- arroser
- (a-rô-zé) v. a.1° Faire tomber, faire arriver de l'eau ou un autre liquide. Arroser les rues d'une ville, les promenades, une chambre, un parterre. Arrosez cette chambre avec du vinaigre.• Quand je racle votre cuvier, Et puis que je l'arrose, LA FONT. Cuv..Par extension.• Le rivage qu'elle arrosait de ses larmes, FÉN. Tél. I.• J'arrosai son visage d'un torrent de larmes, FÉN. Tél. IV.• Elle lui arrosa la main de quelques larmes, HAMILT. Gramm. 7.• Pour arroser son lit de ses larmes, MASS. Conc..2° Fig.• [Je vois] Du sang des Africains arroser ses lauriers, CORN. Cid, II, 5.• Dût le peuple en fureur pour ses maîtres nouveaux De mon sang odieux arroser leurs tombeaux, CORN. Rod. V, 1.Arroser la terre de ses sueurs, travailler péniblement la terre.Arroser son pain de larmes, vivre au sein de la misère, dans la douleur.3° Couler à travers les terres. Ce ruisseau arrose nos prés et les fertilise.Par extension. Cette rivière arrose un pays charmant. Le Danube arrose beaucoup de contrées.Fig.• La providence est une source Toujours prête à nous arroser, MALH. I, 5.4° Arroser un rôti, répandre sur la viande, pendant qu'elle rôtit, du jus, du beurre ou de la graisse.Familièrement. Arroser des créanciers, leur distribuer des à-compte pour obtenir des délais.Faire de petites libéralités. Ayez soin d'arroser ces gens-là.En termes de jeu, se dit de la rétribution qu'un joueur doit à tous les autres en certains cas, ou que tous les autres lui doivent.Ajouter, en parlant d'actionnaires ou d'intéressés dans une entreprise, à la mise de fonds pour subvenir à des dépenses imprévues.Fig.• Après que j'eus un peu arrosé le public [semé dans le public le bruit de....], je m'ouvris avec les particuliers, RETZ III, 243.On dit, dans quelques provinces, arroser le chanvre, le lin, au lieu de le rouir, le faire rouir. C'est une locution peu exacte.XIIe s.• Il comanda que li sacrefice qui estoient tué sur l'auter [autel] fussent arosé de cele aigue [eau], Machab. II, ch. 1.• En une nuit, ce savons tuit, Flori la verge et porta fruit, Sans ce que ele fust plantée, Ne moillée, ne arosée, WACE Vierge Marie, p. 51.• [Rou] Qui, od le suen brant perillos, Arose de lur sancs la plaigne, BENOÎT II, 2248.• Ahi ! mezine [médecine] de halte et de novele maniere, ki seichet les enflées choses en rapressant, et arroset les seiches en sorlevant, Job, 507.XIVe s.• Quand on plante, l'en doit arroser le pié et la terre, non la feuille, Ménagier, II, 2.XVIe s.• En nous arrousant de sa grace invisible, il nous rend fertiles à produire fruicts de justice, CALVIN Instit. 414.Picard, arouser ; Berry, arrouser, bourguig. erôzai ; provenç. arrosar, arrozar, arosar ; de ad (voy. à) et un verbe fictif roser, dérivé du latin ros (voy. rosée). Palsgrave, au XVIe siècle, prononce les deux r Au commencement du XVIIe, la prononciation arrouser était encore très ordinaire :• Il n'y aurait pas moyen de défendre aux pluies les champs des sacriléges et leur prescrire ce qu'elles arrouseraient et ce qu'elles n'arrouseraient pas, MALHERBE Trad. de Sénèque, de Beneficiis.Vaugelas, remarquant que la plupart disent et écrivent arrouser, recommande arroser ; et Marg. Buffet, p. 129, dit qu'arrouser est une vieille prononciation dont on ne se sert plus.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.