- apparence
- (a-pa-ran-s') s. f.1° Ce qui apparaît d'une chose.• Il ne faut pas toujours juger sur les apparences, SÉV. 461.• L'apparence nous trompe, et je sais en effet...., CORN. Héracl. IV, 6.• L'apparence t'abuse, il m'aime au fond de l'âme, CORN. Sert. II, 3.• De votre changement la flatteuse apparence M'avait rendu tantôt quelque faible espérance, RAC. Bérén. V, 7.• Son esprit était éclairé d'une foi constante et inébranlable que les apparences humbles et pauvres ne pouvaient blesser, FLÉCH. I, 118.• Vous le pourriez avec d'autant plus d'apparence de raison que...., FÉN. Tél. XX..• Non, non, vous vous laissez tromper à l'apparence, MOL. Tart. III, 6.• Elle donnerait au public quelques apparences en faveur du duc, HAMILT. Gramm. 8.2° Absolument, belle apparence, belles apparences.• Dans le hameau, cette maison a quelque apparence, J. J. ROUSS. Ém. v..• Le règne de Dieu ne viendrait point avec apparence, FLÉCH. Serm. I, 20.• Il ne fallait que la revêtir [l'idolâtrie] de quelque apparence et l'expliquer en paroles dont le son fût agréable à l'oreille pour la faire entrer dans les esprits, BOSSUET Hist. II, 12.Sauver les apparences, ne laisser rien apercevoir de blâmable.• Pourvu qu'elles sauvent les apparences, MOL. Impr. 1.• Il tâche de sauver les apparences, BOSSUET II, Pénit. 3.• Ils ne lui donneront un baiser de paix que pour sauver les apparences, MASS. Pass..• Tous ceux qui ont passé le Styx après moi [Tatius], m'ont assuré que tu [Romulus] n'as pas même sauvé les apparences [de mon assassinat], FÉN. XIX, 164.• Afin d'en sauver à tout le moins l'apparence.... vous direz .... que c'est la traduction d'une ode, BALZ. Liv. VII, lett. 27.• On garde encore à la vérité les apparences, MASS. Pardon..3° Forme, figure. Sous une apparence mortelle.4° Marque, vestige. Il ne reste à cette femme aucune apparence de beauté.• Sans qu'il y ait jamais eu aucune apparence de danger, SÉV. 249.5° Vraisemblance, probabilité.• Peut-être, et ce soupçon n'est pas sans apparence, CORN. Poly. III, 5.• Il y avait quelque apparence qu'il n'en était pas échappé, CORN. Ex. du Cid..• C'est elle dont je tiens cette haute espérance Qui flatte mes désirs d'une illustre apparence, CORN. Pomp. IV, 3.• Croyais-tu que son coeur, contre toute apparence, Pour la persuader trouvât tant d'éloquence ?, RAC. Baj. III, 3.• .... Un roi qui naguère avec quelque apparence De l'aurore au couchant portait son espérance, RAC. Mithr. III, 1.• ....cette guerre, Arcas, selon toute apparence, Aurait dû...., RAC. Iph. I, 1.• Parmi tous ces discours dépourvus d'apparence, ROTR. Antigone, IV, 5.• Ils n'étaient pas moins en admiration de leur rétablissement fait contre toute apparence, BOSSUET Hist. II, 5.• N'est-ce pas une témérité insupportable d'avancer des impostures si noires non-seulement sans la moindre preuve, mais sans la moindre ombre et sans la moindre apparence ?, PASC. Prov. 2.• Vous n'avez pu donner la moindre apparence à une accusation qu'il n'eût été permis d'avancer qu'avec des preuves invincibles, PASC. ib. 16.• Je le quittai, et je ne vois guère d'apparence d'y retourner, PASC. ib. 10.• Il va à droite et à gauche, selon qu'il y voit de jour et d'apparence, LA BRUY. 6.• Son voyage finira bientôt, selon toutes les apparences, LA BRUY. 223.• Je le croirais bien, il y a toutes les apparences du monde, MOL. Préc. rid. sc. 6.• Je vois trop d'apparence à tout ce qu'il a dit, MOL. le Dép. I, 5.• Il n'y a nulle apparence à cela, MOL. Préf. de Tart..• On peut juger avec grande apparence Que...., LA FONT. Rich..• Je ne vois pas d'apparence qu'ils disposent de moi, HAMILT. Gramm. 8.• Selon les apparences, ils perdirent courage, FÉN. Tél. VI.Il y a apparence que.• Il n'y aurait point d'apparence qu'un particulier fît...., DESC. Méth..• Il y a apparence que je me ressentirai de votre faveur, BALZ. Liv. VI, lett. 2.• Il y a de l'apparence que nous lui gagnerons son argent, HAMILT. Gramm. 3.• Il y a apparence qu'on ira voir cette personne, SÉV. 408.• Je la crois telle aujourd'hui qu'elle a toujours été, et il n'y a pas d'apparence qu'elle se perfectionne jamais..., DIDER. Lett. sur les sourds et muets.