- elle
- (è-l') pron. de la 3e pers. féminin.Il s'emploie comme sujet. Elle a dit. Elles font. Qui a tenu ce langage ? elle.Elle qui.... au féminin, tandis que, au masculin, on dit lui qui.... Elle qui se prétend si sage a pourtant fait une sottise.Elle ne sert pas de régime direct à un verbe actif ; on le remplace par la devant ce verbe : je la chéris, pour je chéris elle.Quand le pronom la est le régime direct d'un verbe, et qu'après ce verbe il y a un nom qui concourt avec le pronom à former ce régime direct, on joint elle à ce nom : le lion la dévora, elle et ses enfants. On dit de même au sujet : elle mourut, elle et ses enfants.Elle ne sert pas ordinairement de régime indirect à un verbe quand ce régime est marqué par à ; on y substitue lui : parlez-lui, et non parlez à elle. Cependant, en quelques cas exceptionnels, où l'on veut exprimer plus fortement le régime indirect, on peut se servir de elle.• Il croyait même parler à elle, FÉN. Tél. VII.Quand on ajoute même à elle, on peut dire à elle : parlez à elle-même (voy. même).D'elle-même spontanément.• Mais enfin d'elle-même on ne l'entend jamais...., TH. CORN. Ariane, II, 1.• La flamme du bûcher d'elle-même s'allume, RAC. Iphig. V, 6.Elle se construit aussi avec une préposition comme complément d'un adjectif ou d'un verbe. Je ne suis pas content d'elle. Je pense à elle. Bien des préventions se sont élevées contre elle. Il faut s'adresser à elle.• Je trouvai du plaisir à me perdre pour elle, RAC. Androm. II, 5.Elle se construit moins bien de la sorte, quand il s'agit de choses et non de personnes ; vous avez une plume bien taillée ; c'est avec elle que j'ai écrit ; il vaut mieux dire : c'est avec cette plume. Cette muraille menace ruine, ne vous approchez pas d'elle ; dites : ne vous en approchez pas. Aussi on désapprouve ces deux vers de Voltaire : Fers, tombez de ses mains, le sceptre est fait pour elles, Oreste, V, 7 ; Mais qui peut altérer vos bontés paternelles ? Vous seule, vous, ma fille, en abusant trop d'elles, Tancr. I, 4. Cependant rien, dans la grammaire, n'empêchant cet emploi, qui seulement est languissant et prosaïque, on ne le blâmera pas absolument ; et l'on acceptera ce vers de V. Hugo, cité par Legoarant : Moi, la douleur m'éprouve, et mes chants viennent d'elle. On acceptera également cette phrase-ci : Cette comédie ayant plu à ceux pour qui elle est faite, je trouve que c'est assez pour elle.Xe s.• Elle n'out eskolté les mals conseliers, Eulalie.XIe s.• Quant el [la dame] le voit, ne peut muer ne rie [s'empêcher de rire], Ch. de Rol. LXXV.XIIe s.• Ele ot chemise de soie d'Aumarie, Ronc. p. 160.• Nule chançon ne m'agrée, S'el ne vient de fine amor, Couci, I.• La roïne ne fit pas que courtoise, Qui me reprist, ele et ses fiex li rois [son fils le roi], QUESNES Romancero, p. 83.• Au departir de li [elle] [il] l'a doucement baisie, Et ele lui aussi, Sax. VII.XIIIe s.• N'ert [n'étoit] fame qui à ele de grant biauté s'afiere, Berte, XII.• Onc puisqu'ele [elles] leur dame voudrent [voulurent] faire mourir, ib. LXIII.• Ge fusse arivés à bon port. Se d'els [elles] troi ne fusse aguetiés, la Rose, 2879.XIVe s.• Les queles choses, s'il [elles] sont bien considerées, H. DE MONDEVILLE f° 31, verso..• Les vaines [veines] sont devisées en moult de parties, tant qu'il soient capillaires, H. DE MONDEVILLE f° 22, verso..• Nous manifesterons et declarerons quantes il [les vertus] sont, ORESME Eth. 78.XVIe s.• Ell' n'en prendroit jamais, te di-je ; Car c'est une femme d'honneur, MAROT I, 207.• Et que veux-tu ? el' m'ayme bien, Je n'ai que faire de m'en plaindre, MAROT I, 210.• Elles sçavent trouver mille feintes excuses, Après qu'ell' ont failly, RONS. 125.Wallon, ile, èle, elle, elles Berry, alle, ielle ; provenç. e-la, elha, ella ; espagn. et ital. ella ; du latin illa (voy. il). L'ancienne langue a dit aussi il pour elle ; ce qui n'a rien d'extraordinaire, le latin disant illa.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.