- couche
- (kou-ch') s. f.1° Lit, dans le style poétique et soutenu.• Qui vous a si matin tiré de votre couche ?, ROTROU Vencesl. IV, 4.• Son sang à gros bouillons sur cette couche verte [lit de gazon]...., CORN. Rodog. V, 4.• L'aurore matinale Vient frapper de ses feux la couche nuptiale, DELILLE Trois règnes, VI.• Sur sa couche de mort il vit pour sa famille, Sent tomber sur son coeur les larmes de sa fille, DELILLE ib. VIII.• À ces mots, sur sa couche imprimant son visage, DELILLE Énéide, IV.• Si, par nous abrité, Il s'endort sur la couche De l'hospitalité, BÉRANG. Exilé..Souiller la couche, abuser de la femme de quelqu'un.• Volage adorateur de mille objets divers, Qui va du dieu des morts déshonorer la couche, RAC. Phèd. II, 5.Souiller la couche, se dit aussi de la femme qui manque à la fidélité conjugale.Familièrement. Bois de lit. Couche de bois de noyer.2° Mariage. Les fruits de sa couche, ses enfants. Dieu a béni leur couche, leur a donné des enfants.• Les dieux ne montrent point que sa vertu les touche ; D'aucun gage, Narcisse, ils n'honorent sa couche ; l'Empire vainement demande un héritier, RAC. Brit. II, 8.• Et jouir de la couche et des embrassements D'un homme qui fuyait tous ces engagements, MOL. École des f. III, 2.3° Linge dont on enveloppe les petits enfants. Une douzaine de couches.4° Enfantement. Être en couche, être dans le travail de l'enfantement et aussi être dans l'état qui suit l'enfantement. Relever de couche, se dit du rétablissement de la santé après l'enfantement.• Il arrive tant d'accidents aux femmes en couche, SÉV. 101.• Il m'a mandé l'heureuse couche de sa femme, SÉV. 219.• Je sais bien que vous êtes en couche, SÉV. 259.• La première personne qui vient au-devant de lui [pèlerin], c'est sa femme relevée de couches, CHATEAUB. Génie, III, V, 6.On dit également couche au singulier et au pluriel pour indiquer un seul enfantement. Les couches de cette femme ont été heureuses. Faire ses couches.Fausse couche, expulsion du produit de la conception qui survient avant le terme de la viabilité du foetus.• Il craint que cette émotion ne lui cause une fausse couche, SÉV. 20.Fig. Fausse couche, avortement.• La raison a fait bien des fausses couches avant de mettre ces deux enfants au jour, VOLT. Roi de Prusse, 164.Les lochies sont vulgairement appelées suites de couches.Suite de couches, se dit aussi des maladies ou indispositions qui suivent les couches.Les couches de la Vierge, dévotion à la Vierge où on lui chante des saluts neuf jours avant Noël.5° Terme de jardinage. Préparation de parallélogrammes larges et épais de plusieurs décimètres, formés de fumier, de feuilles, de mousses ou de toutes autres matières fermentescibles, susceptibles de s'échauffer et de conserver leur chaleur pendant un certain temps.• Nous vîmes briller si pompeusement tous les trésors de la Hollande [des tulipes] sur quatre couches de fumier...., J. J. ROUSS. Hél. IV, 11.Couche chaude, celle qui se fait avec du fumier de cheval dans son premier feu, ou peu de temps après sa sortie de l'écurie ; elle fournit une chaleur élevée, mais qui baisse rapidement si on ne la ranime avec des réchauds ou bourrelets de fumier chaud renouvelé souvent.Couche tiède, celle qui se fait avec du fumier de cheval, de vache et des feuilles, le tout bien mélangé ; la chaleur en est moins forte que celle de la couche chaude, mais elle se prolonge plus longtemps. Ces deux couches se chargent avec du terreau pur ou une terre mélangée, par quart ou par moitié, de terreau, suivant le temps que doivent y rester les plantes.Couche sourde, celle qu'on établit dans une tranchée creusée en terre et à laquelle on donne une forme bombée en dessus, recouverte entièrement d'une terre ameublie et mélangée de terreau. Les couches sourdes sont maintenues chaudes par un bourrelet épais de fumier chaud et sec mis dans les sentiers qui les bordent.6° Se dit des choses qu'on met par lits, surtout des fruits, de certains aliments, de certains médicaments, etc. Une couche de beurre, de confitures. Une couche de lard. Arranger différentes choses par couches.7° Lame ou lit de substances qui ont, relativement, de l'étendue et peu d'épaisseur.• Comme les différentes couches de l'atmosphère sont capables de dilatation et de compression, D'ALEMB. Oeuvres, t. XIV, p. 29, dans POUGENS.Couches géologiques, lits de substances terreuses ou pierreuses. Couches de Purbeck, assise inférieure du terrain wealdien. Couches de Weymouth, calcaires marneux alternant avec des marnes et appartenant à l'étage supérieur du terrain jurassique.