• Il n'y a pas d'apparence que je puisse vous voir sitôt, BOSSUET Lett. Corn. 31.• Quelle apparence y avait-il qu'ils [les mages] demeurassent dans leurs palais, tandis que Jésus-Christ était dans sa crèche ?, FLÉCH. Serm. I, 208.• Quelle apparence y a-t il qu'on puisse les réduire et les ramener à Dieu [ses sens et ses pensées] quand on veut ?, FLÉCH. Panég. II, 239.Il n'y a pas apparence de avec un infinitif.• Il n'y a point d'apparence d'être prodigue dans la pauvreté, BALZ. Liv. v, lett. 9.• Il n'y avait pas d'apparence d'abandonner mon ami dans un si grand accablement d'affaires, SCARR. I, 104.Elliptiquement.• Mais l'apparence, ami, que vous puissiez lui plaire, Teint du sang de celui qu'elle aime comme un père ?, CORN. Cinna, II, 2.• Quelle apparence de pouvoir remplir tous les goûts ?, LA BRUY. Disc. sur Théophr..• Quelle apparence de dire que je veux envoyer des troupes ?, FÉN. Tél. XII.• Quelle apparence qu'il vienne dans une île si éloignée ?, FÉN. ib. XIV.• Quelle apparence de s'en prendre à un pécheur qui se repent ?, FLÉCH. Serm. I, 289.• Mais quelle apparence de m'étendre davantage sur un sujet où, si je veux me louer de votre bonté...., PELLISSON Disc. à l'Académie..6° Faux-semblant.• Ils couvrent leurs passions sous une apparence de piété, FLÉCH. Lam..• Vices déguisés sous les apparences de la vertu, FÉN. Tél. III.• Allons chercher fortune autre part, je vois bien qu'on n'aime ici que la fausse apparence, MOL. Préc. rid. sc. 18.7° En apparence, loc. adv. D'après ce qui paraît, ce qu'on voit. La condition la plus heureuse en apparence a ses amertumes.• Qu'elles le soient effectivement et non en apparence, BOSSUET Polit..• Du prince, en apparence, elle reçoit les voeux, Mais elle les reçoit pour les rendre à Roxane, RAC. Baj. I, 1.• Hermione, seigneur, au moins en apparence, Semble de son amant dédaigner l'inconstance, RAC. Andr. I, 1.• Et qui croira qu'un coeur, si grand en apparence...., RAC. Brit. III, 6.• Si l'on guérit le mal, ce n'est qu'en apparence, CORN. Cid, II, 3.8° En perspective, l'apparence d'un objet est le point par lequel on suppose que passe une ligne qui vient directement à l'oeil.L'Académie dit : sous apparence de l'amitié. Cela ne paraît pas correct ; il faut, ou sous l'apparence de l'amitié, ou sous apparence d'amitié, ou sous une apparence d'amitié.XIIIe s.• Se uns estranges areste en une vile un an ou deus, sans fere aparance de voloir y demorer, BEAUMANOIR LVI, 3.• En tel cas il poent estre prové à bastart par l'aparance du fet, ib. XVIII, 14.XIVe s.• Et souffist parler de ceulx qui de prime face ont aucune apparence, ORESME Eth. 1111.XVe s.• Et veulent dire les aucuns que ce dimanche, selon les apparences que on y vit depuis, le duc de Bretagne ot traité aux Anglois, FROISS. II, II, 215.• Les apostres ne le doulz Jhesu Crist Ne porterent draps de grant apparance, E. DESCH. L'habit ne fait pas l'homme..XVIe s.• Chose qui eust eu apparence [qui eût semblé vraie] en un autre siecle, MONT. I, 27.• Ambassadeur par effect, mais par apparence homme privé, MONT. I, 38.• On peut dire avecques apparence que...., MONT. I, 121.• Il n'y a pas grande apparence que cette isle soit ce monde...., MONT. I, 232.• L'alteration des sainctes escritures est deffendue, non sans apparence [raison], MONT. I, 399.• Cest argument certes a apparence ; neantmoins...., LANOUE 230.• Le François est prompt d'embrasser les choses où il void quelque apparence d'y recevoir louange, LANOUE 235.• Un autre dessein fut tenté par lui (qui ne fut non plus executé) auquel il y avoit, ce me semble, plus d'apparence, LANOUE 553.• Tant en apparence qu'en effect, LANOUE 605.• Il n'y a point d'apparence que je m'y doive fier, CARL. IV, 14.• Que les affaires de la religion estoient beaucoup plus en apparence d'avoir pis qu'en esperance de mieux avoir, M. DU BELL. 185.• Je porte la peine de ce que je ne suis pas beau filz ny homme de nulle apparence, AMYOT Philop. 3.Provenç. apparencia, aparensa ; espagn. apariencia ; ital. apparenza ; du latin apparentia, de apparens, apparent.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.