mouiller

mouiller
(mou-llé, ll mouillées, et non mou-yé) v. a.
   Rendre humide. Mouiller des étoffes. La pluie avait mouillé les chemins.
   Absolument. Le brouillard mouille beaucoup.
   Terme de marine. Mouiller les voiles, les arroser par un temps sec.
   Terme de jardinage. Arroser les plantes d'un jardin. Il faut mouiller ce nouveau plant.
   Mouiller quelqu'un, quelque chose de larmes, pleurer abondamment sur quelqu'un, sur quelque chose.
   Elle m'appela, m'embrassa et mouilla toute de ses larmes, SÉV. 12.
   Je mouille devant lui [Dieu] de larmes criminelles Ces lieux où tu m'as dit qu'il choisit son séjour, VOLT. Zaïre, IV, 1.
   Mouiller les yeux, se dit des larmes qui coulent des yeux.
   Amis, je vois les pleurs qui mouillent vos visages, VOLT. M. de César, III, 8.
   Mouiller les yeux de larmes, faire pleurer.
   Tu t'arrêtes, et ma souffrance Semble mouiller tes yeux de pleurs, BÉRANG. Prisonnier..
   Mouiller les lèvres, tremper légèrement ses lèvres dans un liquide.
   Cette coupe [l'espérance] où tant de misérables s'estimeraient heureux de mouiller un instant leurs lèvres, CHATEAUBRIAND Génie, I, II, 3.
   En termes de cuisine, ajouter un liquide à une sauce, à un plat. Mouiller une fricassée avec du bouillon.
   Terme de marine. Mouiller l'ancre, ou, par ellipse, mouiller, jeter l'ancre ou les ancres. Trente-trois galères qui ont mouillé l'ancre et qui sont rangées sous la grande forteresse, Lett. de du Quesne, 1681, dans JAL.
   Des îles Canaries où il [Colomb] mouilla, il ne mit que trente-trois jours pour découvrir la première île de l'Amérique, VOLT. Moeurs, 145.
   À six heures et demie, les vents refusant de plus en plus et la marée contraire étant assez forte, nous mouillâmes une ancre...., BOUGAINV. Voyage, t. II, p. 288, dans POUGENS.
   Vers deux heures du matin, Villeneuve, qui s'était borné à mouiller une ancre, profita du vent, et reprit sa direction vers l'ouest, THIERS Hist. du consulat, l. XXI.
   Par métonymie. Mouiller un vaisseau, jeter l'ancre ou les ancres d'un vaisseau. Être mouillé, avoir jeté l'ancre.
   Ils étaient mouillés en ligne, à portée de terre, les Espagnols au milieu, Mém. de Villette, 1676, dans JAL.
   Mouille, commandement que l'on fait lorsqu'on veut que l'ancre tombe et aille se fixer au fond de la mer.
   Mouiller sur la bouée d'un navire, mouiller très près de lui.
   Mouiller en affourchant, jeter deux ancres, l'une à bâbord, l'autre à tribord.
   Mouiller en patte d'oie, mouiller avec trois ancres disposées de telle manière que leurs câbles roidis forment comme trois doigts de la patte d'une oie.
   Mouiller en barbe de chat, mouiller un navire sur deux ancres, dont les câbles font avec le nez du navire des angles analogues à ceux que font les barbes avec le nez du chat, JAL.
   Mouiller en croupière, jeter une ancre du côté de la poupe.
   Ironiquement. Mouiller avec la quille, toucher et rester échoué.
   Terme de grammaire. Mouiller les ll, les deux ll, les prononcer comme dans paille, seuil, piller, etc.
   Mouiller gn, le prononcer comme dans agneau.
   Se mouiller, v. réfl. Être mouillé. Il se mouilla et s'enrhuma.
   C'est se plonger dans l'eau de peur qu'on ne se mouille, LAMOTTE Fabl. II, 14.
   Mes yeux se mouillèrent en chemin, MARIVAUX Marianne, 8e part..
   Terme de grammaire. Être prononcé mouillé. Le deux ll se mouillent dans famille.
   XIe s.
   Tuz l'escarnissent [le raillent], sil tenent pur bricun [un misérable], L'egue li getent, si moilent sun lincol [linceul, linge], St. Alexis, LIV.
   XIIe s.
   En haute tour se siet bele Isabel ; De larmes [elle] moille le lai [lé] de son mantel, Romanc. p. 70.
   XIIIe s.
   Les rives sont mouillées, et les chevaus leur cheent [tombent] sur les cors et les noient, JOINV. 224.
   La terre meïsmes s'orgoille Por la rousée qui le moille, Et oublie la poverté Où ele a tot l'yver esté, la Rose, 56.
   Il avoient sorti que chil qui passeroit cest fleuve sans moillier seroit trente ans sires de la tierre, H. DE VALENC. XIV.
   XIVe s.
   Et s'il est que desconfis soies, Et que tes gens mors et pris voies, Jà soit ce que li cuer t'en dueille, Garde que ton oeil ne s'en meuille, MACHAUT p. 110.
   XVe s.
   Or dit qu'elle vient du marchié, Or dit qu'elle a partout cerchié.... Or dit que trop souvent se mouille Pour le proufit de sa maison, E. DESCH. Miroir de mariage, p. 70.
   Quiconque veut travailler, Faut tenir la gorge nette, Et bien souvent la mouiller, BASSEL. XXVII.
   XVIe s.
   Ne tirons pas au doigt mouillé Pour jouer à cligne-musette, BAÏF Passe-temps II, Aventures..
   S'il avient une année fort mouillée, le dit fruit sera fade, PALISSY 32.
   Qui se garre dessous la feuille, deux fois se mouille, COTGRAV. .
   Se couvroit d'un sac mouillé, RAB. I, 11.
   Berry, moillier ; provenç. muelhar, molhar, moillar, mular ; cat. muelar ; esp. mojar ; port. molhar ; du lat. fictif molliare, dérivé de mollis (voy. mou 1) : ce qui mouille rendant mou.
SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRE
MOUILLER. - HIST.
   XVIe s. Ajoutez :
   Je mouille, je humette, je boy, et tout de paour de mourir, RAB. I, 5.
(rapprocher ce mouiller de Rabelais de la locution populaire : être mouillé, avoir trop bu).

Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. . 1872-1877.

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  • mouiller — MOUILLER. v. act. Tremper, humecter, rendre moite & humide, rendre degoutant d eau. Moüiller un linge dans de l eau, dans du vin. la pluye a moüillé les prez, les chemins. il tombe une petite pluye qui moüille fort. ce broüillard mouille comme de …   Dictionnaire de l'Académie française

  • mouiller — Mouiller, Semble qu il vient de Mollire, Madefacere, Madidare, Madificare, Insuccare, Intingere. Moüiller et destremper, Diluere. Fort moüiller et laver, ou tremper, Macerare. Se moüiller, Madefieri. Moüillé, Madens, Madidus, Vdus, vel vuidus.… …   Thresor de la langue françoyse

  • MOUILLER — v. a. Tremper, humecter, rendre moite et humide. Mouiller un linge dans l eau, une compresse dans du vin. La plaie a mouillé les près, les chemins. Il craint de se mouiller les pieds. Il n a fait que s en mouiller les lèvres, le bord des lèvres.… …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 7eme edition (1835)

  • MOUILLER — v. tr. Imprégner plus ou moins d’un liquide un corps, une surface, etc. Mouiller un linge. La pluie a mouillé les prés, les chemins. Il craint de se mouiller les pieds. Il n’a fait que s’en mouiller les lèvres, le bord des lèvres. Il a peur de se …   Dictionnaire de l'Academie Francaise, 8eme edition (1935)

  • mouiller — v.i. Sécréter le liquide vaginal. / Désirer : Il mouille pour un boudin. / Ça mouille, il pleut. □ v.t. Mouiller quelqu un, le compromettre. / Mouiller ou mouiller son froc, avoir peur. / Mouiller la meule, prendre la première consommation de la… …   Dictionnaire du Français argotique et populaire

  • mouiller — vt. MOLYÎ (Albanais.001, Annecy, Balme Si., Cordon, Morzine, Saxel, Thônes.004, Villards Thônes.028), molyé (Albertville.021, Arvillard.228, Chambéry, Table), mweulyé (Montagny Bozel), C.1, D. => Farfouiller (molyon), Humide (molyé), Laîche… …   Dictionnaire Français-Savoyard

  • Mouiller ses lèvres — ● Mouiller ses lèvres les tremper légèrement dans une boisson en buvant à peine …   Encyclopédie Universelle

  • Mouiller son maillot, sa chemise — ● Mouiller son maillot, sa chemise faire de gros efforts, se dépenser sans compter …   Encyclopédie Universelle

  • Mouiller une ligne — ● Mouiller une ligne la jeter dans l eau …   Encyclopédie Universelle

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