- flegme
- (flè-gm') s. m.1° Terme de médecine. L'une des quatre humeurs cardinales des anciens, dite aussi pituite ; elle est, suivant eux, froide et humide, et prédomine surtout en hiver.• Le flegme humide et froid, s'élevant au cerveau, Y vient représenter des brouillards et de l'eau, TRISTAN Mariane, I, 2.• Qui n'ont que du flegme dans les veines, PASC. Prov. 9.Aujourd'hui, synonyme peu employé de sérosité, d'humeur aqueuse.Dans ces deux sens on écrit aussi phlegme.2° Matière pituiteuse qu'on rejette en toussant, en crachant, en vomissant. Il a jeté beaucoup de flegmes.3° Flegme salé, nom que l'on donne en Espagne à une espèce de pellagre.4° Dans l'ancienne chimie, la partie aqueuse, insipide et inodore que la distillation dégage des corps.• Les sels, les flegmes, la tête morte ne s'enflamment point, VOLT. Feu, II, 5.• Le flegme est la substance qui est en plus grande quantité dans la composition des mixtes, et surtout dans celle des plantes et des animaux, CHARRAS Pharm. I, 4, dans RICHELET.Terme de distillerie. Les flegmes, produits aqueux de la première distillation des mélasses, des jus de betteraves ou de grains, et, en général, des sirops fermentés ; ils marquent de 40° à 50° environ à l'alcoolomètre, et contiennent, outre l'alcool, des huiles essentielles, des éthers, etc. C'est en rectifiant les flegmes que l'on obtient l'alcool à 95° et des huiles essentielles servant à l'éclairage.5° Fig. Caractère posé, patient et qui se possède.• La Baguenodière le regarda toujours d'un même flegme, capable de faire enrager tout le genre humain, SCARR. Rom. com. II, 17.• Mais ce flegme, monsieur, qui raisonnez si bien, Ce flegme pourra-t-il ne s'échauffer de rien ?, MOL. Mis. I, 1.• Mon phlegme est philosophe autant que votre bile, MOL. ib..• D'où vient que les mêmes hommes qui ont un flegme tout prêt pour recevoir indifféremment les plus grands désastres, s'échappent et ont une bile intarissable sur les plus petits inconvénients ?, LA BRUY. XI.• Il faut égayer le repas ; Point de flegme espagnol ; vive l'étourderie, FAVART Soliman II, II, 13.• Le grand prieur dit à Roquelaure des choses aussi fâcheuses que celles qu'il venait d'essuyer de son frère, et ce sans altérer un flegme fort à contre-temps, SAINT-SIMON XXVII, 54.• Aux applaudissements, il ne peut consentir, Et son flegme obstiné cherche à les démentir, MILLEV. Jalousies littéraires..XIIIe s.• Flemme qui est froide et moiste, BRUN. LATINI Trésor, p. 103.XIVe s.• Et o [avec] tout ce genre à fistule est chancre, mort mal, fleugme sause, ulcere et leur semblable, H. DE MONDEVILLE f° 79, verso..XVe s.• Dieux scet que ma vieillesse endure De froit et reume, jour et nuit, De fleume, de toux et d'ordure, EUST. DESCH. Poés. mss. f° 442, dans LACURNE.Norm. fleume ; Berry, flême, timidité, manque d'énergie ; génev. fleume, pituite ; peuple de Paris, flume, pituite ; provenç. flegma, flamma, flemma ; catal. fleuma ; espagn. flema ; ital. flemma ; le terme grec se traduit par pituite, proprement ce qui est brûlé, ce qui n'a plus de vertu, du verbe grec traduit par brûler. On voit par l'historique que fleume ou flume du peuple est non une faute, mais un archaïsme.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.