- cultiver
- (kul-ti-vé) v. a.1° Travailler la terre pour lui faire produire les végétaux utiles aux besoins de l'homme et des animaux domestiques. Cultiver un jardin.• Il cultive son champ de ses propres mains, FÉN. Tél. VI.• Un des premiers soins du prince était de faire fleurir l'agriculture ; et les satrapes dont le gouvernement était le mieux cultivé avaient la plus grande part aux grâces, BOSSUET Hist. III, 5.Se livrer, s'adonner à la culture de certaines plantes. Cultiver la vigne.• Je ne veux, je n'attends rien de vous, et je mourrai en cultivant ma vigne, MARMONT. Contes moraux, Lauret..• Je confie à vos soins Les plantes que par choix cultivait ma tendresse, C. DELAVIGNE Paria, III, 1.2° Fig. Cultiver la poésie, la musique.• M. Lieutaud [médecin à la cour] donnait à l'étude tout le temps que ses devoirs lui laissaient ; il cultiva les sciences dans son nouveau séjour comme il les avait cultivées dans sa patrie ; il demeurait à Versailles, mais il ne vivait pas à la cour, CONDORCET Lieutaud..• Il apprit à cultiver les vertus, FÉN. Tél. XXI.• L'histoire naturelle peut passer aujourd'hui, par la manière dont elle est traitée, pour la plus intéressante de toutes les sciences que les hommes cultivent, et celle qui vous ramène le plus naturellement de l'admiration des ouvrages à l'amour de l'ouvrier, J. J. ROUSS. Projet d'éducation..• Combien de citoyens aujourd'hui prévenus Pour ces arts séduisants que l'Arabe cultive !, VOLT. Tancr. I, 1.• Nos modestes aïeux Parlaient moins de vertus et les cultivaient mieux, GILBERT XVIIIe siècle..3° Former, développer. Cultiver sa mémoire.• Les Grecs, naturellement pleins d'esprit et de courage, avaient été cultivés de bonne heure par des rois et des colonies venues d'Égypte, BOSSUET Hist. III, 5.• Leur esprit était vif et ferme ; mais ils prenaient peu de soin de le cultiver, mettant leur confiance dans leurs corps robustes et leurs bras nerveux, BOSSUET ib. III, 3.• Dans les douceurs qu'il goûtait avec ses enfants, il ne cessait de leur inspirer les sentiments de la véritable vertu ; et ce jeune prince, son petit-fils, se sentira éternellement d'avoir été cultivé par de telles mains, BOSSUET Louis de Bourbon..• Il est temps de montrer cette ardeur et ce zèle Qu'au fond de votre coeur mes soins ont cultivé, RAC. Ath. IV, 2.• Vous cultivez déjà leur haine et leur fureur, RAC. Athal. II, 7.• Soumise à mon époux et cachant mes ennuis, De son fatal hymen je cultivais les fruits, RAC. Phèd. I, 3.• Ce malheureux Brutus Dont Caton cultivait les farouches vertus, VOLT. M. de Cés. I, 1.• Ces semences de haine Que mes soins en secret cultivaient avec peine, VOLT. Sémir. II, 4.• J'avais cultivé quelques talents agréables, J. J. ROUSS. Hél. I, 1.• Avec quelle tendresse Ce père infortuné cultiva ma jeunesse, DUCIS Hamlet, II, 5.• Et ceux qui, de nos arts utiles inventeurs, Ont défriché la vie et cultivé les moeurs, DELILLE Énéide, VI, 893.Faire prospérer.• De ton trône agrandi portant seul tout le faix, Tu cultives les arts, tu répands les bienfaits, BOILEAU Ép. VIII.4° Entretenir des relations amicales et bienveillantes avec quelqu'un.• J'ai toujours eu beaucoup d'attache à le cultiver [Ménage], et je n'ai jamais voulu manquer de reconnaissance à tous les bons offices qu'il m'a rendus, SEGRAIS Mémoires, t. II, p. 109.• Vous devez cultiver avec soin Mgr Giori, BOSSUET Lett. quiét. 258.• Il est doux de voir ses amis par goût et par estime ; il est pénible de les cultiver par intérêt, LA BRUY. IV.• Les respecter, les cultiver, leur plaire, MASS. Car. Mélange..• Ces soins et ces empressements à cultiver l'estime des hommes, MASS. Car. Tiédeur. 2.• On ouvre sa maison à des serviteurs de Dieu ; on cultive leur amitié ; on conserve avec eux des liaisons d'estime et de confiance, MASS. ib. Véritable culte..• Vous n'en cultivez pas moins des liaisons fatales à votre innocence, MASS. ib. Rech..• Est-ce la prudence chrétienne qui cultive les grands pour en faire les protecteurs de la vérité ?, MASS. Confér. 1, Cond. des clercs dans le monde..C'est un homme qu'il faut cultiver, c'est une connaissance à cultiver, c'est un homme dont il faut entretenir la bienveillance.5° Se cultiver, v. réfl. Être cultivé. Ces terres se cultivent facilement.Fig.• Le plaisir de la société entre amis se cultive par une ressemblance de goût sur ce qui regarde les moeurs, et par quelque différence d'opinions sur les sciences, LA BRUY. V.• L'amitié qui se cultive aux dépens du devoir, n'a plus de charmes, J. J. ROUSS. Lettre à M. Moultou, t. V, p. 172, dans POUGENS.XIe s.• Cil qui custivent la terre, L. de Guill. 33.XIIe s.• Sunt lur ententes totes mises à la terre de lung gastie, Povre, deserte et enermie, Cum coiltivée funt à dreit, BENOÎT Chron. V. 7059.• Elle [la terre] ert maleite soz ta main, Tu la cotiveras en vain, Adam, Mystère, p. 35.XIIIe s.• Se la terre n'est bien semée Et cultivée et gaegniée, El ne vaut guere, Choses qui faillent en ménage.XIVe s.• Les champs qui n'avoient pas este coutivez, BERCHEURE f° 39, verso..XVe s.• Belle soeur, cy garde prenon ; Quand elle [la vigne] est fouie et fuenbrée [fumée] Et tailliée et bien cultivée...., Mir. de Ste Genev.XVIe s.• Terre portoit les fruicts tost et à poinct Sans cultiver, MAROT IV, 17.• Pour la coulpe de ceux qui l'ont eue en garde [nostre langue] et ne l'ont cultivée à suffisance, DU BELLAY I, 5, verso..• Il destourna le peuple au labourage, à fin que, cultivant la terre, il se cultivast et s'addoulcist aussi soy mesme, AMYOT Numa, 28.• Laissant durant ce temps là les terres en repos, en les cultivant toutesfois ; à ce que les herbes y croissans, n'en succent la substance, O. DE SERRES 90.Saintong. coutiver ; provenç. cultivar, coltivar ; ital. coltivare ; d'un adjectif cultif qu'on peut supposer dérivé de cultus, participe passé de colere.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.