• Dans mon ouvrage sur les ossements fossiles, je me suis proposé de reconnaître à quels animaux appartiennent les débris osseux dont les couches superficielles du globe sont remplies, CUVIER Révolut. p. 7.Terme de maçonnerie. Substance étendue qu'on applique sur une autre pour la couvrir. Revêtir un mur d'une couche de plâtre.Terme de paveur. Sable qu'on répand avant ou après un pavage.Terme de doreur. Feuille d'or ou d'argent qu'on laisse sur l'objet qu'on veut dorer ou argenter.Terme de botanique et d'anatomie. Portion de tissu disposée en lame plus ou moins épaisse. Couches ligneuses. Couche musculaire.8° Terme de peinture. Enduit. Donner trois couches de blanc à l'huile.Couche de teinte, la dernière couche de peinture.Fig.• Madame, farouche et particulière, avec sa couche de gloire, n'en voulut pas faire plus que Mme la Dauphine, SAINT-SIMON 129, 172.Très populairement. Avoir ou se donner une couche, une belle couche, sa petite couche, se griser.Fig.• Trop de peuples, trop de ravages se succédèrent ; trop de couches de barbarie furent données coup sur coup, avant que les premières eussent le temps de disparaître et de céder à la force des sciences romaines, TURGOT 2e disc. en Sorbonne..9° À certains jeux, l'enjeu qu'on met sur une carte. La moindre couche était de 20 francs. Tant de couche et de belle, se dit pour avertir qu'on met tant sur la carte et que celui qui est pris pave tant à ceux qui ont encore leurs cartes.10° Terme militaire. Couche de fusil, disposition plus ou moins courbée d'une crosse. Plaque de couche, semelle de la crosse.11° Toile dans laquelle on met le pain pour le faire lever.12° Terme de brasseur. Disposition du grain dans le germoir, en un tas carré, avant la fabrication de la bière.13° Terme de charpente. Pièce de bois pour supporter des étais ou pour retenir des terres.14° S. f. plur. Terme de marine. Assemblage de pièces qui entrent dans la composition d'un mât.XIIe s.• Il de terre levad, e sur une culche s'assist, Rois, 111.• En sa culche dormeit, ib. 158.XIIIe s.• Un grant tapis d'ovre [oeuvre] entaillé Sur la cuche [il] jeta e mist, Lai del desiré.• Neis [même] au soir, quant ge me couche, Ains que vous reçoive en ma couche ; Si cum prodons fait sa moillier, la Rose, 8904.• Sor tex [telles] couches cum ge devise, Sans rapine et sans convoitise, S'entre acoloient et baisoient Cil cui li geu d'amors plaisoient, ib. 8469.• De ta fille [Jésus] feïs ta mere ; Tiex fu la volonté du pere ; De la creche te fit-on coche, Sans orguel est qui là se couche, RUTEB. II, 20.• Loing [elle] trova de son hospital Une femme qui aloit mal ; La bone dame fist la couche, Dedenz une granche l'acouche, L enfant receut et en fut baille, RUTEB. II, 203.• Et assemblé sunt [les animaux], et en leur colche seront raloé, Psautier, f° 125.XVe s.• Et douce main pour remuer Le pacient et le ruer Doucement en lit ou en couche, EUST. DESCH. Poésies mss. f° 420, dans LACURNE.• À deux coups ay perdu six francs ; Pour autres six voulez-vous bien ? Couche, je ne refuse rien, EUST. DESCH. ib. f° 375.• Porté fu le roy de sa couche en son lit, CHRIST. DE PISAN Charles V, III, ch. 71.XVIe s.• Couche [enjeu], J. MAROT t. V, p. 108.• Ils dormoyent à terre sans lict ne couche, CALVIN Instit. 1013.• Nous diviserons le potager par planches, couches, quarreaux, vazes, diversement nommés, O. DE SERRES 505.• La hauteur de la couche [à melons], appellée couvoir, montera jusques à deux ou trois pieds sur terre, O. DE SERRES 543.• La couche nuptiale, MONT. I, 97.• Il requit les dieux que tout ce qu'il toucheroit se convertist en or.... son vin feut or, son pain or et la plume de sa couche, MONT. II, 339.• De quelle espece d'animaulx a jamais nature tant honoré les couches, la naissance et l'enfantement [il s'agit des alcyons pour qui la mer devient calme] ?, MONT. II, 197.• En quaresme sont toutes maladies semées, c'est la vraye pepiniere, la naïfve couche de tous maulx, RAB. Pant. V, 29.Provenç. colga (voy. coucher).SUPPLÉMENT AU DICTIONNAIRECOUCHE. - HIST. Ajoutez :XIVe s. [Au sens de lit de terre ou de pierre.]• Les gemmes qui lor nessance ont Es couches dom el tretes sont, MACÉ Bible en vers, f° 141, 1re col. verso.
Dictionnaire de la Langue Française d'Émile Littré. d'Émile Littré. 1872-1877.