.
   Le cent d'emeraudes, à or et sans or, DE LABORDE Émaux, p. 410.
   XIVe s.
   À Jehan de Lille, orfevre, pour XV esterlins d'or de touche à faire un collier pour le petit chiennet dudit seigneur [le roi], DE LABORDE ib. p. 412.
   XVe s.
   À Mery Baudet, plumasseur, demourant à Tours, pour avoir garni d'or clinquant xxviii plumeaux pour mettre sur les salades des gens du duc [de Bretagne], DE LABORDE ib. p. 411.
   Une beste tout chargiée de fremailles et d'or tramblant, le plus dru que faire se peut, DE LABORDE ib. p. 413.
   Tous marchans... qui s'entremectront de vendre et faire vendre à Paris or et argent filé, fait à Gennes, que l'on appelle or et argent de Chippre, qui se vend en cannettes, seront tenus de vendre icelui or et argent entresuivant et autel [tel] dessoubz comme dessus, DE LABORDE ib. p. 411.
   XVIe s.
   Il avoit fait escrire en grosses lettres d'or dessus un escu : à la bonne fortune, AMYOT Démosth. 27.
   Son stile estoit un fleuve d'or coulant, AMYOT Cicéron, 29.
   Son coeur comme son or est de vice souillé, RONS. 903.
   En la balance l'or et le fer sont un, LEROUX DE LINCY Prov. t. I, p. 80.
   Nul or sans escume, LEROUX DE LINCY ib. p. 81.
   Il est de bas or, il craint la touche, OUDIN Curios. franç..
   Bourg. Ô, devant une consonne ; prov. aur ; espagn. oro ; portug. ouro ; ital. oro ; bas-lat. orum (quod rustici orum dicebant, POMP., FESTUS, p. 75) ; du lat. aurum ; comparez le slave : lith. auksas, or ; prussien, ausin ; la racine est le sanscrit ush, brûler et aussi briller, à cause de l'éclat de l'or ; comparez le lat. aurora ; lithuanien, auszra ; sanscrit, <
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
2. OR. Ajoutez :
   
   Cet or tout mouvant [les champs de blé], RAC. Lexique, éd. P. Mesnard.
10°   Ajoutez :
   Le pesant d'or, au propre.
   [Chez les barbares] le parricide devra se racheter en donnant tout son pesant d'or, ou deux fois son pesant d'argent, MICHELET Orig. du droit, p. 365.

Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. . 1872-1877.

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